Description
Le lexique du bâti dans les compoix médiévaux et modernes
Étude de linguistique historique et de géographie linguistique
* Onomasticien, philologue, C.R.I.S.E.S, EA 4424, Université Paul-Valéry, site Saint-Charles, Montpellier III
Les objectifs de cette contribution sont d’une part de montrer l’évolution de la langue écrite occitane face à l’avancée de la langue officielle du royaume de France et d’autre part de révéler la richesse du lexique occitan et sa spécialisation. Nous savons que présenter des listes de mots, de citations peut paraître fastidieux, mais c’est le seul moyen de mettre à jour des évolutions, des aires lexicales et peut-être des aires dialectales spécifiques. Un certain nombre de ces mots disparurent et d’autres ne sont plus guère en usage dans la langue parlée d’aujourd’hui ; les compoix en portent témoignage.
Vocabulary used in building constructions in medieval and modern compoix
The aim of this article is to demonstrate the evolution of the written Occitan language when faced with the progress of the official French language, and secondly to show the wealth of vocabulary and specificity of Occitan. We understand that lists of words and quotations can be tedious, but it is the only way to show the development, the zones of vocabulary and, perhaps, the specific dialect areas. A certain number of these words have disappeared and others are hardly used in the spoken language of today; the compoix (ancient land registers) are still available evidence.
Lo lexic del bastit dins los compéses medievals e moderns…
Los objectius d’aquela contribucion son d’un costat de mostrar l’evolucion de la lenga escricha occitana en fàcia de l’avançada de la lenga oficiala del reiaume de França, d’un autre costat de revelar la riquesa del lexic occitan e la sieuna especializacion. Presentar de tièras de tèrmes e de citacions pòt paréisser fastigόs, mas es lo sol biais de revelar l’espandida d’airals lexicals e bènleu d’airails dialectals especifics. Fòrça d’aquels tèrmes desapareguèron e son pas ges en usatge dins la lenga parlada de uòi. Los compeses ne son un testimoniatge.
Une étude exhaustive de tous les termes afférents au bâti dépasserait amplement le cadre de cette communication, et de plus se heurterait aux lacunes de notre base documentaire. En effectuer une stratigraphie historique et une répartition géographique globales est impossible du fait que nous ne possédons pas pour toutes les communautés de notre aire d’étude des séries de compoix s’échelonnant du XIVe au XVIIIe siècle. Pour certaines de ces communautés ne nous ont été conservés que seulement un ou deux compoix, le plus souvent du XVIIe siècle. Les termes qui se rapportent au bâti ou aux éléments du bâti sont légion et nous n’en prendrons comme exemples que quelques cas en en produisant les attestations les plus parlantes. Le lecteur trouvera sans doute la présentation chronologique des attestations de certains types de mots (lexèmes) fastidieuses. Cette présentation n’est pourtant pas exhaustive. Nous avons opéré des choix en ne gardant que des séries de cas explicites concernant la chronologie et la répartition géographique des lexèmes. Les attestations produites selon un agencement chronologique permettent d’appréhender la vie et la mort de certains mots ainsi que l’abandon de la graphie occitane sous la pression de la graphie de la langue politiquement dominante, le français. Ce début d’inventaire révèle la richesse lexicale de la langue écrite occitane mais aussi montre les difficultés de définir les valeurs sémantiques de certains lexèmes.
Ainsi au cours de cette étude nous mettrons en regard dans l’usage écrit l’emploi de tel ou tel terme dans l’aire comprise entre Vidourle et Rhône, ce qui correspond à peu près à l’aire gardoise, et dans l’aire comprise entre Vidourle et Aude, ce qui correspond à l’aire héraultaise. Nous avons conscience qu’utiliser les terminologies « aire gardoise » et « aire héraultaise », ce qui correspond à des découpages administratifs contemporains, est anachronique. De même parler d’« aire dialectale provençale » et d’« aire dialectale languedocienne », réalités linguistiques sans doute avérées pour la période contemporaine, est inopérant pour le Moyen-âge et la période moderne. De toute façon, notre étude porte sur des documents écrits, donc sur une scripta, et il est hasardeux de déduire l’état de la langue parlée à partir de la scripta. Mais pour la clarté de l’exposé nous désignerons les deux espaces formalisés aujourd’hui par les départements du Gard et de l’Hérault sous les sigles (30) et (34). Pour les références des compoix (cpx.) utilisés pour cette étude, il faudra se reporter à notre Recueil lexicographique en ligne sur le site de l’équipe de recherche CRISES, http://crises.upv.univ-montp3.fr, à la rubrique Ressources. Les références des compoix y sont déclinées in fine avec la date, le nom de la communauté et le lieu de dépôt.
Le lieu d’habitation, le lieu de vie
Sur notre aire d’étude, pour désigner l’habitation ou le lieu de vie, la langue occitane a eu recours à deux lexèmes. Le premier a pour étymon le latin mansione(m) et a eu au Moyen-âge comme premier aboutissement maion, s. f. [mayυ] puis aussi la forme maison, s. f. ; le second lexème a pour étymon le latin hospitale(m) et a eu comme aboutissement hostal > ostal, s. m. Ces deux termes occitans sont entrés en concurrence avec prééminence généralement du second sur le premier, ostal ayant eu tendance à éliminer maion. Ce phénomène linguistique fut compliqué au début de la période moderne par l’intrusion, à côté de son homonyme occitan, du lexème français maison porteur d’une certaine polysémie allant de la notion de « bâtiment » à celle de « lieu de vie ». […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2016 |
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Nombre de pages | 13 |
Auteur(s) | Pierre CASADO |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |