Cahiers du Haut-Vidourle N° 7 – janvier 1999

Les Cahiers du Haut-Vidourle entament leur quatrième saison. Au cours des numéros précédents, la variété des articles publiés a montré combien l’histoire des Basses-Cévennes est riche et combien de pans d’ombre n’attendent que l’éclairage nouveau, fruit du travail de chercheurs locaux.

La quête historique continue. Cette année les nouvelles contributions nous ramènent aux racines même de l’histoire cévenole. Sous un titre racoleur, certes, Jean-Marie COLOMINA se propose de nous guider à travers les gouffres et avens qui parsèment le sous-sol de notre contrée. Sa contribution sera riche et diverse, reflétant ainsi la variété des sites et la complexité de ces profondeurs chtoniennes qui ont toujours fasciné nos ancêtres. La démarche se veut originale car elle implique à la fois une connaissance du site et l’historique de l’acquisition de cette connaissance.

De prime abord, l’article de Rémy AZÉMAR paraît sans doute plus austère. Un lecteur avisé pourrait lui reprocher de s’éloigner des limites de notre étude. Pourtant sa recherche s’inscrit dans nos préoccupations profondes. Bien malin celui qui pour les temps reculés pourrait défendre une différence culturelle profonde entre les hauteurs des Causses et celles plus torturées des Cévennes. Ce serait aller bien vite en besogne et omettre que les Cévennes participent, tout comme les horizons caussenards, à l’aire des mégalithes, autant, si ce n’est plus, que la lointaine Bretagne. L’attitude de l’homme face à la mort nous concerne tous, le maintien des pratiques sur d’anciens lieux d’inhumation atteste de cette continuité dans le trend historique. En bon historien, Rémy AZÉMAR n’oublie pas que si l’histoire ne peut pas toujours être le récit que l’on attend, elle demeure l’enquête chère à Hérodote, et son travail ne néglige nullement les travaux des autres sciences ; le résultat est un travail de synthèse où l’on passe progressivement du dolmen à la paroisse.

Les préoccupations de Roland CASTANET nous ramènent vers une actualité pressante et angoissante. L’Euro sera bientôt une réalité pour tous. Et si les anciens et les plus jeunes regimbent contre cette transformation qui va bouleverser nos vies – paraît-il – il est bon de rappeler qu’il y a à peine deux cents ans, nos bons légistes ont fait basculer la France dans le monde du système métrique et décimal. L’exposé savant qui précède les changements intervenus montre combien les responsables de l’époque ont agi avec prudence. L’histoire ne nous dit pas comment les humbles ont réagi face à ces kilomètres qui remplaçaient les lieues, les toises. Il semble que ce soient les buveurs qui aient gardé le dernier mot. On n’invite jamais un ami à boire un décilitre, mais bien un pot au troquet !

Moins douloureuse sans doute est la « révolution silencieuse » qu’évoque Fernand LÉONARD qui retrouve le souvenir d’une réunion cantonale au temps d’avant la décentralisation (loi du 2 mars 1982, dite loi Defferre). Si le travail consciencieux des fonctionnaires et des élus – trop souvent décrié sans doute par un public impatient – est bien décrit, la nature du texte même montre combien les initiatives des élus étaient suspendues aux avis favorables des autorités et combien l’organisation de telles réunions réclamaient de doigté et de patience. L’importance accordée au préfet, même si le texte émane d’un stagiaire, montre que la préséance régalienne des représentants de l’État était une réalité incontournable. Nos élus y ont sans doute gagné depuis en efficacité, et nos lecteurs apprécieront le décalage chronologique entre la date des décisions prises et leur réalisation définitive !

Toutes ces contributions montrent que l’actualité trouve ses racines profondes dans notre passé; pas un événement actuel auquel nos ancêtres n’aient déjà été confrontés! C’est sans doute là le mérite des Cahiers du Haut-Vidourle que d’éclairer notre présent à la lueur du passé.