Description
Saint-André-de-Sangonis et le « mal contagieux » de 1720
*Conservateur en chef du patrimoine (er)
Le dépouillement d’un dossier des archives du village de Saint-André-de-Sangonis (haute vallée de l’Hérault) consacré à la menace de peste de 1721-1722 après l’épidémie marseillaise montre quelles mesures sont mises en œuvre. Il indique les fermes privations de libertés décidées pour éviter l’épidémie menaçante. Elle n’atteindra finalement pas cette zone. Le croisement avec d’autres sources d’archives permettra certainement d’affiner encore l’approche, en particulier sur le plan économique.
The research of an archive file in the village of Saint-André-de-Sangonis, (Haute Vallée de l’Hérault), that dealt with the threat of plague in 1721-1722 after the Marseille epidemic, showed what measures were being implemented. It indicates a decision of a firm lack of freedom to avoid the threatening epidemic. Ultimately the epidemic did not reach this area. Cross referencing with other archival sources will certainly further clarify the research, particularly in economic terms.
Lo despolhament d’un dorsièr dels archius del vilatge de Sant Andriu de Sangònis (nauta valada d’Erau) consacrat a la menaça de la pèsta de 1721-1722 aprèp la reba marselhesa mòstra quinas mesuras son mesas en òbra. Indica las fèrmas privacions de libertat decididas per defugir la marrana menaçaira. En finala arribarà pas dins aquel airal. Lo crosament amb d’autras sorsas d’archius permetrà saique d’afinar encara l’apròcha, en particular sul plan economic.
Le cadre d’une enquête plus large dans les archives communales de St-André-de-Sangonis nous a amené à examiner le dossier répertorié « Peste de 1720 ». La mission des archives départementales en 2003 (complété en 2018) a entrepris de classer ces documents conservés dans les locaux de la mairie de la ville.
Le dossier « peste » est classé sous la cote GG11, il comprend au total moins de 50 pièces d’intérêt très inégal. Saluons le travail des collaborateurs des archives départementales qui avec cet inventaire sommaire, ont rendu ces documents utilisables.
Le dossier des « délibérations consulaires » complète le précédent. Il est conservé aux archives de la commune mais présente l’avantage d’avoir été numérisé par les archives départementales. Le volume qui nous intéresse ici est en accès libre sous la cote Saint-André-de-Sangonis. 34PUB7, il s’agit d’un volume relié qui couvre la période 1701-1726, numéroté de 1 à 473, numérisé en 2012 et dont l’ancienne référence était BB4 1.
Nous allons d’abord rappeler les conditions de propagation de cette épidémie partie de Marseille en 1720 et, après avoir présenté sommairement le village de Saint-André-de-Sangonis, nous verrons les conséquences du « mal contagieux » pour les habitants.
1 La peste de Marseille, dernière grande épidémie de peste en occident.
Nous ne reviendrons pas ici en détail sur la naissance et les diverses péripéties du mal. Sur ce sujet la bibliographie et les informations de ce numéro d’« Études Héraultaises » complètent nos données.
Rappelons seulement qu’un navire marseillais, le « Grand Saint-Antoine » de retour d’un commerce avec des ports de méditerranée orientale, voit huit de ses occupants mourir subitement. Le bateau arrive en rade de Marseille le 25 mai 1720 nanti d’une cargaison très importante, en particulier d’étoffes, à écouler à la foire de Beaucaire. Devant la menace le navire et ses occupants sont mis en quarantaine. Pour diverses raisons, dont peut-être les intérêts financiers que le premier échevin de la ville a dans la cargaison, cette quarantaine a été incomplète et mal sécurisée. Dès la mi-juin, des passagers sont autorisés à sortir et le 20 juin c’est probablement le premier décès de peste dans la ville. Il sera suivi de nombreux autres dès la fin du mois de juillet 1720.
L’épidémie progresse rapidement en foyers. Dès fin juillet, la maladie est hors de Marseille, elle atteint Aix et le Luberon. En août, c’est au tour de la Haute Provence et de divers villages autour de Marseille d’être touchés. À la fin de l’année, Arles ou Tarascon sont atteints, puis la maladie diffuse dans la Lozère actuelle, le Gévaudan.
La Provence orientale est également concernée début 1721 (Toulon, Ollioules, La Valette, etc.). À l’été 1721, la maladie frappe Avignon et le Comtat Venaissin comme la principauté d’Orange, alors qu’elle tend à disparaître à Marseille.
L’avancée est timide d’abord dans le Gévaudan et les Cévennes à partir de novembre 1720. La réaction des autorités centrales du Languedoc paraît tarder à venir alors que la première ligne de blocus le long du Rhône a été franchie. Ce n’est qu’en août 1721, au plus fort d’une deuxième vague, qu’un blocus sévère et armé est organisé autour du Gévaudan. La limite sud en est assurée par le Tarn, axe relativement aisé à garder et surveiller, ce qui est moins le cas ailleurs. Dès septembre 1721, l’emprise devient plus large. Elle est proche de Saint-André-de-Sangonis (moins de 40 km à vol d’oiseau) puisque à la hauteur de la rivière Arre, sur un axe est-ouest Le Vigan/St Hyppolite dans l’actuel département du Gard. Dans le Languedoc on peut considérer que l’épidémie a disparu à l’automne 1722.
Le danger est donc aux portes du centre-Hérault et cette proximité est un facteur de risque. Celui-ci provient des déplacements de population et ce malgré une répression terrible : on fusille, pend ou casse la tête, sans hésiter à qui franchit les limites du blocus et les lignes de défense. L’Hérault actuel, les diocèses de Montpellier, Béziers et Lodève, ne seront finalement pas atteints. Les mesures, quoique tardives 4, mises en œuvre sous l’autorité du Duc de Roquelaure, gouverneur du Languedoc et de Louis Bernage, Intendant, ont démontré leur efficacité. (8 pages et 5 illustrations)
Informations complémentaires
Année de publication | 2020 |
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Nombre de pages | 8 |
Auteur(s) | Michel-Édouard BELLET |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |