Le passage des troupes allemandes à Jacou 24 et 25 août 1944

* Agrégé de Géographie

[ Texte intégral ]

La déroute des troupes allemandes en Languedoc et dans l’Hérault en août 1944 suite au débarquement de Provence a été largement étudiée depuis plusieurs années. Parmi les différents ouvrages fondateurs citons, entre autres, ceux de Roger Bourderon : Libération du Languedoc méditerranéen paru en 1974, et celui de Gérard Bouladou : L’Hérault dans la Résistance : 1940-1944 réédité en 2006. Des études locales, plus récentes, complètent cette vision globale, comme celle, en 2013, de Jean-Claude Richard sur « les passages des colonnes allemandes dans le cœur d’Hérault… »1. Ce dernier signale que les mouvements [complexes] de troupes pourront être précisés à partir « d’ajouts d’acteurs et témoins qui n’ont pas encore livré leurs souvenirs ».

Certes plusieurs publications et archives (conservées aux Archives Départementales de l’Hérault) citent le passage par Jacou des troupes allemandes en déroute, mais sans autre commentaire. En effet, il n’y a pas eu de combats à Jacou (malgré ce qu’en dit l’une des archives du château de Jacou) et donc on ne peut parler stricto sensu de « résistance 2 » ni de « libération ». D’où le quasi-silence des sources sur le village. Jacou n’a pas fait parler de lui. On ignorait donc, jusqu’à présent comment s’est produit le passage des colonnes allemandes dans le village, qui elles étaient, comment cela a été vécu par les habitants, quel était le contexte, quelles furent les conséquences, etc. Or depuis un an, de volumineuses archives et objets historiques ont été rassemblés et pré-classés, par l’association « Jacou, Histoire et Patrimoine » dans le château de Bocaud, propriété de la commune. Une exposition, début 2016, et des premières publications 3 ont donné un aperçu de la richesse potentielle de ces nouvelles sources, en particulier en ce qui concerne la seconde guerre mondiale au village. Dès lors la parole des anciens du village s’est « libérée ». Les témoignages de huit d’entre eux, parfois étonnamment précis et se recoupant, ont été ici confrontés aux archives issues du château, à celles conservées au Archives Départementales et aux ouvrages des historiens. Mémoire et Histoire sont ici confrontés. Au travers de ces témoignages, archives, objets historiques, il est apparu que ce passage des troupes allemandes certes relevait d’un évènement militaire ponctuel, et comme la suite immédiate des combats de Montferrier, mais s’insérait aussi dans des contextes plus larges.

En effet Jacou a été situé successivement dans trois contextes militaires stratégiques à partir de décembre 1942 au voisinage du Crès 4 et de Montpellier, puis, et surtout, en 1944 sur la première ligne de défense allemande en arrière du littoral et, enfin, sur un des corridors majeurs de la débâcle des colonnes allemandes en fuite vers la vallée du Rhône.

Dès lors, ce qui s’est joué, dans ces 3 journées des 24, 25, 26 août 1944, c’est un vécu, le ressenti d’un village, avec sa composition sociologique particulière, exposé à l’ennemi, face à la présence allemande dans le village et ses alentours depuis plusieurs mois. Ainsi cet article ne se situe pas seulement dans le contexte de l’histoire des faits militaires, mais aussi dans celui de l’histoire de « l’Hérault (et des Héraultais) pendant la guerre » telle qu’elle a pu être analysée, en particulier, par Jean Sagnes en 1986 et, plus récemment, en 2015, par Hélène Chaubin 5.

Enfin, ce travail amène à réfléchir sur les rapports entre Passé et Présent, entre Histoire et Mémoire, objets récurrents de réflexion des historiens 6. Il s’agit ici de s’interroger sur cette étonnante mémoire des « anciens du village », sur ce qu’en retenaient – ou pas- les archives d’alors, ainsi que sur la signification profonde de retransmettre aujourd’hui ce passé, dans le contexte présent. Quelles représentations de ce passé sont véhiculées face aux représentations et au ressenti actuels des habitants – et de leurs représentants – de Jacou, bien plus nombreux et bien différents de cette époque, déjà considérée par la plupart comme lointaine, et par ailleurs méconnue voire inconnue ?

Jacou 1944, un petit village

En 1944, Jacou a une population comprise entre 150 et 200 habitants. Le recensement de 1936 indique 160 habitants. Mais depuis cette date certains ont quitté la commune, d’autres sont arrivés : des espagnols (31 % de la population en 1936), dont certains républicains. A partir de mai 1940 arrivent des réfugiés de Belgique, du nord de la France, dont des juifs français 7 ou étrangers. Sont peut-être aussi arrivés des aviateurs français, temporairement employés à l’usine du château « la Concentration Industrielle de Jacou » (C.I.J) qui produit moûts, concentrés de raisin et sucre, dite communément « la Fabrique ». Ils auraient ensuite embarqué pour l’Angleterre 8. A partir de 1943, des jeunes hommes y sont employés de manière réelle ou fictive pour échapper au Service du Travail Obligatoire (S.T.O).

L’expression « jeunes traqués par l’occupant » pourrait se référer aux réfractaires au S.T.O mais aussi, peut-être, à des résistants 9. Jacou a donc sans doute été un refuge pour ces diverses catégories de « hors la loi » par rapport aux administrations de Vichy et lorsque surviendra, en 1944, l’occupation allemande du village.

Le village est petit, ramassé (Fig. 1) autour du vieux village avec ses 3 rues, quasi inchangé depuis le 18ème siècle 10, avec 33 maisons, et son extension au 19e siècle dite « la Bâtisse » le long de la rue de la mairie-école avec 9 maisons. Entre les deux zones, « la Place » (actuelle place F. Mistral). S’y ajoutent deux écarts, avec 3 maisons.

Dans ces 45 maisons du village logent 46 ménages. L’on se connait. Une petite dizaine de propriétaires terriens des « vieilles familles de Jacou » liées entre elles, essentiellement viticulteurs, emploient les mêmes familles espagnoles arrivées progressivement depuis 1917. « Entre nous et les Espagnols on ne faisait pas la différence. On parlait patois. On se comprenait ». En 1940 l’école, à classe unique, compte autant d’élèves de nationalité espagnole, nés à Jacou, que de Français. Certains Français de Jacou et certains Espagnols travaillent à l’usine, aux côtés d’employés et d’ouvriers venus de Montpellier et des villages avoisinants. Le village est donc uni, mais, pour autant, ne vit pas en circuit fermé. Pour la religion, catholique, apparemment assidument pratiquée, Jacou dépend de la paroisse du Crès. Nombre de familles ont des origines ou des accointances avec les villages environnants, avec Montpellier, voire plus loin vers la plaine de Mauguio, le « cœur d’Hérault » (moyenne vallée de l’Hérault), l’arrière-pays des garrigues, les Cévennes… l’information circule.

Le village de Jacou en 1937
Fig. 1 - Le village de Jacou en 1937 (photo aérienne annotée).
Carte de localisation des enjeux stratégiques
Fig. 2 - Carte de localisation des enjeux stratégiques

Jacou 1942-1944, un village à proximité des enjeux stratégiques
et qui subit l’occupation allemande (Fig. 2)

Le village est situé au nord-est de Montpellier, à 6 kilomètres du centre-ville. « On montait sur la colline de las Bouzigues, là où se trouve maintenant le centre œcuménique. A l’époque il n’y avait pas d’arbres ni de constructions. On voyait la mer, Castelnau, Le Crès… ». Aujourd’hui encore, de Jacou, on entend, particulièrement par vent du sud, le bruit des trains au Crès sur la voie ferrée parallèle à la nationale 113 de Montpellier à Nîmes. Jacou se situe donc à 3 kilomètres à vol d’oiseau du grand axe Est-Ouest de circulation du Languedoc, notamment de la voie ferrée Montpellier-Nîmes, et sa branche vers Sommières.

Le 8 novembre 1942 les alliés débarquent en Afrique du Nord. L’armée allemande envahit la zone sud. A partir du 13 novembre la Wehrmacht est à Montpellier et sa région. « Au-delà du littoral au sens strict, la présence militaire est forte jusqu’à 30 kilomètres du rivage 11 ». Dès décembre 1942 un détachement allemand d’une centaine d’hommes s’installe dans le village voisin du Crès, à proximité de la route nationale 113 et de la voie ferrée, « deux objectifs stratégiques qu’il fallait surveiller » 12. Cette présence allemande donnera lieu à Jacou au moins à deux incidents dont les anciens du village gardent le souvenir précis. Celui d’abord d’une tentative de viol, sous menace de mitraillettes, par deux soldats allemands enivrés, venus du Crès, dans le vieux village, sur une première jeune fille espagnole, protégée par sa mère, puis un viol effectif sur une autre jeune fille espagnole, dans une maison en retrait du village. « L’émoi a été particulièrement vif au village ».

1943 : Jacou participe, malgré lui, à l’édification du « Südwall »

A partir du 27 décembre 1942 le littoral est fortifié : c’est le Südwall, « mur de la Méditerranée », totalement réalisé fin 1943 13. (Fig. 3)

Jacou va être amené à participer à cet effort de guerre comme le relate un témoignage 14 : « le parc automobile du château était déjà très important : on comptait deux gros camions, un semi-remorque Berliet et un Renault, un camion Mack, deux V8 et tout un ensemble de camionnettes. Nous étions deux chauffeurs. […] Pendant la guerre, j’ai souvent été réquisitionné avec un camion par les Allemands. Une trentaine de camions étaient rassemblés à Saint-Georges-d’Orques, nous faisions cinq à six navettes par nuit entre Frontignan et Carnon pour déposer sur les plages des mines et autres munitions destinées à faire face à un éventuel débarquement allié. Les Allemands nous ayant une fois pris un moteur de camion 15, j’ai dû saboter tous les autres afin qu’ils ne puissent nous les réquisitionner. »

Bunker du Südwall à Pérols, au lieu-dit « le Soriech ».
Fig. 3 - Bunker du Südwall à Pérols, au lieu-dit
« le Soriech ».

Mars-Juillet 1944 : Jacou sur la première ligne de défense « rouge » allemande à l’intérieur des terres

Durant l’année 1943, les débarquements alliés en Sicile (10 juillet 1943), en Corse (8 septembre 1943), puis la progression alliée en Italie, renforcent la crainte allemande d’un débarquement sur les côtes du Languedoc. A partir du début 44, cette crainte se fait plus pressante du fait de la montée en puissance des bombardements alliés comme celui de l’aéroport de Fréjorgues « le 27 janvier [1944] par une vingtaine d’avions (5 tués, 15 blessés parmi les civils français) » 16. Sachant que le Südwall ne parviendrait peut-être pas à contenir le débarquement sur les plages, les Allemands renforcent les défenses à l’intérieur des terres. Cette défense commencera par l’occupation allemande et italienne de Jacou 17. De plus il faut, pour les Allemands et les administrations de Vichy, se prémunir des actions de plus en plus nombreuses de la Résistance dans l’arrière-pays.

« En 1944 on a vu passer de tout : des Allemands, des gendarmes, la Milice, des résistants »

La Résistance est de plus en plus active au nord de Montpellier, à proximité de Jacou : le 23 janvier à Montpellier, un groupe d’une trentaine de résistants armés, arrivés en camion, s’introduit dans le service du matériel de l’Intendance de Police, s’empare des 8 gardiens, et dérobe uniformes, armes, etc. Les hommes chargent leur butin dans les camions et emportent en otage les 8 gardiens qui seront libérés dans la nuit à proximité de Teyran, village immédiatement au nord de Jacou. Le convoi est donc certainement passé par la route en limite de Jacou au carrefour de la Croisée. Le groupe s’est caché une demi-journée dans un bois près de Montaud. Il n’y aura pas d’arrestations, grâce à la complicité de la gendarmerie de Castries 18.

Le 2 avril une bombe explose sous le pont Tabard entre la gare de Montpellier et celle des Mazes-Le Crès. Pendant toute cette période les câbles de transmission des signaux pour la circulation des trains sont incessamment sectionnés 19.

Après le débarquement du 6 juin en Normandie, les actions de la Résistance se font plus audacieuses. Le 19 et 21 juin des gendarmes sont attaqués et désarmés à Claret, puis à St Martin de Londres 20. Le 20 juillet à St Martin de Londres, 50 maquisards du groupe Valmy, descendus de l’Aigoual, coupent les fils électriques vers Montpellier et réquisitionnent des voitures. Fin juillet dans cette même localité un maquis est constitué et compte 26 hommes (groupe de combat n°19). 21

A partir de mars-avril 1944 Jacou est occupé
par l’armée allemande et un détachement italien.

Selon les anciens de Jacou, de mars ou avril à juillet 1944 des troupes allemandes occupent le vaste château de Jacou, avec sa quarantaine de pièces. (L’attestation Dupuy, elle, n’évoque cette réquisition qu’à partir de juin). (Fig. 4) Les habitants du château cohabitent donc plusieurs mois avec des officiers allemands. De cette occupation dateraient divers objets retrouvés dans le château par notre équipe « Archives et objets historiques du château ». L’occupation ne se limite pas au château. Deux officiers sont logés dans la maison des Soubeyran au coin de la place (actuelle place Mistral) et de la rue de l’hôtel de ville. Deux autres officiers sont logés dans la maison du domaine des Rosiers (famille Fabre).

Le château de Jacou.
Fig. 4 - Le château de Jacou.

A ces troupes allemandes s’ajoutent un petit détachement d’Italiens (une demi-douzaine) chargés de garder les portails du château. Ils sont cantonnés dans l’unique salle de classe de la mairie-école (actuel hôtel de ville de Jacou), elle aussi réquisitionnée. « Le chef du détachement s’appelait Palermo, et l’un des soldats Puccini. Ils étaient gentils. Ils s’occupaient bien des enfants ». Ce témoignage concorde avec ce qu’écrit Gérard Bouladou : « le 31 mars toutes les écoles des villages situés dans une bande de 20 kilomètres de largeur à partir de la côte […] ferment […] (jusqu’à une ligne passant au nord par Castries, Montferrier, […] Jacou) 22 ». Par ailleurs les historiens nous confirment que des Italiens (mais aussi des Polonais, Tchèques, Russes, Arméniens) ont été incorporés dans la 19e armée allemande 23.

Juin-juillet 1944 : la ligne de défense des trous d’hommes au carrefour de « la Croisée », en limite de Jacou et Clapiers.

A compter de juin-juillet 24, les Allemands organisent 3 lignes de défense « grossièrement parallèles à la côte,[…] désignées par des couleurs et respectivement éloignées, en moyenne de 15-25 km, de 20-30 km, et 35 à 45 km du littoral, derrière les grandes villes […] La ligne « Rouge » joignait Sommières à Montouliers par Saussines, St-Hilaire de Beauvoir, St-Drézéry, Jacou, Clapiers, Montferrier… » 25. Une seconde ligne « Bleue » passait par Assas, village immédiatement au nord-ouest de Jacou. Ces lignes de défense contrôlaient les routes sud-nord du littoral vers l’intérieur. Dans le cas de Jacou, il s’agit de la route venant du sud de Montpellier-Castelnau-le-Lez vers le nord à Assas ou Teyran, Corconne et Quissac, et au-delà Anduze, Alès. « La route de Montpellier à Assas, passant par la Croisée était importante. A Assas il y avait une garnison allemande. Ils occupaient le château. Ils surveillaient la route à cause de la ligne téléphonique. » Les défenses sont essentiellement constituées de « trous d’abris » ou « trous d’hommes ». Les Allemands réquisitionnent des habitants de Clapiers et de Jacou pour creuser ces « trous d’homme » dans les champs dits de « La Plaine » (actuelle zone commerciale de Bocaud), de part et d’autre du carrefour de « la Croisée » deux équipes sont constituées l’une sous la direction de Marcel Arlery, l’autre de Cyprien Olivier, tous deux de Jacou. (Fig. 5)

« La Plaine » et le carrefour de « La Croisée », entre Jacou et Clapiers
Fig. 5 - « La Plaine » et le carrefour de « La Croisée », entre Jacou et Clapiers. (Photo aérienne 1946 annotée).

Vers le 25 juillet un régiment d’infanterie s’installe dans les deux villages voisins de Castelnau-le-Lez et de Clapiers 26. Le « théâtre de guerre » est donc maintenant bien présent à Jacou et tout autour…

« En juillet (1944) les bombardements dans la région nous ont fait partir »

Dès le 27 mai, l’aéroport de Fréjorgues est à nouveau bombardé, avec des dégâts sur Pérols et Palavas. On compte 12 à 21 tués (selon la gendarmerie ou les Renseignements Généraux) et 11 à 27 blessés 27. Le 7 juin, en gare de Lunel, un train est survolé et mitraillé. Le 8 juin l’aéroport de Fréjorgues est à nouveau survolé, 2 bombes sont lâchées 28. Le 16 juin un convoi d’huile pour Montpellier est mitraillé par l’aviation alliée entre Balaruc et Mèze. Il y a un mort et un blessé. Le 18 juin un avion allemand est abattu entre Mauguio et Candillargues 29. Le 25 juin des bombardements ont lieu à Sète, Balaruc, Frontignan 30, touchant des usines, des voies de communication, mais aussi des quartiers d’habitations. Le 4 juillet, Balaruc est à nouveau touché. Le 5 juillet, plus proche, les gares de triage d’Arène, Prés d’Arène, Chaptal à Montpellier et les quartiers voisins sont gravement atteints : on ne compte pas moins de 53 morts 31. Ce bombardement, particulièrement violent, avec des explosions que l’on voyait et entendait de Jacou, a fait craindre que le village soit à son tour bombardé : « tout le village s’est retrouvé à l’abri dans le fossé de la Mayre » (le ruisseau principal de la commune). Le 20 juillet, au Crès, un aviateur américain a sauté en parachute de son avion en panne, (qui a fait un atterrissage forcé à Castries). Il est blessé 32. A Jacou, militarisé avec son usine et proche de voies de communication, la famille Dezeuse craint des bombardements : « en juillet les bombardements dans la région nous ont fait partir ».

En août, la situation est de plus en plus tendue à proximité de Jacou

Le 1er août, au soir, à 21h30, à Montferrier, « un groupe d’une dizaine de résistants du maquis du bois de Couttach attaque au pistolet et à la mitraillette le groupement n°209 de Sète des chantiers de jeunesse français pour s’emparer du matériel. Un détachement allemand arrive. Des coups de feu sont échangés. Un Allemand est tué, un résistant est blessé. Les maquisards parviennent à s’enfuir en voiture vers Quissac ». 33

Les 14-15 août, les Alliés débarquent en Provence. C’est l’opération Dragoon. Les troupes allemandes du sud-ouest de la France refluent précipitamment, via le Languedoc, vers la vallée du Rhône. Les bombardements s’intensifient. Le 17 août « la sortie est de Montpellier et les ponts du Lez sont bombardés à 11 h par 30 avions. Le quartier Rimbaud (les Aubes), la Pompignane, Castelnau-le-Lez sont touchés, ainsi que la route de Mende. Il y a 5 tués et 10 blessés » 34

Au village voisin du Crès, les 18 et 19 août, la gare des Mazes est mitraillée par des aviateurs alliés 35 à 3 reprises. Un convoi chargé de tanks, camions-citernes, voitures et munitions est détruit. Les explosions des 13 wagons de munitions sont particulièrement violentes et prolongées jusqu’au jour suivant. Elles endommagent le village du Crès, pourtant éloigné de plus d’1 km. Près de 72 maisons, bâtiments agricoles et divers y compris la mairie, l’église, le bureau de poste seront déclarés endommagés » 36. « Mon père labourait dans notre champ près du Salaison [la rivière limitrophe entre Jacou et Le Crès]. Des morceaux de métal et des douilles lui passaient par-dessus la tête. Il a vite décampé. Pendant longtemps on a retrouvé des douilles dans la garrigue du Crès ».

A Clapiers, au bois de l’actuel « Plein Air des Chênes », en limite de la commune de Jacou, le 21 août, 2 étudiants en médecine de Montpellier, résistants, sont amenés de la caserne Lepic où ils avaient tenté d’enlever des armes, par des troupes allemandes en retraite, et exécutés 37. Une stèle commémore cet évènement. (Fig. 6)

Fig. 6 - La stèle du bois des chênes à Clapiers.
Fig. 6 - La stèle du bois des chênes à Clapiers.

Le 23 août après-midi 2 sections de la Résistance se replient dans les chemins au nord du Crès, proches de Jacou, devant le passage sur la Nationale 113 d’un détachement de chars blindés Tigres 38. Au même moment, au Crès, un train de troupes allemandes, venant de Sète, est mitraillé par l’aviation anglaise et attaqué et incendié par la Résistance FFI à 1 km de la gare du Crès. De nombreux prisonniers sont faits et de nombreuses armes récupérées 39. Le jeudi 24 août à Castelnau-le-Lez, le pont de chemin de fer de Pavie est bombardé 40. Plusieurs quartiers voisins (Les Aubes, la Pompignane) sont touchés. On est alors à seulement 3 km de Jacou.

Les 24 et 25 Août, les troupes allemandes en retraite vers Sommières et la vallée du Rhône passent à Jacou

A partir du 17 août, toute la 19e armée allemande, stationnée dans le Sud-Ouest et en Languedoc évacue vers la vallée du Rhône. Après le 23 août, une partie de ces troupes évite Montpellier en contournant par le nord en direction de Sommières. Il n’y a alors qu’un seul pont sur le Lez, à Montferrier.

Deux colonnes allemandes sont passées à Jacou

Selon A. Jullian, 41 deux Marschgruppen (groupe de marche) sont passés par Jacou, la première dite « colonne de Narbonne » arrivée à Sommières le 24 août, la seconde dite « de Rodez » arrivée à Sommières les 25 et 26 août. « Le premier Marschgruppen est le plus important, il est constitué de la 716ème division d’infanterie (DI) qui était venue relever la 272ème division envoyée en Normandie au mois de juillet. Ce Marschgruppen est appelé la colonne de Narbonne, ville d’où il est parti ; il remonte lentement en passant par Saint Pons, Clermont l’Hérault, Canet, Gignac, Grabels, Montferrier, Jacou et arrive à Sommières le 24 août. »

« La [seconde] colonne de Rodez, part le 18 août avec environ deux mille à trois mille hommes dont les éléments de la Luftwaffe, de l’OST légion et de la Feldgendarmerie. Cette colonne traverse l’Hérault par le Caylar, Aniane, Grabels, elle perd une partie de son arrière garde à Montferrier et aborde Sommières le 25 août ». Le lieutenant-colonel Arsac confirme 42 cet itinéraire et le passage de cette 2ème colonne par Jacou : « Journée du 24 août : … Une colonne allemande importante, comprenant 1 200 allemands environ, descend du Nord (en provenance probablement de Millau) par Montarnaud et Bel-Air…une partie des troupes allemandes continue à emprunter l’itinéraire Montarnaud, Bel-Air, Grabels, Montferrier, Clapiers, Jacou, Castries ». « Des renseignements nombreux proviennent encore sur les mouvements de colonnes se dirigeant sur la région de Montpellier. Des actes de pillage et de violence, des meurtres sauvagement perpétrés, sont signalés aux alentours immédiats de la ville… la terreur que font régner les colonnes allemandes sur leur passage. »

Les crimes et exactions de Montferrier et de Clapiers du 24 août émeuvent la population de Jacou

Le 24 août, au soir, à Montferrier, un camion du moulin de Guilhems (à Montpellier), avec les marques des FFI, s’approche du barrage allemand de l’arrière-garde de la colonne blindée Panzer 11, établi en contrebas du village, au carrefour de Fescau. André Thibal et Pierre Sutra sont dans ce camion. Ce sont des F.T.P (Francs-Tireurs-Partisans). Le camion contient un fusil mitrailleur et une bande de balles correspondante. A l’approche du barrage allemand, les deux FTP abandonnent le camion et s’enfuient avec des armes de poing. Les Allemands découvrent le camion et les armes. Une chasse à l’homme s’en suit. Les hommes possédant un permis de conduire sont arrêtés. C’est le cas d’André Thibal et de Pierre Sutra, mais aussi de 4 ouvriers, dont Jean Coste, contremaître, venus de la distillerie de Saint-Julie. Ils sont torturés, puis à 20 heures exécutés au carrefour de Fescau. Les 6 corps sont abandonnés dans un fossé et couverts d’immondices 43. Une stèle sur ce lieu commémore ce tragique évènement. (Fig. 7)

Le même jour, le garde champêtre de Clapiers, Alban Tasso, est tué parce qu’il ne voulait pas se dessaisir de son vélo 44. Cet assassinat a d’autant plus marqué les esprits à Jacou de par sa sauvagerie. Le garde-champêtre a d’abord reçu un tir de révolver. Il n’était pas mort. Il a été ensuite achevé par d‘autres soldats à coups de crosses de fusil. Là encore une stèle commémore ce tragique évènement.

La stèle des 6 otages, au Fescau, à Montferrier.
Fig. 7 - La stèle des 6 otages,
au Fescau, à Montferrier.
Note du cdt Leblanc sur les assassinats de Montferrier et Clapiers
Fig. 8 - Note du cdt Leblanc sur les assassinats de Montferrier et Clapiers.
(Archives du château de Jacou)

La note du commandant Leblanc, directeur de l’usine de la concentration industrielle de Jacou, datée du 1er septembre 1944, évoque elle aussi ces assassinats d’otages à Montferrier, et celui de Tasso à Clapiers. Il les attribue aux soldats arrivés dans la matinée du 25 août à Jacou. Ce serait donc des éléments la 2e colonne « de Rodez » fuyant les combats au pont de Montferrier 45, face à 900 résistants, qui avaient commencé à 9h30 et avaient duré près de 7 heures. (Fig. 8)

Les soldats allemands morts aux combats de Montferrier enterrés à Jacou

Les Allemands décrochent en emportant leurs 15 morts et 60 blessés 46 « qui furent pour la plupart transportés dans un des camions qui réussirent à s’échapper 47 ». Une rumeur à Jacou dit que certains corps auraient été brûlés. Le lieutenant-colonel Mear écrit en conclusion de son rapport « En ce qui concerne les morts [des combats de Montferrier] les Allemands les évaluent entre 15 et 20. Il y a ceux que nous avons retrouvés sur la route, plus d’autres qui ont été enterrés à Jacou et aux abords de Clapiers, renseignements parvenus par la suite ». Selon un témoignage de Jacou, deux corps, sans doute d’officiers car portant encore leur Lüger ont été enterrés dans l’allée du parc du château de Jacou. Après la guerre, les familles sont venues d’Allemagne récupérer ces corps.

Quant aux blessés, que sont-ils devenus ? Ont-ils été soignés les jours suivants à Clapiers ? A Jacou ? Y sont-ils restés ? Y ont-ils été faits prisonniers ? Ont-ils été évacués vers des hôpitaux de Montpellier ? Ont-ils poursuivi jusqu’à Sommières ?

Qui étaient les soldats de l’armée allemande arrivés à Jacou ?

Les combattants des 24 et 25 août à Montferrier appartenaient à l’arrière-garde de la FLAK, c’est à dire de la défense anti-aérienne (D.C.A) 48. D’autres relevaient de la Feldgendarmerie.

D’autres encore appartenaient à l’OST légion. Celle-ci était composée de soldats russes, arméniens, tchèques, polonais 49. Parmi les Russes sans doute, se trouvaient des mongols, réputés pour terroriser les populations féminines.

On comprend que la population de Jacou soit « terrorisée ». C’est ce qu’affirme la note du commandant Leblanc du 01.09.1944. Lorsque les troupes allemandes arrivent à Jacou, les 24 et 25 août 50, elles sont donc précédées par les assassinats du 21 août des deux étudiants au bois du « Plein air des chênes » de Clapiers, des six otages de Montferrier le 24 août, du garde champêtre de Clapiers, dans des conditions atroces, le même jour. Dès lors on peut s’imaginer l’état d’esprit de la population de Jacou face à l’arrivée de ces troupes…

À Jacou, ces troupes allemandes en fuite ont commis plusieurs vols, de diverses gravités. « Ils avaient faim ». Au combat de Montferrier les camions de vivres ont été détruits 51. De l’élevage avicole du château, si nécessaire pour la nourriture des malades des cliniques et hôpitaux de Montpellier, ainsi que pour les ouvriers et habitants de Jacou, il reste peu de chose : « une trentaine de poules, sur le millier qu’il comptait ». De même y-a-t-il eu des vols de poules chez Mr Pradier, sur la place du village (actuelle place Mistral).

Mais ce sont surtout les moyens de locomotion qui étaient visés, comme nous le rapportent les historiens, car la 19e armée, affectée de manière statique au Südwall, était composée essentiellement de fantassins sans moyens de transport. La « dotation en véhicules et en chevaux est des deux tiers inférieure à la normale, d’où la réquisition systématique des chevaux, des mulets, des automobiles, des bicyclettes, des véhicules de ferme » 52. A Jacou, comme ailleurs 53, les bicyclettes étaient devenues des « cibles ». Un ancien de Jacou témoigne du vol, par la force, d’une bicyclette par un soldat allemand menaçant d’exécuter son père, Cyprien, avec son arme, devant le domaine des rosiers 54. Il a fallu l’intervention du garde-champêtre, d’origine russe et polyglotte, pour sauver son père. Deux documents des archives du château attestent également qu’un réfugié (J. Jouannet) au château s’est fait voler sa bicyclette neuve. Lors de cette retraite allemande de nombreux chevaux ont été volés. A Jacou cela a été, en particulier, le cas de celui d’un agriculteur (selon le témoignage transmis par son père). Il semble aussi que 2 camions (un Berliet et un Mack) du domaine du château et de l’usine de la « Concentration Industrielle  de Jacou (C.I.J) » (la Fabrique) aient été volés, puis endommagés, selon une demande ultérieure d’indemnisation pour dommages de guerre.

Des Allemands faits prisonniers à Jacou le 25 août

Selon l’archive du capitaine DUPUY des soldats allemands ont été fait prisonniers à Jacou le 25 août. Le fait est attesté, mais néanmoins, sans qu’il y ait eu de combats. Effectivement, selon un témoignage, deux soldats mongols (de « l’Ost legion ») se seraient facilement rendus. « Deux mongols, deux frères, étaient assoiffés. Ils demandaient à boire. Nous leur en avons donné. Ils étaient fatigués, ils ne voulaient plus combattre » 55. Cependant le gros des troupes a poursuivi sa marche en direction de Sommières.

Des Allemands ramenés à Jacou et Montpellier

Le gros de la troupe allemande a été arrêté le 26 Août à Salinelles, près de Sommières, par la Résistance et l’aviation alliée. 850 soldats ont été fait prisonniers. Du matériel et du ravitaillement ont été récupérés 56 « Les prisonniers ont été ramenés dans tous les villages entre Sommières et Jacou pour répondre de leurs vols, voire de leurs crimes ». Ce fait a eu lieu le 30 août. Ces témoignages sont également attestés par la note du 1er septembre du commandant Leblanc. A Jacou, environ 70 prisonniers ont alors été alignés sur la place du village, actuelle place Mistral. « Nous habitions en face. Je me souviens bien. Les Allemands étaient gardés par quatre ou cinq résistants, auxquels s’ajoutaient des employés du propriétaire du domaine du château, armés 57 par celui-ci. Les habitants venaient tenter de dévisager ceux des soldats qui leur avaient causé des torts et essayer de récupérer leurs biens ». Ce n’est qu’ensuite qu’ils ont été conduits à Montpellier à Font d’Aurelle 58 (actuel hôpital de la Colombière) selon une autre note du commandant Leblanc. Ce choix s’explique par l’importance des locaux pour loger le grand nombre de prisonniers.

Quelques jours après les évènements du 25 août à Jacou, les vendanges au domaine du château commencent le 11 septembre. Elles dureront jusqu’au 3 octobre. 33 prisonniers allemands (et 14 prisonniers italiens) y sont affectés, (soit 57 hommes) 59. L’on ignore s’il s’agit des soldats allemands qui étaient passés à Jacou le 25 août, voire ceux qui ont été ramenés de Sommières à Montpellier le 30 août. On ne manquera pas de relier cet emploi de main d’œuvre prisonnière allemande à la volonté des autorités françaises d’exploiter le plus rapidement – et le plus longtemps – possible cette « ressource économique », contrairement aux volontés des Alliés américains et anglais 60. En effet l’usine de la C.I.J de Jacou continuera de bénéficier de cette main d’œuvre quasi gratuite jusqu’au moins 1947 61 pour la construction de ses nouveaux locaux « avec des maçons et des électriciens ». (Fig. 9)

Les nouveaux locaux de l’usine de la C.I.J en cours de construction en 1946
Fig. 9 - Les nouveaux locaux de l’usine de la C.I.J en cours de construction en 1946. (Archives du château de Jacou).

Conclusion

Cette « immersion » dans une partie des archives du château de Jacou, dans des témoignages d’anciens du village, confrontées aux sources aux Archives Départementales et publications d’historiens a permis, a minima, de « caler » des faits et une chronologie, nulle part véritablement relatés par ailleurs jusqu’à maintenant.L’exploitation ultérieure de la masse des archives du château, la découverte éventuelle d’autres sources (notamment aux Archives Départementales), des témoignages attendus, complémentaires d’autres « anciens de Jacou » permettront peut-être d’affiner encore cette recherche sur ce sujet précis.

En effet des questions restent en suspens : entre autres, comment le village a-t-il pu dissimuler des républicains espagnols, des juifs, des réfractaires au S.T.O, voire des armes, sans être inquiété ? 62 Quels étaient les liens avec des autorités éventuellement complaisantes ? Lesquelles ? Quels étaient les liens des 30 % (ou plus) de la population espagnole avec l’Espagne, alors franquiste ? Y avait-il des liens avec les nombreux résistants et guérilleros espagnols de la région ? Qui étaient les soldats italiens présents à Jacou en 1944, puis prisonniers aux vendanges de l’automne 1944 ? Appartenaient-ils à des troupes restées fidèles à Mussolini après la capitulation italienne de 1943 ? Ou avaient-ils été enrôlés de force dans la Wehrmacht ? Que sont devenus les prisonniers « mongols », en fait russes ? Ont-ils été immédiatement livrés aux commissions russes opérant en France pour les rapatrier, sachant que beaucoup d’entre eux ont fini dans les goulags… ?

Néanmoins, de cette première recherche en ressort-il peut-être des « leçons » (peut-être transposables à d’autres villages héraultais ?) : on est passé d’un village à peine cité dans les sources officielles portant sur les faits militaires, à un village qui a réellement vécu, et de près, les faits de guerre. Encore aujourd’hui, 70 ans après, cette mémoire est-elle encore bien vivante chez « les anciens ». Qu’ils en soient encore remerciés pour leurs témoignages.

Au-delà de ces faits qui ne portent que sur certains aspects et sur une période seulement de la guerre, il reste tout un contexte et de nouvelles pistes à explorer sur l’ensemble de la guerre, à partir, essentiellement, de la masse d’archives du château et des témoignages. Tout ou presque est présent sur la production agricole, industrielle, les employés agricoles, ceux de l’usine, le Ravitaillement, la vie quotidienne…Que signifie alors le témoignage, apparemment paradoxal, de « on vivait bien à Jacou » ?

Sources

Archives du château de Bocaud à Jacou.

Témoignages d’habitants de Jacou : Isabelle Cutillas-Souche, André Dezeuse, Jean Lopez, André Moulin, Maurice Moulin, Simone Soubeyrand, Marc Olivier.

Aux Archives Départementales de l’Hérault (AD34) :

Fonds Gérard Bouladou :

91 J 4 « La géographie et les évènements de la 2e guerre mondiale dans l’Hérault », extrait du bulletin de la Société Languedocienne de Géographie XXXVIII, 3-4 janv-sept 1966, p.480-505, 589-618.

91 J 26 : chronologie des évènements de la 2e guerre mondiale dans l’Hérault, boîte C : fiches des évènements de janvier à mai 1944.

91 J 27 : boîte D : fiches des évènements de juin à juillet 1944.

91 J 28 : boîte E : fiches des évènements d’août 1944.

Fonds de la préfecture, cabinet du préfet

1000 W 72 affaires diverses.

1000 W 270 faits de guerre.

1000 W 271 réfugiés, accueil surveillance.

Fonds de la préfecture de l’Hérault / Règlementation

2 W 157 recensement des juifs.

BIBLIOGRAPHIE

Sur le contexte languedocien

Bourderon, Roger, Libération du Languedoc méditerranéen, Hachette littérature, 1974.

Sur le contexte héraultais

Bouladou, Georges, « La géographie et les évènements de la deuxième guerre mondiale dans le département de l’Hérault », Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie tome XXXVII, fascicules 3 et 4, Janvier-Septembre 1966.

Sagnes, Jean, L’Hérault dans la guerre 1939/194. La vie quotidienne sous l’occupation, éditions Horvath, 1986.

Bouladou, Georges, L’Hérault dans la résistance : 1940-1944, Lacour éditeur 1992, réédition 2006 augmentée par J.-C. Richard.

Jullian, A., « le maquis Aigoual-Cévennes », Site de Sommières et son Histoire (SSH), n° 4, 1994, https://www.sommieresetsonhistoire.org/le-maquis-aigoual-cevennes-site-de-sommieres-et-son-histoire/.

Iancu, Michaël, Spoliations, déportations, résistance des Juifs à Montpellier et dans l’Hérault (1940-1944), éditions A. Barthélémy, Avignon, 2000.

Berriot, François, Cambon de Lavalette, Véran, Riols, Alain, « La France libre, la Résistance et la Déportation (Hérault, Zone sud).Témoignages ». Centre Régional d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Castelnau-le-Lez. L’Harmattan, 2010.

Chaubin, Hélène, L’Hérault dans la guerre, 1939-1945, de Borée, 2015.

Sur des études locales proches de Jacou

Quillet, Aristide et alii, « Le combat de Montferrier. La libération de Montpellier, août 1944 », mars 1945.

Harris, J., Richard, Jean-Claude, « La libération de Montpellier », Études héraultaises n°9, 1993..

Reboulin, Pierre (dir), Le Crès. L’Histoire d’un village en garrigue, édité par la ville du Crès, 2000.

Richard, Jean-Claude, « Les passages des colonnes allemandes dans le cœur d’Hérault au mois d’août 1944 et l’embuscade d’Aniane (26 août) par le maquis Roland », Études héraultaises, n° 43, 2013.

Sur Jacou

Blanchemain, Antoine, Jacou, petit village et grands seigneurs, Les Presses du Languedoc, 2005.

Blanchemain, Antoine, de Labrusse, Olivier, Histoire de Jacou, du château et ses jardins, Ville de Jacou et association « Jacou, Histoire et Patrimoine », 2010.

Labrusse de, Olivier, Mars-septembre 1944, l’armée allemande à Jacou. Premières pistes de recherches, d’après les archives du château de Jacou et témoignages, « Jacou, Histoire et Patrimoine », juin 2016
(également en format .pdf)

Labrusse de, Olivier, Castillo, Anne, Miron ZLATIN à Jacou, été 1940-printemps 1941. Premières pistes de recherches, d’après les archives du château de Jacou et témoignages, association « Jacou, Histoire et Patrimoine », février 2016 (également en format.pdf)

Sur le contexte de la 2e guerre mondiale et ses conséquences

Wieviorka, Olivier, « Les avatars du statut de résistant en France (1945-1992) ». Vingtième Siècle, revue d’histoire, n°50, avril-juin 1996. Dossier : Nations, états-nations, nationalismes. pp. 55-66.
https://www.persee.fr/doc/xxs_0294-1759_1996_num_50_1_3520.

Shneider, Valentin, Un million de prisonniers allemands en France 1944-1948, Vendémiaire, 2011.

Rousso, Henry, Face au Passé. Essai sur la mémoire contemporaine, Belin, 2016

Remerciements

— A l’équipe « Archives et objets historiques » de l’association « Jacou, Histoire et Patrimoine », coordonnée par Alain Peyronnel : Boisnard Jeanine, Bricout de la Morlière Sabine, Brun Renée, Dezeuse Marie-Françoise, Labbé Jean-Pierre, de Labrusse Olivier, Lefroy Alain, Lopez Guenia, Lopez René, Quaglino Marie-Dominique, Thevenon Gilbert, Wizenberg Armand, qui, depuis septembre 2014, a travaillé au rassemblement des volumineuses archives et nombreux objets historiques (environ 80), dispersés dans les 52 pièces du château, leur identification, leur classement, leur remise en état.

— Aux « anciens » de Jacou pour leurs témoignages : Jean Cammal, Isabelle Cutillas-Souche, André Dezeuse, Jean Lopez, André Moulin, Maurice Moulin, Marc Olivier, Simone Soubeyran.A Renaud Calvat, maire de Jacou et vice-président du Conseil Départemental de l’Hérault chargé de la Culture, qui nous a fourni les moyens de sauver ce patrimoine d’archives et objets historiques du château de Jacou, de les étudier et d’en faire état.

— A Alain Riols, ex-directeur de l’Office Départemental d’Action Culturelle (O.D.A.C) de l’Hérault, pour les informations sur les six otages de Montferrier.

— A André Hautot du Centre Régional d’Histoire de la Résistance et de la Déportation à Castelnau-le-Lez, en particulier pour ses informations sur le statut de résistant.

— A Jean-Claude Richard et Christian Guiraud des Études héraultaises qui, au-delà de l’exposition et des brochures « grand public » de début 2016 à Jacou, m’ont encouragé à approfondir mes recherches et publier cet article.

Crédits

— Sauf spécification contraire, toutes les illustrations sont d’Olivier de Labrusse.

NOTES

1. Voir la bibliographie.

2. Voir sur l’histoire du statut officiel de « résistant » l’article de O. Wieviorka : « les avatars du statut de résistant en France (1945-1992) cité en bibliographie.

3. O. de Labrusse : « Juin-septembre 1944 : les allemands à Jacou, premières pistes de recherches… », association « Jacou, Histoire et Patrimoine » 13 février 2016.

4. Voir à ce sujet l’ouvrage de P. Reboulin : Le Crès. L’Histoire d’un village en garrigue, 2000.

5. Voir bibliographie.

6. Citons, entre autres, Jacques Le Goff : Histoire et mémoire, Folio Histoire 1988 ; Henry Rousso : Face au Passé. Essai sur la mémoire contemporaine, Belin, 2016.

7. Le plus célèbre d’entre eux étant Miron Zlatin (l’époux de la dame d’Izieu). Sabine Zlatin, son épouse, écrit, en 1992, dans ses Mémoires de la dame d’Izieu, (page 110) : « mon mari a trouvé une place à Jacou près de Montpellier, dans une ferme ». Les archives du château de Jacou nous ont livré une partie de la correspondance entre le propriétaire du château associé à Miron Zlatin pour l’élevage avicole du château, et entre le propriétaire du château et le président du syndicat des éleveurs de l’Hérault. Des témoignages et photos complètent cet épisode méconnu de l’histoire des Zlatin. Une brochure sur ces premières découvertes a été réalisée en février 2016 : de Labrusse Olivier : 1940-1941 Miron Zlatin à Jacou, association « Jacou, Histoire et Patrimoine ». D’autres archives du château confirment, à compter du début 1942, la présence et l’emploi à l’usine de la C.I.J d’une réfugiée juive du Bas-Rhin, qui est, par ailleurs signalée dans les archives de la préfecture/ réglementation 2 W 157 recensement des juifs. D’autres noms sont à l’étude.

8. L’attestation du capitaine R. Dupuy, du M.L.N, du 01.02.1945 (Archives du château de Jacou) cite à ce propos 3 noms d’aviateurs hébergés par le propriétaire du château, lui-même ancien aviateur militaire. Ce fait et ces noms n’ont pu encore être confrontés à d’autres sources. Une recherche est en cours. Cependant selon G. Bouladou (opus cité, p.29, 30) « …une véritable organisation existe, avec des centres à Vichy et à Montpellier : l’embarquement aurait lieu entre Sète et Frontignan (sur des points variant constamment, par des yachts puis navires anglais) […] des volontaires français seraient mêlés à des officiers […] parmi lesquels des pilotes ».

9. Une recherche est en cours dans les documents et listes concernant les employés de la C.I.J.

10. Compoix de Jacou, 1774, archives de la mairie de Jacou.

11. Hélène Chaubin, op.cit., p.173-174.

12. P. Reboulin et alii, ouvrage cité, p.173.

13. H. Chaubin, op. cit., p.230 et suivantes.

14. Ce témoignage a été publié par A. Blanchemain dans son ouvrage Jacou, petit village et grands seigneurs, 2005, p.136.

15. Une déclaration de dommages de guerre de fin 1944 porte effectivement sur un camion (le Mack). (Archives du château de Jacou).

16. G. Bouladou, AD34, 91 J 26 citant un rapport mensuel de gendarmerie ; G Bouladou, 1992, opus cité, p.114.

17. L’ancien maire de Jacou et le propriétaire du château avaient œuvré pour retarder cette occupation. (Lettre de F. Soubeyran, Archives du château de Bocaud).

18. G. Bouladou, AD34, 91 J 26, citant un rapport de brigade de gendarmerie de Castries et de la préfecture .Il s’agit du maquis « Bir Hakeim » venu de la Sivadière et de Méjanes le Clap (Gard).

19. G. Bouladou, AD34, 91 J 26, citant un rapport de la SNCF, direction du mouvement-PCC région Sud-Est.

20. G. Bouladou AD34, 91 J 27, citant les rapports de gendarmerie.

21. G. Bouladou AD34, 91 J 27 citant les rapports de gendarmerie, l’ouvrage Aigoual-Cévennes et l’ouvrage de Rascalon.

22. G. Bouladou AD34, 91 J 26, citant le Petit Méridional ; G. Bouladou, 1992, opus cité, p.114.

23. A. Jullian, 1994, H. Chaubin, 2015, p.240, 243. Il ne semble pas que ce soient les mêmes italiens qui, par la suite, en septembre 1944, feront partie des prisonniers italiens, employés à Jacou, aux vendanges de l’exploitation agricole du château et, possiblement, à son usine « la Concentration Industrielle » (d’après la liste des archives du château de Bocaud).

24. Selon R. Bourderon (1974, p. 163) et J. Sagnes (opus cité, 1996, p.131) ces mesures se mettent en place à partir du 6 juin. Selon G. Bouladou (1992, opus cité, p.142-143) ce serait en juillet-août.

25. G. Bouladou (1992, opus cité, p.142-143).

26. G. Bouladou, AD34, 91 J 27. Il quittera ces villages dans la nuit du 8 au 9 août, par camions, pour Nîmes.

27. G. Bouladou, AD34, 91 J 26 citant les rapports de gendarmerie et R.G, et le Petit Méridional des 28, 29, 30 mai 1944.

28. G. Bouladou, AD34, 91 J 27 citant les rapports de gendarmerie.

29. G. Bouladou, AD34, 91 J 27 citant les rapports de gendarmerie et le Petit Méridional.

30. G. Bouladou, AD34, 91 J 27 citant les rapports de la défense passive ; G. Bouladou, 1992, opus cité, p.143.

31. G. Bouladou, AD34, 91 J 27 citant les rapports de la SNCF ; G.Bouladou, 1992, opus cité, p.144 ; J. Sagnes, 1986, p.134.

32. Reboulin, opus cité, p. …. ; Bouladou, AD34 J 27 citant les archives Gallia de la R3.

33. G. Bouladou, AD34, 91 J 28 d’après un rapport de gendarmerie.

34. G. Bouladou, AD34, 91 J 28 ; G. Bouladou, 1992, p. 160 ; journal « L’Eclair » du 18 Août 1944.

35. « Les avions c’étaient des double queues [Lightnings] canadiens ». 2 photographies de l’un d’entre eux ayant fait un atterrissage forcé près de Castries figurent dans le livre de P. Reboulin, p.174 et 175.

36. P. Reboulin et alii, ouvrage cité, p. 174 à 177. G. Bouladou, AD34, 91 J 28  note le « mitraillage, au Crès d’un train de munitions qui saute » le 17 août à 17 h. Par ailleurs il note l’explosion d’un train de munitions le 19 août à 14h.

37. G. Bouladou, AD34, 91 J 28.

38. G. Bouladou, AD 34, 91 J 28.

39. Rapport du lieutenant-colonel Arsac, dans A. Quillet, opus cité, pages 69-70 ; G. Bouladou, AD34, 91 J 38 ; G. Bouladou, 1992, p.160.

40. J. Veran, p.27 dans A.Quillet, opus cité ; G. Bouladou, AD34, 91 J 28 ; G. Bouladou, 1992, p.160, p.173.

41. A. Jullian : article « le maquis de l’Aigoual-Cévennes » 1994.

42. Rapport du Lt-colonel Arsac dans A. Quillet, opus cité, p.74-75.

43. Sources : G. Bouladou, AD34, 91 J 28 ; témoignage de Simone Thibal, recueilli par F. Berriot en collaboration avec Veran Cambon de Lavalette, A.Riols : La France Libre, la Résistance et la Déportation (Hérault, Zone sud), témoignages, Centre Régional d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Castelnau-le-Lez, L’Harmattan, page 216. ; transmis aimablement par Alain Riols.

44. A l’époque une bicyclette représentait 3 mois de salaire d’un ouvrier.

45. A. Quillet, opus cité ; J. Sagnes, opus cité, p.140 ; H. Chaubin, opus cité, p.248.

46. G. Bouladou, AD34, 91 J 28.

47. Lt-colonel Arsac, dans A. Quillet, opus cité, p.82. Le nombre de 60 blessés est repris par R. Bourderon, 1974, p.184 et H. Chaubin, 2015, p.247-248. Le Lt-colonel Mear évalue à « plus de 50 blessés » dans A. Quillet, opus cité, p.112.

48. J. Sagnes, opus cité, p.140

49. R. Bourderon, opus cité, p.163 ; H. Chaubin, opus cité, p.240

50. Voir le 26 août. G. Bouladou, note (AD34, 91 J 38) : « soir du 26/ 08. Jacou, Castries, débandade refluant jusqu’aux abords de Castelnau »

51. Rapport du Lt-colonel Arsac, dans A. Quillet, opus cité.

52. H. Chaubin, opus cité, p.241, 243 ; R. Boucheron, opus cité, p.163)

53. J. Veran signale également, lors de la fuite de la Wehrmacht de Montpellier, les 19 et 20 août les « vélos dérobés ou pris de force » (dans A. Quillet, « le combat de Montferrier, la libération de Montpellier, août 1944 », page 22). Le site des Archives Départementales donne en ligne une attestation de vol de force d’une bicyclette à Grabels : https://pierresvives.herault.fr/643-histoire-d-archives.htm

54. Là encore ce témoignage rejoint les propos de R. Bourderon, 1974, p.164 : « d’où la chasse individuelle aux moyens de transport, en particulier aux vélos, enlevés par la menace des armes, parfois suivie d’effets »

55. Ce témoignage conforte les propos de R.Bourderon, 1974, p.163 : « beaucoup se laisseront prendre sans combattre » et p.164 « nombre de redditions surprenantes… »

56. G. Bouladou, AD34, 91 J 28 ; A. Jullian, 1994.

57. Quelles étaient ces armes ? Étaient-ce des fusils de chasse ? Ceux-ci avaient tout d’abord interdits par le régime de Vichy, Puis, devant les nécessités du Ravitaillement autorisés 2 jours par semaine, et la pénurie alimentaire croissant, plus largement autorisées par les « lois » du 8 août puis du 3 décembre 1942 [selon G. Bouladou, ouvrage cité, p. 27 et 28]. Il pourrait aussi s’agir d’armes récupérées lors du 1er passage des troupes allemandes le 25 voire 26 août, ou encore lors des combats alentour au Crès et à Montferrier.

58. J.-C. Richard, dans l’album photographique en complément, en 2006, de l’ouvrage de G. Bouladou, produit une photographie des soldats allemands prisonniers à Font d’Aurelle (planche 31-2). Jean Bennac, du maquis Bir-Hakeim témoigne d’y avoir gardé ces prisonniers, ainsi que des miliciens (dans « La France libre, La Résistance », …etc. Opus cité, p.180)

59. Selon 2 listes nominatives des archives du château de Jacou.

60. On contextualisera ces faits avec l’ouvrage récent (2011) de V. Schneider : Un million de prisonniers allemands en France, 1944-1948.

61. Ce fait est également évoqué dans l’ouvrage d’A. Blanchemain, opus cité, p.136.

62. En effet ni les archives du château, ni les archives conservées aux AD34, ni l’ouvrage de M. Iancu concernant les spoliations, déportations, la Résistance des juifs de Montpellier et dans l’Hérault n’en font état. Décidément « Jacou ne faisait pas parler de lui » !