Instantanés photographiques chez les Blayac
Instantanés photographiques chez les Blayac :
Une famille bourgeoise au début du XXe siècle
*Assistante de conservation du patrimoine aux Archives départementales de l’Hérault ; Docteure en histoire
P. 5 à 17
François Blayac et Joséphine Chauvain se marient le 9 janvier 1905 à Montpellier. C’est juste après que commence le reportage photographique que François va mener de la naissance de son premier fils jusqu’au passage à l’âge adulte de ses trois enfants à l’orée de 1940. À travers l’objectif il livre des instantanés de l’intimité de sa famille, un panorama visuel des activités de son groupe familial et un aperçu d’événements historiques plus ou moins locaux. Que racontent ces clichés de sa vie et en quoi sa pratique est-elle liée à une certaine représentation sociale ?
Photographic snapshots of the Blayac family:
a bourgeois family at the beginning of the 20th century
The marriage of François Blayac and Joséphine Chauvain took place in Montpellier on 9th January 1905. Just afterwards François began his photographic coverage of his family from the birth of his first son until the three children reached adult age around the beginning of the 1940’s. Through his camera lens he communicates intimate photos of his family, a visual panorama of his family group and an overview of historical events both locally and elsewhere. What do these images tell us about his life and to what extent did this practice give a depiction of his social life?
Instantanèus fotografics a cò dels Blayac :
Una familha borgesa a la debuta del vinten sègle
François Blayac [Francés Blaiac] e Joséphine Chauvain se maridan lo 6 de genièr 1905 a Montpelhièr. Just aprèp co-mença lo reportatge fotografic que François menarà de la naissença de son primièr filh al passatge a l’edat adulta de sos tres enfants a l’òrle de 1940. A travèrs l’objectiu liura d’instantanèus de l’intimitat de sa familha, un panorama visual de son grop familial e un còp d’uèlh suls eveniments istorics mai o mens locals. Que recontant aqueles clichats de sa vida e en qué sa practica es ligada a una cèrta repre-sentacion sociala ?
Introduction
François Blayac et Joséphine Chauvain se marient le 9 janvier 1905 à Montpellier. C’est juste après que commence le reportage photographique que François va mener de la naissance de son premier fils jusqu’au passage à l’âge adulte de ses trois enfants à l’orée de 1940. À travers l’objectif il livre des instantanés de l’intimité de sa famille, un panorama visuel des activités de son groupe familial et un aperçu d’événements historiques plus ou moins locaux. Que racontent ces clichés de sa vie et en quoi sa pratique est-elle liée à une certaine représentation sociale 1 ?
Le fonds dont il est question dans cet article est conservé aux Archives départementales de l’Hérault depuis 2013 suite au don d’un des petits-fils du photographe 2. Il comporte un peu plus de 900 photographies, pour la plupart des photographies négatives monochromes sur plaque de verre. D’autres archives photographiques de la famille existent sans doute pour la même période, qui pourraient compléter le point de vue livré ici. (Fig. 1)
Un photographe de son époque
À la fin du XIXe siècle la technique photographique évolue pour proposer des supports d’impression qui ne nécessitent plus de compétences pointues en chimie. La plaque sèche au gélatino-bromure d’argent permet la diffusion de la pratique à un cercle élargi d’« amateurs éclairés ». Bien que le poids et la fragilité des plaques de verre demeurent des inconvénients, ils ne freinent en rien le développement de la prise de clichés, la chambre noire et l’appareil étant relativement facile à transporter. Sa seule limite est son coût et le temps disponible en loisirs pour la pratiquer. Dans les milieux bourgeois et chez les notables, dans l’Hérault comme dans toute la France, les hommes curieux de nouveautés s’emparent de cette technologie devenue à la mode 3.
Certains ont des visées scientifiques, comme Gustave Tramblay. Entre les années 1880 et sa mort en 1918 il photographie les paysages et les monuments aux alentours de sa résidence de Mérifons, – le mas Canet – et dans les départements voisins, mais réalise aussi parmi les premiers clichés célestes lors de ses observations astronomiques 4. De même Marius Pargoire, instituteur originaire de Saint-Pons-de-Mauchiens, se sert de la photographie pour ses travaux au sein de la Société départementale d’encouragement à l’agriculture de l’Hérault à partir de la toute fin du XIXe siècle 5. D’autres l’utilisent pour documenter leur vie. Il en est ainsi d’un album réalisé par deux jeunes femmes de bonne famille dans le premier quart du XXe siècle à Montpellier. Les tirages sont collés dans un registre, les pages ornées de dessins à l’encre, de peintures. C’est un témoignage vivant des lieux qu’elles fréquentent et de leurs activités de loisirs, sans doute collecté par un homme de leur entourage très proche 6. Tout comme Martial Aubrespy, un notaire de Fontès, qui jusqu’à sa mort en 1929 portraiture sa famille, mais aussi le village et ses habitants dont il est devenu le photographe attitré, François Blayac fixe sur plaque de verre sa femme et ses trois enfants 7.
François Blayac, jeune avocat, épouse Joséphine Chauvain en janvier 1905 8. Le père de celle-ci, Dominique Chauvain, un négociant en vin, propriétaire de biens à Montpellier, est décédé quelques années auparavant. Trois enfants naissent de leur union : Raoul le 13 janvier 1906, Hélène le 1er février 1911 et Françoise le 5 novembre 1913 9. Ce sont eux les principaux sujets de prédilection de leur père, et en particulier le premier. Dès sa naissance il est régulièrement pris en photographie avec sa mère d’abord, puis seul lorsqu’il est en âge de tenir assis ou debout sans aide. On le voit aussi petit en train de manger 10, de jouer 11, d’apprendre à marcher 12. Ses sœurs font l’objet de prises de vue moins intensives. Si Hélène bénéficie encore de l’attention de son père lorsqu’elle est en bas-âge, Françoise n’est jamais photographiée seule à cette période de sa vie. Un unique portrait la montre, déjà grande 13. Pour voir tous les enfants dans leur première année il faut se référer aux reportages que François Blayac effectue après la naissance de chacune de ses filles 14. Les deux sœurs apparaissent le plus souvent ensemble dans des vues d’activités quotidiennes et de jeux. Le déguisement est le plus photographié : costumes de pierrot ou uniforme pour Raoul 15, costume d’indiennes ou coiffe et étole pour Hélène et Françoise 16. Donner à manger aux poules est un classique, que ce soit pour Raoul ou pour ses sœurs 17.
Même si les enfants sont souvent photographiés, les adultes ne sont pas en reste. En dehors des portraits très conventionnels, ils figurent aussi chez eux en train de se déguiser 18. Mais ils peuvent également être immortalisés lors de pratiques sportives 19 ou en train d’observer le ciel 20. (Fig. 2) Et les clichés pris lors d’excursions à l’extérieur, en visite chez des amis ou des parents, voire dans les départements limitrophes, donnent à voir une large zone de déplacement, en lien avec le milieu social de la famille. Sont documentés des balades au bord du Lez ou sur la jetée de Palavas-les-Flots, une corrida à Nîmes, des visites d’Aigues-Mortes, des Saintes-Maries-de-la-Mer, de Marseille, de Carcassonne d’Avignon, et même de Paris, des séjours en montagne. Les frontières nationales sont cependant rarement franchies : seul un reportage réalisé en Espagne en 1928 fait partie du fonds 21. C’est l’un des derniers reportages de François Blayac, réalisés alors que ses enfants sont quasiment adultes, avec un autre sur un déjeuner au pré dans l’Hérault ou le Gard 22.
À noter aussi qu’au sein de ces photographies de François Blayac, les portraits réalisés lors de grands événements religieux de la vie familiale sont rares. Une seule vue montre Raoul en robe de baptême dans les bras d’une nurse dans une allée, sans doute prise peu de temps avant la cérémonie 23. Seule une série de portraits d’Hélène en communiante laisse penser à une véritable intention esthétique 24. D’une manière générale, même dans la seconde moitié du XXe siècle, ce sont en premier lieu les mariages qui sont représentés, puis les communions, mais rarement les baptêmes 25. Pour ces portraits, très importants symboliquement et socialement, le couple Blayac a pu faire appel à un photographe professionnel et choisir de faire faire des prises de vue en studio. C’est aussi ce que feront les classes les plus modestes au XXe siècle, pour conserver une image des moments exceptionnels de leur vie. Les ateliers de photographie sont les témoins privilégiés de l’ascension de la bourgeoisie au XIXe siècle et de sa volonté de légitimer sa généalogie en la fixant par l’image. La multiplication des portraits sur photo-carte à partir de 1857 en est le signe 26. Rien de tel dans le fonds conservé aux Archives départementales de l’Hérault pour la famille Blayac. Pourtant François Blayac a vraisemblablement eu recours aux services d’un studio pour trois portraits de famille, accompagnés pour deux d’entre eux d’une série de portraits individuels des enfants, dont le décor et la manière de poser sont caractéristique de ce type d’endroit.
Le premier est pris vers 1915-1918, le deuxième vers 1920-1922 et le troisième vers 1921-1923 AD34, 42 Fi 922, 42 Fi 923 (1915-1918) ; 42 Fi 800 à 812 (1920-1922) ; 42 Fi 826 à 829, 42 Fi 838 à 847 (1921-1923). Pourtant, curieusement, il n’est présent que sur les clichés du deuxième 27.
En s’équipant de matériel de photographie, François Blayac peut aller au-delà de l’aspect figé que nécessitent ces vues destinées à être montrées, et conserver des instants d’intimité avec ses plus proches. (Fig. 3) Cette photographie domestique se diffuse plus largement à partir des années 1930 grâce à de nouvelles évolutions des appareils, pour devenir majoritaire dans les années 1950 28. La photographie sur support souple, remplace peu à peu celle sur plaque de verre. Toutefois, les premiers films, sur nitrate de cellulose, sont délicats à utiliser car très inflammables (fait connu surtout par l’exemple du cinéma). Inventé en 1888 aux États-Unis par le futur fondateur de Kodak, Georges Eastman, et commercialisé dans la foulée, ce support se diffuse dès le début du XXe siècle auprès des spécialistes de la photographie. Néanmoins, pour ceux des classes bourgeoises, comme François Blayac, qui ont déjà investi dans le matériel compatible avec les plaques de verre et fait l’apprentissage de sa technique, le passage de l’un à l’autre n’est pas une évidence, quand bien même il serait en capacité financière d’y accéder.
Dans ces années 1950 comme au début du XXe siècle la photographie est patriarcale. Ce sont les hommes de la famille qui se cachent derrière l’objectif, tandis que femmes et enfants posent pour eux 29. François Blayac ne déroge pas à cette sexualisation de la pratique photographique domestique, qui s’explique aussi par sa technicité. Difficile de le trouver sur un cliché. Lorsqu’il est capturé par l’appareil, ce ne sont jamais dans des scènes de la vie quotidienne. La spontanéité est par ailleurs relativement rare, bien que la technique photographique donne accès à l’instantanéité depuis la fin du XIXe siècle, en ayant réduit les temps de pose nécessaires 30. Les rares portraits de François Blayac seul sont deux portraits en buste. L’un est pris en extérieur au même moment qu’un autre avec son fils Raoul en 1908 31 ; l’autre est pris dans les années 1908-1914 et le cadrage serré ne laisse pas voir l’arrière-plan 32.
Outre cet aspect genré qui apparaît au premier abord, une hypothèse sociologique plus profonde se dessine à la lumière des clichés pris par François Blayac et de sa biographie. Mais la difficulté d’identifier toutes les personnes présentes sur les portraits de groupe empêche de la confirmer. Les vues ne semblent figurer que les membres de la famille de sa femme. La place accordée aux Chauvain est-elle déformée par le fait que ce sont les seuls qui ont pu être reconnus ? Y a-t-il aussi des membres de sa famille de Corneilhan qui posent ? Peu probable. L’intuition laisse penser que François Blayac a plus ou moins volontairement occulté ses origines en quittant Béziers et son premier poste d’avocat grâce à son mariage avec Joséphine. L’éloignement de Castelnau-le-Lez pourrait-il aussi expliquer cette absence supposée de la famille Blayac aux grandes réunions de famille ? Sans doute pas. Par contre la volonté de François Blayac de s’élever socialement et économiquement grâce à ses études puis son mariage semble plus manifeste.
La stratégie est classique et admise dans la petite ou la grande bourgeoisie tout au long du XIXe siècle, jusqu’en 1914 voire au-delà. Épouser une jeune femme de la catégorie sociale supérieure à la sienne, bien dotée, permet de profiter de son argent, de son nom et de l’établissement de sa famille 33. François Blayac, fils d’un propriétaire de Corneilhan et d’une femme au foyer, fait des études de droit à Toulouse. Il s’installe comme avocat à Béziers, au n° 2 de l’avenue Saint-Saëns, au moins à partir de 1902 34. Le père de Joséphine Chauvain, un négociant en vin sans doute prospère en cette période précédant la crise viticole, meurt en 1902. Sur le papier, le mariage entre François et Joséphine en 1905 est la rencontre de deux intérêts : ceux d’une orpheline de père avec une position sociale avantageuse et ceux d’un jeune homme ambitieux. La question financière est clairement évoquée par l’établissement d’un contrat de mariage auprès de maître Roussel, notaire à Montpellier, avant leur union 36. Il est vraisemblable qu’une séparation de biens y est enregistrée 33. Cette hypothèse est confortée par le fait que Joséphine achète seule le domaine de Rochet en 1908 et le transmette directement à ses enfants 37.
Après son union, François Blayac rejoint Montpellier où habite son épouse, avant leur installation à Castelnau-le-Lez. Exerçant toujours en tant qu’avocat, non plus au tribunal de 1ère instance de Béziers mais à la cour d’appel de Montpellier, il semble se constituer des réserves financières. Dans l’Annuaire de l’Hérault, François Blayac figure dans le tableau des avocats montpelliérains de 1906 à 1913. Jusqu’au volume paru en 1909 il est recensé au n° 22 de la rue des Grenadiers (devenue rue Paul Brousse), puis à partir de celui de 1910 au « château de Rochet » 38. Sa disparition de la liste des professionnels après 1913 pourrait signifier qu’il a cessé d’exercer. Cela ne l’empêche pas d’acquérir, ? en son nom propre ?, plusieurs maisons d’habitation à Montpellier en 1918 et 1921. Mais une partie de ses biens est revendue en 1928 puis en 1940. Il fait don du reste à ses enfants en 1949 39. A-t-il atteint le statut de rentier ? En tout cas, dans l’acte de naissance de sa fille Françoise, rédigé le 5 novembre 1913, il est toujours décrit comme « avocat propriétaire » 40. Si l’ascension sociale de François Blayac ne peut être remise en cause dans une certaine mesure, l’insertion dans le milieu d’origine de son épouse Joséphine ne semble cependant pas totale. À travers le viseur de son appareil de photographie, il paraît surtout construire une image glorieuse de la famille Chauvain. Pourquoi un des autres hommes de la famille n’a pas pris sa place pour qu’il puisse figurer sur les clichés de groupe ? (Fig. 4)
Famille et demeure, la réussite sociale fixée sur plaque de verre
En dehors de son caractère affectif et mémoriel, sans conteste la photographie du tout début du XXe siècle est attachée à un symbolisme social. La possibilité de la pratiquer avalise l’appartenance à la bourgeoisie et les clichés issus de cette pratique contribuent à légitimer cette inclusion par l’auto-représentation.
Sur les photographies de groupe réalisées par François Blayac ce sont principalement les membres de la famille Chauvain qui sont présents, et en particulier les nombreux frères et sœurs de Joséphine, issus de deux lits 41. Parmi ces derniers, ont pu être identifiés Marius, négociant demeurant à Sète avec sa femme Claire et leurs enfants, Gustave et André 42, ainsi que de manière quasiment sûre Pierre Amédée, Jean François et Marie Magdeleine 43, tous trois issus des secondes noces de Dominique Chauvain avec Élisabeth Maffre. Leurs nombreux portraits traduisent l’importance de l’intégration dans le groupe familial. Pour François Blayac celle-ci semble particulièrement prégnante. Originaire de Corneilhan, célibataire il habite à Béziers, mais en se mariant il déménage à Montpellier où son épouse est née et où habite alors notamment sa belle-mère Élisabeth 44. Veuve depuis quelques années, elle réside dans la Villa Élisabeth, cadre de plusieurs clichés 445. Le jeune couple s’installe tout d’abord rue des Grenadiers (devenue rue Paul Brousse), où leur premier enfant, Raoul, naît, puis rue Castillon 46. En janvier 1908 Joséphine achète à Blanche, veuve d’Hoche Camille Saintpierre, et ses cinq enfants, le domaine de Rochet à Castelnau-le-Lez 47.
Cette demeure sert de décor aux vues que François Blayac prend, tant dans l’intimité avec sa femme et ses enfants, que lors de portraits du groupe familial. Elle incarne, dans le paysage héraultais, aux yeux de tous ceux qui passent devant et la contemplent, et au sein du groupe familial, un lieu de richesse et de pouvoir, tout comme les variétés d’arbres qui l’entourent, qu’un parc l’accompagne ou non 48. (Fig. 5) C’est un symbole visuel de réussite sociale qu’il convient d’inscrire aussi dans le temps à travers la photographie, quand bien même il est acheté avec l’argent d’une épouse plus fortunée que soi, qui transmettra directement le bien à ses enfants 49. Et François Blayac n’oublie pas de compléter les nombreux clichés où le domaine sert d’arrière-plan, par d’autres où celui-ci est l’unique objet de son attention tout comme le parc 50 et les activités viticoles qui vont avec 51, et, plus insolite, des carrières de sable 52. Les différents propriétaires énumérés lors de l’acte d’achat trahissent bien cette importance sociale du bâti et des hectares de terres qui y sont associés, tout au long du XIXe siècle. Jean-Jacques Rochet, dont la famille donne son nom au lieu, est négociant à Montpellier, son petit-neveu, Hoche Camille Saintpierre, est adjoint du maire de Montpellier et membre du Conseil général de l’Hérault. Ce dernier le lègue à son fils, qui porte le même nom, un docteur en médecine et directeur de l’école d’agriculture de Montpellier 53.
Outre la Villa Élisabeth déjà mentionnée, la Villa Erialc à Sète, appartenant à l’un des frères de Joséphine, Marius, tient aussi lieu de décor à la mesure de la place que ces membres de la famille Chauvain souhaitent prendre dans la société 54. (Fig. 6) Rebaptisée en l’honneur de son épouse Claire après trois ans de travaux pour la mettre au goût du jour, ? « l’Art nouveau » ?, cette villa est achetée en 1904 55. Moins prestigieuse que cette dernière est la Villa Bouvier, où habite sans doute la deuxième des sœurs aînées de Joséphine, Jeanne, veuve d’Arthur Desilvère Bouvier, de son vivant avocat et juge suppléant au tribunal civil de Lyon. Des membres de la famille sont photographiés devant cette habitation dont la plaque apposée sur la façade reprend le nom du décédé 56.
La façade avant, qui donne sur l’espace public, affiche le masque social dont le propriétaire veut se parer. Décor théâtral pour une mise en scène de l’appartenance à des cercles précis de la société, à travers sa sphère familiale. Cette dernière, dans un cadre plus intime, est aussi invitée à investir l’arrière de la maison et le parc pour des activités plus privés ou des occasions exceptionnelles.
Les Blayac-Chauvain ne sont pas les seuls à juger que ces demeures de prestige sont idéales pour poser. L’exemple le plus frappant de cette volonté d’inscrire dans la pierre sa réussite économique et sociale et de l’immortaliser par l’intermédiaire de la photographie est celui de la famille de Pierre Vialles. Une série de négatifs sur plaque de verre montre la construction de son château de Bor-Saint-André, permise par la prospérité de la viticulture à la fin du XIXe siècle dans la commune d’Aimargues, puis ses outils de production et des portraits individuels ou groupés de la famille qui ont pour cadre le domaine 57.
Les reportages que mène François Blayac sur ses proches donnent aussi un aperçu d’activités liées à leur appartenance à une classe sociale aisée. En dehors de la photographie dont témoigne sa propre production, leurs excursions en automobile, qui leur permettent notamment de découvrir des lieux éloignés de leur lieu de résidence, en sont le témoignage. Bénéficier d’un véhicule motorisé est un privilège rare en ce début du XXe siècle, c’est un bien de demi-luxe 58.
Il est utile non seulement pour les loisirs et le prestige mais aussi pour rejoindre au plus vite les centres urbains où leurs propriétaires travaillent. L’automobile a un rôle utilitaire. Elle permet de faire le lien avec leur habitation et leur patrimoine foncier à la campagne. Différents modèles servent aux déplacements de la famille Blayac : De Dion Bouton ou Torpédo 59, limousines ou décapotables. Si la plupart du temps les photographies montrent un seul véhicule, suffisant pour quelques personnes, l’une d’elles montre un convoi de quatre voitures.
Toute la famille rentre 60 ! (Fig. 7)
La motorisation touche aussi l’exploitation du domaine de Rochet et fait partie de sa modernisation. François Blayac photographie le camion qui sert à transporter un foulograppe dans les années 1910-1916, ainsi que le premier tracteur acheté pour labourer les terres en 1916 61. Même le foulograppe, machine qui sert à fouler et distribuer ensuite le raisin dans des cuves, en est l’illustration. Aucune des photographies ayant pour sujet son domaine ou sa famille ne comporte de cheval. Les vues de travaux agricoles effectués avec des chevaux ou de balades familiales en véhicule hippomobile sont absentes du fonds Blayac 62. Le prestige associé à la possession de cet animal et à la possibilité de se déplacer en grand équipage appartient bel et bien au passé. (Fig. 8) (Fig. 9)
Assister à des courses hippiques et à des représentations d’opéra est également une composante de la sociabilité bourgeoise qui transparaît dans la production photographique de François Blayac. La localisation de l’hippodrome où se déroule la course de galop monté n’a pu être identifiée, mais le paysage n’est pas méridional 63.
De même la représentation en plein air d’Héliogabale qui a eu lieu en 1900 est difficile à localiser 64. Il est probable néanmoins qu’elle se soit déroulée à Béziers, dans les arènes, où une intense activité artistique a lieu en ce début de siècle, notamment grâce à Fernand Castelbon de Beauxhostes 65.
Les vues prises par François Blayac dans le parc de Rochet en 1921 lors de la réception organisée pour y célébrer l’érection du buste de Fabre symbolisent une apothéose sociale 66. Cette sculpture en bronze est réalisée par Varenne pour commémorer le centenaire de la mort de l’abbé Fabre en 1883. Elle est victime de la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905 et reléguée dans une cabane de jardinier du square Planchon à Montpellier. Son installation au mas de Rochet, à Castelnau-le-Lez, commune où elle avait été initialement érigée, est riche de sens et affirme l’allégeance de la famille Blayac à la foi catholique 67. Les autorités ecclésiastiques, présidées par monseigneur de Cabrières, l’évêque de Montpellier, dirigent la cérémonie et sont photographiées sous maints angles ainsi que l’assemblée. Le reportage de François Blayac commémore ce moment exceptionnel pour sa famille. Il illustre l’importance de la foi pour créer une communauté de familles dont la religion est le ciment et celle de l’organisation de mondanités pour célébrer l’appartenance au groupe social ainsi constitué. (Fig. 10)
À noter aussi, autre signe d’aisance, caractéristique de la bourgeoisie : la présence d’employés au sein du foyer. François Blayac réalise trois vues d’un groupe de femmes, dont certaines portent un tablier, ce qui permet de les identifier comme des domestiques 68. L’arrière-plan réduit à des feuillages ne donne pas la possibilité de savoir chez qui elles travaillent. Il est néanmoins fort vraisemblable que ce soit au domaine de Rochet. D’ailleurs quelques photographies de Raoul en bas-âge démontrent aussi la présence de nurses pour s’occuper de lui, que ce soit au domicile ou pour assister au carnaval à Montpellier 69. De même une femme âgée apparaît sur des clichés ou Joséphine donne à manger à des poules avec Hélène et Françoise 70. Peut-être une gouvernante, ou tout au moins la personne chargée de s’occuper au quotidien de ces animaux.
Des traces des événements de la « grande histoire »
En dehors d’événements de portée locale, les documents du fonds Blayac sont aussi le reflet d’événements nationaux comme les manifestations viticoles de 1907 et la Première Guerre mondiale. Elles sont néanmoins l’objet d’un nombre de vues moindre, l’essentiel des photographies étant consacré à la famille et à la sphère privée.
Les manifestations de 1907 sont représentées sur six photographies 71. Cinq d’entre elles sont prises du même endroit, un balcon du premier étage d’un immeuble situé en face du Grand Café à Montpellier, et permettent de voir différents participants au défilé. Pour la sixième François Blayac regarde passer les manifestants munis de drapeaux depuis la rue. Il n’est pas sûr que ces deux ensembles de vues aient été pris lors du même rassemblement, ni dans la même ville. Impossible de savoir à quelle occasion il a pris ces photographies. Est-il venu exprès à Montpellier avec son appareil pour documenter l’événement ?
Pendant la Première Guerre mondiale, François Blayac, avocat dans le civil, fait partie des officiers d’administration des ambulances. Il commence par un travail comptable de gestion de l’ambulance 1/66 de la 58e division d’infanterie en Alsace d’août à octobre 1914, puis en Artois jusqu’à décembre 1915. Un bref et unique passage sur le front en octobre 1915 le détermine à poursuivre la guerre à l’arrière grâce à ses relations. De retour à Montpellier en 1916, il en gère l’hôpital ainsi que celui de Castres. En 1917 et 1918 il est chargé de veiller à l’acheminement du vin depuis Béziers vers le front 72. Les clichés qu’il a pris pendant cette période documentent deux étapes de sa carrière militaire : son poste au service de santé dans le Nord de la France, puis son retour dans l’Hérault à Béziers.
La seconde a fait l’objet de seulement cinq vues, qui ont principalement trait à l’entreprise Ph. Garnier et Fils, sans doute implantée à Béziers et fabriquant des pièces de tonnellerie 73. La première compte un nombre bien plus conséquent de photographies, ? plusieurs centaines ?, sans doute à la mesure du témoignage visuel qu’il veut apporter sur la guerre et ses horreurs. Villes et villages bombardés, champs de batailles sont fixés sur plaque de verre, ainsi que des ouvrages de l’industrie minière. Les vues plus représentatives de la vie des soldats, de leurs déplacements et de leur vie quotidienne, se distinguent. L’abondance des vues commerciales, stéréotypées, réalisées par des professionnels et vendues après la guerre, rend ce genre de témoignages directs précieux 74. Ils montrent les hommes vivre et en sont au plus près : cuisine et repas, combats de coq, jeu de ballon 75. Certaines vues illustrent plus particulièrement les spécificités des tâches dans le service de santé. François Blayac montre les véhicules utilisés, automobiles ou hippomobiles, les blessés, le local qui leur sert d’infirmerie, mais aussi la mort par l’intermédiaire du transport des cercueils 76. Ces photographies sont par ailleurs l’occasion de voir François Blayac en uniforme, posant devant un mur de briques ou le fourgon sanitaire 77.
Conclusion
Ce fonds de photographies en apprend beaucoup sur l’attachement de François Blayac à la famille qu’il a construite, en particulier à travers des vues de ses enfants et de sa femme d’une intimité touchante. Mais par l’acte même de produire ces documents sur sa vie, de la naissance de ses enfants à leur entrée dans l’âge adulte, il participe à un grand élan de la bourgeoisie, qui commence dès le XIXe siècle et qui la conduit à s’emparer de son image et de son univers en les fabriquant 78.
C’est une image de réussite sociale affirmée à travers l’appartenance à une large parentèle et la valorisation d’un chef de famille. Son autorité patriarcale est prolongée dans le fait qu’il est le seul habilité à construire l’image de sa famille, depuis l’arrière de son appareil de photographie. Cette image se fissure cependant quelque peu quand on remarque que ces clichés consacrent surtout la famille de son épouse Joséphine.
C’est un univers d’excursions et de voyages, plus ou moins lointains, à partir d’une demeure qui est à la fois le lieu de vie de la famille et son lieu de représentation. Néanmoins les grandes scansions religieuses de la vie ne sont pas mises en scène. Comme si pour ces événements d’une puissance symbolique et sociale majeure, le photographe avait préféré laisser la place à un professionnel. Car il est quasi impossible qu’il n’y ait pas eu de clichés. Ils font sans doute partie d’autres archives familiales que celles conservées aux Archives départementales de l’Hérault, sans doute sur papier. Ce fonds, par ailleurs, ne laisse pas celui qui le parcourt à l’abri des événements de la « grande histoire ». Les manifestations viticoles de 1907 y sont présentes, et surtout la Première guerre mondiale, déflagration majeure dans l’univers de François Blayac.
Joséphine Chauvain décède le 16 décembre 1955 à Montpellier et François Blayac le 4 février 1964 79. Toutefois, les dernières photographies du fonds datent de la décennie 1930. Ces années voient les enfants Blayac entrer dans la vie active et créer leur propre noyau familial. Les actes de donations de biens signés par Joséphine et François en faveur de leurs enfants, respectivement en 1937 et en 1949 en témoignent. En 1937 Raoul est célibataire, docteur en droit, domicilié au n° 2 de la rue Foch à Montpellier qui est aussi le domicile de ses parents et de sa sœur Françoise, sans profession, mariée à M. Vedel, étudiant en médecine. Hélène, elle aussi sans profession, a épousé M. Bluche, diplômé de l’école des hautes études commerciales, et demeure au domaine de Rochet 80. En 1949 Hélène est désormais divorcée, Françoise n’a pas changé de situation et Raoul est devenu directeur général de société. Le départ des enfants, ? devenus adultes ?, du foyer correspond avec la déprise de la plaque de verre comme support photographique et l’introduction de la pratique de la photographie dans la vie quotidienne dans les milieux paysans ou populaires.
Sources
Conservées aux Archives départementales de l’Hérault (AD34) :
- 1 Fi 1154 –
Album de photographies d’une famille bourgeoise de Montpellier du début du XXe siècle [en ligne].
Disponible sur
https://archives-pierresvives.herault.fr/ - 20 Fi –
Fonds Viard. Photographies sur plaques de verre d’une famille héraultaise [en ligne].
Disponible sur https://archives-pierresvives.herault.fr/ (Consulté le 13 mai 2020). - 24 Fi –
Fonds de photographies de famille de Gaston Racanié-Laurens.
Disponible sur https://archives-pierresvives.herault.fr/ - 30 Fi –
Fonds Martial Aubrespy. Photographies négatives sur plaques de verre de la commune de Fontès [en ligne].
Disponible sur https://archives-pierresvives.herault.fr/ (Consulté le 13 mai 2020). - 38 Fi –
Fonds Gustave Tramblay (1855-1918). Paysages héraultais et portraits des habitants de Fontès [en ligne].
Disponible sur https://archives-pierresvives.herault.fr/ (Consulté le 13 mai 2020). - 41 Fi –
Fonds Giscard-Ruf. Plaques de verre stéréoscopiques sur la Première Guerre mondiale [en ligne].
Disponible sur https://archives-pierresvives.herault.fr/ (Consulté le 13 mai 2020). - 42 Fi –
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NOTES
1. Nous partons du principe ici que la famille Blayac appartient à la bourgeoisie du début du XXe siècle. Le terme de « bourgeoisie » est entendu dans son acception usuelle de catégorie sociale. Si sa conceptualisation et son intégration à l’imaginaire collectif ne font pas de doute, son existence en tant que groupe de personnes s’en revendiquant fait l’objet de discussions pour le début du XIXe siècle en particulier (Maza 2007).
2. AD34, 42 Fi.
3. Ce n’est que dans les années 1930 que la photographie se diffuse de manière plus large jusqu’aux classes sociales moins favorisées socialement et culturellement et perd son caractère distinctif (Dacos 2002).
4. AD34, 38 Fi. Faidit, Guiraud 2012.
5. Des plaques de verre et des tirages issus de son travail sont conservées dans le fonds de la famille Pargoire (AD34, 237 J).
6. AD34, 1 Fi 1154.
7. AD34, 30 Fi.
8. AD34, 3 E 177/518.
9. AD34, 3 E 177/514, 3 E 57/8.
10. AD34, 42 Fi 541.
11. AD34, 42 Fi 251.
12. AD34, 42 Fi 304, 42 Fi 378.
13. AD34, 42 Fi 777.
14. AD34, 42 Fi 766, 42 Fi 767 (naissance d’Hélène) ; 42 Fi 427 à 429, 42 Fi 432 à 436, 42 Fi 438 à 440, 42 Fi 442 à 445 (naissance de Françoise).
15. AD34, 42 Fi 463, 42 F 464 ; 42Fi 918 à 920 ; 42 Fi 761, 42 Fi 771 42 Fi 772 ; 42 Fi 483.
16. AD34, 42 Fi 778, 42 Fi 779, 42 Fi 813, 42 Fi 814 ; 42 Fi 780 à 783.
17. AD34, 42 Fi 388 ; 42 Fi 824, 42 Fi 825.
18. AD34, 42 Fi 214, 42 Fi 224 à 227 (femmes aux chapeaux) ; 42 Fi 286 42 Fi 294, 42 Fi 297, 42Fi 309 42 Fi 310 (Pierrot et ses compagnons).
19. Du tennis (AD34, 42 Fi 372) ou du vélo (42 Fi 215, 42 Fi 268), ou peut-être plus surprenant, de la boxe (42 Fi 23, 42 Fi 25, 42 Fi 26, 42 Fi 37, 42 Fi 39).
20. D’après l’âge d’Hélène sur ces clichés le phénomène observé pourrait être une éclipse totale de soleil ayant eu lieu le 10 octobre 1912 (AD34, 42 Fi 542 à 545).
21. AD34, 42 Fi 861 à 910.
22. AD34, 42 Fi 924 à 940.
23. AD34, 42 Fi 275, 42 Fi 276.
24. AD34, 42 Fi 832 à 837.
25. Bourdieu 1965, p. 41.
26. Charpy 2017.
27. AD34, 42 Fi 800 à 812.
28. Bard 2007.
29. Bard 2007.
30. Gunthert 2009.
31. AD34, 42 Fi 534.
32. AD34, 42 Fi 303, 42 Fi 415.
33. Daumard 1990.
34. Il n’est pas possible de savoir en quelle année François Blayac est entré sur la liste des avocats du tribunal de première instance de Béziers. L’Annuaire de l’Hérault n’a pas été édité entre 1896 et 1901. En 1905 l’avocat se consacre aussi à la défense des prisonniers indigents, au bureau de consultation gratuite de sa ville (AD34, PAR 1600/75 à 1600/77).
35. AD34, 3 E 177/510, 3 E 177/518.
36. Son contenu n’a pas été consulté, il n’a pas été versé aux Archives départementales de l’Hérault. Il est fort probable qu’il soit conservé chez les successeurs de maître Roussel (SCP notaires Villemain, Nouguier, Ribaud).
37. AD34, 45 Q 11/774, n°63.
38. Cette appellation en dit long sur la manière dont le lieu est perçu d’un point de vue symbolique (AD34, PAR 1600/77 à 1600/85).
39. Le n°8 de la rue Maguelone est acheté en janvier 1918 (AD34, 45 Q 1/2001, n°78), le n°2 de la rue Nationale (qui devient ensuite la rue Foch) en février 1921 (AD34, 45 Q 1/2149, n°78) et le n°8 de la même rue en décembre de la même année (AD34, 45 Q 11/7, n°60). Cette maison, dans laquelle aucun des membres de la famille Blayac n’a habité, est revendue peu de temps après, en décembre 1928 (AD34, 45 Q 11/382, n°50). Le n°2 de la rue Nationale est pour partie vendu par étage en 1940. Le reste fait l’objet de donations entre vifs en faveur de ses enfants en avril 1949 (AD34, 45 Q 11/909, n°72, 45 Q 11/931, n°17 ; 45 Q 11/1422, n°69, 45 Q 11/1421, n°38, 3 P 1748 ; 45 Q 11/1423, n°37, 3 P 1774).
40. AD34, 3 E 57/8.
41. Par exemple un portrait de groupe pour lequel les participants sont les plus nombreux, pris sur le côté de la maison de Rochet, en plan serré puis plus large, ce qui permet d’inclure la façade latérale en entier : AD34, 42 Fi 35, 42 Fi 48.
42. Par exemple : AD34, 42 Fi 302, 42 Fi 418.
43. Par exemple : AD34, 42 Fi 522.
44. AD34, 3 E 87/12, 3 E 177/518.
45. AD34, 42Fi 62, 42 Fi 64, 42 Fi 261, 42 Fi 325 à 333, 42 Fi 405, 42 Fi 537, 42 Fi 700. Située dans le quartier Fontcarrade, cette demeure et son parc ont été détruits pour construire la cité Gély dans les années 1950-1960 (Arcaix 2011).
46. AD34, 3 E 177/514.
47. AD34, 45 Q 1/1760, n°20 ; 3 P 665. Pour une biographie plus complète de Camille Saintpierre, voir la conférence présentée à son sujet devant l’Académie des Sciences et lettres de Montpellier le 17/02/2003 (Argelès, Legros, 2003).
48. La « maison de famille » est cruciale en tant que marque d’une dynastie familiale -, quels que soient son rang la et sa fortune -, pour l’enraciner dans un temps long et dans une zone géographique précise (Pinçon, Pinçon-Charlot 1996 ; Ubaud 2017).
49. En août 1937 Joséphine, propriétaire du bien, signe une donation à titre de partage anticipé en faveur de ses trois enfants. Le domaine de Rochet demeure entre leurs mains jusqu’en 1971. Après cette date, devenu propriété de la Caisse régionale d’assurance maladie, il a été détruit. Les bâtiments d’origine ont laissé place à la clinique médicale du Mas de Rochet (AD34, 45 Q 11/774, n° 63 ; 1605 W 264).
50. Notamment sous la neige : 42Fi 448, 42 Fi 450, 42Fi 451, 42 Fi 468, 42 Fi 514, 42 Fi 515.
51. AD34, 42 Fi 460 à 462 (foudres et pressoirs) ; 42 Fi21, 42 Fi 24 (transport du foulograppe) ; 42 Fi 758 à 760 (premier tracteur).
52. Les vues ont sans doute été prises lors d’une promenade avec Joséphine et Raoul : AD34, 42 Fi 473 à 475.
53. AD34, 3 P 665. Un historique des lieux paru dans l’édition du Midi-Libre du 25 octobre 2018 élargit le suivi des familles qui y habitent et remonte jusqu’à son édification à la fin du XVIIIe siècle et à son propriétaire, Jean Rochet, frère de Jean-Jacques Rochet, agriculteur et maire de Castelnau-le-Lez. (Journal disponible en version numérique en salle de lecture virtuelle des AD34).
54. AD34 42Fi 222, 42 Fi 351.
55. La Villa Erialc est depuis 1970 occupée par l’École des beaux-arts de Sète. Un historique de la demeure est disponible sur leur site internet, à l’adresse suivante : https://beauxarts.sete.fr/page-ecole/page-menu-ecole.html
56. AD34, 42 Fi 387.
57. AD34 20 Fi.
58. Fridenson 1972.
59. Par exemple : AD34, 42 Fi 295 (De Dion-Bouton) ; 42 Fi 40, 42 Fi 792 (torpédo).
60. AD34, 42 Fi 36.
61. AD34, 42 Fi21, 42 Fi 24 (camion) ; 42 Fi 758 à 760 (tracteur).
62. Quelques photographies appartenant au fonds de famille de Gaston Racanié-Laurens (1854-1924), avocat à la Cour d’appel de Montpellier, illustrent cet usage du véhicule hippomobile comme marqueur de prestige en lieu et place de l’automobile encore à la fin du XIXe siècle et au tout début du XXe siècle (AD34, 24 Fi 47 à 50).
63. AD34, 42 Fi 73, 42 Fi 253 à 255.
64. AD34, 42 Fi 100, 42 Fi 118, 42 Fi 130, 42 Fi 702 à 717.
65. L’inventaire de son fonds, conservés aux Archives départementales de l’Hérault, en témoigne (AD34, 267 J).
66. AD34, 42 Fi 356 à 371.
67. Barral 1977.
68. AD34, 42 Fi 277 à 279.
69. AD34, 42 Fi 275, 42 Fi 276, 42 Fi 350 (parc privé) ; 42 F 308, 42 Fi 349 (carnaval).
70. AD34, 42 Fi 824, 42 Fi 825.
71. AD34, 42 Fi 323, 42 Fi 324, 42 Fi 346, 42 Fi 797 à 799.
72. AD34, 1 R 1078 ; Cazals 2008a ; Cazals 2008b ; Cazals 2014.
73. AD34, 42 Fi 454 à 458.
74. Ces plaques de verre stéréoscopiques, achetées sur catalogue, qui peuvent être fournies avec le stéréoscope pour les visionner en tri-dimension, sont répandues dans les familles. Deux ensembles de ce type sont conservés aux Archives départementales de l’Hérault, le fonds Giscard-Ruf (AD34, 41 Fi) et le fonds Gabriel Cadilhac (AD34, 48 Fi).
75. AD34, 42 Fi 614, 42 Fi 597, 42 Fi 564, 42 Fi 584, 42 Fi 591.
76. AD34, 42 Fi 572, 42 Fi 590, 42 Fi 663, 42 Fi 613, 42 Fi 615, 42 Fi 660, 42 Fi 664, 42 Fi 586.
77. AD34, 42 Fi 572, 42 Fi 581.
78. Denoyelle 1997, 93.
79. AD34, 5 Mi 58/4 ; AM Montpellier, 4 E 48.
80. AD34, 45 Q 11/774, n° 63.