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Description

Le Sud… Mythes, Images, Réalités

Divers chercheurs de l’université de Montpellier III se sont trouvés réunis sur un thème de recherche commun qui ne peut qu’intéresser un large public celui de notre région ou plutôt, pour entrer dès maintenant dans le vif du sujet, celui des provinces méridionales. Ce thème est celui du Sud, du Midi et, bien entendu, des Méridionaux.

Ce sont des « littéraires », c’est-à-dire des chercheurs plus orientés vers l’analyse du discours à visées esthétiques destiné à la diffusion par le livre, qui ont ouvert le dossier en réunissant un colloque international de la Société française de littérature générale et comparée, dont les actes viennent tout juste de sortir des presses de l’Université sous le titre : Le Sud : mythes, images, réalités (pour se procurer les deux volumes, s’adresser à la section de littérature comparée, B.P. 5043-34032 Montpellier-Cedex). Vient ensuite l’ouvrage de notre collègue Jean Sagnes, Midi rouge, mythes et réalités (EDHISUD, 1982). Viendront dans la revue Études sur l’Hérault, en 1985, les actes de la journée 1984 d’histoire moderne de l’Université de Montpellier III, consacrés au thème : Le Sud. Viennent régulièrement, depuis 1982, les numéros de la revue AMIRAS et ceux de la revue DELTA.

La moisson est riche et, en réunissant les apports, on peut esquisser une synthèse permettant de préciser ce qui est acquis, mais aussi de poser de nouveaux problèmes débouchant sur de nouveaux axes de recherche.

Les littéraires nous entretiennent de Sud(s) multiples, géographiques ou historiques : « le mythe gascon » (Robert Escarpit), « Midi ou Sud, ça existe-t-il » (Robert Lafont), le Deep South et les écrivains du sud des États-Unis, sinon sudistes ; la part du lion revient à l’inventeur du Sud en littérature Faulkner (Jacqueline de Labriolle, Jean Rouberol). Le concept et ses dérivés South et Southern semblent aussi vieux que l’histoire américaine, d’après les recherches des anglicistes de l’Université, réunis autour de la revue DELTA.

Les recherches d’identité humaine des groupes nous montrent notre Midi (R. Laffont), nos Gascons (R. Escarpit), le sud de l’Afrique du Centre (Thérèse Dufeil), une Sudiste américaine, transplantée dans notre Midi (Reine Marcel : Zelda Fitzgerald entre deux Sud(s)), le Sud poétique (Pierre Torreilles), le Sud de Camara Laye (Jacques Chevrier).

On pourrait intituler le reste des communications « voyager le Sud » ; là aussi, se révèlent les multiplicités du Sud : le Sud de la Russie, la Crimée (Michel Cadot), le Sud du Maghreb (Charles Bonn). A ce propos, on notera que je prends l’entière responsabilité du terme : Maghreb, qui désigne, pour les géographes arabes, sous la dénomination complète de Djezirat el Maghreb, l’île de l’Occident, ce que nous appelons, nous, l’Afrique du Nord. Cette multiplicité de désignations permet pourtant d’aboutir à une des remarques – banale, oh combien ! – on est toujours au Sud de quelqu’un, si banale qu’elle est souvent oubliée et que Claude Brunon a parfaitement raison de la souligner avec force. L’occitan Robert Lafont rappelle qu’il « est un méditerranéen du Nord » et notre amie, Alice Marcel de l’Université de Perpignan précise qu’elle appartient aux comtés du Nord de la Catalogne. Denise Brahimi nous entraîne au Sud du Sahel dans le Sahara de Fromentin. Les Allemands ont eux aussi, le mythe du Sud et s’ils placent volontiers leur Sud en Italie (l’œuvre de Thomas Mann, analysée par Jacqueline Ott), certains Allemands, ceux du Nord, bien sûr ! perçoivent dans les Bavarois des Allemands du Sud, étrangers au bel idéal nordique de l’aryen blond aux yeux bleus… « Strauss est volontiers considéré comme un méridional…, perçu au Nord comme un impulsif, un brouillon, un tricheur même – bref comme l’un de ces méridionaux suspects que l’on aime à charger de mille péchés, qui seraient inconnus dans un nord aseptique et moralement aussi pur que peut l’être un congélateur… » (Tome II, p. 436. Jean Neveux). Le portrait du Bavarois se complète un peu plus loin : « Les Bavarois ne savent pas se dominer, leur sang méridional en fait des violents, des hableurs, des « galéjeurs » allais-je dire, des êtres qui se noient dans le mensonge et dans l’alcool (ne sont-ils pas catholiques comme il n’est pas, comme il n’est plus permis de l’être ?). Toujours le couteau… à la main, ils pratiquent des sports bestiaux… ils mangent du poumon en hachis et même de l’ail… c’est la pouillerie levantine, le vol, les petites bêtes qui piquent, les sales maladies… Malheur aux non Bavarois, forcés de vivre au milieu de cette « cour des miracles » (Jean Neveux, Tome II, p. 441). Voilà l’image de l’homme du Sud véhiculée à multiples exemplaires par l’homme du Nord à partir d’un centre de rayonnement : la capitale de l’état national – nationaliste – me glisse R. Lafont. Au Bavarois répond le méridional français à la Tartarin de Tarascon aussi tiré par nos chercheurs que les casquettes qu’il se plaisait lui-même à trouer ! L’Andalou (Duarte Mimoso Ruiz), Hamlet confronté au sud chez Faulkner (Jean Rouberol) et à Don Quichotte par Tourgueniev (Alexandre Zviguilsky), le navigateur des mers du Sud vu à travers Melville et Michelet, à travers l’œuvre de ces auteurs le lecteur est conduit vers des sud(s) voyagés, décrits, analysés depuis la période moderne.

Découvrir le, ou un Sud, suppose, il me semble important de le rappeler ici, que l’on se déplace dans l’espace en se repérant sur une carte, d’où les points cardinaux. Cette condition n’est parfaitement remplie qu’au début du XVIe siècle. L’autre condition de définition d’un Sud par rapport à un Nord suppose la référence à un centre : la construction de l’état territorial national réalisé en Espagne, en Angleterre, en France… favorise une distinction Nord-Sud, cette distinction ne naît pas à la même époque en Allemagne. Est-on sujet de Bavière ou de « Prusse » ou bien Allemand du Nord ou du Sud ? Ne passe-t-on pas de la nation germanique du Saint- Empire au kleinstattereï du XVIIe siècle ? Ne passe-t-on pas de la civilisation italienne à des ethnotypes de Florentin, de Milanais et de Napolitain ? Ne faut-il pas rapporter la naissance et l’affirmation de la notion de Sud à la naissance et à l’affirmation d’un état national territorial autour duquel se crée, si l’espace le permet, un ethnotype national, puis à l’intérieur duquel se distingue sa rivalité avec l’ethnotype provincial. Le Français n’entre t-il pas en lutte avec le Gascon ? […]

Informations complémentaires

Année de publication

1984

Nombre de pages

4

Auteur(s)

Michel PERONNET

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf