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Description

Étude chronologique du canal de Lunel (canal de la Radelle)

* Président de l’Association pour la Maintenance du Patrimoine du Lunéllois.

Au Moyen Age, les radeaux ou les barques, venant de l’ouest, traversent l’étang de Mauguio, remontent le cours inférieur du Vidourle (qui se jette alors dans l’étang) jusqu’aux marais de Psalmody et, de là, gagnent, par deux canaux, le Petit Rhône et les ports de Saint-Gilles.

Par sentence arbitrale de 1228 et lettres patentes du roi Philippe le Bel en 1229, les Lunellois sont autorisés à creuser leur « capouillière » où ils voudront. Ce qui fut fait de la pointe orientale de l’étang de Mauguio en direction de Notre-Dame-des-Ports. Ce canal s’avérait indispensable pour faciliter le transport du sel (des salines de Leucate jusqu’à celles du Peccaix) aux greniers à sel de Lunel et Sommières mais aussi pour détourner le trafic à travers les étangs de Montpellier à Saint-Gilles.

Depuis l’édification du port d’Aigues-Mortes au début du XIIIe siècle, les navigateurs, venant de l’ouest, devaient se rendre de Lattes à ce port par la mer en suivant la côte, pour payer les droits aux agents du roi de France avant de prendre le large ou accomplir le trajet inverse.

A cette époque, pour éviter ce détour dangereux par la mer, où sévissaient de terribles tempêtes ou les pirates barbaresques, le roi Louis IX permit le creusement du canal dit « de la Radelle », qui, partant d’Aigues-Mortes, traversait l’étang de Mauguio jusqu’au port de Lattes.

Le seigneur de Lunel, Raymond Gaucelm V s’engagea, le 18 novembre 1251, à laisser librement circuler par ce canal, qui traversait ses terres, les navigateurs de Montpellier, sans jamais percevoir d’eux le moindre droit pour les denrées transportées. En échange du consentement du roi d’Aragon, seigneur de Montpellier, ses consuls conférèrent au seigneur de Lunel le titre de bourgeois de leur ville et la possession de certaines maisons qu’il convoitait.

En 1291, les salines du Peccaix deviennent propriété royale et la baronnie de Lunel est acquise par le roi de France en 1295 ; son sel doit être transporté à Lunel.

Pour cela, il est nécessaire de créer une voie navigable, même en période de basses eaux : le transport par voie de terre est, lui, impraticable pendant l’automne et l’hiver, à cause des marais.

C’est de 1298 que date le plus ancien document dans lequel il est question de la roubine du canal de Lunel. Une délibération du 3 des ides de novembre 1298, prise par les Lunéllois réunis dans le cimetière de l’église Notre-Dame-du-Lac, décide de dépêcher certains d’entre eux au sénéchal de Nîmes et Beaucaire pour aller demander la permission de faire creuser une roubine neuve qui viendrait en droite ligne depuis les cabanes du sel jusqu’aux fossés de la ville.

Creusement du canal de Lunel et de ses prolongements aidé par les rois de France

Le sénéchal, par des lettres données à Nîmes, le 8 des calendes de juillet 1299, confirmées, peu de jours après, par le roi à Saint-Agile-sur-Loire, donna pouvoir aux syndics de Lunel de traiter pour les ouvrages à exécuter à la roubine.

Malgré l’opposition au projet de certains Lunéllois qui refusent de contribuer aux frais, après obligation royale faite, les syndics de Lunel, en vertu des lettres patentes du mois de mai 1300, confièrent à Sornac Calcinel, adjudicataire, l’exécution des ouvrages prévus, à ses frais et dépens, pour le creusement du canal depuis le port du sel jusqu’aux fossés de la Condamine : canal de 9 mètres de large et de 1,20 mètre de profondeur, un chemin d’une canne de largeur sera établi de chaque côté (2,98 m). Les terrains nécessaires pour l’exécution des ouvrages devaient être payés des deniers de la communauté. L’entrepreneur devait, en outre, payer 100 livres tournois de rente au roi, moyennant quoi les syndics de Lunel lui cédèrent toutes les rentes et revenus du port pendant huit ans.

Deux ordonnances du sénéchal, des 12 octobre 1318 et 12 mai 1319, nous apprennent que l’entrepreneur, après avoir fait creuser le canal jusqu’à la Peyrille, ne tient pas ses engagements. Il fut condamné à des dommages et intérêts ; ses biens furent saisis et les travaux commencés restèrent longtemps suspendus.

Les barques pénétraient dans l’étang de Mauguio venant soit d’Aigues-Mortes par le canal de la Radelle, soit par le grau de Pérols, et arrivaient au port de La Peyrille à 1 200 toises de la ville (2 km 400), ce qui favorisa l’essor de notre ville.

En 1341 et 1344, de nouvelles tentatives de prolongement du canal sont effectuées. Vers 1360, le canal, bien qu’encore imparfaitement creusé, commençait d’amener, dans nos murs, une partie des marchandises qui s’embarquaient pour Aigues-Mortes ou autres graus.

Au mois d’août 1368, le roi Charles V, à la sollicitation du comte d’Étampes, seigneur de Lunel, donna des lettres confirmant aux habitants de Lunel le droit d’y transporter et d’y vendre exclusivement le sel, à charge de continuer, à leurs frais, le canal jusqu’à la ville, afin que, barques, bateaux et navires puissent y venir et rester en sûreté. Faute de moyen d’exécution, le port provisoire de La Peyrille continua encore de longues années à servir de lieu de débarquement.

Informations complémentaires

Année de publication

1998

Nombre de pages

9

Auteur(s)

Yves RICARD

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf