Géographie

L’oppidum est implanté sur le flanc est d’une colline basse qui constitue l’extrémité sud-est des garrigues du Montpelliérais et qui domine la plaine du Vidourle à l’endroit où le substrat calcaire du valanginien inférieur affleure au plus près du cours d’eau. Un quartier bas s’est étendu au nord-est de l’oppidum, à proximité immédiate du fleuve qui devait fournir à l’habitat l’essentiel de ses ressources en eau.

Le site est au contact de terroirs différents (terres légères de la garrigue et sols lourds de la plaine), favorables à l’implantation d’une communauté agro-pastorale ; il est aussi à l’endroit qui se prêtait le mieux au contrôle du passage du fleuve : Ambrussum deviendra d’ailleurs un relais de la voie domitienne à l’époque romaine.

Sources antiques

Le nom d’Ambrussum a été conservé par plusieurs documents itinéraires antiques. Les gobelets de Vicarello, qui portent la liste des stations de Gadès à Rome, constituent les témoins les plus anciens trois d’entre eux, datés du début du principat d’Auguste, indiquent AMBRVSSVM ; le quatrième, de la fin de la période augustéenne ou du début du règne de Tibère, porte AMBRVSIO. On retrouve ces deux formes sur des documents dérivés d’une carte du monde établie sous Auguste : la Table de Peutinger, dont le fond daterait au plus tard de la première moitié du IIIe siècle, mentionne AMBRVSIVM, et l’itinéraire d’Antonin, guide routier de la fin du IIIe siècle, AMBRVSSVM. Quant à l’itinéraire de Bordeaux à Jérusalem, rédigé en 333, il précise qu’AMBROSIVM était une mutatio, située à égale distance des relais voisins de Nîmes et de Sextantio, soit quinze milles.

Toponymie

Ambrussum évoquait pour E. Desjardins, une origine « ombrienne ou ambronne » et E. Bonnet rapprochait ce nom de celui des Umbranici, peuple voisin des Tectosages sur la table de Peutinger. Plus prudemment, on observera que la base ambr-, conservée dans des toponymes d’Espagne, de Gaule, d’Italie et d’Illyrie, pourrait se rapporter à un substrat méditerranéen, pré-indoeuropéen.

Le pont romain, qui marque le passage de la voie domitienne au pied de l’oppidum, a conservé le nom antique sous la forme Pont-Ambroix (Ponte Ambrosio en 1156, Pont Ambrueys en 1390, Pont Ambruiejs en 1630, Pont Embrieu sur la carte de Cassini).

Historique des recherches

Les mentions d’un relais dans les itinéraires antiques et les ruines du pont romain attirèrent sur les rives du Vidourle, dès le XVIIe siècle, les amateurs d’antiquités.

Ainsi, l’historien de Nîmes, L. Ménard, put, vers le milieu du XVIIIe siècle, localiser la station sur la colline qui domine le pont. Le rempart de l’oppidum, décrit dès 1835 par le pasteur Hugues, fut levé en plan, à l’initiative de la société archéologique de Montpellier, en 1857. Au cours du XIXe siècle, plusieurs découvertes furent signalées : monnaies, urnes funéraires, fibule à disque décoré (IXe siècle avant notre ère), armes du 2e Age du fer et tuyau de plomb estampillé d’époque romaine. A partir de 1911, le Dr. Marignan, préhistorien de la basse vallée du Vidourle, fit effectuer des fouilles, recueillit du mobilier néolithique, dégagea neuf cases gauloises, reconnut trois maisons romaines et mit au jour, au pied de la colline, un bâtiment médiéval.

Des recherches systématiques furent entreprises en 1967. Des sondages préliminaires mirent en évidence l’existence de quartiers hors les murs, au sud et surtout au nord-est (Fig. 1). Sur l’oppidum, des fouilles furent programmées entre 1969 et 1980 ; elles précisèrent la chronologie de l’occupation du site, permirent le dégagement et une première étude du rempart et aboutirent à la présentation d’une rue pavée, d’un bâtiment public ouvert sur une place et de deux îlots d’époque romaine. Les recherches dans le quartier bas, au nord-est de l’oppidum, ont été conduites entre 1979 et 1983 dans le cadre d’un sauvetage programmé, prolongé par une fouille programmée en 1984 et 1985; ainsi, ont été explorés une partie de la rue principale de ce quartier et un îlot contigu.

Plan d'Ambrussum (Villetelle, Hérault)
Fig. 1 Plan d'Ambrussum (Villetelle, Hérault)

Chronologie de l’occupation

La partie haute de la colline a connu un habitat de plein air du Néolithique final (culture de Ferrières). Une autre occupation, durant les VIe et Ve siècles avant notre ère, n’est attestée que par un matériel mêlé à des documents plus récents. Ce n’est qu’à la fin du IVe ou au début du IIIe siècle avant notre ère qu’est créée l’agglomération d’Ambrussum.

Des niveaux de cette période ont été rencontrés dans les fouilles des secteurs I, IV et V ; il est probable que l’habitat était alors déjà fortifié c’est ce que laissent supposer les noyaux quadrangulaires des tours 1, 4 et peut-être 12, qu’on peut interpréter comme les vestiges d’un rempart primitif, noyé dans un mur d’enceinte plus récent.

En effet, la fortification à tours curvilignes qui a été dégagée, est datée des environs de 225 avant notre ère. Dans le secteur I, sa fondation en semelle parementée reposait sur des constructions de la première moitié du IIIe siècle; dans le secteur IV, une couche de recoupe de calcaire tendre marquait une activité de taille liée à un aménagement de la tour 18 en appareil pseudo-isodome.

C’est dans la première moitié du IIe siècle avant notre ère que le quartier bas a connu une première occupation, vraisemblablement de courte durée puisque ce niveau a été couvert par des alluvions épaisses, certainement mises en culture.

Vers le début du Ier siècle avant notre ère, la partie haute de l’oppidum a connu des transformations par l’établissement de terrasses, bien observé dans le secteur IV. Dans les décennies suivantes – peut-être autour du milieu du siècle – le quartier bas a été urbanisé : un réseau de rues a été créé et dans un îlot ainsi constitué, une grande unité d’habitation et d’exploitation agricole s’est établie autour d’une cour, dans deux bâtiments.

Dans la seconde moitié du Ier siècle avant notre ère, l’adoption de techniques romaines (tuiles, enduits au mortier) transforme l’habitat de hauteur (secteur IV) et le quartier bas qui conserve la même organisation après l’exhaussement des sols menacés par les crues du fleuve, au début de l’époque augustéenne. C’est durant cette période qu’est construit un portique en bordure d’une place dallée derrière l’entrée sud de la ville restaurée à l’occasion du pavage de la rue principale de l’oppidum. La fortification du IIIe siècle est alors en partie ruinée et l’on a élevé sur l’éboulis extérieur, un mur de 3 m d’épaisseur qui n’a pu être daté précisément. Ce développement de l’urbanisme intervient aussi au moment où une monnaie d’argent est émise au nom de l’oppidum (monnaies à légende AMBR vraisemblablement du troisième quart du Ier siècle avant notre ère). Au Ier siècle de notre ère, l’habitat de l’oppidum est caractérisé par de grandes habitations à cour intérieure, inspirées des domus urbaines, mais marquées aussi par des traits indigènes ; l’une d’elles a été mise au jour dans le secteur IV et deux autres forment un îlot dans le secteur I ; toutes ont été construites vers 40 de notre ère et abandonnées vers 100, au moment où la colline se dépeuple. A cette époque, la partie la plus haute du rempart en ruines accueille un culte de hauteur, caractérisé par des objets votifs – autels en pierre et gobelets en céramique – du temps de Tibère.

Abandonné durant la première moitié du Ier siècle de notre ère, l’îlot fouillé dans le quartier bas, est réoccupé dans la seconde moitié de ce siècle, après un important remblaiement et selon la même organisation qu’auparavant. Les destructions dont les niveaux plus récents ont fait l’objet, ne permettent pas de restituer la physionomie de l’îlot dans son dernier état ; mais la date d’abandon du quartier est bien cernée vers 240.

L'organisation de l'habitat

Le mur d’enceinte de l’oppidum se présente, dans son état actuel, comme un triangle aux sommets arrondis dont deux côtés seulement seraient conservés sur une longueur de 635 m. Il est probable qu’à l’origine, une courtine se développait au-dessus du Vidourle, en bordure de terrasse au nord et suivant la cote des 30 m au sud. Il faudrait alors restituer une entrée de ce côté, à l’extrémité basse de la rue principale qui devait se prolonger vers le Nord jusqu’à l’extrémité du pont.

A l’intérieur de la fortification, l’habitat occupait un hémicycle naturel d’une superficie de 5 ha environ. Le traitement de photographies aériennes par équidensités colorées laisse supposer qu’il s’organisait par rapport à la rue principale qui suit une courbe adaptée au relief : à l’ouest de cette voie, on restitue un plan rayonnant ; à l’est, l’aménagement de terrasses a rectifié de fortes pentes.

Le quartier bas, établi dans une zone inondable, s’est développé de part et d’autre d’une rue qui, depuis le pont, vers le nord, est parallèle au pied de la colline. Les ruelles dégagées à l’est de cet axe principal, ne lui sont pas perpendiculaires, mais suivent le tracé qui assurait le meilleur écoulement des eaux en direction du fleuve.

Le mur d'enceinte

La partie la mieux conservée est la façade ouest où 15 tours curvilignes, de trois modules différents, espacées de 7 à 10 m, alternent symétriquement par rapport à la tour 9 située au centre (Fig. 2). Le sommet de la colline est occupé par deux tours remarquables par leur volume : la tour 17, qui est deux fois plus large que les tours ordinaires et présente des assises épaisses en grand appareil, constitue une tour monumentale, plus haute à l’origine que le reste du mur d’enceinte; la tour 18, auprès de laquelle on a découvert six blocs en pierre de taille, a pu, quant à elle, supporter une construction pleine, au parement pseudo-isodome de type « hellénistique ».

Moins bien conservée, la face sud ne présente pas le même dispositif de tours que la face ouest ; il s’y trouve la seule tour quadrangulaire en grand appareil (tour 20) qui peut correspondre à un réaménagement, et en son centre, la seule porte conservée, protégée par une tour (25) et un mur de soutènement (24) établi pour séparer la porte restaurée au Ier s. avant notre ère (piédroit et butée des vantaux), des courtines en ruines.

Tour du rempart sur la face ouest du site
Fig. 2 Tour du rempart sur la face ouest du site (IIIe siècle avant J.-C.).

Ce rempart, fait de pierres extraites du substrat local et des terres alluviales provenant du Vidourle, est une construction complexe, épaisse de 7,50 m ; en deux points, on a noté la présence de 4 parements internes. Des reprises sont visibles ; des redans peuvent marquer des consolidations; mais la ruine de l’ouvrage a nécessité l’érection d’un mur épais de 3 m, établi comme un avant-mur, sur son éboulis extérieur, à une date indéterminée avant notre ère.

Les structures de l'habitat protohistorique

Dans le secteur I, une habitation à pièce unique (9 x 4,50 m) aux murs de pierre, était ouverte dans l’angle sud-ouest de sa façade la plus longue. Occupée au IIIe s. avant notre ère, elle présentait un sol de terre sur un radier de cailloux et comportait une banquette longue de 4 m. Cette construction semble avoir recoupé l’un des deux murs qui limitent un passage de 2,50 m environ et qui s’engagent sous le rempart, derrière la tour 4. A la même époque, dans le secteur IV, la forte densité de foyers et de petites fosses invitent à restituer un habitat peu différencié, aux unités relativement réduites. Un des sondages de ce secteur a livré cependant l’angle d’une pièce formé par un mur et une cloison dont la base en pierre supportait vraisemblablement des superstructures en terre comme le laissait supposer une épaisse couche de destruction. Un foyer, fait d’une chape d’argile sur un radier de cailloux et de tessons, était appuyé à la cloison et situé à proximité d’une petite fosse couverte par une dalle de calcaire arrondie. De l’autre côté de la cloison, devait s’étendre un espace découvert dans lequel on a observé un foyer lenticulaire et un radier carré de même construction que celui du foyer.

Sur l’oppidum, les niveaux du IIe siècle avant notre ère ont rarement été trouvés en place. On ne peut rapporter à cette période qu’un sol de galets et un tronçon de mur en pierre associé à une banquette dans deux sondages du secteur IV.

Au début du Ier siècle avant notre ère, une terrasse large de 15 à 16 m est créée dans le secteur IV ; elle comporte deux passages larges de 2 m environ qui longent deux corps de bâtiment l’un, large de 3,60 m environ, contre le soutènement nord ; l’autre, large de 5,20 à 5,60 m, entre les deux passages. Dans l’une des ruelles, un foyer bâti sur un radier de cailloux contre une façade, était accompagné de deux trous de piquets qui limitaient un abri ou portaient un dispositif de séchage.

Un important accroissement de la superficie des unités d’habitation est sensible dans le quartier bas, dans le second tiers du Ier siècle avant notre ère : deux bâtiments spécialisés (habitation et communs), entre lesquels un appentis abritait un four en torchis de 1,10 m de diamètre, limitent une vaste cour ouverte sur la rue principale par une porte charretière et pourvue d’un dispositif central comportant un pilier en pierre de taille, un grand foyer construit et un petit bassin s’écoulant dans un caniveau (forge ?).

C’est dans la seconde moitié du Ier siècle avant notre ère qu’apparaissent les premiers signes de la romanisation de l’habitat toitures de tuiles, antéfixe, enduits de mortier, colonnes et pierres de seuil. A propos des pierres de taille, extraites à quelques kilomètres de l’oppidum, on notera que leur utilisation, attestée sur le rempart du IIIe siècle avant notre ère, ne semble pas toucher l’architecture domestique avant la romanisation. Celle-ci ne fut d’ailleurs jamais complète comme en témoignent les permanences observées dans la construction des murs, faits en calcaire local lié à l’argile, jusqu’au IIe siècle de notre ère.

Le relais de la voie domitienne

Le franchissement du Vidourle par la voie domitienne est marqué, au nord-est de l’oppidum, par le Pont-Ambroix. Ce pont, d’après les fouilles effectuées en 1973 sur la rive droite, et les mesures de résistivité électrique relevées sur la rive gauche, devait avoir onze arches à l’origine et l’arche conservée en serait l’élément central. Il s’agit certainement d’une construction julio-claudienne puisque les milliaires découverts dans les environs attestent des réfections de la voie aux temps d’Auguste, de Tibère et de Claude. L’ouvrage était ancré à la base de la colline d’Ambrussum et la sortie se trouvait sur la pente, à plus de 3 m au-dessus de l’accès actuel. Cette position permet de restituer une liaison entre l’extrémité de l’ouvrage et la rue principale de l’oppidum ; il est donc vraisemblable que la voie traversait l’agglomération et que l’abandon de cet itinéraire au profit d’un contournement par le Sud est consécutif au dépeuplement de la colline; les profondes ornières creusées dans la rue principale peuvent témoigner de ce tracé primitif, de même que la situation de la porte sud, établie dans l’axe du tracé extérieur de la voie repris par la limite communale de Villetelle et de Lunel. Ce contrôle de la voie domitienne par la communauté d’Ambrussum, que traduisent la topographie et l’urbanisme, invite à penser que l’aménagement de la route romaine n’a pu se faire ici qu’avec l’assentiment de la classe dirigeante indigène (Fig. 3).

Derrière la porte sud, était aménagée une place dallée sur laquelle s’ouvrait un portique pourvu d’une exèdre et dont on n’a conservé en dehors des murs, que la base de quatre piliers dans le grand axe du bâtiment. Ce monument, dont le plan rappelle celui du portique dorique de Glanum, pourrait remonter à la 2e moitié du Ier siècle avant notre ère comme le pavage de la rue et le dallage de la place. C’est cependant une construction rustique dont les murs liés à l’argile, étaient couverts de mortier peint, et seule une corniche de piédestal découverte dans la destruction, est à rapporter à son aménagement intérieur. La destination d’un tel bâtiment est donc délicate à préciser. Mais il s’agit plutôt d’un édifice public lié à la vie locale que d’une installation en rapport avec le relais. Les découvertes faites dans l’habitat gallo-romain le confirment.

Voie pavée à l'intérieur de l'oppidum
Fig. 3 Voie pavée à l'intérieur de l'oppidum

Les maisons gallo-romaines

Maison à cour intérieure du Ier siècle après J.-C.
Fig. 4 Maison à cour intérieure du Ier siècle après J.-C.

Les habitations du Ier siècle de notre ère qui ont été fouillées à proximité du rempart rompent avec les conceptions de l’habitat protohistorique par leur superficie (400 m²) et par leur organisation (Fig. 4). Ce sont des maisons à cour intérieure où la partie résidentielle et les pièces de communication prennent une place prépondérante. Constructions originales, elles sont caractérisées par une cour à galerie ou à portiques, bordée au Nord par trois pièces dont la principale, au centre, est pourvue d’une baie, et qui présentent le plus souvent des aménagements d’enduits peints et de béton de tuileau. Les communs sont intégrés à la maison et dans un cas s’étendent à un bâtiment annexe ; on y a reconnu une resserre ménagée au fond de la cour et une remise à porte charretière qui a pu abriter un petit atelier et un animal de trait. Mais ces bâtiments comportent aussi un lieu de vie permanent, proche de l’entrée, où se tenait un groupe dépendant des propriétaires de la maison. Cette pièce, en effet, avec son foyer et la présence d’un dépôt propitiatoire (monnaies ou reptile dans une urne), perpétue un mode de vie traditionnel dans un ensemble différencié.

En tout cas, ces maisons, constituées à partir d’une forte concentration foncière, marquent l’ultime développement du processus d’urbanisation qu’a connu Ambrussum et y témoignent d’une société gallo-romaine fortement peuplée et hiérarchisée. Ce sont des maisons villageoises dont le mobilier traduit une permanence des activités agro-pastorales.

L'emprise sur le fleuve

Un des intérêts de la fouille du quartier bas a été de mettre en évidence les liens qui se sont tissés dans l’Antiquité entre les habitants d’Ambrussum et le Vidourle. On a retrouvé la terrasse naturelle du fleuve à 2,50 m au-dessous du sol actuel alors que le niveau de l’eau (1,50 m plus bas en période d’étiage) n’a pas sensiblement varié si l’on se réfère à l’implantation du pont romain ; avant l’intervention de l’homme, le Vidourle avait donc une physionomie bien différente de celle qu’on lui connaît, même si son régime, avec ses brutales vidourlades, n’a guère changé. Il est vrai qu’aujourd’hui c’est un fleuve domestiqué par d’anciennes digues et de récents barrages d’écrêtement de crues, qui s’écoule sous nos yeux (Fig. 5).

La première installation en bordure du fleuve, dans la 1re moitié du IIe siècle avant notre ère, devait avoir un caractère précaire ; elle n’est marquée que par des fosses-foyers couvertes par des alluvions qui témoignent d’une reconquête du fleuve même si elles ont gardé quelques traces de mise en culture.

Îlot d'habitations du quartier bas (état de l'époque augustéenne)
Fig. 5 Îlot d'habitations du quartier bas (état de l'époque augustéenne)

Dans la première moitié du Ier siècle avant notre ère, l’urbanisation du quartier a été réalisée dans une zone inondable dans la rue principale, on a observé des traces d’inondation sur la chaussée primitive qui sera régulièrement exhaussée durant plus de trois siècles pour échapper aux crues. La voie encore utilisée après l’abandon du quartier se trouve presque au niveau du sol actuel ; c’est dire que si le profil de la terrasse s’est profondément modifié, c’est essentiellement à cause de l’implantation humaine dans l’Antiquité. L’homme avait le souci constant de se protéger du fleuve, et, en même temps que celui de la rue, le niveau des maisons voisines a été régulièrement surélevé certaines pièces aux murs enduits de mortier de chaux ont été partiellement comblées de gravier et réoccupées après exhaussement des murs et des toitures et réfection des enduits.

Après l’abandon du quartier vers 240, la rue principale a été utilisée au moins jusqu’à la fin de l’Antiquité. Le chemin a été déplacé au niveau de la voie actuelle à la base de la colline, certainement à l’occasion de la mise en culture de l’ensemble de la terrasse. On a observé à la fouille que les vestiges de l’habitat, bien conservés près de la hauteur, étaient de plus en plus profondément détruits à l’approche du fleuve. C’est sans doute la conséquence du reprofilage dont la terrasse a fait l’objet pour améliorer le drainage, au moment de la mise en culture. La terre et les matériaux récupérés lors de cette opération ont dû servir à constituer la levée de terre qui forme une digue protectrice le long du Vidourle. La date de ces travaux n’est pas connue mais elle se place, selon toute vraisemblance, au XIe ou au XIIe siècle, qui furent une période de conquête de terres et pour lesquels des textes mentionnent la création et l’entretien de tels ouvrages.

L'Antiquité tardive et le Moyen Age

L’oppidum et le quartier bas n’ont livré, au cours des fouilles et des prospections, aucune céramique de l’Antiquité tardive à l’exception d’un tesson de claire D trouvé dans une tranchée d’épierrement du quartier bas. Les monnaies du IVe siècle qui ont été récoltées en surface semblent donc davantage en rapport avec la fréquentation de l’itinéraire et la récupération de matériaux, qu’avec le maintien d’une agglomération. Si en 333, une mutatio est encore mentionnée à Ambrussum, il s’agit certainement d’un relais isolé.

L’utilisation du pont et de la voie au Moyen Age est attestée à trois reprises. En 1156, il existait sur le pont ou aux abords, une chapelle Notre-Dame du Pont-Ambroix qui dépendait du chapitre de Nîmes. En 1254, elle passa sous l’autorité de l’abbaye de Saint-Geniès-des-Mourgues à condition que quatre religieuses s’y installent ; il est possible que le bâtiment fouillé par Marignan à la base de l’hémicycle de la colline et qui a livré une monnaie de Philippe le Bel, soit en rapport avec cette installation. En 1390 enfin, les archives notariales de Clarensac mentionnent que le pont a connu des destructions à cause des habitants de Gallargues et qu’il doit être réparé.

Bibliographie

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