Henri Prades dit Pascal (1920-1989)
Henri Prades dit Pascal (1920-1989)
Publication du
G.R.E.C. n° 228-229-230-231
(2e semestre 2021)
p. 43 à 47
Dossier coordonné par Pierre-Joan Bernard et Jean-Claude Richard Ralite
Introduction
Henri PRADES « Pascal » (1920 1989) a été l’un des meilleurs chefs de groupe du Maquis Bir-Hakeim. En 1945, l’Inspecteur d’Académie demande à chaque chef d’établissement de lui fournir un rapport sur leur relation avec la Résistance. Ces rapports sont soit globaux soit individuels. C’est le cas pour Henri PRADES dont le rapport d’activité est présenté par trois anciens responsables du Maquis.
En 1945 [?], Henri PRADES a édité une plaquette de 11 pages : Le commandant DEMARNE dans la Résistance, sans date qui s’ouvre par des citations et se poursuit (p. 511) par un texte d’hommage au Commandant de ce maquis, mort au combat en août 1944.
Il nous a donc semblé bienvenu d’éditer ces deux textes qui soulignent l’activité d’un Maquis de l’Hérault.
Henri PRADES, originaire de Nébian, est nommé instituteur en septembre 1942 à Saint-Saturnin. En 1943, il fait un séjour aux Chantiers de Jeunesse et fin 1943 il entre dans la Résistance. Au printemps 1944, il reçoit des fonds pour créer un groupe sur cette commune au Rocher des Vierges. Il appartient au maquis Bir-Hakeim et a sous sa responsabilité le groupe du Rocher des Vierges. Il n’est pas présent à La Parade et en août 1944 ; il rejoint Montpellier. Après un stage au Valdahon, en novembre il reprend son poste à Saint-Saturnin puis à Octon. À la rentrée 1958, il est nommé à l’école de la Pompignane à Montpellier (groupe scolaire Painlevé) où il termine sa carrière. Il est le type de l’instituteur laïque, patriote et républicain. De 1958 à 1989, il consacrera l’essentiel de ses libertés à la recherche archéologique et au site de Lattes à partir de novembre 1963 dont les découvertes ont permis de réaliser le Musée archéologique Henri Prades (1986).
Bibliographie :
— F. DELMAS et J.-C. RICHARD, « Henri Prades, 1920-1989 », Encyclopedia Universalis, Vies et portraits, les vies, Paris, 1989, p. 617-618.
— Marguerite PRADES, De Bir-Hakeim à Lattara : combats et passions…, Octon, 1996.
Rapport sur l’activité au Maquis de Monsieur Henri PRADES
dit Pascal, instituteur à Saint-Saturnin (Hérault)
Jeune Instituteur révoqué en 1940, ayant un frère en captivité en Allemagne, reprend son service en juillet 1941 par suite du retour de son frère évadé.
Convoqué au chantier de jeunesse en 1941, il manifeste ouvertement son mécontentement sur la trahison de Vichy, dénonce les abus de ses chefs et commence déjà à organiser la résistance. À la fin de ce stage, il revient avec la mention suivante : « esprit d’indiscipline ».
Au cours de l’hiver 1942-1943, PRADES essaie de constituer avec quelques collègues un groupe de résistants, après bien des difficultés ce groupe est disloqué par suite de l’appel des intéressés pour l’Allemagne (S.T.O.), malgré les efforts de Mr. l’Inspecteur David et du camarade Renaud de l’Académie, le départ est fixé au 24 juin 1943.
PRADES prend le chemin des Cévennes et entre au Maquis d’Ardaillers (Chef de Groupe, le Pasteur OLIVÈS).
En juillet 1943, ce maquis est disloqué par suite des attaques allemandes. Devant ce désastre, il reconstitue un nouveau groupe au Col du Minier. Sans armes, sans nourriture, pourchassé par les Boches, ce malheureux groupe serait anéanti sans le courage de Pascal.
Il reprend contact avec les responsables : désigné pour une mission d’armes au Capitaine DEMARNE à Clermont-l’Hérault, il est de suite remarqué par cet Officier. Affecté au Maquis Bir-Hakeim, il commence la dure vie des chargés de mission, St Jean du Gard le voit au moment du désastre de La Parade où 60 des nôtres trouvèrent sous les ordres du Commandant BARREAU une mort glorieuse.
En juin 1944, il est chargé de la constitution de groupes de résistance dans la région de Nébian, Clermont-l’Hérault, Lodève, là encore il se distingue par sa prudence et son esprit d’organisation.
Enfin il est désigné pour créer un groupe-franc qui sera sous ses ordres et à la disposition du Commandant DEMARNE.
PRADES remarqué par son Commandant pour son patriotisme, attaque sans répit, causant parfois de très lourdes pertes à l’ennemi, c’est une véritable terreur pour les Allemands.
Chef de poste à Saint-Félix de Lodez, il est chargé du ravitaillement des maquis de la région. Durant cette époque, pour nourrir ses camarades, et même la population civile, il attaque convoi sur convoi, réussissant parfois à faire même des prisonniers.
Par ses fonctions, il était chargé de la Police de la région, là encore il fut un homme droit, frappant énergiquement les traitres, et soulageant les faibles. C’est durant cette période que nous avons tous particulièrement remarqué chez PRADES cette culture, droite et honnête de l’Instituteur.
En août 1944, il participe à tous les parachutages de la région, son courage et son initiative, bien souvent épargnant l’accrochage si redouté, accomplissant sans aucune perte ces dangereuses missions.
— À la mort du Commandant DEMARNE, il est nommé officier adjoint au Capitaine MONTAIGNE qui reprend le commandement du Maquis. Il reste à ce poste jusqu’à la Libération.
— Aussitôt, il reprend du service au Ier Bataillon de l’Hérault comme Aspirant, là encore il continue de servir.
— Pour terminer nous devons dire que PRADES fut vraiment un héros du maquis, un brave obscur, il incarnait le type parfait de l’éducateur.
— Dur avec conscience, intransigeant devant le devoir, animé envers ses camarades de cette bonté que seuls les vrais soldats de France connaissent.
— Démobilisé le 11 novembre 1944, il reprend modestement et avec la même foi son métier d’instituteur qu’il aimait tant.
— VAGNY Jean dit Yves, Officier au Maquis Bir-Hakeim, 13 Bd Gambetta, Montpellier. WAGNY.
— PANNOUX Pierre dit Aimé, Renseignements de l’A.S. et du maquis Bir-Hakeim, Saint-Félix-de-Lodez. PANNOUX.
— FIOLS Robert dit Spahis, Officier au maquis Bir-Hakeim, en congé à Saint-Félix-de-Lodez. FIOL.
Le Commandant DEMARNE, par Henri PRADES
Le Commandant DEMARNE est une personnalité tellement complexe qu’il serait audacieux de tenter d’en faire un portrait sans en rien omettre d’important. Nous ne ferons que noter quelques traits essentiels de cette riche nature, dans le domaine de la Résistance.
Au physique un homme moyen, élancé bien qu’un peut voûté, amaigri dans les dernières semaines par l’excès de fatigue, mais vif, alerte, vigoureux, inlassable, d’un tempérament très nerveux, capable de supporter des fatigues insurmontables à un homme moyen, remis, après quelques heures, parfois moins d’une heure de repos, bref d’une endurance et d’une énergie exceptionnelle.
Ce qui frappait le plus dans son visage c’était son regard mobile, vif, pénétrant, sombre et brillant, inquisiteur et ironique à la fois. Ce regard donnait à sa physionomie d’un brun remarquable une vie intense et d’une beauté particulière. On a franchement plaisir, un plaisir indéfinissable à retrouver le même regard chez ses enfants. Il était l’image exacte d’une intelligence non moins hardie, profonde et audacieuse, sûre d’elle-même sans suffisance, à peine téméraire quelques fois car DEMARNE était pieux, fermement attaché à certaines traditions et il avait un amour profond de la famille. Pourtant jamais cet amour ne l’a ébranlé dans son ardent patriotisme, et bien que cette double conviction soit probablement à la source de plus d’une situation cornélienne, le sens du devoir l’emportait sur toute autre considération.
Dès les premières heures de notre époque héroïque, il fonda l’A.S. (Armée Secrète) de laquelle il se sépara dans les conditions que l’on connaîtra bientôt.
Sa personnalité se montre une première fois dans la constitution de son premier groupe de combat qui fut, du point de vue patriotique, un groupe d’élite. Il choisira ses hommes à la façon de LYAUTEY et la simple démarche d’un candidat lui en dit quelque fois plus long que tous les curriculums vitae de la création. Il est curieux de constater qu’il se soit rarement trompé.
Il est vraiment flatteur d’être estimé de lui comme il est terrible d’en être méprisé car d’un mot (ou d’un geste parfois très énergique) il désarme son adversaire. Je l’ai vu à plusieurs reprises qualifier ses interlocuteurs avec une franchise et une justesse de vue telles qu’il les laissait muets comme des carpes.
Entre cette période et les heures tragiques de La Parade, il apparaît comme un homme fougueux, ardent et dont les décisions éclairs sont bien souvent salutaires. Faut-il des « Aussweiss » ? Il entre aussitôt en contact avec un entrepreneur qui, malgré la fortune amassée auprès des Allemands, se révèle une très forte personnalité. Il l’ébranle par son attitude et le décide à voler aux Officiers Allemands les laissez-passer nécessaires. Faut-il une autorisation de circuler ? DEMARNE la trouve, elle est en blanc, qu’importe ? Il la remplit d’indications fantaisistes. Un jour un Allemand monte sur le marchepied de sa voiture. Il le descend avec une balle dans la tête. Le tout a duré quelques secondes. Un second Allemand, témoin du drame, se sauve à toutes jambes. La route est libre. Chauffeur aux réflexes déconcertants, il force avec aisance plusieurs barrages et si, parfois certains gendarmes font des difficultés… il les enlève. À ses côtés, le spleen, cette maladie infantile du Maquis n’existe pas. À peine une fois l’avons nous entendu dire : « Qu’est-ce qu’ils attendent les autres pour débarquer ? » Mais il n’a guère le temps de s’abandonner à cette inquiétude. Il n’est pour ainsi dire jamais en repos. On peut affirmer sans crainte d’erreur que, même quand il n’était pas traqué, il lui est arrivé de rester 24 heures et même 48 heures sans manger, ni dormir. Malgré ce surmenage, il reste d’une compagnie agréable, il plaisante même au P.C. Pierrot [MANZANERA] est une tête de turc bien complaisante qui se fige dans une immobilité impeccable quand, après une solide bourrade, le Commandant lui affirme d’un air terrible, à vous faire frémir : « Pierrot, je te tuerai ». C’est une de ses phrases favorites Quand la situation est vraiment pénible, d’un mot familier DEMARNE résume l’opinion de tous et détend les physionomies et les cœurs. « Ça commence à devenir saumâtre ».
Il y a même dans le domaine du cœur, non seulement la bonté dont nous avons eu maintes preuves, mais encore comme une certaine naïveté qui le fait se rapprocher d’instinct de ceux qui lui paraissent avoir une nature droite et simple. On l’a vu, les larmes aux yeux, parler de l‘une de ses adorables filles jumelles qui était fatiguée. Un jour, la résistance organise à Canet une cérémonie et l’on entend une vibrante marche Lorraine. DEMARNE est ému. Sur quel ton il dit à Pierrot : « Que c’est beau, Pierrot !! » Celui-ci en est bouleversé.
Mais la période où DEMARNE donne la pleine mesure de ses moyens est celle qui s’étend de La Parade à sa mort. Son but : ressusciter Bir-Hakeim. Ses moyens : sa personnalité. L’atmosphère de ce combat inlassable : les recherches et les efforts ininterrompus de la Gestapo qui vise Bir-Hakeim dans son chef. J’ai dit qu’à ce moment-là DEMARNE fut à la fois un malheureux et un géant.
Malheureux, oui il l’est même s’il n’en laisse rien paraître pour que le moral du Maquis reste fidèle et solide ; sa famille qu’il aimait tant « une femme qu’il chérissait, un fils qui est son image vivante et deux délicieuses jumelles » fut pour lui l’objet d’un souci constant. Il était pleinement conscient du danger qu’il leur faisait courir. Il se savait connu, visé, traqué.
Il n’a jamais tremblé pour lui mais que de fois il a eu peur pour les siens, lui qui connaissait les méthodes de certains Allemands… et Français !
Après l’arrestation de Mme MONTAIGNE, de son fils et sa périlleuse évasion (elle avait tant été secouée qu’elle en avait un moment perdu la raison), DEMARNE vécut des heures difficiles à qualifier. Seuls peuvent comprendre ces heures lourdes d’inquiétude, les Camarades de la Résistance qui avaient une famille. Aussi, ceux qui n’étaient pas ses parents directs lui reprochaient-ils les dangers qu’il faisait courir à tout le monde.
Après le repli de La Vacquerie, il se présenta en assez piteux état physique à l’un de ses parents ou alliés éloignés. Je crois qu’une tasse de café lui fut refusée avec cette allégation : « Je ne me fais pas tuer pour un Maquisard ».
Certes, à Canet même et ailleurs, DEMARNE a connu des amitiés saines, solides et profondes, des amitiés d’homme simples et de parents fiers, mais il les côtoyait si peu et il y avait tant d’amertume parfois chez lui !!
Car il y avait d’autres sources de tristesse et, en particulier, les intrigues mêmes de certains Résistants, lui causèrent souvent une impression pénible. Notre époque enfin et plus encore notre Région le peinaient.
Un jour la plupart des coiffeurs de Clermont refusèrent de le raser parce qu’il était trop compromettant. Et la majorité des gens chez nous a brillé davantage par ses critiques spirituelles contre le Maquis que par l’aide apportée à ses membres. Malheureux enfin pour ce Bir-Hakeim que les heures saignantes de La Parade avaient assombri. Bien qu’il fût avant tout un soldat et qu’il n’eut jamais abusé ses hommes, on comprendra combien sa conscience le tourmentait quand il incorporait de nouveaux éléments. À travers les réparties de ce boute-en-train, on sentait malgré tout un voile de mélancolie profonde qui, bien qu’habilement déguisé à ceux qui l’entouraient, aurait fort ressemblé à du découragement, n’était sa foi inaltérable en l’avenir de la Patrie.
C’est dans de pareilles conditions morales, trop brièvement analysées que DEMARNE mena la vie d’homme traqué que l’on connaît.
Il déplaçait sans cesse son P.C. et son Maquis malgré son réel mépris du danger, car Bir-Hakeim devait vivre avant tout. Il glissait sans arrêt entre les doigts de ceux de la Gestapo. Sa connaissance de l’Allemand lui rendit de grands services. Les trahisons même furent inopérantes contre lui, car il était constamment en éveil et prenait parfois des décisions foudroyantes fort judicieuses : lors d’une réunion de la Résistance, soudain on le vit se lever, prendre sa veste sous le bras et gagner les quartiers hauts de la ville avec un seul mot : « Allez ! Hop ! ».D’une puissante voiture allemande à 50 mètres descendaient plusieurs officiers allemands, à quelques pas d’un des cafés fréquenté par le Maquis. En quelque secondes DEMARNE, ayant pressenti la dénonciation et la rafle, était hors de portée. Au cours de la rafle du 12 juin où les Allemands mobilisèrent des forces plus importantes, forts des précisions d’un agent, Roby [Ruby], il décroche en pleine ville en se couvrant et en couvrant Jackie, grâce à une grenade dont il menaçait les boches.
Comme on le voyait partout, à tout moment, tout le monde était convaincu de son arrestation prochaine ou de sa mort probable. Chacun connaissait cet homme d’un brun caractéristique qui se promenait avec une veste marron sous le bras, et laissait voir, parfois sans se rendre compte, le crosse de son pistolet. Le jour où il fut tué combien de gens dirent, à 30 km à la ronde, avec un accent de conviction profonde et de fierté toute intime : « Il y a longtemps que je vous l’avais dit ». On sait bien que pareil accident ne risquait pas d’arriver à ces gens là. Mais je m’excuse de leur dire que le Commandant DEMARNE n’était ni un imprudent, ni un bluffeur ni un inconscient. Car d’une part il avait d’autres chats à fouetter que de vanter les bienfaits du Maquis et, d’autre part, j’affirme qu’il était prudent et je souhaite à ceux qui ont tenté bassement de le diminuer d’avoir autant de clarté dans les idées que celle dont il a fait preuve en Résistance. Car s’il se permettait certaines audaces, c’est qu’il voyait venir le danger et qu’il avait assez de mobilité dans le regard et dans le mouvement pour y échapper à coup sûr. Il n’est pas mort en téméraire. Il est mort parce que ses hommes se battaient et qu’il a volé à leur secours, en Chef digne de ce nom.
D’ailleurs DEMARNE se reposait beaucoup sur Pierrot qu’il savait très perspicace. Enfin il n’avait pas le temps, dans ses multiples actions, de prendre beaucoup de précautions. Il avait beaucoup trop à faire et il est ici impossible de donner une idée, même approximative, de ce que fut son travail. Avant tout il y a la résurrection de Bir-Hakeim qui est son chef-d’œuvre. Ces deux dizaines de rescapés de La Parade et des premières aventures faisaient, il faut l’avouer, fin mai, une bien triste mine. Le boulanger de Saint-Saturnin peut se rappeler de deux hommes qui, à cette époque là, vinrent un jour mendier quelques kilos de pain pour leurs Camarades : mal rasés, les vêtements déchirés, mal chaussés, les traits tirés et durcis par la fatigue, la voix grave malgré leur jeune âge, ils faisaient naître la pitié au cœur de ceux qui les voyaient. De ces quelques éléments qui avaient pu, juste, sauver quelques armes, au Maquis d’août, il y a un pas de géant. Certes, il y a l’apport de MONTAIGNE et de la Résistance. Reconnaissons que cet apport ne fut pas négligeable. Mais il y a surtout l’inlassable action de DEMARNE.
DEMARNE est partout. Il a véritablement le don d’ubiquité : auto, moto, vélo, marche à pied, tous les moyens où il reste maître de sa vitesse sont bons à ses déplacements. Il est partout et nulle part. Il surgit où on l’attend le moins, confère avec l’un, avec l’autre, surmonte la crise des vêtements, celles des chaussures, celle des effectifs, celle de l’argent, celle des vivres, organise des secours pour les parents de Maquisard, utilise toutes les bonnes volontés, récupère des armes, les fait remettre en état, entraîne ses hommes, collecte des produits pharmaceutiques, garde un contact étroit avec l’Anglais Raymond et avec les Résistants de Clermont, envoie à des dizaines de kilomètres son impeccable agent de liaison Marcel COMPAN qui sera tué quelques jours après lui, organise la résistance dans certains villages, punit quelques collaborateurs notoires, trafiquants du marché noir (saisies de miel, viande, pommes de terre, etc.) et faux Maquisards, prépare l’évasion de Jacky à Montpellier, aide en argent et en vivres les familles de ceux qui ont été victimes des Allemands pour faits de résistance, secourt la population civile, etc. Tout cela en poursuivant la Résistance armée. Il tisse dans le secteur, inlassablement, avec une patience obstinée, un filet souple et robuste qui réunit tous les éléments désireux de participer activement à la libération du territoire.
De cette vaste organisation aux racines profondes il est incontestablement l’âme, la tête et le bras. L’âme par son ardent patriotisme et le dynamisme qu’il a su insuffler à tous ; la tête car il est celui qui a tout conçu, tout préparé, tout obtenu ; le bras car Bir-Hakeim, derrière lui, marche comme un seul homme et de cette force les Allemands ont peur et quelle peur !
Après le coup de La Parade, dans notre Région, une impression de tristesse profonde entoure le seul nom de Bir-Hakeim ; plusieurs enfants du pays y trouvèrent la mort. La crainte de l’occupant était telle que DEMARNE qui osait lui faire face était l’objet d’une sorte de réprobation à peu près unanime. À sa mort tout le monde vous parlait de Paul comme s’ils eussent été des amis intimes depuis leur plus tendre enfance. Voilà l’hommage involontaire de la population. On est fier, chez nous d’avoir connu cet homme ; à l’heure actuelle cet état d’esprit persiste et s’affirme. Les Allemands eux-mêmes ont rendu hommage à sa valeur par cette phrase caractéristique : « DEMARNE mort ? Quel bonheur ! », et par les ordres sévères qu’ils firent respecter au moment des obsèques. Depuis la population unanime est venue s’incliner sur sa tombe à plusieurs reprises au cours de cérémonies grandioses. Pour tous, il personnifie la Résistance dans ses multiples aspects et on en a fait, en toute justice et pour une longue période d’années, un Héros Régional glorieux et inaltérable.
PRADES Henri
A la suite, Citation militaire de DEMARNE
et Citation du Quartier Général des Forces Interalliés.
[ADH, 324W8]