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Description

Le séjour de dom Edmond Martène et de dom Ursin Durand
entre Saint-Chinian et Albi en octobre 1711

Le Voyage littéraire de deux religieux Bénédictins de la Congrégation de Saint-Maur…, édité en deux volumes en 1717 et 1724, est une source particulièrement intéressante pour la connaissance du monde de l’érudition ecclésiastique et pour celle de la vie religieuse et monastique à la fin du règne de Louis XIV et au début de la Régence. Les quelques pages présentées ici permettront de mettre en valeur les différents aspects érudits, spirituels et littéraires qui caractérisent cet ouvrage dont un des deux auteurs (dom Martène) est un des grands érudits mauristes, disciple de Mabillon et contemporain de Montfaucon.

Écrit en français, de lecture aisée, cet ouvrage est le résultat de sept années de voyages réalisés à la demande du Chapitre général de la Congrégation de Saint-Maur et avec le soutien de l’Assemblée du clergé. Le premier volume contient les six premières années de voyage, de 1708 à 1713. Cette série de voyages répond à la volonté de reprendre la publication de la Gallia christiana, abandonnée au milieu du XVIIe siècle. Ce premier volume est divisé en deux tomes. L’extrait, présenté ici, est tiré de la deuxième partie, pages 62 à 67. Quant au second volume, il contient le récit du voyage de 1718 réalisé dans le cadre de l’élaboration d’un Recueil des historiens de France décidée par le chancelier d’Aguesseau et dont le plan avait été dressé par dom Martène. Finalement, le projet fut abandonné et repris dans les années trente par dom Bouquet mais le voyage eut lieu grâce à dom Charles de l’Hostellerie, supérieur général.

Le premier intérêt de ce récit concerne l’aspect géographique ces voyages couvrent une grande partie de la France, les Pays-Bas, la Rhénanie et la Westphalie. Plus précisément, en voici la cartographie année par année

A la vue de cette cartographie, on peut faire plusieurs remarques. Tout d’abord, de grandes régions monastiques françaises n’ont pas été visitées par les deux Mauristes (la plus grande partie de l’ouest et le Massif central). Cette lacune s’explique tout à fait par l’organisation des études dans la congrégation : la collaboration entre plusieurs religieux voyageurs et sédentaires et l’utilisation des recherches déjà réalisées. Martène l’explique lui-même dans une lettre

« nous avons a la réalité travaillé mon compagnon et moy avec des moines que dieu seul connoie,… Mais nous ne sommes pas les seuls qui avons travaillé et fourny des memoires au R.P. (Dom Denis de Sainte-Marthe). Il a premierement puisé dans les tressas inépuisables du p. Mabillon comme il le dit luy mesme. Il a ete le maitre du travail de Dom Michel Germain qui avoir fait l’histoire abregée de tous les monastères de notre congregation. Dom Claude Estiennot… avaoit ramassé dans leurs provinces beaucoup de memoires… Dom Denys Briant religieux de S. Vincent du Mans, homme tre habile et exact a travaillé dans le Maint et la Bretagne. Dom Jacques Jouvelin et Dom Richard Houssaye ont travaillé sur la Normandie, Dom Jacques Boyer a parcouru pour le mesme dessein l’Auvergne la Saintonge et quelques abbayes du Limousin. »

Seconde remarque, Martène dans sa quête aux sources historiques de la Gaule chrétienne s’est trouvé dans l’obligation de séjourner dans des régions particulièrement marquées par le monachisme à diverses périodes : la carte monastique carolingienne (Fleury, Autun, Corbie, Chelles, Prùm, Corvey, Saint-Riquier…) à la suite du monachisme colombanien (Luxeuil), la Bourgogne clunisienne et cistercienne visitée à deux reprises, les grands monastères de chanoines réguliers (congrégation d’Arrouaise, de Saint-Ruf, de Vindesheim, des Génovéfains), les grandes abbayes de l’ordre de Prémontré, les Chartreuses les plus importantes et enfin les abbayes des principales réformes monastiques du XVIIe siècle (Saint-Vanne et Saint-Maur, l’Étroite observance de Cîteaux, Feuillant et l’Antique Rigueur). Cette géographie met en valeur l’attachement des deux Mauristes à leur mission dont les étapes sont autant de lieux d’investigations scientifiques que des lieux de pèlerinages marquant la continuité intellectuelle et spirituelle du monachisme et son enracinement dans l’histoire de France.

L’organisation matérielle du voyage n’apparaît que par allusions dans le récit. On peut cependant avoir une certaine idée du déroulement quotidien du voyage en rassemblant ces détails auxquels il faut ajouter divers éléments tirés de récits manuscrits du Voyage littéraire écrits par dom Ursin Durand. Les deux religieux partent chaque année après Pâques de Marmoutier de Tours ou de Saint-Denis pour revenir fin décembre ou courant janvier dans l’un de ces deux monastères. Ils voyagent revêtus de l’habit monastique, à cheval et assez souvent accompagnés d’un guide ou même d’un valet comme en Allemagne. Ces guides sont soit des religieux désignés par leurs supérieurs soit des laïcs. Les deux religieux logent le plus souvent dans des abbayes des ordres les plus divers, masculins et féminins. Cependant, il leur arrive assez régulièrement de s’arrêter dans des auberges, notamment en Allemagne en […]

Informations complémentaires

Année de publication

1990

Nombre de pages

8

Auteur(s)

Daniel-Odon HUREL

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf