Description
Sète, naissance d’un port au XVIIe siècle. Le peuplement de Sète de 1666 à 1715
Colbert a voulu créer un port de commerce dans la partie occidentale du Golfe de Lion. Il semble bien, de ce qui ressort de la correspondance consultée, que le ministre de Louis XIV n’ait pas eu pour le port de projet urbain. Seuls les travaux de l’infrastructure portuaire, aspect technique et financement, le préoccupaient. Le port devait tout particulièrement permettre de charger les produits de la draperie languedocienne à destination des Échelles du Levant et en même temps donner une impulsion commerciale au Languedoc en lui donnant un accès à la mer digne de ce nom. Il s’agissait en même temps de créer une rade sûre et spacieuse où les galères des escadres de la Méditerranée stationnées à Marseille pourraient faire escale.
Pierre Paul Riquet, qui devient l’entrepreneur de Sète en 1669, veut faire de Sète l’aboutissement en mer du Canal de Jonction des Deux Mers. Sète deviendrait ainsi l’accès naturel de tout le Languedoc, jusqu’à Toulouse, au commerce en Méditerranée.
Il a fallu l’entêtement de Riquet pour mener presque à son terme l’entreprise dont les difficultés techniques et le coût ont toujours été mal évalués. Il ne peut réaliser son désir d’en faire une vraie ville structurée. Malgré les aléas des chantiers, une communauté d’hommes venus d’horizons divers s’est fixée là, vivant d’abord exclusivement des chantiers.
La fin des grands travaux au milieu des années 1680 coïncide malheureusement pour le nouveau port avec une conjoncture économique désastreuse. La population, en ces temps difficiles, est stabilisée. Elle arrive durant cette quinzaine d’années difficiles (1682-1698) à survivre d’un trafic portuaire réduit et de quelques maigres chantiers.
A partir de l’extrême fin du XVIIe siècle, l’activité du port s’intensifie. La situation de la population s’améliore. La seconde impulsion donnée à l’activité de la petite ville est paradoxalement une conséquence directe de la guerre.
I – Un village vivant au rythme d’un chantier (1666-1682)
Durant les premières années qui suivent la fondation officielle du port, en juillet 1666, volume de population et rythme des travaux entrepris sont étroitement liés.
Le site choisi en 1665 par le chevalier de Clerville pour établir le port n’était pas inhabité. Le lieu était alors bien isolé : une colline (180 m) entre mer et étang reliée à Agde à l’ouest et à Frontignan à l’est par un mince cordon littoral. De chaque côté de l’« île », le cordon sableux était coupé par un grau souvent impraticable tant à la navigation qu’aux transports terrestres. Le chemin le plus facile pour gagner l’île de Sète était la traversée de l’étang de Thau en barque.
Aussi les premiers propriétaires et exploitants agricoles venaient-ils pour beaucoup de Bouzigues. Une quinzaine de familles d’agriculteurs, une centaine de personnes en tout, vivaient dispersées dans quelques mas sur la petite plaine donnant sur les rives de l’étang de Thau, face à Bouzigues et à Mèze.
Sète semble avoir été un exutoire pour certaines familles larges et ramifiées de la petite bourgeoisie bouzigoise, comme les familles Benezech ou Goudard.
C’est sur le versant de l’île aux falaises donnant sur la mer que le port est construit. En 1666, sous la conduite d’obscurs entrepreneurs, deux chantiers sont lancés simultanément. Le curé de la paroisse Saint-Joseph distingue généralement le personnel employé sur le chantier du môle (ou jetée) et celui occupé par le creusement du canal entre la mer et l’étang de Thau. L’idée de départ était de créer un port abrité des tempêtes terribles du Golfe du Lion dans les eaux profondes de l’étang de Thau relié à la mer par un canal. Le môle construit en pleine mer ne servirait qu’à briser les lames et créer un avant-port. Guère plus d’une quarantaine d’hommes en tout sont occupés à la construction de la grande jetée de pierre. Le creusement du canal ne demande pas comme le môle de main-d’œuvre qualifiée (maçons, tailleurs de pierre, pétardiers, …) et pouvait certainement recourir aux services de saisonniers ou de la main-d’œuvre féminine fréquemment utilisée pour l’évacuation des déblais dans des paniers. Les travaux durant ces trois premières années sont modestes, piétinent et s’arrêtent même franchement en 1668.
Pierre Paul Riquet, l’entrepreneur du Canal de Jonction des Deux-Mers a obtenu en 1668 conjointement à l’adjudication du deuxième tronçon du Canal Trèbes-Agde celle du port de Sète. La notoriété de Riquet et ses relations suivies avec Colbert et Clerville, contrôleur général des fortifications, donnent une certaine impulsion aux chantiers sétois. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 1994 |
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Nombre de pages | 6 |
Auteur(s) | Claude BOYER |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |