Description

La révolution municipale dans le département de l’Hérault (1789-1790)

La mainmise de la bourgeoisie sur le pouvoir municipal est l’événement de l’année 1789. Jusqu’alors, en effet, l’administration municipale demeure le monopole d’une oligarchie restreinte de privilégiés qui tiennent leur pouvoir de l’hérédité, de la vénalité des charges ou de la désignation du roi. On conçoit le mécontentement d’une bourgeoisie riche et « éclairée » ; elle réclame une réforme de l’administration urbaine et veut la « régénérer » par l’élection afin de s’en emparer. Tel est le vœu exprimé dans les Cahiers du Tiers-État de Montpellier.

« La liberté entière règnera dans l’élection des officiers municipaux. Le prétendu droit que certains seigneurs ecclésiastiques et laïques se sont arrogés de nommer ou de choisir les consuls seront abolis, sauf l’indemnité de ceux qui auraient acquis ce droit à titre onéreux. Que cette élection sera faite par un conseil renforcé composé de citoyens librement élus par leurs pairs et que, dans les villes principales, le conseil politique sera composé des membres élus par les diverses corporations ».

À la tête des villes figurent, en effet, des administrations complexes de type varié soit en fonction des arrêts et des édits qui les légitiment, soit en fonction des sociétés qu’elles expriment. Toutes ne se moulent pas dans le mouvement de renaissance municipale qui a marqué, avec des temps forts et des moments de répit, le XVIIIe siècle en Languedoc.

Le soin de l’administration municipale est confié à des consuls et à des conseils politiques qui se recrutent suivant un ordre hiérarchique. À Montpellier, le premier consul doit être un gentilhomme ou un noble faisant profession des armes. Massilian de Sanilhac est le premier consul en 1789. Le deuxième, doit être un bourgeois ; le troisième, procureur à la cour des aides ou au Présidial ; le quatrième, chirurgien ou apothicaire ; les cinquième et sixième consuls, marchands ou artisans. À Lodève, le premier consul est un noble, un gradué, un négociant, un notaire ou un bourgeois ; le second est pris parmi les marchands détailleurs, apothicaires et droguistes ; le troisième, parmi les artisans et gens de métier. En 1789, le premier consul est Pierre de Salze, chevalier de Saint-Louis et ancien brigadier des gardes de corps du roi. Le même principe préside au recrutement des membres du Conseil politique. À Montpellier, il compte vingt-quatre membres pris, dans l’ordre, parmi les membres de la Cour des Aides ou Bureau des Finances, de la Sénéchaussée, les chanoines, les gentilshommes, les avocats, les négociants en gros, les notables bourgeois, procureurs ou notaires ; au bas de la hiérarchie figurent un marchand en détail, un chirurgien apothicaire, un ménager, un artisan. À Lodève, parmi les douze membres figurent un noble, un officier retiré du service, un gradué en droit ou en médecine, un bourgeois, trois marchands fabricants, deux marchands détailleurs, un procureur, un chirurgien ou apothicaire, trois artisans. À Béziers, les classes sont au nombre de quatre. La première pour les nobles et les gradués ; la deuxième pour les bourgeois, commerçants en gros, notaires, procureurs ; la troisième pour les marchands drapiers, merciers, toiliers, chirurgiens, orfèvres, horlogers, épiciers ; la quatrième pour les tapissiers, perruquiers, traiteurs, bailleurs. Le recrutement est censitaire. Pour les affaires importantes, le conseil politique se renforce par le doublement de ses membres pris dans les mêmes classes sociales.

Au total, les corps municipaux renvoient le reflet plus ou moins fidèle de la société des notables ; plus aristocratiques à Montpellier qu’à Béziers; mais toujours à l’exclusion des classes populaires. Quant aux protestants, ils sont eux aussi tenus à l’écart du pouvoir.

Les municipalités sont placées sous la tutelle des seigneurs ; celle-ci s’exerce suivant bien des nuances. Les consuls peuvent être nommés directement par le seigneur ; alors le pouvoir municipal n’est qu’une « illusion » comme dans les cités épiscopales, Lodève, Agde où l’évêque nomme les trois consuls. À Montpellier, le gouverneur de la ville, choisit chacun des six consuls sur une liste de trois noms (candidats) proposés par le conseil politique renforcé. Béziers jouit d’un régime plus libéral : les consuls sont élus par le conseil de ville. À la veille de la Révolution, le premier consul est un médecin, le deuxième, un homme de loi, le troisième, un maître en pharmacie.

En 1789, sur le plan local comme sur le plan national aux états généraux, un grand souffle de libération va emporter des institutions héritées du passé et livrer le pouvoir à la bourgeoisie. Voyons-en les étapes : […]

Informations complémentaires

Année de publication

1989

Nombre de pages

10

Auteur(s)

Geneviève GAVIGNAUD-FONTAINE, Robert LAURENT

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf