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2.00

Description

Toujours tranquille, tête lourde et l’idée fixe :

l’internement du sculpteur Paul Dardé pendant la Première Guerre Mondiale.

* Assistant de Conservation du Patrimoine,
service des archives anciennes et privées des Archives départementales de l’Hérault

Introduction

La vie et l’œuvre de Paul Dardé, célèbre sculpteur languedocien (1888-1963), sont relativement bien connues aujourd’hui. Le musée Fleury de Lodève lui consacre actuellement plusieurs salles. Quelques ouvrages permettent de suivre le récit de sa vie, qu’il s’agisse de biographies officielles, d’articles épisodiques, voire même des témoignages oraux complétés et même recomposés à titre posthume.

Ces publications ont néanmoins le point commun de présenter de manière très approximative une période relativement sombre de la vie du sculpteur. Il s’agit de son internement pendant la Première Guerre mondiale. Quelques mois après la mobilisation du mois d’août 1914, l’artiste est accusé de désertion. Emprisonné, il est interrogé et orienté vers les services psychiatriques de Montpellier. Lui-même évoquait peu cette période, et c’est à l’occasion de la commémoration du centenaire du Premier conflit mondial qu’un article s’interroge ouvertement sur cet épisode.

Que s’y est-il passé ? Nous avons la chance de conserver des archives à ce propos, archives médicales inédites à ce jour. Elles vont nous permettre de combler ici une lacune dans la biographie de Paul Dardé. Mais afin de bien saisir toute l’importance et la portée de ces documents, il convient de donner la parole à l’artiste lui-même, dans un témoignage qu’il en donne dix-sept ans plus tard.

Prologue

Le 4 mai 1933, Paul Dardé, demeurant alors au 3, avenue de la gare à Lodève, adresse un courrier au préfet de l’Hérault à Montpellier. Il y sollicite une audience pour exposer sa situation de « chômeur intellectuel », ainsi qu’il est inscrit à la mairie depuis le 15 novembre 1932. Mais c’est surtout pour présenter sa candidature à l’emploi d’architecte communal de la ville de Lodève.

Il y joint une « Lettre publique », imprimée à ses frais, et adressée aux Conseillers municipaux de Lodève. Sans revenir sur un litige de diffamation qui opposera pendant plusieurs années l’artiste et la municipalité, il nous semble opportun de reproduire ici un passage important. Il porte sur une accusation que l’on aurait formulée à son égard, à savoir celle d’avoir été un déserteur pendant le Premier conflit mondial. Voici comment l’accusé constitue sa défense :

« (…) Et alors, vous expliquerez bien des choses. Pourquoi par exemple, on s’est tant attaché à faire circuler le bruit que j’étais un déserteur, cela par dépit de n’avoir pu avoir ma peau pendant la guerre, quand j’étais en traitement dans les hôpitaux. Cependant, mes ennemis, ceux qui voulaient être mes maîtres étaient tout puissants à ce moment-là. C’était M. D., bannière, porte drapeau des super patriotes, représentant autorisé des partis de droite. C’était la direction du Génie, la Direction du Service de Santé, qui usèrent de tous les moyens qu’ils pouvaient avoir à leur disposition pour manœuvrer sans qu’il y paraisse le simple pioustre que j’étais, qui n’auraient pas manqué, si j’avais été déserteur, et simulateur, de me renvoyer au front, avec ces indications mystérieuses, qui accompagnaient ceux-là qui n’en devaient pas revenir. […]

Informations complémentaires

Année de publication

2021

Nombre de pages

18

Auteur(s)

Rafaël HYACINTHE