Les Amis de Clio

Cahiers du Haut Vidourle N° 11 - janvier 2001

Histoire et Ethnologie
en Piémont Cévenol

76 pages

Amis de Clio Avant-propos

Pour inaugurer le XXIe siècle, Les Cahiers du Haut-Vidourle abordent pour la première fois le Moyen-âge. Cette période qui fut tour à tour tant décriée puis tant encensée reste la matrice de l’Europe. C’est à cette époque que se mettent en place les territoires et les pouvoirs qui vont perdurer jusqu’aux temps modernes et laisser leur trace jusque dans nos circonscriptions contemporaines. Loin d’être un monde cloisonné, où chacun serait isolé par les difficultés de communications et de déplacements, il apparaît étonnamment ouvert et traversé d’influences multiples.

Michèle Roux-Saget et Louis-Paul Delplanque nous montrent ainsi comment les Bermont de Sauve furent liés aux monarchies anglaises et françaises ; ils ouvrent la chronique des temps héroïques par ce qui nous en reste de plus visible : les châteaux. Il fallait d’abord situer ces hommes et ces femmes qui en ordonnèrent les constructions, en défendirent les abords, y vécurent et y régnèrent, pour pouvoir ensuite découvrir chacun d’entre eux. Aussi le premier article du Millénaire des châteaux nous plonge, avec délices, dans les généalogies et les héritages de ces dynasties locales dont les rêves d’autonomie du XIIe siècle furent brisés par la monarchie française triomphante incarnée par cette maîtresse femme que fut Blanche de Castille.

Ensuite, ce sera à une visite guidée, château après château que nous convieront les auteurs, de la vallée du Gardon à celle du Vidourle.

Jean-Marie Colomina achève sa descente de notre fleuve entre Saint-Hippolyte et Sauve. Un parcours beaucoup plus long qu’il n’apparaît en surface, les lecteurs ont déjà reconnu un réseau qui semble sans fin sous la plaine de Conqueyrac. Toujours sur les traces du maître, le père de la spéléologie E. A. Martel, il dresse l’état des découvertes publiées à ce jour et surtout de l’étendue de ce qui reste à découvrir, du côté de Coutach et de Mus. Le haut Vidourle garde encore beaucoup de mystères et si aujourd’hui le contrôle de ses crues est à peu près complet, on est loin de connaître l’ensemble du réseau souterrain qui les provoque et les alimente. Mais les découvreurs ne manquent jamais à l’appel et si Les Cahiers du Haut-Vidourle, par cette série d’articles, ont pu contribuer à conforter ou à lancer des vocations, nous nous en réjouissons.

Alice Gabriel présente dans un deuxième article sur le XVIIIe siècle la description du système fiscal d’Ancien Régime à Saint-Hippolyte. L’argent est le nerf de la guerre, mais aussi celui de l’embellissement de la ville qu’elle avait décrit dans le numéro précédent. On sait la prospérité de la ville à cette époque, grâce au développement industriel lié aux activités agricoles de l’élevage du mouton (laine et cuir) et de celui des vers à soie (filatures et bonneteries), sans négliger la vigne, les oliviers, les céréales et le chanvre !

L’auteur montre la négociation constante à trois, le conseil politique de Saint-Hippolyte, les États du Languedoc et l’intendant, roi présent en la province. Sans oublier les réclamations individuelles qui attisent constamment le feu de la résistance aux impôts. Elle montre bien comment plus que de son poids absolu, c’est de sa complexité, de son opacité et de son inégalité que le système fiscal royal grève les revenus des contribuables. Une façon de comprendre comment des bourgeois, prospères et participant à la gestion des affaires publiques, ont pu se lancer aussi rapidement et complètement dans l’aventure de la révolution. Car ce sont bien les mêmes, collecteurs de taille, maires, consuls, receveurs d contributions, baillistes du courtage ou de la subvention, qui vont en 1789 prendre les rênes du nouveau pouvoir, abolir les inégalités d’imposition, créer une administration fiscale. La révolution est aussi une rationalisation de l’État.

Mais un numéro des Cahiers ne peut pas se passer d’une évocation religieuse ! Après les Mémoires de l’abbé Pialat publiés dans les premières livraisons, c’est la biographie d’un pasteur qui va faire l’objet de notre feuilleton. Le manuscrit provient d’archives privées, d’une famille apparentée au pasteur Martin (1757-1838) dont un fils a écrit cette biographie. Les dernières années de l’Ancien Régime et toute la révolution sont exposées, brièvement, à travers le renouveau, le Réveil du protestantisme du début du XIXe siècle, à Saint-Hippolyte puis à Bordeaux.

L’eau, les pouvoirs, la religion, une trilogie qui rythme toutes les sociétés et dans laquelle Saint-Hippolyte a joué et joue toujours un rôle dont elle a rarement écrit le texte mais qui n’empêche pas l’affirmation d’une forte personnalité.

Sommaire

L’impôt à Saint-Hippolyte à la fin du XVIIIe siècle :
fiscalité royale et fiscalité locale

Si la fiscalité est aujourd’hui un sujet central, elle l’était déjà sous l’Ancien Régime, ce dont témoigne l’abondance des délibérations concernant les impôts dans les registres de la communauté de Saint-Hippolyte.

À la fin de l’Ancien Régime, le système fiscal est le fait de siècles d’élaboration par les différentes monarchies qui se sont succédé sur le trône de France. Ce système fort complexe, qui faisait appel à un important personnel, sollicitait les Français pour de nombreuses contributions.

À Saint-Hippolyte, la fiscalité s’exerçait dans le cadre des États du Languedoc et plus précisément dans celui du diocèse (civil) d’Alès. C’est pourquoi, avant de s’intéresser aux rouages et aux fonctionnements des impôts royaux et locaux pesant sur les Cigalois, il est nécessaire de se pencher sur le système fiscal languedocien, car toutes les provinces françaises n’étaient pas soumises au même régime fiscal.

Les dessous du Vidourle (suite & fin)

Jusqu’à présent, les quelques cavités étudiées dans les Cahiers, témoins ou regards sur le cheminement de cette eau disparue, nous permettent d’en définir un tracé assez précis et d’imaginer une circulation souterraine sensiblement parallèle au lit aérien du Vidourle tout au moins dans la première partie de son cours hypogé.

Aven de Banelle, Aven et Évent de la Blode, Aven des Gosses, Aven-évent des Cambous, Aven Volpellière, Grotte de la Roquette, Résurgence et Évents de la Roquette, Grotte et Résurgence de la Paulerie, autant d’indices, de témoignages de l’obstination passée ou présente du Vidourle à vouloir se dissimuler aux regards des hommes en s’enfonçant de plus en plus profondément dans le sol dans sa fuite vers la mer.

Le millénaire des châteaux : du Gardon au Vidourle (1)

Les balades « nez au vent » sont souvent propices à de multiples découvertes : fleurs, champignons, fossiles, etc. Le hasard peut guider le promeneur en dehors des sentiers battus pour lui faire dénicher, au milieu de fourrés souvent inextricables, des amas de pierres ou des rochers ruiniformes qui, en les regardant de plus près, s’avèrent être des restes de châteaux, témoins de notre histoire. Pour peu qu’il soit curieux le dénicheur va tenter d’en savoir plus. Tel un Sherlock Holmes il va décortiquer dans les bibliothèques, les archives départementales, régionales, toute la littérature du pays. Mais légende et Histoire (avec un grand H) sont intimement mêlées et il est difficile dans cet écheveau de tirer le bon fil. De plus, les textes anciens sont en latin et le lecteur n’est pas forcément un « latiniste distingué ». Les interprétations peuvent quelquefois être erronées d’autant plus que les manuscrits eux-mêmes sont rédigés dans une forme souvent obscure.

Notice sur la vie du pasteur Martin (1)

Monsieur François Martin, né le 10 mars 1757 à Saint-Jean-du-Gard, fils de François Martin et d’Élisabeth Marion, son épouse, issu d’une famille moins distinguée par les biens de la fortune, que par son exacte probité, et son zèle pour la religion réformée, qu’elle professait depuis l’origine de la Réformation, manifesta dès sa plus tendre jeunesse, un goût particulier pour le ministère évangélique. Son aïeul, et son père, qui furent successivement membres du consistoire, et dont la maison était l’asyle (sic) des pasteurs persécutés, virent avec plaisir, que cet enfant augmenterait le nombre des ministres d’une religion qu’ils chérissaient, et qui gémissait sous le joug de l’intolérance », puisque le culte divin ne se célébrait qu’à la campagne, et à une lieue de la ville, pour éviter la présence des soldats. Lorsque le jeune Martin fut parvenu à l’âge de raison, on le mit aux écoles où il apprit à lire, à écrire, et à calculer.