Occitanie, un littoral en mouvement

Occitanie, un littoral en mouvement

Introduction

Dans un contexte géographique marqué à la fois par les effets du changement climatique et un « désir de rivage », le littoral – zone de contact entre la terre et la mer –, est au cœur d’interrogations nouvelles sur son devenir. Celui du Golfe du Lion s’étire entre le cap de Creus en Catalogne et le cap Sicié en Provence. Sur quelque 220 kilomètres d’un linéaire de plages sableuses et de dunes en cordon littoral, sa partie languedocienne court du Grau-du-Roi, aux franges rhodaniennes, jusqu’au Cap Cerbère en frontière avec la Catalogne. Flanquée de quelque 40 000 hectares d’étangs et de lagunes en arrière-plan, cette côte désormais dédiée au tourisme « pour le plus grand nombre » accueille bon an mal an une dizaine de millions de touristes français et plus largement européens. Les stations balnéaires, nées de la Mission Racine ou issues du chapelet des petites villes héritières d’un temps passé, illustrent la modernité d’un tourisme tourné vers un nouvel usage du sable et de la mer. Or les contraintes climatiques modifient en profondeur les rapports à la mer, les modèles d’habitat et leur articulation aux modes de vie, les équilibres des écosystèmes ainsi que les relations avec le réseau des villes de l’arrière-pays.

Jadis insalubre et inhospitalier, délaissé à cause des razzias, des tempêtes et des moustiques, le littoral est devenu attractif – saturé même, en été, le parc résidentiel s’étalant le plus souvent au plus près de la plage – à l’égal de ceux des régions voisines de la Côte d’Azur et de la Costa Brava. Les plages, symboles du tourisme de masse, font aujourd’hui l’objet de vives controverses : faut-il continuer à urbaniser, à densifier, à conquérir les espaces naturels des dunes et des bords d’étang ? Est-il rationnel de les recharger en sable alors que l’érosion touche la majorité d’entre elles ? Est-il raisonnable de multiplier les « paillotes » locatives sur les plages devenues privées ? Plus largement, les enjeux de la banalisation d’un paysage « naturel » constamment menacé par l’action des aménageurs, le vieillissement du parc résidentiel et les conséquences du réchauffement climatique se télescopent. À partir de la question du rapport société-nature qui est fondateur, il convient d’en montrer le caractère systémique et d’en expliquer les ressorts.

Le rapport au littoral naît de la Méditerranée plus que du continent. Les Étrusques sont les premiers à construire un réseau efficace d’échanges dans le golfe du Lion (Agde et Lattes en sont les points forts) et contrôler les transactions maritimes qui se développent en Provence et en Languedoc. La conquête romaine repose par contre sur la route continentale (via Domitia), et c’est par l’autorité du royaume de France que le littoral du Languedoc s’ouvre à nouveau à la Méditerranée lorsque la monarchie capétienne fonde Aigues-Mortes en 1248. Une double perspective s’impose, la défense du royaume plutôt qu’une capacité d’attaque laissée à la Provence et à ses ports d’arsenaux, et le commerce d’exportation notamment des produits de la manufacture. Il s’agit aussi de protéger les infrastructures existantes (pêcheries, ports…) des tempêtes hivernales et de l’envasement des étangs. Meuble par nature et fragile, le littoral s’est continuellement transformé ; la mer a souvent gagné sur les terres par élévation du niveau marin ou érosion côtière, mais le rivage a aussi avancé pendant de longues périodes grâce à l’apport de sédiments en provenance des fleuves. Des lagunes ont pu se former et parfois disparaitre, tout comme les « graus », qui font communiquer les étangs littoraux avec la mer. C’est donc depuis toujours un milieu naturellement dynamique comme le suggère par exemple l’étude de l’évolution du littoral agathois depuis la fin du Petit Âge Glaciaire. C’est notamment pourquoi, exceptée Sète, « ville nouvelle » édifiée au XVIIe siècle, aucune grande agglomération ne borde la mer : Nîmes, Montpellier, Béziers, Narbonne et Perpignan sont situées à distance du littoral.

Il faut attendre la fin du XIXe siècle pour que les premiers bains de mer – de préférence destinés aux familles aisées des grandes villes alentour – se développent sous l’impulsion des hygiénistes. Dans l’Hérault, une première génération de stations balnéaires (Palavas-les-Flots, Sète, le Grau d’Agde, Valras) sort ainsi de terre. Elles s’organisent autour des plages bien sûr, mais aussi des casinos et d’infrastructures hôtelières. Des artistes s’y invitent pour rechercher l’exotisme et en font la promotion. Cette première génération de stations balnéaires contraste singulièrement avec les aménagements réalisés aux époques médiévale (Aigues-Mortes en premier lieu) et moderne (Sète notamment). Elle amorce la mise en tourisme du littoral que les « congés payés » et le chemin de fer (puis la voiture et le caravaning) popularisent. À côté des casinos poussent donc des cabanons dans un joyeux bazar : les ouvriers et les employés découvrent aussi les vacances dans l’entre-deux-guerres (1936) et surtout à partir des années 1950.

La Mission Racine, débutée en 1963, précipite l’aménagement de la côte : par son ampleur, son organisation et les répercussions économiques, sociales et environnementales qu’elle a générées, elle est sans commune mesure avec les aménagements qui l’ont précédée. Ce vaste chantier, voulu par le pouvoir gaulliste afin de maîtriser le développement jusqu’alors désordonné du territoire, a fait du littoral un grand laboratoire d’architecture et d’urbanisme des vacances. Elle a aussi profondément bouleversé la dynamique naturelle qui caractérisait jusqu’alors le littoral. Un sévère déficit sédimentaire et des pressions anthropiques de plus en plus fortes s’imposent sur le système côtier languedocien et en modifient les équilibres. La littoralisation n’a laissé ni la place ni le temps aux côtes basses et fragiles de s’ajuster à ces contraintes. L’action publique, soucieuse de réponses, s’est bornée à des mesures de protection structurelles (brise-lames, digues, etc.), lesquelles ont depuis montré leurs limites face à ce rivage mobile et difficilement contrôlable.

Conscients de la situation, les pouvoirs publics ont peu à peu échafaudé une stratégie d’adaptation du littoral qui consiste à redistribuer les hommes et les activités dans l’espace en fonction de leurs vulnérabilités aux aléas (érosion, submersion marine…). Mais, comme le montrent les retours d’expériences, à Vias par exemple, cette dernière se heurte aux politiques locales car la fin de la Mission Racine en 1983 ne s’est pas traduite pas l’arrêt du développement territorial, bien au contraire. Les années 1980 correspondent en effet à l’acte 1 de la décentralisation ; elles sont suivies par le renforcement progressif des intercommunalités des années 1990 et 2000. Ces deux processus conjugués ont positionné les élus locaux comme les artisans de l’aménagement du territoire, d’où l’urbanisation des communes qui voulaient rattraper leur « retard » par rapport aux nouvelles stations balnéaires ayant bénéficié de l’appui de l’État. Le durcissement des instruments de planification (urbanisme, risques naturels…) combiné aux actions locales du Conservatoire du Littoral créé en 1975 ont tout juste permis d’éviter la bétonisation des milieux agricoles et remarquables (les étangs, l’île de Maguelonne…).

Le paysage littoral se confond désormais avec un maquis de voies souvent sans issues où alternent grandes copropriétés, lotissements pavillonnaires, hôtellerie de plein air, parcelles cultivées et espaces « naturels ». Et pour cause, la population permanente des 32 communes littorales approche aujourd’hui les 350 000 habitants. Le seuil du million est franchi en y ajoutant les résidents des 63 communes rétro-littorales (environ 700 000) ; soit près de 17 % de la population régionale d’Occitanie, ce qui situe le littoral au niveau de la métropole toulousaine. C’est dire si ce littoral, jadis insalubre et inhospitalier, ressemble aujourd’hui aux régions voisines de la Côte d’Azur et de la Costa Brava. Dans ce contexte, comme le résumait le journal Les Échos en 2017, « le littoral languedocien [est] contraint de revoir son logiciel d’aménagement ». Autrement dit, il faut sortir du « tout tourisme » et d’une économie presque exclusivement présentielle en recherchant les moyens d’une adaptation territoriale plus écologique. Ainsi, au plan commercial d’abord, l’occupation des plages est amenée à évoluer. Leur sur-fréquentation et les conflits d’usages rebutent une partie des clientèles touristiques. Par ailleurs, la plupart des municipalités cherchent à compenser ou bien à empêcher leur recul, l’élévation progressive du niveau de la mer menaçant certains secteurs à long terme. Dans un autre registre, la privatisation du domaine public par des paillotes – que des dispositions récentes prévoient de cantonner aux plages « urbaines » -, pose de sérieux problèmes, longtemps considérées comme secondaires par les pouvoirs publics.

Au plan écologique ensuite, la question du littoral est devenue problématique. Les écosystèmes littoraux subissent encore des destructions et des dégradations provoquées par l’urbanisation ou bien liées à la pollution véhiculée par les fleuves. Ce constat préoccupant plaide en faveur du maintien et de la recréation de connections entre des espaces naturels aujourd’hui fragmentés. C’est là un chantier indispensable pour limiter l’érosion de la diversité biologique. Les expérimentations « grandeur nature » sont encore insuffisamment conduites, en particulier dans les secteurs les plus problématiques, c’est-à-dire ceux qui, urbanisés, sont les plus exposés à l’érosion et aux submersions marines. Le réaménagement récent des lidos du Petit et du Grand Travers, qui concilie tourisme de masse et renaturation entre Carnon et la Grande Motte, laisse toutefois entrevoir des solutions d’adaptation fondées sur la nature. De même, les lagunes qu’il fallait combler ou drainer il y a encore quelques décennies font aujourd’hui l’objet d’une protection efficace (faune, flore, qualité des eaux…). Au reste l’évolution du climat ne doit pas masquer l’autre grand sujet : le littoral voit sa population augmenter depuis 150 ans alors que sa capacité d’accueil sera limitée dans un futur proche. Les diagnostics des schémas de cohérence territoriale (SCoT) insistent sur le possible manque d’eau dans les prochaines décennies et la prévisible pénurie de gisements fonciers ; deux facteurs qui limiteront de fait l’urbanisation et incitent les pouvoirs locaux à rechercher des solidarités nouvelles entre littoral et rétro-littoral.

Au plan politique enfin, seuls les fleuves côtiers agrafent – symboliquement – la mer à la montagne. Difficile donc de solidariser des territoires qui coopèrent assez peu pour des raisons culturelles, mais aussi à cause de projets insuffisamment structurants. En outre, la création des métropoles par la loi du 27 janvier 2014 de Modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), la mise en place de la nouvelle Région Occitanie suite à la loi du 7 août 2015 d’Organisation territoriale de la République, ou encore la recomposition des intercommunalités, expliquent l’instabilité du paysage institutionnel et administratif. Ce qui complique les solidarités entre des communes aux intérêts souvent divergents selon qu’elles sont littorales ou rétro-littorales. Or, c’est à cette échelle que l’élévation du niveau de la Méditerranée et les conséquences de l’érosion devraient être traitées. Le tableau pourtant est moins sombre qu’il n’y paraît d’autant plus que les stations s’ouvrent à l’habitat permanent et que les rentes patrimoniales nées de l’immobilier résidentiel et touristique sont une source de revenus non négligeable. Par ailleurs, si la crise sanitaire de la COVID-19 en 2020 a mis en lumière la vulnérabilité économique des territoires de mono-industrie (tourisme, aéronautique, etc.), elle a aussi précipité de grands chantiers régionaux en gestation (transports collectifs avec l’hydrogène pour énergie, parc éolien en mer, silver économie, habitat flottant, etc.) pouvant accélérer la transition écologique du littoral d’Occitanie.

La multitude des enjeux pour qualifier les lignes de force d’un développement « durable » du littoral du golfe d’Aigues-Mortes au front pyrénéen explique une véritable effervescence territoriale (« Plan littoral 21 », « Habiter le littoral, demain ! »….) et l’intérêt de ce numéro spécial d’Études Héraultaises. À la manière des explorateurs, chaque auteur tente d’ouvrir une voie nouvelle ou d’en consolider une plus ancienne en s’appuyant sur les résultats de programmes de recherche – en particulier ceux mis en place avec le soutien de la Fondation de France et de partenaires locaux à commencer par la Ville d’Agde et le syndicat mixte du SCoT Biterrois. Il est question ici d’apporter un éclairage aussi pédagogique et actualisé que possible sur le littoral d’Occitanie avec deux entrées principales : l’aménagement et l’environnement. On l’aura compris, il s’agit aussi de remettre en cause le modèle qui a prévalu jusqu’à présent après en avoir analysé quelques-uns des enjeux, notamment dans l’Hérault.

La question reste de savoir quels peuvent être les formes d’adaptation et les instruments susceptibles d’en précipiter la mise en œuvre. Cela passe certainement par une rupture fondamentale avec le temps des grands projets d’aménagement du territoire : le bétonnage de la côte, pour la défendre ou l’habiter, est derrière nous. Chaque site, en fonction de sa localisation, de son altimétrie, de ses composantes et de son histoire devrait guider les architectes des territoires que sont devenus les élus. De sorte que la stratégie de recul voulue par les pouvoirs publics voici quelques années laisserait la place à des projets qui s’appuieraient tantôt sur le recul voire la renaturation de façon à décorseter les rivages les plus dynamiques, tantôt sur des innovations permettant de fixer – sans les mettre en danger – les hommes et des activités économiques diversifiées. Après tout, la côte du Golfe du Lion a jadis été un formidable moteur d’innovation. Elle peut à coup sûr l’être à nouveau et servir de vitrine aux autres régions riveraines de la Méditerranée à condition d’échapper aux spectres de l’immobilisme et du populisme.

Contribution réflexive du comité de rédaction de la revue Études héraultaises

Une boussole des possibles

« Occitanie, un littoral en mouvement », cet ouvrage résume des approches spécifiques avec des focus bien identifiés qui interrogent l’histoire, l’écosystème complexe du rapport terres/eaux et la géographie de l’aménagement d’un littoral qui ne cesse de se transformer. L’objectif est de mieux saisir l’évolution contemporaine fortement déterminée par les conséquences du changement climatique. Les rapports du GIEC et celui de l’Alliance nationale de recherche pour l’environnement (AllEnvi) en 2016 1 ont révélé la vulnérabilité de la Méditerranée, particulièrement exposée aux risques et aléas divers. La recherche de solutions d’atténuation, d’adaptation, de prévention, de transition y est d’autant plus importante. Or le système économique et social contemporain a largement bouleversé la géographie du littoral languedocien.

Quelque 170 ans après la révélation par Courbet du Bord de mer à Palavas (1854) – le ciel, la mer y comptent plus que la plage figurée par un rocher qui pointe sur une maigre étendue de sable déserte – le littoral du golfe du Lion s’identifie aujourd’hui par ses plages largement ouvertes à la fréquentation touristique. Depuis la « découverte du rivage », les aménagements conséquents l’ont inscrit dans une dynamique de changement. Une vision d’avenir serait-elle toute tracée, portée par un tourisme de masse qui a modifié les figures du lido, densifié les lieux urbains, agressé et réduit les espaces de nature ? Ancrées sur les reliefs rocheux des « monts » (Saint-Clair à Sète, Saint-Loup en Agde) et des « massifs » (la Gardiole, la Clape, les Albères), les longues langues sableuses largement conquises et colonisées par les stations balnéaires sont de plus en plus exposées à l’érosion, à l’élévation du niveau de la mer et aux phénomènes de submersion marine. Autant de critères soulignant les incertitudes qui planent sur le futur du littoral d’Occitanie, alors que les études de prospective et les rapports attenants envisagent une montée des eaux de 30 à 60 cm, pour les plus optimistes. Dans moins d’un demi-siècle, on peut donc estimer que plusieurs centaines de milliers de mètres carrés d’habitations, de commerces, d’équipements publics seront directement affectés. Des territoires pourtant situés à distance du rivage seront également touchés à cause de la vulnérabilité aux aléas des zones résidentielles et commerciales, des réseaux d’eau, d’énergie et de communication. Les capacités d’accueil du littoral seront donc de plus en plus limitées, d’autant que les gisements fonciers sont rares, les documents d’urbanisme n’ayant pas permis de contenir une urbanisation développée aux dépens des espaces agricoles et naturels.

Les analyses développées tout au long de cet ouvrage permettent de penser que le littoral, dans toutes ses dimensions est un espace fragile, une interface terre/mer labile, un « point de bascule » souvent souligné par les chercheurs 2. L’histoire nous dévoile qu’il n’a cessé de changer dans ses configurations géographiques. Il obéit à une dynamique qui a engendré des modifications et mutations de ses usages, le principe d’adaptation prévalant. La maîtrise du progrès technique par les ingénieurs a facilité la conquête du rivage, au plus près des flots, pour en tirer profit, au XIXe siècle d’abord, au XXe ensuite, le tourisme y trouvant sa raison d’être avec la Mission Racine.

La version environnementale du littoral et du rétro-littoral, celle qui s’intéresse au cordon dunaire et aux espaces naturels de l’écosystème lacustre, accorde sa place à la notion de paysage et à l’esthétique des lieux et des sites, mais elle révèle surtout la nécessité de penser la transition vers une trajectoire « durable » du littoral d’Occitanie. Il s’agit d’élaborer une stratégie de réponses spécifiques 3 à l’érosion du trait de côte, à la submersion marine accusée et à la progression de la salinité des terres et aquifères.

La montée des risques doit être également associée à la densification résidentielle du lido et à la « littoralisation » de l’économie du fait du tourisme balnéaire directement illustré par l’action de la Mission Racine 4. Des tensions multiples caractérisent cet espace de conquête, la gestion politique s’efforçant d’en démêler les enjeux au gré de réponses qui se veulent correctives, sous forme de repli, de recul stratégique, de « relocalisation » ou, de manière plus globale de « recomposition territoriale ». Autant d’options jugées irréalistes par la plupart des élus et inconcevables pour les habitants. Nombre d’acteurs locaux restent fidèles aux seules mesures de protection structurelles (rester sur place) car la relocalisation des activités (se replier) leur paraît illusoire et l’abandon une négation économique. Les projets d’aujourd’hui suscitent des controverses, car ils sont souvent perçus « à rebours » des ambitions écologiques et des principes du développement durable.

Véritable « entre deux », le littoral d’Occitanie transmet à la fois le message d’un patrimoine culturel aux nombreuses facettes, et celui d’un écosystème d’une nature vivante, riche et complexe, dont le Conservatoire du littoral 5, par un travail patient et minutieux, assure la pérennité. N’y aurait-il pas dans la convergence de ces deux entités le catalyseur d’un grand projet régional pour le littoral ?

Empruntant la métaphore à Mireille Delmas-Marty 6, ne pourrait-on construire pour le littoral une boussole des possibles de la transition reposant sur les héritages de nature et de culture, l’anticipation des risques et, comme elle le souligne, la responsabilisation des acteurs. Ce qui implique un renouvellement du regard, une interdépendance des territoires source d’actions coordonnées rendant réversibles les options initiales du tourisme de masse qui a largement induré un littoral tout de mobilité et de mouvement. Si Paul Valéry nous rappelle dans le Cimetière marin « la mer, la mer, toujours recommencée », le littoral d’Occitanie, cet univers que l’on a voulu, un jour, immobiliser et uniformiser, ne s’offre-t-il pas à l’anticipation et à la créativité pour refonder le nouveau rêve d’un futur durable ?

Le Comité de rédaction
d’Études héraultaises

1* Collectif AllEnvi, La Méditerranée face au changement climatique, COP 22, 2016
2* https://planbleu.org/soed/. François Guerquin, directeur de Plan Bleu, 2020, Rapport sur l’état de l’environnement et du développement en Méditerranée : « L’exploitation des ressources et des organismes, la pollution et le changement climatique devraient exacerber les fragilités préexistantes… »
3* Dominique Bourg, Gérald Hess, 2016, Science, conscience et environnement. Penser le monde complexe, PUF, 326 p.
4* Pierre Racine, Mission Impossible ? L’aménagement touristique du littoral Languedoc-Roussillon, Midi Libre, 1980.
5* Le Conservatoire du littoral a été créé en 1975 pour protéger les espaces naturels et les paysages des littoraux.
6* Métaphore qu’elle a mise en valeur dans un autre champ, celui du droit et de la gouvernance : Mireille Delmas-Marty, 2011, Une boussole des possibles. Gouvernance mondiale et humanismes juridiques, leçon de clôture prononcée le 11 mai 2011 au Collège de France.