Paysages de Jardins

* Docteur en sociologie, cofondateur du réseau national « Le Jardin dans Tous Ses États » et… jardinier.

De quoi sont composés les paysages qui s’offrent à notre regard ? Sans doute, dans leur acception la plus courante, sont-ils l’expression plus ou moins spectaculaire des « beautés de la nature », comme un tableau s’offrant au regard de celui qui le contemple, mais lui demeure extérieur. Une sorte d’objet panoramique dont la distance contribue à magnifier ce qui est contemplé.

Lorsque l’on évoque un paysage agricole, urbain ou industriel, l’action de l’homme prédomine dans ce qu’il convient alors d’appeler la construction du paysage. On peut y lire une époque, des aspects de ses traits dominants et de son évolution, ses modes de production et de circulation, une organisation du territoire reflétant des relations sociales et des rapports de force.

Afin de mieux le comprendre, il peut être utile de se rapprocher du paysage, voire d’y pénétrer pour bien en saisir les détails. Le contemplatif devient ainsi explorateur et parfois ethnologue, pour se mêler aux acteurs de ce territoire en mouvement. C’est ce à quoi nous invitent les espaces très anthropisés que sont les jardins.

L’Histoire des jardins s’intéresse principalement aux réalisations de créateurs patentés, lesquels étaient qualifiés au XIXe siècle du terme de jardiniste, avant l’invention de celui de paysagiste, dans la seconde partie du XXe siècle. Ce sont les jardins les plus prestigieux qui ont retenu l’attention des observateurs, notamment pour ce qu’ils témoignent des représentations du Pouvoir ou du rapport à la Nature. Le petit jardin, vivrier de surcroît, reste la portion congrue de la grande Histoire des jardins.

Parmi eux, les ensembles collectifs de jardins potagers constituent une catégorie que l’on pourrait qualifier d’hybride. Ils combinent en effet différents modes d’appropriation, de manières d’être et présentent deux caractéristiques communes essentielles : ils sont séparés du domicile de leurs jardiniers 1 et ne leur appartiennent pas. Ces espaces ne constituent pas le prolongement direct de l’habitation, mais bien un lieu à part, échappant en quelque sorte à l’univers clos du domicile et mêlant étroitement sphère publique et privée.

Le département de l’Hérault en est riche à plus d’un titre. Le passé minier des « Hauts Cantons », l’accroissement et la densification des villes des plaines et du littoral sont à l’origine d’initiatives diverses depuis une centaine d’années. Nous avons choisi d’en présenter quelques-uns, établis en différents lieux du territoire héraultais, mis en œuvre à partir de projets politiques différents. De Bédarieux à Aniane, en passant par Montpellier et Sète, quels sont ces paysages, comment sont-ils conçus et comment les usages les transforment-ils ?

DES JARDINS OUVRIERS AUX JARDINS FAMILIAUX

C’est au début du XIXe siècle que se développe l’idée de procurer un petit espace de terre aux « plus démunis », notamment en Angleterre et en Allemagne (« les champs de pauvres », destinés aux indigents). Les jardins dits « ouvriers » annoncent par leur appellation leur filiation avec les révolutions industrielles en Europe, et notamment l’exploitation minière, tout au long du XIXe et de la première partie du XXe siècle.

En France, c’est à la fin du XIXe siècle que le phénomène apparaît, historiquement à Sedan, sur l’initiative d’une femme, Félicie Hervieu, militante de la Démocratie Chrétienne, qui en confiera la gestion à un groupe de femmes… ce qui est à souligner dans un univers dominé ensuite essentiellement par des hommes.

Favorisée par les sociétés charitables et les ligues antialcooliques, la création de ces potagers regroupés à proximité des lieux de production est soutenue par un patronat soucieux de contrôler un prolétariat naissant. Le projet est bien plus idéologique que philanthropique. Il repose sur l’idée d’améliorer l’ordinaire du travailleur et de sa famille, par l’accès à une culture vivrière qui ne lui est pas encore étrangère : l’exode rural pourvoit les centres industriels d’une main d’œuvre culturellement attachée à la terre et à son travail, mais instable et souvent insuffisante. La population ouvrière, sans attache urbaine ni culture d’entreprise, reste mobile, change facilement d’employeur ou retourne volontiers à des activités agricoles saisonnières (les moissons, les vendanges). Le jardin ouvrier devra contribuer à fixer à un « coin de terre » cette population « déracinée », lui communiquer l’indispensable goût pour la propriété privée et fournir une relative sécurité propre à concevoir foyer et famille nombreuse. La fidélisation au lieu de production, notamment en période de récolte, et la reproduction de la force de travail (comment fonder un foyer… sans foyer ?) sont à ce prix, somme toute peu élevé pour les nouveaux maîtres de l’industrie.

La vie collective qui se développe autour des parcelles regroupées renforce l’organisation sociale : des visites officielles, concours des plus imposants légumes ou plus beaux jardins stimulent l’effort et exaltent les conduites exemplaires. Les discours y glorifient un hygiénisme dont la double signification s’affirme sans ambiguïté : parallèlement aux nécessités incontestables d’améliorer les conditions désastreuses de logement et de santé de la classe ouvrière, se profile le dessein d’assainir ses comportements. Le jardin est « l’antithèse du cabaret 2 », grand médiateur des idées révolutionnaires et lieu de perdition pour le chef de famille et l’économie du ménage. La société industrielle naissante y gagne une main d’œuvre plus stable, capable de produire sur son temps de repos un « travail gratuit », selon l’expression de Marx, propre à compenser en partie la faiblesse de son salaire… mais aussi à faire face moins difficilement à une éventuelle période de grève. Tout cela, à l’exception de ce dernier aspect, encourage les industriels à mettre à la disposition de leurs salariés un petit jardin, situé à l’intérieur d’un ensemble de parcelles regroupées ou attenant à leur logement, sur le modèle des corons.

L’abbé Lemire, député du Nord et fondateur en 1896 de la Ligue Française du Coin de Terre et du Foyer, va faire de ces jardins l’instrument de son combat politique, afin « d’établir la famille sur la base naturelle et divine, qui est la possession de la terre et du foyer » 3. Ces initiatives connaissent un incontestable succès, renforcé par l’insécurité alimentaire des guerres ou des crises économiques. Plus d’un million de jardins industriels ou fédérés par la Ligue du Coin de Terre et du Foyer sont recensés en 1945, dans un pays d’à peine quarante millions d’habitants. C’est à cette époque que leur appellation se « déprolétarise » : le terme de jardins familiaux vient mieux rendre compte de l’évolution socioprofessionnelle du pays, tout en émancipant ces initiatives de leur genèse industrielle. En 1952, le code rural pose les bases juridiques de leur existence en prescrivant une gestion associative conformément à la loi du 1er juillet 1901. Le législateur contribue ainsi à élargir et relativement autonomiser leur fonctionnement de la vie de l’entreprise.

L’évolution des modes d’habitat (développement des lotissements pavillonnaires), de consommation et de loisirs, ainsi que la pression foncière des Trente Glorieuses semblent signer la fin d’une pratique d’un autre âge, en décalage avec les aspirations du monde moderne. À la fin des années soixante, on ne compte plus guère que 150 000 parcelles de jardins collectifs. Le jardin dit « d’agrément » supplante le potager. La jouissance d’un jardin attenant au domicile prend le pas sur l’activité de jardinage. L’évocation d’un potager renvoie à l’image d’un homme âgé, éventuellement associé à son épouse pour les fleurs, la récolte et sa conserve. Une figure du passé, appelée à disparaître avec le siècle finissant…

Ce n’est qu’à partir du milieu des années soixante-dix que les jardins familiaux bénéficient d’un petit regain d’intérêt. Les associations de jardinage trouvent dans les organisations de défense du cadre de vie et de la famille des partenaires susceptibles de vivifier leur mouvement. En 1976, la loi Royer s’associe aux actions du jeune Ministère de l’Environnement pour protéger ces espaces en voie de disparition, tout en subordonnant son soutien au respect d’une esthétique aseptisée de toute expression populaire (récupération de matériaux, extension de la cabane, clôtures bricolées…). Cela va caractériser les sites de jardins collectifs en tant qu’éléments du paysage, d’une façon qui nous intéresse plus particulièrement ici.

La paternité de la sphère industrielle et l’influence des associations caritatives tendent à disparaître, hormis pour certains sites, protégés par la taille de l’entreprise, la force de leurs syndicats ou le soutien assuré par des municipalités bienveillantes ou opportunistes. C’est le cas des Jardins du Cheminot, fortement implantés sur l’imposant patrimoine foncier de la SNCF et défendus par des syndicats très actifs, et également des jardins liés aux activités industrielles ayant généré une culture ouvrière forte (ainsi que les mines, dont Péchiney constitue un exemple que nous allons évoquer), les sites particulièrement concentrés ayant eu une influence notable sur le territoire (Nîmes pour notre région, ou Tours, pour les convictions de son maire Jean Royer évoqué précédemment).

Les jardins familiaux deviennent instruments de loisirs et de gestion paysagère, l’apport alimentaire quantitatif passant au second plan derrière la valeur symbolique du lieu, de l’activité et du produit de qualité cultivé par son consommateur. Le jardin de production se transforme, pour les classes moyennes, en espace de loisirs et de consommation. L’argument économique ne prévaut plus : « si l’on devait compter le temps qu’on y passe… et les produits ! » entendait-on souvent à propos de la production potagère familiale.

L’usage et la dénomination de ces jardins ont donc suivi l’évolution sociologique de leurs jardiniers, et notamment l’élévation progressive de leur niveau de vie au cours des Trente glorieuses. La récession économique des années quatre-vingt va favoriser l’émergence de nouveaux modes de jardinage.

DES JARDINS D’INSERTION AUX JARDINS PARTAGÉS

Les jardins collectifs que nous venons d’évoquer sont organisés en lotissements divisés en parcelles et concernent une population relativement intégrée au système de production et de consommation. Les jardins ouvriers se définissent par l’appartenance de classe de leurs jardiniers, les jardins familiaux font référence à leur vocation domestique. Le développement des jardins d’insertion dans la deuxième moitié des années 1980 s’inscrit pour sa part dans les notions d’exclusion sociale et professionnelle et concerne une population beaucoup moins homogène que celle évoquée précédemment.

Le jardinage s’avère un outil séduisant d’intervention sociale. Les jardins d’insertion se développent d’autant qu’ils proposent des réponses, là où la dynamique économique n’en offre pas de façon satisfaisante. Leur activité (le jardinage), leur imaginaire (un lieu bienveillant), leur dimension à la fois occupationnelle et professionnelle répondent en partie au désarroi de certains travailleurs sociaux ne sachant plus comment traiter individuellement les problèmes collectifs engendrés par les bouleversements économiques, l’augmentation du chômage et l’apparition de nouvelles précarités.

Ces jardins d’insertion prennent différentes formes pour s’adapter aux situations de leurs « bénéficiaires 4 » : de la simple activité régénératrice (être dehors, voir d’autres personnes, améliorer son alimentation…) à la production maraîchère, ces jardins fleurissent dans le secteur associatif bénévole ou professionnel. Le plus souvent aux marges de la ville, ils se présentent comme des espaces collectifs non parcellisés, à la production parfois symbolique, sans nécessité de rendement, ou s’inscrivent dans un processus de formation professionnelle en maraîchage lié à des objectifs économiques 5. Le lien social, l’insertion dans un univers plus ou moins professionnel, et quelquefois la thérapie motivent les initiateurs de ces jardins. Le jardin n’est plus vraiment individuel et reste peu marqué par la personnalité de ses maîtres d’œuvre. Au cours des années 90, d’autres types de jardins vont davantage permettre l’expression des jardiniers.

Le terme de jardin partagé apparaît une dizaine d’années après celui de jardin d’insertion. Il minimise la dimension « dispositif d’intervention sociale » pour favoriser celle de rencontres à l’échelle d’un quartier, d’un village et de dynamique sociale pour en enrichir le quotidien. C’est, en quelque sorte, le retour d’un jardin reflétant la personnalité de ses pratiquants, jardiniers ou simples passagers. Multiformes, ces jardins produisent des fruits, légumes, fleurs, rencontres entre jardiniers et non jardiniers, espaces de détente (jeux d’enfants, lieux de repas et de repos). Des parcelles individuelles peuvent y être dessinées – la demande en est d’ailleurs fréquente – à côté d’espaces communs organisés collectivement. Leurs dimensions varient en fonction du foncier disponible et de l’importance du groupe le faisant vivre : de quelques mètres à plusieurs centaines de mètres carrés. On les trouve plus facilement au cœur de la ville dense.

Voici, de façon assez simplifiée, quelles sont les caractéristiques historiques, sociales et d’usage des jardins qui nous occupent ici. Nous allons maintenant parcourir différents sites de jardins ouvriers, familiaux et partagés du département de l’Hérault, choisis pour leur diversité typologique et leur implantation rurale ou urbaine. Nous nous intéresserons plus particulièrement à leur évolution en termes d’appropriation par leurs jardiniers, en nous attachant aux conséquences de ces transformations sur le paysage. Que nous disent ces espèces d’espaces 6 de ce qui les entoure et de ceux qui les font ?

JARDINS OUVRIERS

L’exemple de Bédarieux : des jardins ouverts sur le paysage

Jardins d’ouvriers, nous semblerait mieux signifier l’étroite relation entre l’homme et son territoire, la marque qu’il imprègne sur cet espace le destin commun du jardinier et de son « lopin de terre », comme on aimait qualifier ces jardins au siècle dernier.

Rendons-nous à Bédarieux (à peine 6 000 habitants en 2020), dans ce qui n’était pas autrefois « l’arrière-pays », mais bien un des centres dynamiques de l’économie du Languedoc, à une époque où le littoral n’attirait pas les foules qu’il draine aujourd’hui. L’activité industrielle de ce territoire justifia dès le milieu du XIXe siècle la construction d’un chemin de fer permettant d’écouler la production textile, les cuirs, puis la bauxite de Bédarieux et de sa voisine Pézène-les-mines, ou la houille de Graissessac. Bédarieux abritait alors près de 10 000 habitants.

L’entreprise Péchiney, s’implante à Bédarieux après la découverte de Bauxite au début du XXe siècle et exploite la mine jusqu’en 1974. Le site de jardins ouvriers est créé en 1926 au Chemin de Levas et comporte 80 parcelles, exclusivement réservées aux salariés de l’entreprise.

Aujourd’hui, ce site est amputé de la moitié de ses parcelles, suite à la transformation en espace commercial et culturel d’une ancienne tuilerie voisine. Les 40 parcelles restantes ne sont désormais plus réservées aux « Anciens de Péchiney », devenus moins nombreux, mais le gestionnaire conserve la marque de fabrique en affichant ses origines : l’APP, Association du Personnel de Péchiney est toujours active ! 7

Situés aux limites de la ville, les jardins sont implantés dans un environnement ouvert sur la vallée (Fig. 1). Aucune limite physique n’en interdit l’accès, ce qui procure une impression d’espace et d’une relative liberté. Les rares barrières restent symboliques, ou sont motivées par l’intrusion de quelques sangliers.

Jardins Péchiney, Bédarieux, Hérault – 2002
Fig. 1 Jardins Péchiney, Bédarieux, Hérault – 2002
(les photographies suivantes de ce site ont été prises la même année)

Aucun cahier des charges ne s’impose pour la construction des abris, lesquels présentent une grande diversité de matériaux, pour la plupart de récupération. Cette architecture « pauvre » fait en réalité appel à une grande richesse inventive, permettant de tirer le meilleur parti possible des ressources du jardinier. Les abris sont ainsi personnalisés par l’origine de la matière première, mais également par l’investissement plus ou moins important des maîtres d’œuvres en termes de temps, recherche des matériaux, entretien, adaptation aux usages et bien sûr, critères esthétiques de chacun.

De la plus élémentaire accumulation de matériaux, à la construction sophistiquée ressemblant à une petite maison, en passant par des constructions utilitaires d’un point de vue horticole (une serre-véranda adossée à la cabane), on assiste à différentes démarches architecturales (Fig. 2a à 5b).

Fig. 2a
Fig. 2a
Fig. 2b
Fig. 2b
Fig. 3a
Fig. 3a

Vigne cultivée, lierre échevelé :
la cabane s’habille du paysage environnant.
Les folies 8, des maisons dans les feuilles…

Fig. 3b
Fig. 3b
Fig. 04a La cabane de gauche présente une légère et élégante peau de métal déroulé, peut-être de l'aluminium provenant de l'entreprise Péchiney
Fig. 4a
Fig. 04b Cet autre abri, à droite, fait appel à des procédés de construction plus classiques
Fig. 4b

La cabane de gauche présente une légère et élégante peau de métal déroulé, peut-être de l’aluminium provenant de l’entreprise Péchiney : un matériau souple, pliable, inoxydable… et vraisemblablement facile à se procurer pour ce jardinier. Cet autre abri, à droite, fait appel à des procédés de construction plus classiques.

Fig. 5a
Fig. 5a
Fig. 5b
Fig. 5b

Sur l’image de gauche au premier plan, une barre à mine, dont on devine l’origine, soutient le talus pour ménager une petite banquette de culture.
Au fond, deux générations de cabanes illustrent l’évolution des techniques architecturales et des ressources des jardiniers.
L’image de droite présente une clôture légère, soutenue par des tarières provenant de l’activité minière

L’hétérogénéité des constructions montre que l’association gestionnaire ou l’autorité publique n’imposent pas de normes esthétiques particulières. Aucun modèle n’est prescrit et chacun compose avec ses moyens et ses valeurs. Vraisemblablement, l’isolement du site et la relative autonomie gagnée par l’association du personnel autorisent-elles cette liberté.

Il n’en est pas de même partout, et l’Hérault comporte des territoires dans lesquels la liberté est beaucoup plus surveillée.

L’exemple de Sète : des jardins du cheminot très contrôlés

La puissante association nationale des Jardins du Cheminot, créée en 1942, regroupe aujourd’hui plus de 30 000 membres et comporte plusieurs salariés permanents. L’organisation, rebaptisée « Jardinot » s’ouvre depuis 2005 à de nouveaux adhérents, non-salariés de la SNCF ou de ses filiales. À l’origine, les jardins, installés sur les délaissés de l’entreprise ferroviaire, sont très marqués par leur identité professionnelle. C’est à ce titre que nous les considérons comme appartenant à la catégorie des jardins ouvriers.

Fig. 6a
Fig. 6a
Fig. 6b
Fig. 6b

Les jardins cheminots de Sète s’étendent le long des voies ferrées, quelques centaines de mètres avant d’arriver à la gare, venant de Montpellier. Le voyageur les devine à peine, cachés derrière un épais rideau de cannes de Provence (arundo donax). Voisin de l’usine d’incinération des déchets de Sète Agglopôle et dépourvu de barrière périphérique, le site est éloigné de toute habitation, ce qui le rend assez vulnérable.

Chaque cheminot-jardinier met en œuvre sa stratégie de défense pour son jardin, non sans s’inspirer des initiatives voisines, notamment par l’emploi de traverses de chemin de fer, dont les employés de la SNCF disposent assez facilement. Cela donne un ensemble imposant de fortifications, constituées d’une suite de cabanes et de clôtures massives et opaques (Fig. 6a, 6b et Fig. 7).

Contrairement au site de Bédarieux très perméable au regard, les potagers des cheminots sétois dessinent un paysage dont le jardin est absent. À l’espace ouvert et horizontal des jardins Péchiney, s’oppose ici un labyrinthe clos.

Intéressons-nous maintenant à d’autres ensembles de jardins présentant une histoire et des caractéristiques différentes.

Fig. 7 Ces architectures délimitent des aires de circulation étroites et encaissées, formant des groupes de jardins semblables à des petits quartiers fortifiés.
Fig. 7 Ces architectures délimitent des aires de circulation étroites et encaissées, formant des groupes de jardins semblables à des petits quartiers fortifiés.
Un urbanisme défensif est réinventé

DES JARDINS FAMILIAUX SOUS CONTRÔLE

À Montpellier, un archipel de jardins en perdition

Le jardin éloigné du domicile présente une dimension insulaire : les lotissements de jardins dénotent souvent par rapport à leur environnement. Masse végétale au milieu du bâti ou des voies de circulation, l’ensemble de jardins forme une sorte d’archipel urbain. En son sein, chaque parcelle est elle-même une petite île investie par un naufragé volontaire. Combien de panneaux placardés dans les jardins annoncent un « Petit Paradis » pour confirmer ce sentiment d’insularité privilégiée ? Ces îles offrent un espace de liberté, de robinsonnade, même modeste car le domicile n’est pas loin, même temporaire, car le soir on rentrera à la maison. Mais tant que le jardinier est dans son jardin, la cabane, bien plus qu’un simple espace de rangement, symbolise l’autonomie, relative, de ce petit territoire. Élément fixe d’un paysage jardiné en perpétuel changement, l’abri donne une dimension pérenne rassurante à cet îlot que l’on ne possède pas. Ce point fixe signifie le « chez-moi » du jardinier au sein de l’espace collectif du groupe de jardins. Il permet d’y mettre un peu de soi, tout en préservant son intimité. Avant de quitter l’île, on s’y change et on y laisse des affaires que l’on retrouvera lorsque l’on reviendra…

Cet état insulaire est fragile. Il peut être remis en cause par des logiques aménageuses. Prenons pour exemple l’aventure du déménagement d’un ensemble de jardins montpelliérain. Nous avons eu l’opportunité d’étudier la disparition annoncée et le transfert de ces jardins familiaux anciens, dans le quartier des Aiguerelles, au Sud-Est de la ville. La construction du nouvel Hôtel de ville et d’autres aménagements urbains ont bouleversé les habitudes d’un petit groupe de jardiniers, cultivant 23 parcelles aux abords d’un quartier pavillonaire situé sur la rive droite du fleuve Lez et jusque là peu concerné par le développement de la ville.

Le plan d’ensemble des deux sites est sensiblement le même : à partir de l’entrée principale, une allée centrale dessert les parcelles individuelles (Fig. 8).

Sur le site ancien, fondé au milieu du XXe siècle, les jardiniers ont très majoritairement édifié leur abri au fond de chaque parcelle, et les ont espacés les uns des autres. Les cabanes, toutes auto-construites, ont été édifiées au fur et à mesure des besoins et des possibilités des jardiniers (Fig. 9, Fig. 10, Fig. 11). Certaines ont brûlé au début de ce siècle et ont été rebâties sur le même emplacement, preuve que celui-ci convenait particulièrement. La présence d’un couvert végétal au bout de certaines parcelles explique en partie ce choix, mais nous n’avons pas pu vérifier si ces arbres existaient déjà lors de la construction des cabanes.

Fig. 8 Jardins familiaux de La Rauze, Montpellier, Hérault - 2007
Fig. 8 Jardins familiaux de La Rauze, Montpellier, Hérault - 2007 ** À gauche, l'ancien site détruit en 2007. À droite, le plan du nouveau site, mis à disposition à quelques centaines de mètres du secteur exproprié. Les petits rectangles représentent les abris, regroupés par deux sur le schéma de droite.
Fig. 9 Jardins familiaux de La Rauze, Montpellier, Hérault ⎼ 2007
Fig. 9 Jardins familiaux de La Rauze,
Montpellier, Hérault ⎼ 2007
Fig. 10 Jardins familiaux de La Rauze, Montpellier, Hérault ⎼ 2007
Fig. 10 Jardins familiaux de La Rauze,
Montpellier, Hérault ⎼ 2007
Fig. 11 Jardins familiaux de La Rauze, Montpellier, Hérault ⎼ 2007
Fig. 11 Jardins familiaux de La Rauze,
Montpellier, Hérault ⎼ 2007

En observant d’autres sites de lotissements de jardins, il apparaît que l’implantation en fond de jardin par rapport à l’entrée est spontanément privilégiée par la plus grande partie des auto-constructeurs. La tendance inverse peut apparaître dans certains lotissements dont les clôtures parcellaires interdisent la vue sur le jardin. Mais d’une façon générale, on est mieux au fond du jardin…

Sur le site récent de 2007, les abris, normalisés, regroupés par deux, sont systématiquement placés à l’entrée de chaque parcelle. Posées sur des dalles en béton, les cabanes ont été édifiées par l’entreprise qui les a conçues. Il était plus efficace d’organiser ce chantier à partir de l’allée centrale (apport du béton, des matériaux, circulation des engins et ouvriers). Ainsi, c’est la rationalité technique qui a déterminé l’aspect, l’implantation et la disposition des cabanes les unes par rapport aux autres (Fig. 12).

Fig. 12 Jardins familiaux de La Rauze ⎼ le nouveau site ⎼ 2007
Fig. 12 Jardins familiaux de La Rauze ⎼ le nouveau site ⎼ 2007

D’autres considérations interviennent dans ces choix. On regroupe les abris par deux, trois ou quatre pour des raisons économiques ou « paysagères » : une cloison ou une toiture commune permet de diminuer le coût des matériaux et de leur mise en œuvre ; l’impact sur le paysage d’un « pâté » de cabanes paraît moins important à certains aménageurs qu’une dissémination individuelle sur l’ensemble du lotissement.

Les jardiniers expropriés du site d’origine avaient tenu à être relogés sur un nouveau site livré « clef en main et impeccable 9 ». « Qu’au moins, on n’ait rien à faire en arrivant », ajoutait l’un d’entre eux 10. Vigilants quant aux caractéristiques de leurs nouvelles cabanes (Fig. 13), ils n’ont semble-t-il pas pris en compte la question plus complexe de leur implantation les unes par rapport aux autres et de leur positionnement sur le terrain.

Fig. 13 Jardins familiaux de La Rauze, le nouveau site ⎼ 2008
Fig. 13 Jardins familiaux de La Rauze, le nouveau site ⎼ 2008

L’insularité de chaque parcelle a ainsi disparu au profit d’une proximité imposée, que les jardiniers interrogés ne contestèrent pas, tout au moins dans les premiers temps de leur nouvelle installation : il eût été inconvenant de se plaindre au sociologue de la mitoyenneté obligée, sur ce site d’une vingtaine de parcelles dans lequel « tout le monde se connaît depuis longtemps ». On vit néanmoins assez rapidement apparaître quelques petites séparations visuelles sous la forme d’écrans accrochés au grillage séparant les deux jardins.

« Dans le pays des légendes, il n’y a pas de hutte mitoyenne », affirme Gaston Bachelard 11, confirmant ce désir d’insularité. Laurence Nicolas note elle aussi, chez les habitants de Beauduc, dans les Bouches-du-Rhône, une propension à éviter la juxtaposition de cabanes 12.

L’activité horticole n’occupe pas la totalité du temps passé au jardin. Les aménagements mobilisent en effet une part importante du travail du jardinier. Les matériaux récupérés nécessitent d’être ajustés à leur nouvel usage et la nature même de ces éléments fait que ce n’est jamais fini. Il faut régulièrement remplacer une partie vieillissante ou rendue obsolète, par une nouvelle plus adaptée. Ces bricolages à peu de frais ne sont pas régis par de seules motivations économiques. Ils contribuent à la démonstration de savoir-faire et à l’exercice d’un loisir laborieux et créatif. Combien de fois avons-nous entendu, à propos des constructions au jardin (clôtures, cabanons…), les jardiniers décrire leur édification en précisant avec malice et fierté : « C’est tout de la récup ! ».

Déracinés du site originel qu’ils avaient eux-mêmes aménagé et dont ils ont été expropriés, les jardiniers des Aiguerelles ont bénéficié d’installations neuves et normées. S’agit-il encore de cabanes ? Les mois qui suivirent le déménagement furent l’occasion de petits aménagements discrets qui ne devaient en aucun cas modifier l’esthétique imposée : pas de couleur, pas d’excroissance hasardeuse. Seules quelques coquetteries (un discret panneau – Fig. 14a, 14b et 14c), une gouttière proprette pour récupérer les eaux de pluie, des étagères venaient personnaliser bourgeoisement ces cabanes de jardin qui n’étaient plus tout à fait des cabanes de jardiniers.

Quelques temps auparavant, à l’opposé de la ville, la municipalité avait l’heureuse initiative de créer ex nihilo un nouveau site de jardins familiaux. Voilà qui allait nous permettre d’observer l’évolution d’un équipement, livré ici aussi clé en main.

Fig. 14a
Fig. 14a
Fig. 14b
Fig. 14b Personnaliser l’abri préfabriqué…
Fig. 14c
Fig. 14c

Les jardins familiaux de Malbosc

On remarque l’organisation linéaire du site et l’implantation des abris, figurés par des petits rectangles, à l’Est des parcelles. Les hachures évoquent les courbes de niveau du terrain, constitué par une pente aménagée sur la colline en trois paliers étagés accueillant les alignements de jardins.

Créés en 2004, les jardins familiaux de Malbosc représentent la première réalisation communale de la Ville de Montpellier. Sans tradition ouvrière, la ville comporte peu de jardins collectifs. On recensait au début de ce siècle moins d’une centaine de parcelles pour une ville de près de 230 000 habitants, réparties principalement entre trois sites :

  1. une quarantaine de parcelles réservées aux agents EDF, dans le secteur excentré de Grammont,
  2. vingt-trois parcelles gérées par une association privée affiliée à la Fédération Française des Jardins Familiaux, évoquées précédemment,
  3. une trentaine de parcelles affiliées au Jardin du Cheminot, le long des voies de garage des TGV, dans le quartier des Prés d’Arènes.

À titre de comparaison, la ville voisine de Nîmes recensait alors plus de 1 200 parcelles pour une population ne représentant que la moitié de celle de Montpellier.

La demande sociale, la composition de la municipalité influencée par le Parti des Verts, l’opportunité de disponibilités foncières ont incité la Ville à développer un programme de jardins collectifs. Prévu initialement pour accueillir 200 parcelles, le site de Malbosc s’est finalement limité à une unique tranche de 52 unités, au profit d’un autre emplacement à l’Est de la ville.

Investir un projet « clef en main »

Malbosc est situé au Nord-Ouest de la ville, dans ce qui constituait une espèce de no man’s land entre la Zone d’Urbanisation Prioritaire de La Paillade 13 et les limites du noyau urbain principal. La création du site s’inscrit dans un vaste programme réalisé depuis, destiné à urbaniser ce territoire et à créer une continuité entre le quartier Nord et la ville centre.

La ZAC de La Paillade fut créée dans les années soixante, notamment pour accueillir les nombreux arrivants d’Algérie. Son édification constitue une initiative pour une ville alors peu dynamique. Comme de nombreux quartiers d’habitat collectif conçus à cette période, La Paillade sera ensuite perçue comme un lieu de relégation que les classes moyennes chercheront à éviter à partir des années soixante-dix, pour investir les lotissements pavillonnaires créés dans les zones périphériques. Cette fuite des bénéficiaires de l’ascenseur social contribuera à l’appauvrissement du niveau de vie des habitants de ces quartiers, associé le plus souvent à une dégradation de leurs conditions d’existence dans un parc immobilier vieillissant.

La création des jardins familiaux constitue ainsi une nouveauté rapidement convoitée. Géré directement par le Service des Espaces Verts de la Ville, laquelle n’a pas souhaité le confier à une association, le site est ouvert à l’ensemble des Montpelliérains afin de favoriser une certaine mixité sociale. Nous sommes symboliquement sur un terrain de rencontre entre les Pailladins et les Montpelliérains du centre.

La création des jardins familiaux constitue ainsi une nouveauté rapidement convoitée. Géré directement par le Service des Espaces Verts de la Ville, laquelle n’a pas souhaité le confier à une association, le site est ouvert à l’ensemble des Montpelliérains afin de favoriser une certaine mixité sociale. Nous sommes symboliquement sur un terrain de rencontre entre les Pailladins et les Montpelliérains du centre.

La maîtrise d’œuvre de ce programme a été confiée à une célèbre agence d’architecture parisienne, qui a conçu le plan général du site et les abris. Accolés par deux dos à dos, ces derniers reprennent une partie du vocabulaire des jardins ouvriers : le coûteux acier Corten©, cher à certains architectes contemporains, a été ici retenu pour son aspect rouillé rappelant l’usage de métal récupéré servant à bâtir des cabanes de jardin économiques (Fig. 16). Point d’économie ici, puisque les placards de Malbosc atteignent pour leur 2 m² de rangement un prix proche de celui du mètre carré bâti dans le quartier… Sans compter la tonnelle ajoutée l’année suivante, à laquelle nous nous intéresserons particulièrement.

Fig. 16 Jardins familiaux de Malbosc, Montpellier, Hérault ⎼ Juin 2004.
Fig. 16 Jardins familiaux de Malbosc, Montpellier, Hérault ⎼ Juin 2004. Au premier plan, les abris, dépourvus de leur tonnelle pour une année encore. Au second plan, quelques maisons individuelles bordent le site municipal. Au fond, les premiers immeubles de La Paillade sont à quelques minutes à pied

Cinquante-deux terrains aux dimensions et abris préétablis, vierges de toute culture ou circulation, représentaient autant de pages blanches prêtes à être remplies. Allaient-elles être appropriées à leur usage, à la fois individuel et collectif ? Comment ce paysage allait-il évoluer ?

Présent dès 2004, nous avons pu suivre sur une dizaine d’années la chronique régulière de cette appropriation à petits pas.

Le site est livré en Juillet aux 52 jardiniers tirés au sort sur une liste de plus de 250 postulants. La terre a été travaillée avec des engins de motoculture et un symbolique petit tas de compost fourni par le SEV (service des espaces verts) attend d’être incorporé aux 100 m² de terre argileuse de chaque jardin. Un règlement intérieur est établi par le SEV. La location est fixée à un euro par mètre carré et par an et ne comprend pas les charges d’eau potable, facturées environ deux euros et demi par mètre cube.

Dans les mois qui suivent la livraison, de nombreuses clôtures sont renforcées, pour fermer le jardin aux regards extérieurs, mais surtout pour en interdire l’accès. Quelques intrusions nocturnes contribuent à développer un sentiment d’insécurité incitant à fortifier les clôtures (Fig. 17, Fig. 18).

Le fond des jardins, moins accessible car protégé par un talus assez important, prend peu à peu des allures de vieux potager, dans lequel il fait bon stocker quelques matériaux ou se reposer un peu (Fig. 19).

Fig. 17 Avril 2005
Fig. 17 Avril 2005
Fig. 18 Juin 2007
Fig. 18 Juin 2007
Fig. 19 Juin 2008
Fig. 19 Juin 2008

Ce « décor végétal » n’est pas un simple détail esthétique. Il constitue une fermeture agréable de l’espace du jardin, atténue la présence de la ville, apporte un peu d’ombre l’été en fin d’après-midi et donne à certains jardiniers interrogés l’impression de retrouver des morceaux de jardins de leur enfance. Ses plantes vivaces, fournies par le SEV, forment un massif pérenne, s’opposant au caractère changeant du potager, par essence sans cesse renouvelé. L’aspect « lotissement » artificiel créé de toute pièce laisse peu à peu place à un jardin dont l’histoire s’écrit au rythme des jardiniers et des saisons.

La réponse du jardinier à l'architecte…

Les abris conçus par les architectes mandatés par la Ville ne sont pas des cabanes. Accolés dos à dos par paires, ils offrent à chaque potagiste une surface de rangement au sol de deux mètres de large sur un mètre de profondeur. Une histoire à dormir debout 14. Ces placards habillés d’acier accueillent quelques outils, une brouette et les inévitables accessoires à protéger de l’humidité ou de la convoitise : semences, produits divers, tuyaux d’arrosage et petit matériel pour se reposer ou se nourrir au jardin. Leur manteau rouillé a vraisemblablement retenu les suffrages du jury de l’appel d’offre municipal, au prétexte du mariage entre la tradition des matériaux utilisés dans les potagers anciens et la modernité des lignes de cet aménagement contemporain. Qu’en ont fait les jardiniers ? (Fig. 20).

Les abords des abris s’enrichissent rapidement de différents éléments destinés à les magnifier 15 et à leur donner les mesures d’une « vraie cabane », voire même d’une maison (Fig. 21).

Fig. 20 Ce jardinier a appliqué sans attendre un efficace vernis protecteur destiné à fixer la rouille du métal de son abri.
Fig. 20 Août 2004. Ce jardinier a appliqué sans attendre un efficace vernis protecteur destiné à fixer la rouille du métal de son abri. Élément indigne, à son goût, la rouille est considérée comme un défaut d'entretien, voire un signe de pauvreté. Un déshonneur vite évité par un soin immédiat, pied de nez irrévérencieux et sans appel au distingué geste architectural…
Fig. 21 Février 2006. Un portique et un treillis vertical donnent de la profondeur à la terrasse
Fig. 21 Février 2006. Un portique et un treillis vertical donnent de la profondeur à la terrasse. Un dallage assure la transition avec le jardin. À défaut de disposer d'une maison, on en figure les attributs

Jouer sur les accessoires pour évoquer une maison ne suffit pas toujours à contenter le jardinier. L’abri reste un rangement de 2 m². Alors, d’autres stratégies se mettent en place pour réellement transformer le placard en cabanon.

Appliquant le principe de la maison extensive, ce jardinier a investi la dalle de béton prolongeant l’abri et multiplié sa surface par cinq (Fig. 22). Le portillon du jardin est devenu porte de la cabane. Une fenêtre est ménagée, l’accès sans transition au jardin dénote un désir d’optimiser utilement l’espace. À l’intérieur, une table, un peu de matériel de cuisine et de jardinage. Les portes de l’abri ont été supprimées pour que l’alcôve ainsi créée accueille un petit lit.

Fig. 22 Août 2009. La double flèche rouge rappelle la dimension initiale de l'abri
Fig. 22 Août 2009. La double flèche rouge rappelle la dimension initiale de l'abri
Fig. 23 Décembre 2011
Fig. 23 Décembre 2011

Dans l’exemple suivant, une sorte de yourte, dotée d’une protubérance annexe semblant servir de serre, constitue l’abri de ce jardinier d’origine asiatique (Fig. 23). Seule la tonnelle rappelle la disposition antérieure. Le placard a été phagocyté par la nouvelle construction.

Ainsi donc, le paysage de caissons soigneusement normalisés et alignés s’est en partie transformé en combinaisons d’ingénieuses constructions. Celles-ci témoignent de l’écart entre la conception technocratique du maître d’œuvre et l’usage au quotidien des maîtres du jardin.

Un autre élément architectural nécessitera d’être adapté, pour ne pas dire sanctionné, par les jardiniers.

L’exemple édifiant des tonnelles

Au printemps 2005, les abris sont dotés de tonnelles. Cet équipement était prévu dès la conception des équipements de Malbosc : les volumes du cube des abris et de la vaste pergola sont faits pour se marier harmonieusement. Le vocabulaire des jardins ouvriers est à nouveau décliné : l’armature est constituée de solides fers à béton de 16 mm de diamètre, matériau fréquemment utilisé dans les jardins populaires pour différents usages tels que les piquets de clôtures ou les tuteurs. Tout est prévu par le maître d’œuvre : plantation de plantes grimpantes au pied de plusieurs montants de l’édifice, pose et fixations de canisses sur toute sa surface (Fig. 24).

Fig. 24 Août 2005
Fig. 24 Août 2005

Hélas ! Une fois de plus, le point de vue de l’architecte n’est pas celui des hommes de terrain. Les plantes grimpantes et les canisses sont installées par les Services de la Ville, parfois en l’absence des jardiniers. Les informations relatives à leur entretien sont distillées de façon aléatoire. On peut penser qu’une gestion associative aurait su établir davantage de liens entre les jardiniers et le maître d’ouvrage, ainsi qu’entre les jardiniers eux-mêmes. La situation des jardins sous l’influence des vents dominants vient rapidement à bout des canisses qui ne procureront d’ombre qu’au cours du premier été. La hauteur de la pergola interdit son accès sans escabeau et les jardiniers interviennent peu pour réparer les premiers dommages et éviter l’arrachement complet de l’écran végétal.

Au printemps suivant, la plupart des couvertures ont disparu (Fig. 25). Défaut de jeunesse, sans doute. L’objectif de la structure métallique est d’accueillir à terme une couverture végétale généreuse et cela demande quelques années. Mais faute d’avoir été associés au projet, puis impliqués dans sa réalisation, les jardiniers font de leur côté leur petit bonhomme de chemin et (s’) arrangent, une fois de plus, avec ce qu’ils ont sous la main.

Fig. 25 Février 2006
Fig. 25 Février 2006

Les tonnelles ne leur conviennent pas pour deux raisons essentielles :

  1. placées à l’Est des terrains, en bordure de l’allée de service, elles procurent de l’ombre au plus fort de la température estivale, entre midi et 16 heures, à l’extérieur du jardin. Il faudrait disposer sa chaise dans l’allée pour bénéficier de cette ombre bienfaisante…
  2. le plateau de la pergola est positionné à trois mètres de hauteur pour accueillir un volume conséquent de végétation lorsque celle-ci sera suffisamment développée. Cela paraît bien haut, lorsque l’on mesure 1,70 m…

Les pratiques du quotidien vont apporter des réponses rapides et astucieuses à ces différences de point de vue.

  1. Si l’ombre n’est pas là où on le souhaite au moment voulu, il suffit d’en modifier la source : des stratégies sont alors mises en œuvre pour déplacer l’emplacement de l’ombre portée l’après-midi : on prolonge la pergola vers l’Ouest, et l’on modifie son angle et sa hauteur (Fig. 26a et 26b).
  2. Le second défaut de cette pergola réside dans sa hauteur, disproportionnée, tant qu’elle est nue, avec l’échelle de personnes vivant les yeux tournés vers le sol.
Fig. 26a
Fig. 26a
Fig. 26b
Fig. 26b

Fig. 26a, 26b – Juin 2006. À gauche, un an après l’installation de la pergola « officielle », celle de l’architecte est nue, remplacée par une excroissance entretenue par le jardinier. Une solution intermédiaire, à droite, consiste à conserver la couverture existante et à abaisser en l’inclinant sa partie voisine. Un classique parasol complète l’ensemble pour cette protection solaire à trois niveaux…

Rapidement, de fausses pergolas apparaissent, à la manière de « faux plafonds » doublant un plafond trop haut, pour remettre à l’échelle du jardinier cette inaccessible protection (Fig. 27).

Le projet d’une treille est parfois évoqué pour justifier cette « sous-structure » : comment cueillir tranquillement les raisins s’il faut grimper sur un escabeau à chaque fois que l’on veut tâter une grappe ?

Mais le motif le plus souvent invoqué est simplement que « c’était trop haut », sans plus de justification technique. Les sous-structures constituent des réponses sans ambiguïté aux propositions du maître d’œuvre : « nous n’avions pas besoin de cela » semblent signifier les quelques 25 % d’aménagements « pirates ». C’est ce qui nous amène à penser que c’est bien une question d’échelle qui est en jeu ici. Indépendamment de la raison pratique, le jardinier ne s’y retrouve pas sous ce plafond trop haut. Les cabanes ne sont pas des cathédrales… (Fig. 28)

Fig. 27 Août 2008
Fig. 27 Août 2008
Fig. 28 Juin 2008
Fig. 28 Juin 2008
Fig. 29 Juin 2008
Fig. 29 Juin 2008

Notre point de vue critique à l’égard de la maîtrise d’œuvre de cet équipement peut, avec quelques années de recul, paraître bien sévère. Nous reconnaissons que l’efficacité et l’esthétique de l’ensemble puissent expliquer cette conception monumentale : le volume de la construction permet en effet d’accueillir une végétation conséquente, procurant une ombre bienvenue, pour peu que la tonnelle soit végétalisée sur trois côtés (Fig. 29).

Malheureusement, la conception du projet en agence d’architecture ? autrement dit, « hors-sol » ? l’absence de connaissance des usages des jardiniers, le manque d’informations, de concertation et de suivi sont à l’origine de ces maladresses, coûteuses sur le plan budgétaire et génératrices de frustrations. L’expérience de Malbosc ne sera ni étendue (le projet initial prévoyait 200 parcelles) ni reproduite 16.

D’autres initiatives permettent pourtant d’observer des pratiques radicalement différentes, formant des paysages à l’image des acteurs, et non des usagers, qui les ont conçus et les font vivre.

ANIANE, DES JARDINS PARTAGÉS SANS LIMITES 17 ?

La notion de limites est inséparable de l’idée de jardin. Autant un paysage peut paraître sans limites, autant le jardin se conçoit comme un espace fini.

Le Dictionnaire Robert indique que le mot jardin est probablement issu du gallo-roman hortus gardinus, jardin enclos, le terme latin d’hortus donnant, « hort », « hortillon », « hortillonnage », tandis que gardinus, venant du francique gart ou gardo, signifiant « clôture » ou « pieu », donnera les termes anglo-saxons de garten et garden.« Hortillonnage » désigne quant à lui, à la fois le lieu, un marais parcouru de canaux délimitant des hortillons, et la façon particulière de les cultiver sur des levées de terre délimitées par l’eau. Dominique-Etna Corbal 18 précise que Garden donnera « garder » « au sens d’enclore, de monter ou ériger la garde ; lever de terre, de branchage, de haies… Ceci désigne à l’origine la notion de clôture ». Cette idée de protection périphérique, de séparation de l’extérieur est donc, dès l’origine, associée au jardin, « congénitalement clos 19 », soigneusement gardé.

Dans ces lieux étymologiquement clôturés, la ceinture peut revêtir différents aspects et s’avérer, comme nous l’avons constaté, plus ou moins importante sur le plan fonctionnel (interdire le passage) et symbolique (signifier les limites). Mais elle peut aussi aller jusqu’à disparaître.

Les initiateurs des jardins partagés d’Aniane 20 n’ont souhaité ni clôture périphérique ou parcellaire, ni abri pour la quarantaine de parcelles établies depuis 1997 sur un hectare de terres agricoles, louées à l’écart du village. Une sorte de jardin de plein champ, dont le relatif isolement au milieu d’une plaine viticole semble limiter les convoitises de passage, si ce ne sont celles de sangliers (Fig. 30).

Les délimitations sont essentiellement matérialisées par les chemins. C’est le passage régulier des jardiniers et un entretien léger qui marquent les allées principales ou les séparations entre les parcelles (Fig. 31).

Jardins partagés d’Aniane, Hérault ⎼ 2006
Fig. 30 Jardins partagés d’Aniane, Hérault ⎼ 2006
Parfois de modestes ébauches de minuscules clôtures végétales sont confectionnées, comme des gestes enfantins
Fig. 31 Parfois de modestes ébauches de minuscules clôtures végétales sont confectionnées, comme des gestes enfantins

C’est l’antithèse des jardins cheminots de Sète qui s’affirme ici. Ce choix, quasi idéologique, repose sur l’idée que le partage de l’espace doit concrétiser le projet associatif de l’association Vivre à Aniane, dont la raison d’être n’est pas de gérer un groupe de jardins familiaux, mais de favoriser les rencontres entre les habitants. Ces jardins sont un des moyens mis en œuvre par l’association à la fin du siècle dernier, notamment à destination des nouveaux habitants du centre bourg, isolés dans des maisons de village sans jardin.

Il s’agissait de constituer un lieu de rencontre et d’échange pour des habitants ayant peu d’opportunités de relations sociales au sein du village. Des « palabrettes », réunions amicales autour d’un repas et d’un thème particulier, rassemblent régulièrement les jardiniers à propos de préoccupations internes (le jardin, la vie associative…) ou générales (activités culturelles, actions de solidarité avec des pays du Sud…). Cet idéal de cohésion, sa dimension militante, la conviction opiniâtre de ses initiateurs font de ces jardins un support d’initiatives sociales particulièrement riches. La force du projet associatif et une relative homogénéité sociale expliquent cette absence de clôture.

L’interdiction d’édifier une cabane ne permet pas d’avoir un abri, ne serait-ce que pour créer un peu d’ombre. Alors, quelques édifications discrètes permettent de s’abriter, telle cette ébauche de cabane, toute en transparence et en légèreté (Fig. 32). Une sorte de proto-cabane, rappelant les constructions enfantines. Utilisant une ressource présente sur place (la canne de Provence), son architecture s’inspire des techniques de tuteurage traditionnellement utilisées au potager pour la culture des pieds de tomates ou de haricots grimpants. Elle s’inscrit dans le paysage habituel, et donc légitime, des jardins vivriers.

