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Description

Roucher, Gossec, Simoneau ou le triomphe de la loi

Sans doute le Montpelliérain Jean-Antoine Roucher est-il connu des lecteurs de la revue Études héraultaises. Aussi ne trouveront-ils pas ici un nouvel essai biographique du poète dont la gloire et les œuvres célèbres en leur temps sont aujourd’hui quelque peu éclipsées. Cependant des travaux entrepris dans le cadre du Centre de musique baroque de Versailles ont permis d’en évoquer le souvenir en deux occurrences, la première non attestée, vers les années 1780, la seconde précisément en mai et juin 1792. Il a donc paru intéressant à ce propos d’évoquer un aspect peu connu de l’activité de Roucher, singulièrement dans ses rapports avec le musicien Gossec dont il fut sinon l’inspirateur tout au moins le librettiste occasionnel.

François-Joseph Gossec (1734-1829) est dans les années 1770-1790 un musicien réputé pour avoir acclimaté, l’un des premiers en France, le genre de la symphonie. Outre une Grande messe des morts, composée en 1760, son chef-d’œuvre, il est connu comme ancien directeur du Concert spirituel des Tuileries et les postes importants successivement occupés à l’Académie royale de musique ont fait de lui un personnage en vue du monde musical. Auteur de deux opéras, l’un Sabinus (1773) joué à la cour de Versailles, l’autre Thésée (1782) à Paris, il a conçu vers 1785-1790 le projet d’une nouvelle composition dont le sujet est l’histoire de Gustav Vasa. A l’époque, la Suède est à la mode et les voyages parisiens du roi Gustave III y ont contribué.

Sur ce thème, une collaboration entre Gossec et Roucher peut être envisagée. Ce sont des hommes « publics » et célèbres, l’un par ses travaux musicaux, l’autre par ses fameux poèmes, Glaciers (1777) et Les Mois publiés en 1779-1780. Ils se sont peut-être même rencontrés dès 1775 à l’Académie royale de musique et en tout cas leur appartenance aux loges maçonniques semble à l’époque ne faire aucun doute. Pour le poète, c’est la Loge des Neuf Soeurs où, le 17 février 1778, il accueille et lit un premier Chant de triomphe à l’occasion du retour de Voltaire à Paris. Pour Gossec, c’est celle de l’Opéra La Réunion des Arts, les deux loges comportant de nombreux artistes et surtout des musiciens qui n’hésitent pas à passer de l’une à l’autre.

De quoi s’agit-il ? Entre 1520 et 1523, le prince Gustav Vasa délivre la Suède du joug danois. Héros identifié à l’indépendance de son pays, il est le fondateur de la dynastie des Vasa. Au XVIIIe siècle, cette épopée paraît avoir retenu l’attention des littérateurs français. Ainsi, le 3 février 1733, la Comédie-Française donne un Gustaf Wasa, tragédie en 5 actes et en vers d’Alexis Piron. Vers 1780, Roucher esquisse à son tour quelques chants d’un poème intitulé Gustave Vasa ou la Liberté de la Suède, vraisemblablement d’après la traduction faite en 1779 d’un Gustav Vasa rédigé par Gustave III (1746-1793). Mais l’histoire de son lointain aïeul passionne tant le roi de Suède qu’en 1785, il propose son ouvrage à Johann-Henrik Kellgren afin qu’il en tire le sujet d’un opéra dit « national », opéra représenté à Stockholm en 1786 sous le titre de Gustaf Wasa, sur une musique de Johann Gottlieb Naumann. Le texte de Kellgren passe en France où l’histoire héroïque du fondateur de la dynastie suédoise comme on l’a vue est déjà connue. C’est peut-être à partir de ces sources, Piron, La Harpe, Gustave III, Roucher et Kellgren que le projet de Gossec de présenter un Gustave Vasa sur la scène de l’Académie Royale de musique de Paris prend forme. Tout ceci est évidemment à mettre au conditionnel puisque l’un des rédacteurs de la Biographie universelle, ancienne et moderne (L. G. Michaud 1825, tome 39, pages 89-94), Durozoir, écrit : « C’est à tort que plusieurs biographes ont avancé que Roucher avait versifié quelques chants d’un poème intitulé : Gustave Vasa, ou la Liberté de la Suède ; Il s’est borné à en tracer le plan ; il en avait rimé quelques morceaux, qui ne se sont pas trouvés dans ses papiers ». […]

Informations complémentaires

Année de publication

2005

Nombre de pages

4

Auteur(s)

Claude ROLE

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf