L'expression artistique de la dévotion privée de quelques magistrats montpelliérains. L'exemple d'Antoine de Barbeirac ( ? - 1765)

L’expression artistique de la dévotion privée
de quelques magistrats montpelliérains. L’exemple d’Antoine de Barbeirac

* Docteur en Histoire de l’Art moderne

Le présent article est extrait de notre thèse d’Histoire de l’Art traitant de la dévotion privée des magistrats de Montpellier à l’époque moderne. Ce travail universitaire proposait de dresser un profil type de cette élite d’après la production artistique du moment, les collections et les biens trouvés dans les fonds d’archives de la ville et du département.

Le présent article est extrait de notre thèse d’Histoire de l’Art 1 traitant de la dévotion privée des magistrats de Montpellier à l’époque moderne. Ce travail universitaire proposait de dresser un profil type de cette élite d’après la production artistique du moment, les collections et les biens trouvés dans les fonds d’archives de la ville et du département.

La consultation des documents du Clergé (série G des Archives départementales de l’Hérault), des registres de réception des confréries (série 5 E) et des dénombrements (série BB) a permis l’identification de certains acteurs de la dévotion tels que les familles de Serres 2, de Belleval 3, Deydé 4 et du Vidal 5. Des actes notariés (série 2 E) et des papiers de famille ont permis, quant à eux, d’aborder le thème dans sa dimension patrimoniale ; les premiers avec les problèmes de propriété et de transmission qui lui sont propres, comme chez les Beaulac 6 et les Campan 7, les seconds précisant les orientations confessionnelles de certaines familles telles que les Crouset 8 et les Salze 9. Enfin, un certain nombre d’autres pièces d’actes notariés et des Biens nationaux (série N et Q) ainsi que des Archives dites privées (J) ont révélé une dimension économique de la dévotion par les dépenses qui lui étaient réservées (dons, achat d’objets pieux) 10, par leur estimation et leur vente par des professionnels 11 jusqu’à leur acquisition par des particuliers 12. Le caractère lacunaire des sources, auquel s’ajoute le phénomène de déchristianisation de la période, a rendu le travail d’interprétation difficile pour cette démarche, inédite dans la discipline. En effet, il n’existe, à ce jour, aucune étude consacrée à la dévotion privée en Histoire de l’Art, si ce n’est son évocation en pendant à sa manifestation publique, trouvée majoritairement dans des biographies d’artistes ou de collectionneurs

Lorsque le sujet est enfin abordé, seule l’iconographie est privilégiée comme nous le montre encore l’historiographie la plus récente 13. Les théories sur l’art religieux de Frédéric Cousinié sont les seules qui ont pris en compte à la fois les aspects publics et privés de la dévotion 14. Quant à notre étude qui se voulait plus complète, nous avons dû y intégrer tous les autres éléments tenus, jusque-là, à l’écart : les lieux (coins de dévotion, oratoires et chapelles domestiques), le mobilier (prie-Dieu, bénitiers, emblèmes, chapelets et reliquaires) et les livres. Aborder cette architecture et cette production artistique si particulière interpelle sur la fabrication, les conditions d’acquisition et la véritable place accordée à ces objets. Ce thème oscille sans arrêt entre les frontières du monde de l’art et de l’artisanat, celles de la collection et de la décoration. Seule, l’ethnologue Émilie Notteghem 15 s’est intéressée à la place qu’occupaient ces objets dans la mémoire, l’esthétique et la culture collective pour conclure sur leur lente et certaine désacralisation. On trouve ce même phénomène dans les écrits d’historiens tels que Jacques Michaud 16, Pierre Serres 17 ou Pierre Vialles 18, lesquels ont largement développé la part publique et officielle de la dévotion chez les magistrats montpelliérains. Apparue comme homogène et conforme aux normes d’alors, elle a révélé des disparités dès lors qu’elle a été abordée dans sa partie privée.

En effet, il fallait compter sur la présence, plus ou moins forte, d’éléments nécessaires à une pratique pieuse, laquelle différait selon les individus. Elle révélait leur appartenance confessionnelle et indiquait un certain degré d’implication de leur part. Une typologie de la piété individuelle a pu être établie d’après ce principe et selon les fonctions de chacun de ces éléments : à une dévotion expressive, donc extériorisée et visible, devaient correspondre des objets suffisamment nombreux sinon diversifiés (prie-Dieu, bénitiers, chapelets, reliquaires); à une dévotion spirituelle, donc plus intériorisée et discrète, devaient correspondre des objets orientés vers la méditation et l’éducation (œuvres à sujets religieux, livres et emblèmes comme les croix). Cependant, un compromis entre ces deux types d’expression restait possible pour le particulier à la recherche d’un certain équilibre. C’est à cette troisième tendance qu’Antoine de Barbeirac semblait appartenir.

Ce magistrat, dont le nom est tantôt orthographié de Barbeyrac, tantôt de Barbeirac dans son inventaire après décès 19, n’a jamais fait l’objet de publications 20. Bien que cet inventaire soit la seule source dont nous disposons pour le moment, elle contient suffisamment d’éléments biographiques pour en faire un portrait et servir de démonstration à notre propos. Par conséquent, certaines lacunes subsistent quant à l’état civil de notre personnage (date de naissance manquante, donc son âge à son décès), à son lieu de résidence au moment de l’établissement de l’acte, à la possession de certains biens (acte de propriété manquant), ou encore à l’origine d’objets mobiliers (achat ou héritage) pour ne citer que ces exemples.

Le personnage

Antoine de Barbeirac était le fils aîné d’une famille de cinq enfants, tous issus de l’union entre Antoine de Barbeirac (1693-1749), Président Trésorier Général de France, et Gabrielle Benoît de la Prunarède contractée le 10 février 1719 devant Me Bonnafoux, notaire à Béziers. Leur extrait de contrat de mariage était conservé dans un tiroir d’une tablette du cabinet de leur fils. L’année de la mort de son père, l’inventaire nous apprend qu’Antoine, encore mineur, a bénéficié d’un autre héritage, inattendu celui-là. En effet, il a fallu le consentement de son oncle, Charles de Barbeirac de Maureilhan, pour profiter de la fortune d’Antoine Sisobre, médecin consultant du roi. Il est écrit dans l’inventaire que celui-ci désignait le jeune homme comme son légataire universel dans son testament daté du 2 mars. Sa fortune grossie, Antoine de Barbeirac était prêt à s’installer dans la vie.

D’après un extrait en forme du contrat de mariage, trouvé dans son cabinet, il avait épousé, le 15 novembre 1751, Marie Anne Angélique Antoinette de Saint-Aurant, fille de Jean Claude de Saint-Aurant, seigneur de Casalis, conseiller à la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier, et de Marie Pujol de Beaufort, dont il eut cinq enfants, trois fils et deux filles. Charles Marie (1754-1834), Jean Joseph Martin (1756-1834) et Joseph Henry (1760-1832) étaient en pension dans un collège oratorien de Lyon 21. Il est à peu près sûr qu’ils y étaient encore lors du décès de leur père, l’année scolaire courant traditionnellement du 18 octobre aux environs du 20-25 août 22. Alors que la position des parents paraissait claire en matière d’éducation pour les garçons, elle n’était pas évidente en ce qui concernait leurs sœurs, Elisabeth Adélaïde et Marie Gabrielle 23.

Antoine de Barbeirac était à l’origine de la branche montpelliéraine des marquis de Saint-Maurice 24. C’est dans une boîte en fer blanc, rangée dans un tiroir d’une tablette située près d’une fenêtre de son cabinet, qu’ont été trouvées les lettres d’érection en marquisat de la terre de Saint-Maurice 25. Elles étaient datées du mois de mai 1753 et avaient été enregistrées en la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier les 22 août et 1er septembre de la même année. Le marquis était aussi désigné dans l’inventaire comme chevalier et seigneur de Saint-Aunés où il possédait un château. Des polices d’afferme montraient qu’il y avait placé Jean Hué, un fermier chargé des revenus du domaine. L’inventaire précisait que ce dernier avait bénéficié d’un premier contrat de six ans à compter du 29 septembre 1756, renouvelé en 1762 pour la même durée.

On n’en sait pas d’avantage sur le patrimoine d’Antoine de Barbeirac sinon qu’il s’est séparé d’une maison située en cette ville auprès d’un négociant nommé Sabatier. D’après un document trouvé dans les papiers de son cabinet, la transaction se montait à 22 000 £ et eut lieu devant Me Auteract le 24 mars 1753. Il est difficile de dire si cet épisode coïncidait avec des ennuis financiers passagers ou s’il s’agissait simplement d’une fructueuse affaire. Quant à la maison, elle pourrait être celle représentée sur le plan du Projet d’Alignement de rue dans le quartier de l’Oratoire prévu en 1728 26. (Fig. 1)

Plan du Projet d’Alignement de rue dans le quartier de l’Oratoire prévu en 1728
Fig. 1 - Plan du Projet d’Alignement de rue dans le quartier de l’Oratoire prévu en 1728

On y voit le nom de M. Barbeirac entre ceux de Mouton et d’Ugla. Le plan correspond au sixain Sainte-Foy, en bordure de l’Esplanade. La maison donnant sur l’ancienne rue de la Floccarié – aujourd’hui rue Jacques Cœur – et faisant face à la rue du Cardinal – aujourd’hui rue de la Loge est située dans l’île des Pénitents-Blancs. Grasset-Morel confirme bien la présence d’un Jean Mouton de la Clotte, écuyer, qui devint propriétaire de l’hôtel voisin dès le 23 juin 1727. Celui-ci l’aurait même fait refaire. Il est aussi confirmé que la maison qui nous intéresse, qualifiée de modeste par l’auteur, fut acquise par un certain Jean Sabatier à la même date et auprès du même notaire, mentionné par l’inventaire. Pas de prix cependant sinon que le négociant possédait encore la maison en 1788. En revanche, Grasset-Morel nous apprend que la maison aurait été apportée en dot par une certaine Marguerite Brueys, fille de David Brueys procureur du Roi en la Monnaie, à son époux Charles Barbeyrac, docteur en médecine à l’Université de Montpellier, qui n’est pas le Barbeirac qui nous préoccupe. L’auteur ne citant pas ses sources, on est en droit de se demander d’où il tire ces informations. Nul doute qu’il s’agit de l’oncle du marquis, celui-là même qui dut intervenir en sa faveur pour qu’il puisse toucher l’héritage de 1749 que mentionne l’acte.

A cela s’ajoute l’absence d’indices sur son train de vie et son environnement quotidien. L’inventaire mentionne bien la présence de livres de compte mais sans les décrire. Seule, une quittance de loyer montrait qu’il était locataire de son dernier logement. L’adresse y était indiquée : rue du Palais, paroisse Saint-Pierre à Montpellier. Délivrée par le président de Saint Martial, elle indiquait qu’Antoine Barbeirac avait réglé 500 £ de loyer pour une durée de six mois. Le récépissé datait du 3 février 1765. Décédé le 6 juillet, il ne laissait à sa famille le bénéfice du toit que pour un mois avant la prochaine échéance.

Deux ans avant sa mort, le marquis avait pris soin de rédiger son testament en la faveur de son fils aîné. Celui-ci étant encore mineur au moment du décès 27, sa mère nomma un curateur, un certain Jean Guillaume Durand, chargé de ses affaires 28. Selon l’ordonnance de 1747, il était prévu que le fils héritier, à la mort de son père, devait reverser à la veuve son augment dotal 29. Ayant connaissance de ce point de droit, ladite veuve avait pris ses précautions afin de ne pas léser son fils aîné sur sa part. En effet, dès le 30 avril 1757 (son fils n’avait alors que trois ans), elle établissait une déclaration, trouvée dans les papiers du cabinet de son mari, par laquelle elle le dispensait de ce dû contre le loyer d’un appartement qu’elle occupait chez lui. Cette disposition révélait-elle une séparation effective du couple après six ans de mariage ou une simple gestion éclairée des biens de la famille ? Aucun indice ne permet de tendre vers l’une ou l’autre interprétation.

Anne Marie Angélique Antoinette de Saint-Aurant, en digne fille de magistrat et bonne administratrice de la famille, était parfaitement au courant des procédures légales à suivre en cas de décès. Sans perdre une minute, elle n’hésitait pas à faire venir le notaire un dimanche afin de mettre les scellés sur les effets personnels de son mari, lequel était décédé la veille.

L’inventaire : un acte rédigé en deux temps

Gabriel Davranche est le notaire montpelliérain chargé de dresser l’inventaire après décès. Il s’est présenté le dimanche 7 juillet, à huit heures du matin, au domicile de la famille. Étaient présents la veuve, Me Léotard, procureur en la Cour des Comptes, Aides et Finances de la ville, Me Benezech et un certain Jacques Granier, habitant de Montpellier. En leur présence, le notaire a apposé des scellés de cire rouge et des bandes de papier blanc sur la porte du cabinet du défunt ainsi que sur ses meubles. Ce n’est qu’après avoir fait signer les témoins et reporté l’inventaire au jeudi 11 juillet que le notaire est reparti, toutes les clefs en sa possession. Il lui faudra cinq jours pour établir l’inventaire après décès : quatre pour la maison de Montpellier, un seul pour la propriété de Saint-Aunés.

C’est dans la demeure urbaine que tout ce qui touche à notre propos a été trouvé. La rédaction de l’acte a révélé des horaires de travail réguliers. Le notaire commençait sa journée à huit heures ou neuf heures du matin jusqu’à une heure de déjeuner non précisée. Il reprenait toujours à quinze heures pour terminer en soirée. « L’heure tarde » (sic) est une indication permettant de comprendre que le travail devait se poursuivre tant qu’il faisait jour. Quant à la répartition journalière, elle est apparue plus disparate. En effet, l’inventaire ayant commencé le jeudi 11 juillet n’a pas pu se poursuivre le lendemain et a été reporté au lundi suivant. A partir de là, il s’est déroulé sans discontinuité jusqu’au vendredi 19 juillet. Cette coupure trouve son explication dans le fait qu’il a fallu nommer des experts pour la prisée des meubles, ce qui a demandé un certain temps. Le samedi 13 juillet, le Lieutenant principal Fermaud de la Banquière nommait, pour l’estimation du mobilier, le tapissier François Laspaneze dit Toulouse, et pour celle des bijoux et de la vaisselle, l’orfèvre Marc Bazille.

Cependant, aucune estimation totale ne figure dans l’acte, détail d’autant plus frustrant que les objets, intéressant notre propos, ont une valeur réelle 30. Aucune étude d’ordre économique n’est donc, de ce fait, envisageable. La fin de l’acte revêt un caractère des plus solennel puisque les témoins sont invités, un par un, à jurer qu’il n’y a plus rien à inventorier dans la maison « la main levée à Dieu ».

La maison rue du Palais

Le notaire a passé les deux premiers jours à dresser l’inventaire du cabinet et de la chambre du défunt et a entièrement consacré le troisième jour à la bibliothèque. Ce n’est que le dernier jour qu’il s’est rendu dans les autres étages (les premier et troisième), les combles et les caves. S’il est possible d’avoir une idée sur l’agencement général de la maison, il n’est est pas de même pour l’aspect et l’aménagement des pièces. Aucune dimension, aucune description des lieux mais des énumérations sommaires de leur contenu. Aussi, est-il impossible de se figurer l’emplacement du mobilier et des objets. Quant à leur fonction, on la devine à peine selon le contexte. Les indications comme « posé au sol » ou « accroché au mur », trop rarement présentes dans ce genre d’acte, s’avèreraient pourtant bien utiles. Elles sont absentes ici.

L’inventaire ne révèle rien non plus sur l’aspect extérieur de la demeure sinon que la façade donnait sur la rue du Palais et l’arrière sur une cour. L’ouvrage de Grasset-Morel signale que le président Fages de Saint-Martial possédait un immeuble sur l’île Bouissonade, dépendance de sa maison voisine située sur l’île Fages, cette dernière portant le nom de Brignon Roux et dont il n’y a aucune description 31. Il est certain que le marquis et sa famille vivaient là, les deux îles donnant sur la rue du Palais, actuellement rue du Palais des Guilhem. L’auteur décrit l’île Fages comme cernée par cette dernière, la rue Pelleterie, la rue Basse – aujourd’hui rue Jean-Jacques Rousseau – et en partie par le Plan du Palais et la rue Coste Frège.

Quant à l’intérieur, il n’apparaît qu’à travers la progression du notaire, chargé de répertorier les biens du défunt et uniquement les siens. Par conséquent, l’acte n’offre qu’une vision partielle de l’intimité de la famille de Barbeirac. A sa lecture, on découvre que la maison comporte trois étages habitables et des combles aménagés, le tout reposant sur un sous-sol à plusieurs caves. La conception moderne de l’habitat, qui inclut la notion d’intimité se retrouve dans la répartition spatiale. Les pièces communes ou les pièces à vivre donnent sur l’avant de la maison alors que les pièces d’ordre privé se retrouvent à l’arrière.

Le premier étage est conforme à cette norme. La salle à manger, desservie latéralement par la cuisine, le salon et la « chambre des Officiers » donne sur la rue. Au contraire, une garde-robe et trois chambres, l’une desservie latéralement par une avant-chambre, une autre par un garde-meuble, ont vue sur la cour. Notons que le marquis a rendu l’âme dans l’une de ces chambres et qu’une autre était occupée par sa mère. Le second étage répondait aux mêmes critères. Il était réservé à la cellule familiale 32 puisqu’on y trouvait la chambre des enfants ainsi que les appartements du défunt. Peut-être, ce dernier a-t-il changé d’étage lorsqu’il était au plus mal ?

Les objets, révélateurs d’une piété et d’une personnalité

On ne trouvait, chez le marquis, qu’un seul objet religieux par pièce. Seuls, les espaces les plus intimes étaient concernés : les chambres, son cabinet et sa bibliothèque. Cette répartition particulière, réduite au strict minimum, révèle une personnalité discrète et pudique en la matière. Dans la chambre où est décédé Antoine de Barbeirac, un Christ en quadre doré garni de vieux velours noir apprécié vingt sols ornait probablement un des murs de la pièce, du moins le suppose-t-on. Peut-être se signait-on en entrant dans la chambre ?… Quoi qu’il en soit, son caractère usé et de peu de valeur témoigne bien de son ancienneté. Il est certain qu’il appartenait déjà à la génération précédente. Quant au choix du velours noir, couleur du deuil, il révélait sans doute une préoccupation de la mort. Sa présence dans la pièce ajoutait à l’affliction du moment où le mourant soucieux de sa « bonne mort », s’apprêtait à partir, gardant l’image rassurante du Christ l’accompagnant dans son dernier voyage. Un grand nombre de Christ sur velours noir se retrouvaient, en effet, chez les particuliers, plus précisément chez les magistrats languedociens. Le mode de diffusion de ces objets, fabriqués en série dans les couvents ou autres ateliers, reste pour nous encore imprécis. Et pour ajouter à notre interprétation, cette chambre meublée et peu ornée était peut-être réservée à cette seule fin : mourir. Hormis le Christ sur fond noir, deux tableaux à cadre dorés étaient accrochés sur les autres murs de la pièce. Les sujets ne sont pas précisés. On y trouvait également un bois de lit « à la duchesse » avec son châssis ferré. Sur ledit lit y ayant trois matelas, un lit de plume, son traversin, quatre oreillers, quatre couvertures indienne servant de tapisserie doublée en plein, six fauteuils couvert de toile Dalu33 de bois de noyer, deux bras de cheminée, un feu leton avec sa pele et pincettes, deux rideaux de fenêtre encadrés de Karenka34, une petite table à pied de biche bois blanc, quatre chandeliers similer avec ses porte mouchette, une petite comode bois de saule a deux tiroirs et sa garniture leton dessus de marbre blanc et un trumeau entre les deux fenêtres à trois glaces avec sa moulure dorée autour

Un second objet semble confirmer la thèse de la préoccupation d’Antoine de Barbeirac envers les fins dernières : un Ecce Homo en cire dans une boîte en bois blanc, peint, éclairé par trois verres, d’une valeur de six livres, conservé dans son cabinet et signalé en même temps qu’une paire de vieux pistolets d’arson appréciée six livres. Ces deux objets faisaient office de séparation entre les livres de la bibliothèque et un nombre important de registres et de papiers. Probablement posés sur une étagère de la bibliothèque, ils devaient être simplement offerts au regard, avec une fonction seulement ornementale. Peut-on penser cependant qu’il pouvait y avoir plus qu’une simple contemplation de la part de leur propriétaire dont l’esprit de conservation ou le goût pour l’ancien était plus qu’indéniable ? Tout le problème est de savoir si le marquis le possédait par sa famille ou s’il en avait fait l’acquisition, ce qui révélerait chez lui ce goût pour la méditation. En tous les cas, la fonction de piété d’un objet n’est pas incompatible avec celle de l’objet de curiosité. Sa possession témoigne du succès du sujet qui perdure depuis le XVIIème siècle 35 et l’on retrouve nombre de ces représentations dans beaucoup d’intérieurs domestiques, dont ceux des magistrats, révélant ainsi une piété plutôt démonstrative.

Les livres qui composaient la bibliothèque du marquis atténuent cet aspect personnel de sa piété. Quatre-vingt-cinq titres ont été recensés : une bibliothèque que les spécialistes qualifieraient de « grande » 36. Elle révèle plus une curiosité intellectuelle que des préoccupations religieuses. Les titres montrent un sens de l’éclectisme et de l’actualité de la part du marquis. Ses goûts touchent autant à l’Histoire qu’aux autres disciplines. Ainsi, trouve-t-on sur les étagères, dans un format in 12, Le Siècle de Louis XIV par M. de Voltaire, en deux volumes, les Poèmes de Thomas Corneille, en cinq volumes, et les Fables de la Fontaine, en cinq volumes. Divers essais sont également présents avec L’Esprit des lois de Montesquieu. De nombreux dictionnaires sont à remarquer comme le Dictionnaire des arts en deux volumes in folio. A côté de cela, aucun ouvrage de dévotion ni guide spirituel. Deux bibles seulement : l’une de Sacy en trois volumes in 12, l’autre de Desmarets en deux volumes in folio. Deux bibles sujettes à controverse. La première n’a d’intérêt que parce qu’elle découle de la pensée janséniste, réputée rigoriste et austère. Deux adjectifs qui, curieusement, sont assimilables au décor intérieur, réduit au minimum, de la demeure du marquis. Il est dommage que les dates de publication ne soient pas indiquées. Cela nous aurait permis de savoir laquelle de ces éditions était en sa possession, celle de la fin du XVIIème siècle, publiée en plusieurs volumes entre 1672 et 1693, ou celle de Paris, datée de 1701. La seconde, celle des premiers réformés, a fait l’objet d’une saisie à Paris entre 1678 et 1701. Sa présence s’explique peut-être par ce fait historique. Cependant, un ouvrage montre l’attachement de Barbeirac au patrimoine familial avec les Sermons de Tillodonte traduit par Jean Barbeirac, son aïeul. Deux autres titres font apparaître le marquis comme un homme averti des questions religieuses avec l’Histoire du fanatisme, l’Eucharistie de l’ancienne Église par Robertin et le Père Lafitan jésuite.

Le contenu de la chambre du marquis, attenante à son cabinet, cerne son profil. La pièce est sobrement meublée mais confortable. Il n’y a pas moins de dix fauteuils, la plupart qualifiés de « vieux », et son lit, placé dans une alcôve, donne à l’ensemble un caractère intime et douillet. Une fois encore, le détail des informations concernant l’ornementation fait défaut mais on devine la présence de deux tableaux sur les murs. Le premier, de grand format, avec un cadre doré, représentant une Vierge, était estimé à quinze livres ; le second, un saint François peint sur bois, à six livres seulement. Le support de cette œuvre laisse penser qu’elle est ancienne, peut-être de la Renaissance. Ajoutés aux images du Christ déjà rencontrées, ces deux sujets font entrer définitivement notre personnage dans les statistiques de la dévotion privée des magistrats languedociens, les figures de la Vierge arrivant largement en tête, suivies par les représentations du Christ et enfin celles des saints dont François d’Assise, fréquemment présent dans les intérieurs domestiques pour son comportement exemplaire, sa piété, son humilité, son sens de la fraternité.

En conclusion, nous dirons que le cas d’Antoine de Barbeirac est représentatif de son époque. Il apparaît comme un homme attaché aux valeurs du passé, soucieux de la préservation d’un patrimoine familial : l’Ecce Homo de son cabinet, le saint François sur bois dans sa chambre et le Christ sur velours noir dans la chambre mortuaire en témoignent. Dans le domaine intellectuel, il offre le visage d’un homme érudit, curieux des questions religieuses mais émancipé des contraintes des supports traditionnels de la dévotion méditative. Cette liberté d’esprit est le signe évident d’une disparition progressive de la piété domestique.

Le cadre de vie et la nature des objets définissent le type de la dévotion correspondant au personnage. Ici, il s’agit d’un compromis entre une gestuelle limitée (signe de croix et génuflexion supposés devant les emblèmes religieux) et une intériorisation de la piété dans la privatisation de l’espace. Cette pudeur et cette discrétion de la pratique dévote fait de celle-ci une affaire personnelle et individuelle. L’inventaire lui-même témoigne de l’austérité du personnage et de sa demeure, créatrice d’une atmosphère particulière concentrée dans les parties les plus intimes de l’habitat et même les pièces dites de réception. En effet, la seule pièce ornée est l’avant-chambre du premier étage où sont exposés, avec une Cléopâtre, les portraits en pendants de ses parents et de son oncle Charles. Comme pour le reste de la maison, on y perçoit un certain poids des traditions et une ligne de conduite minimaliste, reflets de la personnalité du propriétaire.

Bibliographie

Imprimés

— Louis Ventre de ARTEFEUIL, seigneur de Touloubre, Histoire héroïque et universelle de la noblesse de Provence avec huit grandes cartes armoriales. Avignon, Imprimerie de la veuve Girard, Tome 1er, (1776), 1786, 1901.

— François-Alexandre Aubert de la CHESNAYE-DESBOIS, BADIER, Dictionnaire de la noblesse, contenant les généalogies, l’histoire & la chronologie des familles nobles de France, l’explication de leurs armes, & l’état des grandes terres du royaume… : On y a joint à ce dictionnaire le tableau généalogique, historique, des maisons souveraines de l’Europe, & une notice des familles étrangères, les plus anciennes, les plus nobles et les plus illustres. Paris, La Veuve Duchesne, Volume 1, (1770), 1771, 1775.

— Pierre CLERC, Dictionnaire de biographie héraultaise des origines à nos jours. Anciens diocèses de Montpellier-Maguelone, Béziers, Agde, Lodève et Saint-Pons – Montpellier. Montpellier, Librairie Pierre Clerc, Volume I, 2001.

— Frédéric COUSINIE, Le peintre chrétien. Théories de la peinture religieuse dans la France du XVIIe siècle – Paris. Paris, Esthétiques, L’Harmattan, 2000.

— GRASSET-MOREL, Montpellier. Ses sixains, ses îsles et ses rues. Ses faubourgs – Nîmes. Nîmes, C. Lacour, Rediviva, 1908 (1989). Images et méditations au XVIIe siècle. Rennes, Art & Société, Presses Universitaires de Rennes, 2007.

— Jean-Michel LENIAUD et Isabelle SAINT-MARTIN, Historiographie de l’histoire de l’art religieux en France à l’époque moderne et contemporaine. Bilan bibliographique (1975-2005) et perspectives. Turnhout, Bibliothèques de l’École des Hautes Études des Sciences religieuses, Brepols, 2005.

— Emmanuel LE ROY LADURIE, Histoire du Languedoc. Paris, Presses Universitaires de France, 1962 (2000).

— Pierre SERRES, Histoire de la Cour des Comptes, Aides et Finances de la ville de Montpellier, depuis son établissement et sa création. Montpellier, Félix Seguin, 1878.

— Pierre VIALLES, Études historiques sur la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier d’après ses archives privées. Montpellier, Firmin et Montane, 1921.

— Nicolas VITON DE SAINT-ALLAIS, Nobiliaire universel de France ou recueil général des généalogies historiques des maisons nobles de ce royaume. Paris, Bureau du nobiliaire universel de France, 1816.

Manuscrits

Archives départementales de l’Hérault

— C 1102/3/Montpellier. Quartier de l’Oratoire. Projet de l’alignement de rue dans le quartier de l’Oratoire. 1728.

— 2 E 57 751. Testament mystique de Madame de Boussairolles. 26 juin 1768.

— 2 E 61 161. Inventaire des meubles et effets de M. le président de Beaulac. 30 avril 1716.

— 2 E 62 320. Inventaire des meubles et effets délaissés par M. Antoinede Barbeirac, Marquis de St Maurice. 07 juillet 1765.

— 5 E 2. Confrérie de la Vraie Croix : A été reçu Messire Joseph de Belleval, conseiller du Roy en ses conseils, Président en la cour des comptes, aides et finances du Languedoc. 17 août 1755.- A été reçu Messire Charles Philippe Gabriel de Belleval chevalier conseiller du Roy en ses conseils, Président en la cour des comptes. 10 février 1771.- Hipolite, Charles et Gabriel Belleval, tous trois fils du frère Jean-Jacques Gaspard Belleval…, 10 juin 1880.

— G 1378. Extrait des clauses et fondations de la chapelle de St Joseph dans l’église cathédrale de Montpellier, tiré du testament de noble Jean Deydé, conseiller et sous-doyen en la cour des comptes, aides et finances de Montpellier. 4 mars 1686.

— 63 H 16. Dots et dossiers des religieuses. 1632-1788.

— 67 H 3. Religieuses, réceptions et dots. 1649-1787.

— 1 J 247. Vente aux enchères des biens de Jean-Baptiste de Lespine, conseiller à la cour des comptes, aides et finances de Montpellier. 07 octobre 1763.

— 1 J 368. Livre de raison de Claris. 1715-1734.

— 1 Q 476. Inventaire du mobilier de la veuve de Lépine. 30 octobre 1792.- Estimation des meubles et effets de Lépine. 17 septembre 1793.- Procès verbal de vente du mobilier de la veuve de Lépine, émigrée. 19-21 septembre 1793.

Archives municipales de Montpellier

— BB 335. Recensement de la population, 1680 : Sixain St Firmin, Isle de St Nicolas. C.R. Dans la maison de M. le conseiller du Vidal, lui, sa femme, cinq enfants, six domestiques.

— GG 43. Abjuration de Marguerite Bosc. Abjuration de François de Serres. Abjuration de Marguerite de Serres. 20 octobre 1685.

Travaux universitaires

— Stéphanie LEBEAU, La dévotion privée des parlementaires et des magistrats en Languedoc à l’époque moderne (1600-1789), dans son rapport avec les arts : architecture, iconographie, objets mobiliers, livres. Montpellier, Thèse de Doctorat d’Histoire de l’Art moderne sous la direction de Laure Pellicer, 2009.

— Jacques MICHAUD, Histoire de la compétence de la Cour des comptes, aides et finances de Montpellier. Montpellier, Mémoire en Droit sous la direction de M. Gouron, 1963.

— Émilie NOTTEGHEM, Parcours d’objets de dévotion : mémoire, esthétique, culture. Paris X, Thèse de Doctorat en Ethnologie sous la direction de Giordana Charuty, Volume I, 2007.

Sources Internet

— Grégoire BIGOT, Histoire du droit de la famille. Nantes, Cours de Licence 1, Université de Nantes, 2009. https://www.droit.univ-nantes.fr/

— Gabriel COMPEYRE, Oratoire. 1911. http://www.inrp.fr

Notes

 1.  Lebeau, 2009.

 2.  Arch. Mun. Montpellier, GG 43, 1685. Les membres de cette famille calviniste ont tous abjuré en octobre 1685, période marquée par des conversions en masse en vue d’une politique répressive. Soit une mère et ses deux enfants avec lesquels Olivier de Serres (1539- 1619), conseiller en la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier, a un lien de parenté direct mais qui reste à déterminer. Le Roy Ladurie, 1962 (2000), p. 66-67. Dans son Histoire du Languedoc, l’auteur mentionne l’abjuration d’Olivier de Serres mais son acte reste introuvable.

 3.  Arch. Dép. Hérault, 5 E 2, 1755, 1771 et 1804. La famille de Belleval est restée fidèle à la confrérie de la Vraie Croix sur trois générations : du Président Joseph Philibert (1711-1789), ses fils Jean Jacques Gaspard et Charles Philippe Gabriel, respectivement Président et conseiller, ses trois petits-fils Hipolite, Charles et Gabriel.

 4.  Arch. Dép. Hérault, G 1378, 1686. Le fervent conseiller Jean Deydé établit des clauses testamentaires afin d’obliger ses héritiers à tenir leurs devoirs religieux en entretenant la chapelle familiale Saint-Joseph en l’église cathédrale de Montpellier. A défaut, ces derniers verraient leur pension détournée au profit des pauvres de l’hôpital de la ville.

 5.  Arch. Mun. Montpellier, BB 335, 1680. Dans une période religieuse encore difficile, les dénombrements ont montré quelques couples mixtes dont les du Vidal font partie. Ici, c’est la femme du conseiller qui est protestante.

 6.  Arch. Dép. Hérault, 2 E 61 161, 1716. La veuve du Président de Beaulac dut réclamer ses effets personnels qui furent confondus avec ceux de son défunt mari, lors de l’inventaire. Parmi ces effets, deux tableaux de la Madeleine et un petit bénitier.

 7.  Arch. Dép. Hérault, 2 E 57 751, 1768. Dans son testament, Jeanne Marguerite Campan léguait à sa petite-fille ses livres de piété et d’Histoire sainte devant servir à une éducation chrétienne et raisonnable.

 8.  Arch. Dép. Hérault, 63 H 16, 1662 et 1771. L’ordre des Visitandines de Montpellier comptait deux filles de Crouset dans ses rangs : Marguerite et Antoinette, entrées respectivement en 1662 et 1711.

 9.  Arch. Dép. Hérault, 67 H 3, 1718 et 1729. Les Ursulines ont pu compter sur la fidélité de la famille Salze avec les entrées respectives de Marianne et de Marie en 1718 et 1729.

10. Arch. Dép. Hérault, 1 J 368, 1715-1734. On dispose d’un livre de raison appartenant au conseiller de Claris, lequel faisait état de ses dépenses réservées à ses obligations religieuses telles que son droit de chapelle (12 £), la rémunération de l’aumônier (10 £) et les messes (265 £ 12 s. 6 d.). Il pratiquait également la charité par des dons aux pauvres et aux malades (6 £), offrait deux livres du Père Bourdaloue à la Sœur de Sarret (8 £), ornait sa chapelle de Ganges par l’achat, entre autres choses, de burettes (1 s. 6 d.). Il est intéressant de noter que ses dépenses, sur une période de 19 ans, n’ont représenté que 1 % de ses comptes et qu’elles se sont amoindries à la fin de cette période.

11. Arch. dép. Hérault, 1 Q 476, 1792 et 1793. La veuve du conseiller de Lépine a fait l’objet d’un inventaire en 1792, puis d’une estimation de ses biens en 1793, par un tapissier nommé Galibert, avant leur mise en vente la même année.

12. Arch. Dép. Hérault, 1 J 247, 1763. Il n’est pas nécessaire d’attendre la période révolutionnaire pour les ventes aux enchères et noter l’intérêt de particuliers intéressés par le mobilier religieux. Un certain Michel désigné comme « citoyen » s’est offert deux prie-Dieu lors de la vente des effets du conseiller Jean-Baptiste de Lespine pour 6 £ 10 s et 8 £ 50. Le document ne précise pas les circonstances de cette vente (absence d’héritiers, liquidation de surendettement…) et n’indique pas davantage les motivations de l’acquéreur, ni même sa profession.

13. Leniaud, Saint-Martin, 2005.

14. Cousinié, 2000 et 2007.

15. Notteghem, 2007. L’auteur évoque les différentes possibilités de fonctions pour un objet sur le long terme: utile aux exercices pieux, vendu, transmis, échangé, collecté, collectionné, exposé. Nos travaux ont adopté une démarche similaire en la complétant par les notions de vol ou de don selon les cas rencontrés lors du dépouillement.

16. Michaud, 1963.

17. Serres, 1878.

18. Vialles, 1921.

19. Arch. Dép. Hérault, 2 E 62 320, 1765.

20. Chesnaye-Desbois, Badier, (1770), p.716. Artefeuil, (1776), p. 92. Aucun Antoine Barbeyrac, mentionné dans les ouvrages de l’époque, ne fait l’objet de développement biographique.

21. D’après un reçu de 660 £, délivré par M. Maigne, prêtre de l’Oratoire, et daté du 16 avril 1765.

22. Compayre, 1911. En admettant que ce collège appliquait le même mode de fonctionnement que celui de Juilly (en Seine-et-Marne), établissement-modèle de cet ordre.

23. Viton de Saint-Allais, op.cit., 1816, p. 301-302. L’inventaire ne mentionne que cinq enfants alors que l’auteur du Nobiliaire universel de France en mentionne six. Sans indiquer ses sources, il mentionne qu’Elisabeth Adélaïde s’est mariée le 15 février 1786 à Auguste Marc Antoine de Sambucy, baron de Sorgues. Marie Gabrielle se serait unie à François de Peyrot de Valhausy, baron de Brousse et conseiller au Parlement de Toulouse, le 19 novembre 1784. Enfin, une dénommée Pauline Marie aurait été mariée à Jacques Louis Durand, seigneur de Lunel-Viel et de Saint-Just, Président en la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpellier. En admettant qu’elle faisait partie de cette fratrie, l’absence de son nom, dans l’acte notarié, pourrait s’expliquer par le fait qu’elle n’était pas encore née. Sa mère devait être au début de sa grossesse, peut-être même ignorait-elle son état sans quoi il aurait été signalé par le notaire, comme on a pu le constater dans d’autres inventaires locaux…

24. Clerc, 2001, p.111 et Viton de Saint-Allais, 1816, p. 301. Dans son Nobiliaire universel de France, Nicolas Viton de Saint-Allais explique qu’Antoine de Barbeirac n’est devenu marquis qu’après l’obtention de lettres patentes obtenues auprès du roi en mai 1753. Celles-ci reconnaissaient l’ancienneté de la noblesse de sa famille et récompensaient ses services rendus à la couronne.

25. Antoine de Barbeirac fils gardait également les titres de propriété de ses terres dans une armoire d’un autre petit cabinet situé dans la maison.

26. Arch. Dép. Hérault, C 1102/3/Montpellier, 1728. Grasset-Morel, 1908 (1989), p. 326-327.

27. Jusqu’à la Révolution, la majorité était établie à 25 ans. Ce n’est qu’après qu’elle est passée à 21 ans.

28. Un paquet cacheté en cire rouge ardente où il était écrit « ecy est mon testament ». Le notaire, après l’avoir ouvert et constaté la date, le 2 septembre 1763, l’a conservé à la requête des légataires. On ne trouve aucune mention sur le contenu du testament dans l’inventaire.

29. Bigot, 2009. Selon le droit de l’époque, le contrat de mariage pouvait stipuler que lors du décès de son mari, une femme pouvait récupérer sa dot ainsi que les intérêts générés par le mariage, sous l’administration du mari. Ce dernier décédé, il revenait au fils héritier de verser cette somme à sa mère, rognant avec plus ou moins d’importance sa part d’héritage.

30. La somme totale des objets religieux est de: 27 £ et 20 sols. Celle des livres se monte à 606 £ (il s’agit du coût total de la bibliothèque).

31. Grasset-Morel, op.cit.

32. Notons qu’il n’est fait mention, nulle part, des appartements de la veuve, celle-ci étant supposée loger chez son fils aîné, d’après les papiers trouvés dans le cabinet du défunt. Soit ces appartements existent mais ne sont pas cités car ils ne font pas partie de l’inventaire, soit il n’y en a pas. Il est tentant d’opter pour la première suggestion puisque, comparativement aux autres étages au nombre de pièces plus important, le second donne vraiment l’impression qu’il n’a pas été entièrement visité.

33. Peut-être faut-il lire de lin ou dales.

34. Ce nom revient à plusieurs reprises dans l’inventaire, notamment dans le salon où est signalé un couvre-pied Karanka piqué doublé de taffetas apprécié 8 livres. Il doit s’agir d’une variété d’indienne.

35. Lebeau, op.cit. Sous la Révolution, la possession de ces objets suscitera des réactions violentes de la part des agents assermentés, des experts et autres témoins d’inventaires. Ceux-ci allant jusqu’à qualifier de « fanatiques » les possesseurs de ces objets et de nommer ces dernier : « objets de fanatisme ». La perception de ces objets évolue donc avec le temps.

36. Menez, 1996. Selon une classification de cet auteur, une petite bibliothèque compte moins de dix ouvrages, les moyennes entre onze et cinquante livres, une grande à partir de cinquante livres et les très grandes à partir de cinq cents livres.