Fig. 32
Fig. 32

Cette rapide promenade dans quelques jardins héraultais confirme que ces espaces sont particulièrement investis par leurs jardiniers. Leur fonction alimentaire en augmente d’autant la valeur symbolique. Le potager, jardin que l’on mange, est toujours à recommencer. Il exige constance et présence régulière. L’investissement en temps est à la mesure de l’investissement symbolique.

Dans ces configurations collectives, l’organisation de chaque jardin, le marquage des limites, les abris et d’une façon plus générale, les différents aménagements sont étroitement liés aux choix institutionnels et collectifs, et à la façon de les appliquer. La capacité du groupe, notamment de ses responsables, à prendre en compte les attentes et les représentations de ses membres et à construire un consensus ou un minimum d’entente, décide pour une grande part du paysage des jardins.

Ceux-ci se construisent peu à peu, pas à pas, au fur et à mesure des saisons qui passent, du temps disponible, des opportunités en matériaux, des aléas, des influences voisines… Les schémas préconçus d’aménagement de jardins collectifs, structurels ou réglementaires, préservent mal, ou bien provoquent, l’expression individuelle des jardiniers. On observe que l’envie de marquer le territoire, la volonté d’exprimer des savoir-faire, l’ingéniosité, la capacité de résistance, la force d’inertie, modifient les prescriptions des concepteurs et des gestionnaires. Ainsi, les paysages calibrés se transforment au gré de l’expression de ceux qui les font vivre, composés par une multitude de petits paysages personnels. « Le jardin, c’est la plus petite parcelle du monde et puis c’est la totalité du monde », affirmait Michel Foucault 21.

BIBLIOGRAPHIE

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WEBER 1998 : WEBER (Florence), L’honneur des jardiniers, Éditions Belin, Paris, 1998.

NOTES

1. Réglons, pour cet article, la question des genres : nous utiliserons le terme générique et indifférencié de « jardinier » lorsqu’il sera question de l’individu qui jardine, indépendamment de son identité sexuelle. Notons toutefois que si la figure masculine a longtemps dominé le jardinage vivrier, notamment en milieu urbain, l’activité s’est fortement féminisée au XXIe siècle, en particulier dans les initiatives de jardinage partagé.

2. L’expression est de Gérard Monédiaire, in Des jardins d’ouvriers, clameurs sur, murmures dans, Thèse d’Urbanisme, Institut d’Urbanisme, Grenoble II, 1984.

3. Archives de la Ligue Française du Coin de Terre et du Foyer.

4. On notera l’habileté sémantique, apte à transformer un pauvre en bénéficiaire

5. Nous ne voulons pas sous-estimer la valeur possible de cette production : plus les revenus d’un ménage sont faibles, plus la part relative du budget alimentaire est importante. Les produits du jardin peuvent constituer l’équivalent d’un treizième mois pour un couple percevant les minimums sociaux.

6. Hommage à Georges Perec, qui défrichait malicieusement nos rapports à l’espace il y a presque 50 ans.

7. Nous remercions son Président, Monsieur Guttierrez, pour l’entretien qu’il a bien voulu nous accorder au moment de l’actualisation de ces données (août 2021).

8. Le terme de « folie », utilisé par Olivier de Serres dès 1600 pour désigner les riches maisons de campagne, évoque, étymologiquement, une « maison dans les feuilles »…

9. Pour reprendre les termes du très actif président de l’association, lequel fit en sorte que le nouveau site constitue un progrès, comme une consolation, par des aménagements de qualité (abris surdimensionnés par rapport aux normes en vigueur, clôtures conséquentes, distribution d’eau, parking, circulations, aire collective). La SERM s’est montrée particulièrement conciliante, afin que rien n’entache le bon déroulement du chantier de l’Hôtel de ville : des cabanes de 7,5 m², une hauteur de plafond permettant d’aménager des rangements, mais pas de fenêtre, rapidement rajoutée par certains…

10. Malheureusement, ils ne retrouvèrent pas la qualité de sol qu’ils cultivaient, pour certains depuis deux générations. Quelques-uns s’évertuèrent à transporter, à la brouette, une partie de leur excellente terre dans leur nouveau jardin.

11. Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, Presses Universitaires de France, Paris, 2001 (1957), p. 46.

12. Laurence Nicolas, Beauduc, l’utopie des gratte-plage, Ethnographie d’une communauté de cabaniers sur le littoral camarguais, Éditions Images en Manœuvres, Marseille, 2008, p. 269.

13. Rebaptisée « La Mosson », à l’initiative de Georges Frêche, maire de Montpellier, du nom de la rivière bordant le quartier. Une façon d’utiliser la toponymie pour requalifier un territoire connoté plutôt négativement.

14. Rappelons que dans la plupart des lotissements de jardins, en France, il est interdit de s’installer pour la nuit.

15. Magnifier : 1 Célébrer comme grand. 2 Rendre plus grand. Dictionnaire Larousse Lexis 2009. Les deux acceptions peuvent ici être retenues.

16. Un autre site, diamétralement opposé par rapport à la ville, propose depuis 2008 des aménagements plus modestes d’un point de vue budgétaire et plus simples sur le plan architectural. Il s’agit du site des Grands Grès, malheureusement rejeté au bord de l’Autoroute A9.

17. En hommage à Paul Cooper, enseignant, sculpteur, jardinier et paysagiste britannique d’avant-garde, auteur de l’ouvrage Jardins sans limites, éditions Octopus / Hachette, Paris, 2004.

18. Dominique-Etna Corbal, « De la racine, Du champ, Du jardin, Du buisson », in Le jardin, Réalités, imaginaires et symbolique ? Les cahiers d’ARTES ? Atelier de Recherches Transdisciplinaires Esthétique et Société, Élisabeth Magne, Lydie Pearl, Hélène Sorbé (dir.), Université Michel de Montaigne, Bordeaux, n° 4, 2008, p. 215, 216.

19. Selon l’expression de Pascale Bourgain, dans Le jardin de l’âme, in Sur la terre comme au ciel, Jardins d’Occident à la fin du Moyen Âge. Collectif, Élisabeth Antoine (dir.), Éditions de la Réunion des musées nationaux, Paris 2002, p. 20.

20. Les jardins partagés d’Aniane sont vraisemblablement à l’origine de l’expression « jardins partagés », désormais adoptée de façon générique pour qualifier ce type de jardin cultivé à plusieurs. Les termes de community gardens, issus des initiatives nord-américaines qui ont inspiré ces jardins en France, n’étaient pas aisément utilisables en français, du fait de la connotation du mot communautaire propre à chaque langue.

21. Michel Foucault, Dits et Écrits, t. 4, Éditions Gallimard, Paris, 1994 (1984), p. 759, à l’occasion d’une conférence au Cercle d’études architecturales, « Des espaces autres », Paris, 1967.