Retour aux sources textuelles sur Agde grecque

* Aix-Marseille Université, CNRS, UMR 7299-Centre Camille Jullian, Aix-en-Provence.

Avant sa localisation précise en 1938-1939 par Raymond Aris et les débuts de l’archéologie urbaine, l’histoire d’Agde grecque reposait uniquement sur les textes anciens. Dès les premières découvertes de terrain, les archéologues se sont tout naturellement appuyés sur ces écrits laconiques indiquant tout juste qu’elle était au bord/près du fleuve Hérault et qu’elle avait été une ville de Marseille. C’est donc en tant que telle qu’Agde est entrée dans l’Histoire et c’est cette approche qui a guidé la recherche jusqu’à date récente.

L’un de ces textes mentionnait les Rhodiens avant les Massaliotes. En dehors des quelques observations de Jean-Jacques Jully à propos des vases archaïques « rhodiens » ou égéens de la nécropole de Saint-Julien à Pézenas 1, cet aspect n’a pas vraiment retenu l’attention et a même été vu comme partie d’une légende. Puis, avec la fouille de la nécropole indigène du VIIe s. av. n. è. d’Agde/Le Peyrou, qui a restitué des vases grecs, André Nickels a brièvement repris la question et considéré l’épisode rhodien comme réel, mais ponctuel et sans suite 2.

En revanche, la date de fondation a longtemps fait discuter et a varié entre le VIIe et le IVe s. av. n. è. A. Nickels l’a fixée autour de 400, là où il supposait la présence de Grecs Phocéens aux côtés des indigènes depuis le VIe s. Il justifiait cette date surtout par les résultats obtenus dans l’immédiat arrière-pays et notamment à Bessan/La Monédière, un site indigène dont l’abandon, justement autour de 400 et peut-être forcé, aurait sonné le glas de l’indépendance indigène et permis aux Grecs Massaliotes de s’installer durablement et renforcer le site d’Agde 3.

Depuis les années 1980, de nouvelles recherches ont considérablement enrichi le dossier.

L’assiette urbaine d’Agde grecque, sa taille, son développement et ses rythmes sont maintenant mieux appréhendés. Deux phases chronologiques sont clairement séparées par un long abandon : Agàthe I (525/500-300/275 av. n. è.) et Agàthe II (150/140 av. n. è.-Ier s. de n. è.). Ces acquis et le mobilier permettent de dire qu’Agde était une fondation grecque dès le début (vers 525/500) et que, à nouveau abandonnée entre le Ier s. et le Ve s. de n. è., elle n’a pas fait partie des villes de l’époque impériale romaine.

Parallèlement, la découverte d’une très grande ville grecque sous l’actuelle Béziers, son ancienneté, son identification avec la Rhòde archaïque des sources et l’évidence de ses liens avec Agàthe I révélés par le mobilier font envisager que cette dernière a d’abord été une création rhodo-biterroise et que c’est lors de la phase Agàthe II qu’elle est devenue une ville de Marseille 4.

Les connaissances locales et globales ayant progressé au cours des dernières décennies, il est utile de revenir aux textes concernant Agde grecque qui ont tant compté dans l’écriture de son histoire, afin de voir si et dans quelle mesure ils correspondent aux positions scientifiques actuelles.

Les sources se présentent en deux groupes. Les plus anciennes sont indirectes et traditionnellement attribuées aux IVe-IIIe s. av. n. è., alors que les sources directes appartiennent à la période de la Conquête romaine et aux premiers temps de l’Empire. Certaines sont confuses et soulèvent des interrogations à plusieurs niveaux. Toutes sont laconiques.

Les sources indirectes

Les sources indirectes sont regroupées dans les Ethniques d’Étienne de Byzance.

Grammairien quasiment inconnu qui a dû vivre à Constantinople au Ve ou VIe s. de n. è., il est l’auteur d’un lexique géographique rédigé par ordre alphabétique dont l’intention était de faire la jonction entre une ville et le nom de ses habitants ou d’un peuple. Presque entièrement perdu, il a été abrégé par un certain Hermolaos dont l’Épitomé, écrit au VIe s. et dédié à Justinien (empereur romain d’Orient), nous est parvenu par des manuscrits non antérieurs au XVe s. Les épitomisations successives réalisées par plusieurs compilateurs font que notre version du texte est à la fois une récriture et un résumé dont le résultat est que « l’abrégé que nous possédons n’a rien à voir avec celui que le grammairien Hermolaos a pu rédiger probablement entre 550 et 565 » 5.

L’Épitomé a fait l’objet de plusieurs analyses textuelles et critiques, mais il demeure difficile d’évaluer dans le détail sa conformité aux Ethniques, ainsi que la qualité des résumés, sans compter qu’Étienne de Byzance a pu commettre des erreurs ou des confusions éventuellement reproduites, voire « raccourcies », dans la version de l’Épitomé qui nous est parvenue.

La notice concernant Agde est particulièrement longue et fait apparemment partie de la section des Ethniques la moins abrégée dans l’Épitomé6. Elle renseigne néanmoins très peu car le Grammairien est davantage préoccupé par sa discipline que par l’histoire ou la géographie. Malgré leur côté laconique, les mentions d’œuvres perdues sont importantes et méritent une attention particulière.

« Agathe ville des Ligyens ou des Celtes. Scymnos dit qu’elle appartient aux Phocéens dans l’Europe. Timosthène, dans le Stadiasme, l’appelle Agathé Tyché. Si cette forme est la bonne, on doit redescendre l’accent, en tant qu’adjectif, comme pour Heraîon teîchos face à Heraion, ou Hermaîos lòphos face à Hermaios. Il existe aussi, selon Philon, une autre Agathe des Ligystiens sur l’étang ligyste. Peut-être est-ce la même que la première, selon Eudoxe. L’accent remonte. L’ethnique est Agathînos ; il est formé comme Akragantînos. En effet, Habron dans « Les formes dérivées des noms » le signale comme tel. Puisque Agathînos est aussi un nom propre, il est assez normal qu’il soit employé pour les deux. En effet, Schoineùs est à la fois un nom propre, le nom d’un fleuve et l’ethnique, comme Lìxos ou également Thessalòs, Sikanòs, Sikelòs et quantités d’autres mots. Si on n’utilise pas Agathînos comme ethnique, on doit appeler l’habitant d’Agàthe Agathaîos suivant la forme courante de la langue, ou bien Agatheùs, à l’instar de Thessalonikeùs, Omareùs [ou Sintareùs pour d’autres éditeurs] et Berenikeùs ; on rencontre d’ailleurs Agàtheia comme forme dérivée d’Agathe, comme on a Berenìkeia et Thessalonìkeia. Il existe aussi une île appelée Agathe, de Lycie. Il faut utiliser pour l’ethnique la forme Agatheùs : en effet ce pays utilise préférentiellement la forme en –eus comme Patareùs, Tloeùs, Telmiseùs, Krueùs. » (Trad. M. Bouiron 2014. Nous retenons la forme Agathe, adhérente à l’original grec, plutôt que celle d’Agathê choisie par ce chercheur).

Emblème de la ville grecque d’Agde, la statue en bronze de l’Éphèbe est d’époque hellénistique, a été trouvée dans l’Hérault en 1964 et est présentée au Musée de l’Éphèbe et d’archéologie sous-marine (Cap d’Agde). © Pierre-Arnaud.
Emblème de la ville grecque d’Agde, la statue en bronze de l’Éphèbe est d’époque hellénistique, a été trouvée dans l’Hérault en 1964 et est présentée au Musée de l’Éphèbe et d’archéologie sous-marine (Cap d’Agde).
© Pierre-Arnaud.

• La première phrase, générique, situe Agde par le peuple ligure (ligyen) ou celte qui l’habite, ce qui ne saurait être plus vague et, de surcroît, plus étonnant. Il en ressort juste la localisation d’Agde le long de la côte méditerranéenne nord-occidentale alors que le peuple indigène qui l’habitait est incertain.

Pour Marc Bouiron, l’identification ethnique indéterminée s’explique par la difficulté de fixer, à l’époque d’Étienne de Byzance, ce qui était « ligyen » pour les sources pré-romaines et « celtique » pour celles postérieures, comme Strabon ou Artémidore 7. Il reste que, dans les deux cas, ce sont bel et bien les habitants du lieu qui sont désignés et ce ne sont pas des Grecs. Conformément au projet d’origine des Ethniques (= établir le lien entre une ville et le nom de ceux qui y vivent), le Grammairien retient donc que des « indigènes » habitaient Agde. Autrement dit, le souvenir de l’identité grecque était perdu ou considéré sans importance puisqu’on ne le retrouve que dans la suite du texte comme une information secondaire recueillie chez Scymnos.

• L’appartenance aux Phocéens est introduite d’après l’Europe de Scymnos.

Dans tout le paragraphe consacré au toponyme « Agde », cette mention est la seule à consigner ce fait qui nous paraît si important, tout en étant la seule à l’attribuer aux Phocéens.

Il est alors utile de s’interroger : de quel Scymnos s’agit-il ? Scymnos de Chios (IIe s. av. n. è.), auteur d’une Périégèse presque entièrement perdue ? Pseudo-Scymnos, auteur anonyme du Périple de la terre habitée, écrit en vers autour de 130-120 av. n. è. et dédié à un roi de Bithynie ? La critique contemporaine penche pour ce dernier, dont l’œuvre est partiellement conservée dans l’Épitomé de Marcien d’Héraclée (entre le IIIe et le Ve s. de n. è.), abrégeant des récits géographiques, œuvre à laquelle Étienne de Byzance s’est largement référé.

Il est toutefois curieux que, dans l’Épitomé des Ethniques, le titre de l’œuvre soit l’Europe, qui ne correspond ni à celle de Scymnos de Chios ni à celle du Pseudo-Scymnos. Ce détail ne semble pas avoir été relevé par l’exégèse, probablement parce que le poème du Pseudo-Scymnos comportait deux parties traitant l’une de l’Europe et l’autre de l’Asie, alors que l’œuvre de Scymnos de Chios comptait plusieurs livres au découpage différent 8.

Le passage du Pseudo-Scymnos étant conservé, le mieux est de s’y reporter (voir ci-dessous).

• Dans le Stadiasme, Timosthène l’appelle Agathé Tyché (= Bonne Fortune ; Bon Hasard).

Le Grammairien souligne que quand Agathé est un adjectif, l’accent est sur la dernière syllabe, alors que si Agathe est un nom l’accent est sur la pénultième.

Extrêmement laconique, cette mention pose problème à plusieurs titres et notamment parce que c’est la seule à transmettre ce nom composé qui a joui d’une si grande faveur. Timosthène ayant écrit dans le courant du deuxième quart du IIIe s. av. n. è., son œuvre consignerait le plus ancien nom de la ville, d’où l’importance attribuée par les historiens à son témoignage. Le toponyme composé est toutefois un unicum car chez les auteurs de langue grecque on trouve toujours Agathe, avec l’accent sur la pénultième syllabe (ce qui en fait un substantif), et chez les auteurs latins Agat(h)a ou Agat(h)e). Le fait que le nom composé ne se retrouve qu’ici laisse supposer – nous semble-t-il – qu’il n’est probablement pas correct et d’ailleurs le Grammairien lui-même se demande « si cette forme est la bonne ». Il est alors légitime de s’interroger sur son origine et à plus forte raison que plusieurs indices orientent vers une erreur ou confusion.

1) Timosthène de Rhodes était amiral de la flotte égyptienne de Ptolémée II Philadelphe dans les années 280-270 av. n. è. et l’auteur d’un Traité sur les ports, admiré par Ératosthène (IIIe s. av. n. è.) et Strabon (début du Ier s. de n. è.).

Or, dans notre passage, il ne s’agit pas du Traité sur les ports mais du Stadiasme, ouvrage dont le titre complet est Stadiasme de la mer, incomplet et corrompu même dans le plus ancien manuscrit parvenu (Xe s.). Les études critiques ont montré qu’il ne s’agit pas de l’œuvre de Timosthène 9. Les différents styles et les informations déjà d’époque romaine laissent voir une composition à partir d’au moins quatre périples dont les plus anciens peuvent être antérieurs à Timosthène, alors que les plus récents sont d’époque républicaine ou contemporains d’Auguste 10. L’information concernant le nom composé d’Agde utilisée dans l’Épitomé provient donc d’une compilation assemblée – pense-t-on – surtout au IIIe s. de n. è. 11 et donc postérieure à Timosthène de cinq ou six siècles. Par conséquent, on ignore quelle part elle conserve de l’œuvre de l’amiral grec.

Le passage du Stadiasme concernant le Midi n’est pas conservé dans le manuscrit dont nous disposons mais il l’était évidemment dans celui, plus ancien, consulté par Étienne de Byzance. D’un autre côté, l’ouvrage de Timosthène est perdu. Dans le très long laps de temps séparant le Traité des ports de la version du Stadiasme consultée par le(s) Byzantin(s) et, a fortiori, de la nôtre, nous ne pouvons donc pas évaluer les différences, confusions et erreurs intervenues, qu’elles soient d’origine ou plus tardives.

Puisque l’Épitomé transmet un unicum dont il est impossible de connaître le contexte originel, nous devons au moins envisager que rien ne garantisse l’existence de la mention de notre Agde dans l’œuvre de Timosthène, ni que la ville portait le nom d’Agathé Tyché au temps de cet auteur. Tenir compte de ce doute nous semble d’autant plus indispensable que, pour le port de Marseille, bien plus important que celui d’Agde, le(s) Byzantin(s) ne mentionnent ni Timosthène ni le Stadiasme.

En somme, tout cela laisse perplexe.

2) Agathé Tyché était le nom d’une déesse.

Si les villes aux noms inspirés de ceux des dieux ne sont pas rares, ces toponymes sont généralement adaptés (p. ex. Athènes, Poseidonia, Apollonia). À notre connaissance, il n’y a pas de villes grecques portant purement et simplement le nom d’une divinité.

Par là même, le cas d’Agde serait inhabituel.

3) Tyché, ou Tyché Agathé, ou encore Agathé Tyché (Nymphe champêtre ou Océanide ou fille d’Aphrodite et de Zeus ou d’Hermès) était à l’origine la déesse de l’inconstance du bonheur, du hasard, de la prospérité de la terre, de la bonne navigation. Puis, elle est progressivement devenue la déesse protectrice de la cité, veillant sur sa prospérité et sa destinée 12. Elle était devenue importante au point que son invocation figurait couramment au début ou à la fin des décrets des cités 13. Elle a joui d’une grande faveur à partir de l’époque hellénistique, notamment en Grèce et Asie Mineure, a été alors souvent associée aux divinités poliades et progressivement les a même plus ou moins écartées. Au IIIe s. av. n. è., quasiment chaque ville avait sa propre Tyché, qui est devenue aussi la protectrice des rois en tant que source surnaturelle de leur gloire 14.

Or, Agde a été fondée avant l’époque hellénistique. Que ce soit à la fin du VIe s., comme nous le retenons aujourd’hui, ou vers 400, comme l’avait proposé A. Nickels, le moment n’était pas propice pour lui attribuer le nom de cette figure divine alors encore marginale. De surcroît, notre Agde est très loin de la Grèce et de la Méditerranée orientale, c’est-à-dire des régions où cette déesse a été largement honorée.

4) Agathé Tyché était particulièrement vénérée à Alexandrie, où son temple était d’une grande beauté.

Il est alors intéressant que nous ayons la trace du fait que dans son temple de Délos, les reines d’Égypte Arsinoé II et Bérénice II 15 lui aient été associées après leur mort 16. Bérénice II a été aussi représentée en Agathé Tyché sur un vase légendé trouvé en Cyrénaïque 17. Il y avait donc un lien fort entre la déesse et ces reines que Timosthène a connues. Il n’est pas exclu que l’une des deux soit l’Agathé Tyché de son ouvrage et/ou que le rapprochement avec notre Agde soit une confusion ultérieure ou une erreur due à l’un ou l’autre des abrégés de l’Épitomé.

5) La ville portuaire d’Agathopolis18, une colonie athénienne au nom proche de celui de notre Agde, se trouvait au bord de la Mer Noire, en Thrace, dont Lysimaque était le roi depuis 304 av. n. è. En 299, il a épousé Arsinoé II, qui a donc été reine de Thrace et de Macédoine jusqu’à la mort de son mari (en 281), avant de devenir reine d’Égypte suite à son mariage avec son frère Ptolémée II, en 275.

Ainsi, Agathopolis, la Thrace et la reine d’Égypte Arsinoé II sont reliées entre elles.

6) Dans la notice Agathe de l’Épitomé, est mentionnée aussi une île de Lycie portant ce nom. La source du renseignement n’est pas précisée et le lieu ne semble pas autrement connu 19. Il reste qu’une fois de plus, cette localisation ramène vers la Méditerranée orientale.

En somme, ce ne sont peut-être que de curieuses coïncidences mais, d’une part, elles reconduisent à la Méditerranée orientale et à la Mer Noire et, d’autre part, Agathé Tyché était une divinité majeure du milieu alexandrin, duquel notre côte est bien loin, alors que Timosthène y vivait. Il est possible que lui ou l’un des compilateurs du Stadiasme ait rapproché, d’une façon ou d’une autre, la déesse ou l’une de ces reines d’Égypte au nom de notre Agde et/ou que l’un des abréviateurs des Ethniques ou de l’Épitomé ait coupé le contexte et le sens de la mention.

Au final, il n’y a aucune raison objective de croire qu’Agde ait jamais porté le nom d’Agathé Tyché, ni même que Timosthène l’ait mentionnée. Bien au contraire, nous sommes enclins à penser que ce toponyme résulte d’une confusion d’Étienne de Byzance ou de l’un de ses abréviateurs, voire de l’une des strates de la composition du Stadiasme.

Il est donc regrettable que cet invraisemblable nom composé soit affiché partout et systématiquement utilisé, même dans certains travaux scientifiques.

• Selon Philon, une autre Agathe des Ligyens (Ligures) a existé sur l’étang ligyste (ligure). Le(s) Byzantin(s) renvoie(nt) alors à l’avis Eudoxe, pour qui ce serait la même ville.

Ici, comme souvent, l’« étang ligyste » désigne génériquement la côte occidentale aux nombreux étangs.

Quant à Philon, il s’agit vraisemblablement de Philon de Byblos (vers 64-141 de n. è.) car son œuvre (un recueil de notices sur des personnages célèbres classés par villes d’origine) était l’une des principales sources d’Étienne de Byzance, probablement par l’intermédiaire de l’abrégé d’Aélius Sérénus, peut-être rédigé au IVe s. de n. è. 20.

Deux questions, nous semble-t-il, n’ont pas encore été posées par la critique : 1) qui est l’homme illustre originaire d’Agde ou qui y est venu ? 2) pour quelle raison Philon a-t-il cru qu’il existait deux villes au même nom le long de la côte ligure ?

Si la première question reste sans réponse, pour la seconde il est tentant d’identifier le déjà vague souvenir des deux phases grecques d’Agde. Il faut en tout cas relever que cette dualité se trouve déjà chez le Pseudo-Scymnos, puis encore chez Claude Ptolémée, mais aussi chez Eudoxe d’après la formulation de l’Épitomé.

• D’après Eudoxe, il n’y avait qu’une seule Agde le long de notre côte.

La phrase sonne comme si Eudoxe corrigeait Philon.

Puisque dans ce passage l’on identifie habituellement Eudoxe de Cnide, il est évident qu’il n’aurait pas pu corriger un auteur postérieur de plusieurs siècles 21.

La critique penche donc pour Eudoxe de Cnide (première moitié du IVe s. av. n. è.), notamment parce que dans d’autres passages de l’Epitomé le nom est associé à l’œuvre perdue du Cnidien intitulée Circuit de la Terre22.

S’il s’agit bien de lui ici aussi, la plus ancienne mention textuelle d’Agde remonterait non pas au IIIe s. (comme on l’a cru d’après Timosthène) mais au IVe s. av. n. è. Il est toutefois utile de relever que, dans l’Épitomé, Agde est le seul site côtier nord-occidental à bénéficier d’un renvoi au Cnidien 23. Cela étonne : pourquoi n’est-il pas évoqué pour Marseille ? Il faut encore souligner que dans notre passage Eudoxe n’est associé à aucune œuvre. Autrement dit, l’identification du Cnidien n’est due qu’à sa présence dans d’autres contextes de l’Epitomé, ce qui n’est pas une preuve. Il reste que cet Eudoxe n’aurait pas pu « unifier » les deux Agde car en son temps la ville était encore dans sa première phase (Agathe I).

Mais, d’autres Eudoxe sont connus dans la littérature antique. Eudoxe de Rhodes était un historien du IIIe s. av. n. è. Nous n’en connaissons quasiment que le nom (cité par Diogène Laërce au début du IIIe s. de n. è.) et quelques fragments de l’œuvre. Agde y était-elle mentionnée ? Eudoxe de Sicile (également cité par Diogène Laërce) était un poète comique du IIIe ou IIe s. av. n. è. Il paraît difficile que notre Agde ait eu quelque chose à faire dans sa production, perdue pour nous. Enfin, Eudoxe de Cyzique était un fameux navigateur de la fin du IIe s. av. n. è. Il n’a pas laissé une œuvre écrite, mais ses voyages étaient très connus, légendaires. Strabon (II, 3) leur consacre un long passage et, parmi ceux-ci, il y a celui longeant la côte entre Dicearchia (Pouzzoles, I) et Gadeira (Cadiz, E), en passant par Marseille. Ce parcours a nécessairement concerné notre espace géographique. Strabon tire les renseignements de l’Histoire (couvrant la période 145-86 av. n. è.) de Posidonios d’Apamée (vers 135-vers 51 av. n. è.), qui était plus ou moins contemporain d’Eudoxe de Cyzique. Strabon ne mentionne pas Agde dans ce voyage et l’ouvrage de Posidonios est perdu. Nous ne savons donc pas si cet auteur mentionnait Agde. Cela reste probable et, quoi qu’il en soit, l’information aurait probablement pu être trouvée dans d’autres récits que celui de Strabon.

Au final, un navigateur chevronné de la fin du IIe s. av. n. è. tel qu’Eudoxe de Cyzique peut bien être celui qui a réduit les deux villes à une seule car en son temps Agde était justement au début de sa phase II, alors que les ruines d’Agde I étaient encore très visibles.

En définitive, n’est-il pas vraisemblable qu’Étienne de Byzance fasse allusion ici à Eudoxe de Cyzique plutôt qu’au Cnidien ?

Les mentions directes

Quelques textes conservés ajoutent des renseignements à l’histoire d’Agde.

Pseudo-Scymnos, Périple de la terre habitée, v. 201-209 (vers 120 av. n. è.).

« Après, en suivant la côte, se rencontrent les Ligures et les villes grecques que les Phocéens Massaliotes ont colonisées ; la première Empòrion, la deuxième Rhòde ; celle-ci fut fondée autrefois par les Rhodiens maîtres de la mer. Après eux, les Phocéens qui avaient fondé Marseille, allèrent en Ibérie et prirent possession d’Agàthe et de Rhodanousìa, que longe le grand fleuve Rhône. Après celle-ci, Marseille, très grande ville, colonie des Phocéens. Ils la fondèrent en Ligurie, dit-on, cent vingt ans avant la bataille de Salamine. Ainsi Timée relate la fondation. Après celle-ci suivent Tauroeis et la voisine ville d’Olbia et Antipolis, la dernière. ».

Dans l’Epitomé est cité Scymnos de Chios, alors que le texte dont nous disposons est attribué au Pseudo-Scymnos, auteur de la Périodos (Circuit de la terre) 24 où Agde est une ville des Phocéens de Marseille et non des seuls Phocéens comme dans l’Epitomé. La comparaison entre ce passage et sa mention par le(s) Byzantin(s) montre une large part d’interprétation…

L’information importante que livre ce texte est que les Phocéo-Massaliotes sont allés en Ibérie après les Rhodiens et ont alors « annexé » ou « tenu » Agathe et Rhodanousìa. Autrement dit, les Rhodiens occupaient la place avant les Massaliotes.

Béziers I, où de longue date a été reconnue une ville grecque 25, a été récemment identifiée avec la Rhòde archaïque d’Occident. Ce passage semble bien le conforter malgré le contexte géographique confus dû au fait que les deux côtés des Pyrénées ne sont pas séparés. Empòrion, Rhòde, Agàthe et Rhodanousìa semblent ainsi situées en Ligurie et, en même temps, dans une Ibérie en quelque sorte délimitée par le Rhône. Nous savons maintenant que Béziers I/Rhòde a été fondée dans le dernier quart du VIIe s. av. n. è. et qu’Agathe I était « rhodienne » en tant que fondation de la ville proche. Lorsque cette dernière a été abandonnée par les Grecs (vers 300 av. n. è.), Agathe I a connu grosso modo le même sort. Marseille l’a réactivée autour du milieu du IIe s. av. n. è. et est devenue Agathe II 26.

En somme, c’est exactement ce que décrit le Pseudo-Scymnos. Nous avons donc ici la première attestation textuelle, et la seule qui soit clairement exprimée, des deux phases d’Agde. Il est intéressant que cette dualité ait été confusément relevée également par Eudoxe et Philon (d’après l’Épitomé), puis encore par Claude Ptolémée (voir ci-après).

Ce passage, qui résume l’histoire d’Agde sur le long terme même si dans une formulation très concise, étonne dans une œuvre censée dépeindre l’époque où les Grecs sont entrés en contact avec les réalités décrites, du moins si l’on se fie aux sources (antérieures à 250 av. n. è.) auxquelles le Pseudo-Scymnos admet se référer. Il ne devrait donc pas y avoir d’allusions aux événements de son temps. Toutefois, au moins deux exceptions ont été relevées par la critique 27 : elles montrent que le Pseudo-Scymnos a bien inséré des informations plus récentes que 250 av. n. è. Il n’est pas surprenant que des renseignements contemporains du Pseudo-Scymnos figurent dans son œuvre puisqu’aux vv. 128-138 il précise avoir énormément voyagé pour en recueillir et il est normal qu’il en ait utilisé certains correspondant à son époque. Le cas d’Agde est une autre exception et, en définitive, les cas sont rares tant que de nouveaux arguments ne les mettent pas en évidence, mais ils existent. Celui-ci correspond parfaitement à des vicissitudes qui ont marqué plusieurs siècles de l’histoire d’Agde et dont la dernière (l’avènement de Marseille) n’est pas antérieure à la deuxième moitié du IIe s. av. n. è., époque qui correspond bien à celle de l’écriture de l’œuvre du Pseudo-Scymnos.

Strabon, Géographie (début du Ier s. de n. è.) :

IV, 1, 5 :

« Malgré cela, par leur valeur ils [les Massaliotes] furent plus tard assez puissants pour occuper quelques plaines de leurs environs grâce à cette force qui leur permit aussi de fonder des villes, qui furent des bastions, les unes du côté de l’Ibérie, contre les Ibères à qui ils ont transmis leur culte national de l’Artémis éphésienne et leur façon d’offrir des sacrifices selon le rite grec, Rhòe et Agàthe contre les barbares habitant le long du Rhône, Tauroention, Olbia, Antipolis et Nikaia contre le peuple des Salyens et contre les Ligures qui habitent les Alpes. »

Le passage décrit le système défensif de Marseille, qui a fondé des villes-remparts (ou bastions). Les sites d’Ibérie opposés aux Ibères ne sont pas nommés, alors qu’Agàthe et Rhòe sont associées contre les Barbares établis le long du Rhône.

Si Rhòe est Rhòde ibérique (Roses, E) ou Rhodanousìa sur le Rhône (localisée tantôt à Arles, tantôt à L’Argentière d’Espeyran, tantôt au Cailar) 28, comme le proposait la critique, on ne verrait pas comment Agde, distante du Rhône de 120/140 km selon le chemin choisi (et de 90 ou 120 km par bateau jusqu’au petit ou grand Rhône), aurait pu remplir sa fonction en complément de l’une ou de l’autre, même par la plus courte voie maritime, par exemple pour une protection concernant uniquement le trafic maritime. Confier la défense de l’espace à l’ouest du Rhône à ces deux seuls sites, si éloignés l’un de l’autre (que l’on associe Agde à Rhòde d’Ibérie ou à Rhodanousìa), paraît largement insuffisant et n’a pas un sens stratégique évident, surtout en regard du dispositif déployé à l’est du Rhône, où plusieurs implantations sont citées. D’un autre côté, si les termes Rhòe et Agàthe devaient former ensemble le nom complet d’Agde (traduit par « Agde au beau fleuve »), comme cela a été proposé 29, il faudrait alors retenir que seule Agde assurait la défense occidentale de Marseille, ce qui paraît encore plus insuffisant.

Or, Rhòe (nom incomplet que nous corrigeons en Rhòde) a été identifiée récemment avec Béziers I, qui a été abandonnée autour de 300 av. n. è., c’est-à-dire bien avant l’intervention massaliote le long de cette côte. Son implication dans la défense de Marseille aux côtés d’Agde est donc exclue et ne peut que résulter d’une confusion. Comme Strabon ne connaissait que la Rhòde ibérique, la seule encore localisée en son temps, il a sans doute cru devoir regrouper sur celle-ci les informations la concernant et aussi celles concernant la Rhòde biterroise, associée à Agde.

IV, 1, 6 :

« … le golfe Golfe Galatique ou Massaliotique. Ce golfe est double, car du milieu de l’arc qu’il dessine se détache le mont Sygion [Saint-Loup] qui, avec l’île voisine de Blascon [Brescou], divise le golfe en deux bassins. Le plus grand de ces deux bassins forme le golfe Galatique proprement dit, c’est celui où le Rhône décharge ses eaux, le plus petit est le golfe de Narbonne, qui s’étend jusqu’au mont Pyréné ».

« …De l’autre côté de Narbonne, ceux [les fleuves] qui descendent du Mont Cemmène [Cévennes] dans la mer, au delà de l’Atax [Aude], sont l’Orbis [Orb] et l’Arauris [Hérault]. Sur le cours du premier s’élève Baitera [Béziers], ville bien protégée et proche de Narbonne; sur le cours du second s’élève Agàthe, fondée par les Massaliotes. ».

Agde, fondation massaliote, est au bord de l’Hérault et l’environnement est correctement décrit.

Par assonance, le mont Sigion (ou Segion) a été souvent identifié avec Setion, le Mont Saint-Clair de Sète. Jean Grimal a récemment accumulé des arguments en faveur du Mont Saint-Loup d’Agde, l’amer indispensable pour localiser l’embouchure de l’Hérault depuis la haute mer et qui sépare en deux parties la côte du Midi 30.

Ces deux passages offrent la description de notre zone la plus ancienne et la plus précise qui soit parvenue jusqu’à nous et elle date de l’époque d’Auguste, même si Strabon a puisé dans des œuvres antérieures, perdues pour nous ou presque (p. ex. celle de Posidonios d’Apamée, 135-51 av. n. è.).

Pomponius Méla, Chorographie, II, 5, 80 (écrite autour des années 40 de n. è.).

« Plus loin, l’Arauris [Hérault] descend des Cévennes et coule près d’Agatha et l’Orbis près de Baeterras. ».

Cet auteur romain presque inconnu a livré un état à peu près complet de la géographie de son temps mais, à propos d’Agde, il consigne seulement qu’elle est au bord de l’Hérault et non loin de Béziers.

Pline, Histoire Naturelle, III, 32-33 (23-79 de n. è.).

« …Narbo Martius, colonie de la Xe légion, distante 12 000 pas de la mer. Fleuves : Araris [Hérault], Liria [Libron?]. Oppida rares pour le reste, au bord des étangs Agatha autrefois des Marseillais et la région des Volques Tectosages, où se trouvait autrefois Rhoda des Rhodiens, qui ont donné leur nom au fleuve Rhône le plus riche des Gaules… ».

Pline l’Ancien a exercé la charge de procurator de la Narbonnaise (haut fonctionnaire de l’administration impériale des provinces) et la connaissait donc bien. Pour autant, ses renseignements ne sont pas très explicites. L’identification de la Liria avec le Libron est hypothétique mais vraisemblable au vu du contexte. Pline rappelle qu’Agde dépendait auparavant de Marseille, la situe non loin de Narbonne, dans une zone d’étangs de l’aire des Volques Tectosages, là où se trouvait aussi la Rhoda des Rhodiens, c’est-à-dire Béziers I selon notre proposition.

L’indication de l’aire tectosage est couramment considérée erronée car Agde se trouverait dans le territoire arécomique 31 en vertu de la délimitation orientale sur l’Hérault de la « civilisation ibéro-languedocienne », établie autrefois sur la base de la supposée « frontière » entre les domaines d’Empòrion et de Marseille 32.

Ces anciennes notions n’ont plus de raison d’être dans le cadre historique qui prend forme progressivement depuis la découverte de la ville grecque de Béziers I, son identification avec la Rhòde archaïque, le rattachement d’Agàthe I à sa sphère et le renouvellement de la problématique concernant la « civilisation ibéro-languedocienne » en regard du faciès mobilier rhodo-biterrois. Le partage entre zones d’influence ne se faisait pas entre Empòrion et Marseille mais entre celle-ci et Béziers I/Rhòde. L’Hérault n’a pas joué le rôle de « frontière » qu’on lui a souvent attribué car celle-ci était représentée de manière souple et sans doute variable par le delta du Rhône, dans son acception large. En revanche, plus tard, l’espace entre Orb et Hérault a pu marquer plus ou moins nettement la séparation entre le domaine de Marseille et l’aire romanisée autour de la première colonie de Narbonne 33.

Claude Ptolémée, Géographie, II, X (mort autour de 168 de n. è.) :

« Le côté du midi est limité par ce qui reste du mont Pyréné, à partir de l’Aquitaine jusqu’au sommet qui se projette dans notre mer et sur lequel est le temple d’Aphrodite, puis par la mer gauloise jusqu’à l’embouchure du Var, et la côte se dessine ainsi :

Après l’Aphrodisium : 20° 20’ 42° 20’
Embouchure du fleuve Illiberis : 21° 42° 40’
Embouchure du fleuve Ruscino : 21° 15’ 42° 45’
Embouchure du fleuve Atax : 21° 30’ 42° 45’
Embouchure du fleuve Orobis : 21° 45’ 42° 45’
Embouchure du fleuve Arauris : 22° 42° 50’
La ville d’Agàthe : 22° 15’ 42° 50’

…Les îles situées au-dessous de la Narbonnaise sont Agàthe avec une ville du même nom, dont la position est :

22° 30’ 42° 10’
….. et après elle Blasco : 22° 30’ 42° 20’

Traité de géographie qui a fait autorité depuis la Renaissance, lors de la refondation de la discipline, ce monument du savoir gréco-romain pose problème pour Agde, qui y figure pratiquement trois fois, avec des coordonnées deux fois différentes : d’ouest en est, on la trouve en tant que ville après l’embouchure de l’Hérault, puis en tant qu’île à l’ouest de celle de Brescou et enfin en tant que siège d’une ville sur cette île. C’est le seul cas qui présente une telle configuration. Comme il n’y a jamais eu qu’une seule Agde, il ne peut s’agir que d’une erreur et on se demande comment elle s’est produite. Ptolémée a dû trouver des renseignements qu’il a regroupés indûment, mais le fait est qu’aucun autre texte ne place Agde sur une île. A-t-elle pu l’être à un moment donné ? Le paysage était-il très différent de l’actuel et de celui décrit par Strabon ou Pline ? La dualité d’Agde est-elle géographique ou a-t-elle un autre sens ?

Les chercheurs ont surtout questionné l’environnement car l’Hérault a pu avoir, outre l’actuel, un bras oriental faisant d’Agde une île 34. D’un autre côté, les étangs et marais étaient sans doute plus étendus dans l’Antiquité et la butte d’Agde aurait pu être une île à certains moments de l’année, notamment suite aux inondations périodiques. On a proposé aussi que l’île soit en fait la montagne de Sète 35.

Il reste qu’à l’époque de Ptolémée Agde n’était plus en activité depuis environ un siècle et cela peut expliquer la confusion du Géographe. Il n’avait manifestement pas d’informations de son propre temps et a donc regroupé des descriptions différentes aux coordonnées différentes mais proches entre elles tirées d’auteurs antérieurs.

Aucune hypothèse environnementale n’expliquant les deux villes, une alternative pourrait être qu’il s’agisse une fois de plus non pas de deux lieux différents mais du lointain, mal placé et confus souvenir d’Agàthe I qui a précédé Agàthe II. Avons-nous ici un indice supplémentaire des deux phases de la ville comme chez les auteurs ci-dessus ?

Avienus, Ora Maritima, v. 552-614 (IVe s. de n. è.) :

« …Non loin d’eux le Thyrius roule d’une hauteur […] le Cinorus s’avance (ou : le défilé du Cinorus)… Jamais la mer n’y soulève ses vastes flots, toujours pèse un calme d’Alcyon. Le sommet de ce rocher se détache de cette région au promontoire que j’ai dit s’appeler Candidus. À côté se trouve l’île Blascon et la terre montre hors de l’eau une forme arrondie. Sur le continent et entre les têtes de caps qui s’élèvent auprès, se déploie encore une plage sablonneuse ; on voit s’étendre des rivages sans habitants. Puis le mont Setius se dresse avec son haut sommet garni de pins… ».

Ce passage est séparé de celui concernant la zone de Béziers par une lacune. L’identification du Thyrius (fleuve Libron ou Hérault ? ; une colline ?), du Cinorus (une hauteur ? de couleur « gris cendré » ? Mont Saint-Loup d’Agde ? Cévennes ?), et du promontoire Candidus (Blanc, lequel ?), a donné lieu à des conjectures restées telles car ces noms ne se trouvent dans aucun autre texte et aussi parce que la description est incomplète. Aussi, seule l’île Blascon (Brescou) et le mont Setius (Mont Saint-Clair de Sète) situent la zone d’Agde, mais la ville n’est pas signalée et cette aire est dite inhabitée.

Ce témoignage atypique a une certaine importance car le poème est crédité de sources « très anciennes ».

Rufus Festus Avienus est le traducteur et paraphraseur d’ouvrages grecs ainsi que l’auteur de poèmes. Son Ora Maritima, conservé seulement en partie et duquel on n’a aucun manuscrit mais l’édition imprimée à la fin du XVe s., est un poème géographique décrivant la côte méditerranéenne dans le style des périples grecs anciens. L’auteur n’a pas voulu écrire un texte utile pour la navigation, la géographie ou l’histoire, mais un essai dans le style des Anciens dédié à Probus et à la demande de ce jeune et cher ami. Il s’agit donc essentiellement d’un exercice académique et rien n’autorise à croire qu’il ait une absolue valeur historique. Si des sources « très anciennes » (de la fin du VIe à la fin du IVe s. av. n. è.) sont effectivement citées dans l’introduction, Aviénus admet avoir tenu compte de Salluste (86-35/34 av. n. è) dont l’œuvre historique est en grande partie perdue.

Le but de l’Ora Maritima et la forme poétique choisie suffiraient à expliquer les nombreuses difficultés que soulève ce texte, les incohérences et anachronismes, les noms qu’Aviénus est le seul à utiliser, la modification de bon nombre des autres et, globalement, l’impossibilité d’attribuer l’œuvre à une époque précise. Tout en admettant que des renseignements tardifs ont été insérés, la critique a négligé cet aspect et, en revanche, s’est acharnée à tenter d’en valider les perspectives historiques, l’ancienneté des sources, des noms et des contextes, jusqu’à supposer qu’il s’agisse de la paraphrase d’une œuvre grecque volontairement non signalée et à laquelle il n’est jamais fait allusion. L’hypothèse a été poussée jusqu’à identifier le texte en toile de fond : un périple maritime du VIe s. av. n. è., et pourquoi pas celui de Pythéas, un Massaliote qui a exploré les côtes septentrionales du continent vers la fin du IVe s. av. n. è. – suppose-t-on – dont l’exploit est entouré de légendes et hypothèses et que Strabon (I, 4, 2-5 ; II, 5, 8 et 43) pensait être une affabulation. Son œuvre est perdue mais elle a suscité une très vaste bibliographie par le biais des auteurs anciens qui l’ont citée.

L’idée du périple caché derrière l’Ora Maritima n’a pas résolu les problèmes mais n’a pas été mise en doute et, aussi dépourvue de fondement qu’elle soit, elle s’est imposée en passant d’une publication à l’autre jusqu’à devenir un fait incontournable, ce qui est regrettable 36.

Pour le passage qui nous intéresse, nous avons vu que l’île Blascon est mentionnée pour la première fois par Strabon, qui a pu se référer à des auteurs plus anciens mais non nécessairement antérieurs aux IIe-Ier s. av. n. è. De plus, Aviénus décrit la basse vallée de l’Hérault et la bande côtière comme inhabitées et nous savons, d’une part, que cette aire n’était pas déserte entre le VIIe s. et la du fin VIe s., c’est-à-dire avant la fondation de la ville et que, d’autre part, la ville a connu deux périodes d’abandon : l’une entre le début du IIIe et le milieu du IIe s. av. n. è. (qui a concerné aussi une bande côtière très vaste 37) et l’autre entre le Ier et le Ve s. de n. è. Mais, dans cette dernière période, les villas romaines de la cité de Béziers ponctuaient une campagne qui n’était pas vide 38. En d’autres termes, comme pour d’autres zones du Midi, Aviénus n’a pas eu recours à une source « très ancienne » 39 : l’hypothèse la plus vraisemblable est qu’il s’agisse – au mieux – d’une œuvre du IIIe ou IIe s. av. n. è., ou relatant cette époque, qui est celle qui semble correspondre le mieux.

Quant à savoir si le poème est l’œuvre d’Aviénus ou celle d’un érudit bien plus récent, les recherches de P. Casado 40 semblent orienter vers cette dernière hypothèse.

Vibius Sequester, Des fleuves, sources, lacs, forêts, marais, montagnes, peuples mentionnés par les poètes (IVe ou Ve s. de n. è.) :

« Dans le Golfe des Marseillais, en second vient la ville d’Agatha »

Auteur d’un lexique géographique composé de listes distinctes de lieux et peuples classés par ordre alphabétique pour l’explication des textes poétiques latins (notamment de Virgile, Ovide, Lucain, Silius Italicus) aux élèves de son fils, Vibius Sequester ne précise pas d’où proviennent les noms figurant dans ses listes, qui sont d’ailleurs tirés aussi d’œuvres d’exégèse 41. La mention d’Agde se trouve dans la liste des fleuves, quoi que, curieusement, sous le vocable de Cyrta (golfe). Il y est en effet question du « Golfe des Marseillais » (Golfe du Lion) où est située la ville. La phrase est énigmatique : « en second » par rapport à quoi ?… à Marseille ?

On peut tout au moins en déduire qu’un poète a fait référence à notre ville ou que le commentateur d’un poème l’a fait.

Conclusions

Grâce aux données acquises par les fouilles archéologiques, la compréhension des sources textuelles sur Agde s’enrichit d’aspects qui, jusques là, ne pouvaient que passer plus ou moins inaperçus.

Notamment, les informations tirées d’œuvres perdues citées dans l’Épitomé des Ethniques d’Étienne de Byzance sont manifestement moins anciennes et surtout moins sûres que ce que l’on a pu croire. Des erreurs sont apparues suite aux nombreux remaniements qu’ont subis nos textes : les renseignements sont passés d’une œuvre à l’autre et non nécessairement de façon précise ; ils ont été abrégés, diversement compilés, interpolés, assemblés à partir de multiples documents ; les manuscrits ont fait l’objet d’innombrables copies qui sont autant de possibilités d’imperfections plus ou moins importantes. Elles sont restées indétectables jusqu’à quand des indications issues d’autres domaines que la littérature ancienne ont permis de les mettre en évidence.

Par exemple, la transmission indirecte est très évidente pour la mention de Timosthène, mais aussi pour celle de Scymnos. D’un autre côté, l’identification de certains auteurs est sujette à caution. C’est le cas d’Eudoxe, qui est le Cnidien pour les exégètes contemporains, mais qui peut être – selon notre hypothèse et, nous semble-t-il, avec une plus grande vraisemblance – le marin de Cyzique, bien plus récent que le premier.

La critique a souligné l’absence de l’œuvre de Claude Ptolémée dans notre contexte, par ailleurs très rarement citée dans l’Épitomé et essentiellement par l’intermédiaire d’autres textes 42. Il est plus étonnant que Strabon ne figure pas non plus alors qu’il est fréquemment cité dans l’Épitomé, qu’il a mentionné Agde plusieurs fois et donné la description géographique la plus précise qui nous soit parvenue de son emplacement et de son environnement.

De l’analyse du passage de l’Épitomé, il découle que la source la plus ancienne donnant quelques informations sur notre ville est l’œuvre du Pseudo-Skymnos, de la fin du IIe s. av. n. è., qui est la seule à mentionner les Rhodiens avant les Massaliotes. C’est toutefois Strabon, au début du Ier s. de n. è. et donc déjà d’époque romaine, qui la situe au bord de l’Hérault. Il est donc le premier auteur et, en fin de compte, le seul à décrire correctement la géographie des lieux.

En revanche, le témoignage d’Aviénus, toujours considéré comme « très ancien » mais qui ne l’est sans doute pas, permet de repérer la zone d’Agde mais la ville n’est pas mentionnée. Son texte reste inutilisable à cause d’une lacune et aussi parce que les éléments du paysage sont affublés de noms ne se retrouvant nulle part ailleurs et vraisemblablement inventés.

L’ensemble des sources permet d’affirmer que le nom de la ville grecque était indiscutablement Agàthe. Les transcriptions apposant l’accent sur la dernière voyelle sont à proscrire, quel que soit cet accent (p. ex. Agathè, Agathé, Agathê). Tous les auteurs anciens concordent sur ce point. L’unique cas où apparaît Agathé Tyché est particulièrement improbable et semble bien être dû à une confusion tardive.

Il faut donc, nous semble-t-il, abandonner le nom douteux pour ne garder que le plus sûr, et tout spécialement dans les travaux scientifiques.

Enfin, l’identité grecque d’Agde est clairement partagée entre Rhodiens et Massaliotes chez le Pseudo-Scymnos, qui – nous l’avons souligné – est la source la plus ancienne sur Agde et devait, à son tour, puiser dans des documents encore plus anciens.

Plusieurs autres auteurs pourraient bien faire également allusion à cette dualité dont la signification serait obscure si l’on n’admettait pas le brumeux souvenir de la double fondation de la ville désormais assurée par l’archéologie.

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UGOLINI, GOMEZ É. 2021 : UGOLINI, (Daniela), GOMEZ (Élian) – Béziers I. La première Rhòde d’Occident. Hommage à Christian Olive, Rome 2021.

UGOLINI, OLIVE 2009 : UGOLINI (Daniela), OLIVE (Christian) – Sites grecs, sites indigènes. Essai sur le fonctionnement des habitats de l’Hérault occidental (VIe-IVe s. av. J.-C.), in : I. Bertrand, A. Duval, J. Gomez de Soto, P. Maguer éd., Habitats et paysages ruraux en Gaule et regards sur d’autres régions du monde celtique. Actes du XXXIe colloque international de l’AFEAF (Chauvigny 2007), 215-243, Chauvigny 2009.

UGOLINI, PARDIES 2018 : UGOLINI (Daniela), PARDIES (Céline) – L’évolution topographique de l’habitat d’Agàthe (Agde, F) (VIe s. av. J.-C.-Ier s. apr. J.-C.), ArchClass, LXIX-n.s., II, 8, 2018, 167-196.

VALLOIS 1929 : VALLOIS (René) – Le temple délien d’Arsinoé Philadelphe ou d’Agathè Tychè, Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 73-1, 1929, 32-40.

NOTES

1. Jully 1977, 1978, 1983.

2. Nickels et al. 1981 ; Nickels 1989 ; Odyssée gauloise, passim.

3. Option encore suivie par Beylier et al. 2018 et Dedet, Schwaller 2018.

4. État de la recherche et bibliographie sur Agde et la basse vallée de l’Hérault jusqu’à 2001 : CAG 34/2. Sur le VIIe s. av. n. è., en dernier : Odyssée gauloise 2013 ; Ugolini, Gomez É. 2021. Sur Agde : Bénézet 2002 ; Dana 2017 ; Gomez É. 2010, 2013 ; Ugolini 2008, 2010, 2012, 2017 ; Ugolini, Arcelin, Bats 2010 ; Ugolini, Pardies 2018 ; Gomez C., Ugolini 2020 ; Dedet, Schwaller 2018. Sur Béziers et ses relations avec Agde, en dernier : Ugolini 2018 ; Gomez É., Ugolini 2020 a et b ; Ugolini, Gomez É. 2021.

5. Bouiron 2014, 93.

6. Bouiron 2014, 241.

7. Bouiron 2014, 241. Strabon (IV, 6, 3) a pourtant essayé de circonscrire les Ligyens et des Celtes, voire des Celto-Ligyens : Bats 2003.

8. Bouiron 2014, 190-191, 196-197, 918-919.

9. Pour Desanges 2004 il dériverait « principalement » de Timosthène ; pour Diller 1952, 105, 149-151, du Périple de Ménippe de Pergame (époque augustéenne), presque entièrement perdu.

10. Arnaud 2020.

11. Foucher 1964 ; Gonzàlez-Ponce 1995, 69-71 ; Arnaud 2020 ; avec un lexique parfois byzantin, du moins dans le manuscrit médiéval parvenu : Rougé 1978, 72.

12. Allègre 1889.

13. Dimopoulou-Piliouni 2012.

14. Leers 2010, 26-27.

15. Arsinoé II (vers 316-270/268 av. n. è.) : fille de Ptolémée I d’Égypte, sœur et épouse de Ptolémée II Philadelphe. Bérénice II (266/267-221 av. n. è.) : fille de Magas, roi/gouverneur de Cyrène, épouse de Ptolémée III Évergète.

16. Vallois 1929. Pour l’association entre ces reines et la déesse : Grabowski 2014, 124.

17. Dimopoulou-Piliouni 2012.

18. Aujourd’hui Ahtopol (Bulgarie) : de Boer 2005.

19. Nous n’avons trouvé aucune information sur l’Agàthe lycienne.

20. Bouiron 2014, 196-200.

21. Bouiron 2014, 242, avance la possibilité que Philon ait repris Eudoxe de Cnide mais que la phrase originelle de Philon était différente et suggère la formulation : « Peut-être est-ce la même que celle d’Eudoxe ».

22. Bouiron 2014, 242-244.

23. Bouiron 2014, Tab. XL, 978.

24. Marcotte 2000 suppose que le Pseudo-Scymnos soit Apollodore d’Athènes (IIe s. av. n. è.) ; Bouiron 2014, 917, concorde ; Bravo 2009, 1-29, s’y oppose mais admet que certaines parties sont tirées de l’œuvre de cet Apollodore.

25. Ugolini, Olive 1991.

26. Ugolini 2018 ; Ugolini, Pardies 2018 ; Gomez É., Ugolini 2020 a ; Ugolini, Gomez É. 2021.

27. Au V. 233 et au F. 32 : Marcotte 2000, 5-7 et 47-49.

28. Comptant sur les supposées erreurs de Pline, plusieurs localisations dans la basse vallée du Rhône ont été proposées pour Rhòe, qui serait alors Rhodanousìa. Sur ces propositions et le nom de Rhòe : état de la question Ugolini, Gomez É. 2021.

29. Thollard 2009, 231-233.

30. Grimal 2018. Lasserre 1966 et Thollard 2009 avaient aussi exprimé leur préférence pour le Mont Saint-Loup.

31. P. ex., Thollard 2009.

32. P. ex. Garcia 1993.

33. Ugolini 2005 ; Ugolini, Gomez É. 2021.

34. Notamment Adgé 1995. Les recherches en cours de B. Devillers permettront peut-être des avancées sur l’environnement.

35. Grimal 2018, 4.

36. Depuis Müllenhoff 1870, la bibliographie véhiculant l’idée du périple caché est très importante et c’est le grand succès rencontré par l’édition de l’Ora Maritima par Schulten 1922 qui l’a largement diffusée et en quelque sorte consacrée.

37. Ugolini, Olive 2009 ; Gomez É., Ugolini 2020.

38. Voir dans CAG 34/2 les communes d’Agde et limitrophes.

39. P. ex., pour Béziers : Gomez É., Ugolini 2020.

40. Casado 2022.

41. Gelsomino 1967.

42. Bouiron 2014, 186.