L’hôpital Saint-Charles de Sète de 1778 à 1786 :
l’aboutissement d’une politique hospitalière ?

*Assistant de Conservation du Patrimoine aux Archives Départementales de l’Hérault.

Introduction : Une collecte tardive

Le hasard fait souvent bien les choses. Et les hasards apportent plus d’une surprise dans la vie quotidienne de l’archiviste. Dans le cadre des versements de documents n’ayant plus aucune utilité administrative, il est amené à entrer en contact avec maints producteurs. C’est ainsi qu’en 2006, les agents des Archives départementales ont pu faire le tour des différents services hospitaliers de la ville de Montpellier, afin de faire le point sur les éventuels documents qu’ils pourraient conserver pour la recherche historique.

À l’occasion de l’un des ces entretiens, le responsable de la pharmacie de l’Hôpital Suburbain Saint-Eloi nous confia, au cours de la conversation préalable à notre enquête, qu’il avait en ses mains un document pouvant nous intéresser. Il avait travaillé auparavant à l’hôpital de Sète, où œuvraient alors les dernières sœurs de la Charité en charge du soin des malades. À son départ pour Montpellier, celles-ci voulurent lui faire un cadeau. Étant donné qu’il s’intéressait à l’histoire (selon leurs propres mots), elles lui offrirent un vieux registre qui pourrait l’intéresser. Un vieux registre de délibérations et de comptes de l’ancien hôpital de la ville. Ce médecin conservait ce document chez lui, et souhaitait pouvoir prendre le temps de le lire à sa retraite prochaine. Nous lui avons bien souligné l’importance historique éventuelle de ce document et il nous a promis de nous contacter pour nous le confier, une fois qu’il en aurait terminé.

Les années passèrent. Et nous eûmes l’agréable surprise d’être contactés par ce pharmacien l’année dernière. Comme promis, il nous proposait de récupérer le registre en question. Rendez-vous fut pris à Pierres Vives, et c’est ainsi que le plus ancien registre des délibérations de l’hôpital Saint-Charles de Sète a pu rejoindre les archives de cet établissement dans la sous-série 11 HDT des archives hospitalières. Sous la côte 11 HDT E 1 figurait jusque-là l’unique registre de ce genre, couvrant les années 1784 à 1789, soit les dernières années de l’Ancien régime. Or le nouveau venu, qui porte désormais la cote 11 HDT E 3, couvre les années 1778 à 1784. Il s’agit bien d’un document complètement inédit pour la recherche historique. (Fig. 1)

Page de couverture du registre des délibérations de l’hôpital Saint-Charles de Sète, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 1 (1778-1784).
Fig. 1 Page de couverture du registre des délibérations de l’hôpital Saint-Charles de Sète, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 1 (1778-1784).

Nous souhaitons ici en présenter le contenu, et le recontextualiser dans l’histoire hospitalière de la ville de Sète. Durant notre travail d’analyse, nous avons en effet pu relever plusieurs données sur le fonctionnement, le personnel, l’architecture, voire la place qu’occupait cet hôpital dans la société du port languedocien. Mais nous ne serons pas exhaustifs : nous terminerons par des pistes de recherches et quelques réflexions qu’étudiants ou chercheurs pourront exploiter à leur tour, grâce à ce document, afin de finaliser l’histoire de cet établissement hospitalier, somme toute assez peu connu.

L’hôpital Saint-Charles de Sète : historiographie

Aujourd’hui, les Sétois ont pour habitude, lorsqu’ils parlent de l’ancien hôpital de Sète, de désigner l’imposant édifice qui abrite actuellement la médiathèque municipale. Il faut dire que ce bâtiment a longtemps aussi porté le nom de Saint-Charles. Il a également fait fonction d’hôpital depuis 1847, date de sa construction. Mais il fut bâti à cet endroit, pour prendre la suite d’un premier établissement situé ailleurs, et dès lors vétuste. Celui-ci a fait l’objet d’une première recherche en 1980.

En utilisant principalement les registres municipaux, A. Degage a pu faire le point sur les « balbutiements », les débuts de la politique hospitalière de la ville, dans un article qui demeure une référence 1. En 1693, suite aux réformes hospitalières initiées par Louis XIV autour des Hôpitaux généraux à faire édifier dans toutes les grandes villes pour prendre en charge les nécessiteux et marginaux du royaume, les consuls estiment qu’une telle dépense semble inutile pour le port vieux d’à peine vingt ans. Le procureur des Pauvres, officier municipal, conserve la charge de percevoir les sommes nécessaire à l’assistance locale.

Ce ne sera qu’en octobre 1713 que l’évêque d’Agde, à l’occasion d’une visite pastorale, note la volonté des habitants de procéder à la construction d’un hôpital. Le premier registre de délibération, conservé aux archives municipales de Sète, rapporte les ordonnance et statuts alors attribués. Le bureau sera composé des curés des deux paroisses (Saint-Louis et Saint-Joseph), de six conseillers urbains, un syndic, et un trésorier. Ce conseil sera renouvelé par moitié le 30 juin de chaque année, soit le lendemain de chaque élection consulaire.

Les données municipales décrivent un bâtiment situé place de l’Hospitalet, dans le quartier haut de la ville. Il se composait d’une salle unique, à laquelle furent ajoutées deux maisons mitoyennes en 1719 et 1720, formant ainsi un bâtiment tripartite, auquel est adjoint une chapelle en 1737, inaugurée en 1754. Tenu à l’origine par des veuves et femmes pieuses, il est finalement décidé de faire appel aux sœurs grises en 1777. C’est à ce moment-là que débute notre nouveau registre.

Les registres portant les cotes 11 HDT E1 et E3 contiennent en effet une foule de renseignements qui vont nous permettre de décrire le quotidien de cet hôpital, vu de l’intérieur. Qu’il s’agisse des travaux, des questions de disciplines relatives soit aux médecins, soit aux sœurs de la Charité, des questions des cadavres des décédés, voire même de la place de cet établissement dans la spiritualité sétoise de la fin de l’Ancien régime, ces documents nous permettent de répondre à plus d’une question laissée en suspens par A. Degage en 1980. Ils nous permettent d’observer ce qui peut paraître, à première vue comme l’aboutissement des balbutiements observés il y a quarante ans.

Une gestion d’Ancien Régime

Mais avant d’entrer dans les détails, il convient de se reporter au préalable aux archives de l’Intendance de Languedoc, pour faire un premier point. Cette série contient en effet plus d’un rapport sur les hôpitaux, donnant des récapitulatifs intéressants sur leurs situations respectives. Sous la cote C 4680 est par exemple conservé un « mémoire sur la subdélégation de Sète, adressé à Monseigneur l’Intendant au mois de septembre 1786 ».

Inspections et mauvaise réputation

Voici ce qu’affirme ce document à propos de l’hôpital qui nous intéresse :

« Il y a dans Sète un hôpital d’infirmerie qui fut fondé en l’année 1713, et qui a reçu une constitution légale par lettres patentes du mois de mai 1742 : on y reçoit que les pauvres malades du lieu, les soldats et les matelots du roi qui y sont néanmoins traités, ainsi que les matelots des navires marchands et certains autres individus.

Les biens de cette maison de charité n’ont pas toujours été administrés avec sagesse et économie, mais on y voit de l’ordre depuis quelques temps, et surtout depuis qu’on y a placé pour la desservir des sœurs de la Charité qui y sont depuis l’année 1778.

On y voit guère cependant que quarante lits, qui ne sont pas même le plus souvent occupés, quoique les malades n’y couchent que séparément. Au surplus, quoique les malades soient bien traités dans cet hôpital, […] les gens du peuple ont une singulière répugnance pour cette maison, et il faut que les besoins soient bien pressants chez eux pour les déterminer à profiter de ce secours, que l’opinion publique ou un faux préjugé leur font regarder comme très humiliant et capable de les déprimer dans l’esprit de leurs semblables.

La ville de Sète n’offre d’ailleurs aucunes ressources ni le moindre asile pour les infirmes, les vieillards, les orphelins, les insensés et autres infortunés qui, n’étant pas dans le cas d’être reçus comme malades à l’hôpital et qui, rencontrant les secours épuisés dans l’œuvre de la Miséricorde, sont abandonnés à leurs tristes sorts et périssent le plus souvent de misère. » 2

Il est donc question d’un établissement de taille modeste, n’ayant pas la fonction sociétale d’un hôpital général : les fous, orphelins, et autres pauvres vivant dans la marginalité n’y sont point accueillis, comme c’est le cas par ailleurs à Montpellier. Le but est bel et bien purement médical : y sont accueillis non seulement les pauvres malades du lieu, mais également les soldats et matelots du roi de passage au port. Sauf que la population hésite à s’y rendre. Bien que le confort y soit attesté, il faut vraiment une urgence pour s’y rendre. Il faut bien avouer que l’état sanitaire du port n’est pas des plus glorieux. Imbert, inspecteur royal, fait le tour des hôpitaux de la province de Languedoc durant l’année 1766. Il s’arrête à cette occasion à Sète, et y rédige un mémoire sur l’état de la pharmacie, notamment les « abus qui s’y commettent journellement dans la composition, administration et débit de drogues. » 3 D’après ce document, il n’y a pas de maître apothicaire établi à Sète. Les habitants « ont avoué au sieur Imbert qu’il étoient dans le tremblement toutes les fois qu’ils se voyaient obligés d’user des drogues tirées des boutiques desdits chirurgiens de Sète. » Il dénonce ainsi des abus dans l’approvisionnement des plantes : les chirurgiens, ou les garçons qu’ils envoient, ne sont pas botanistes et peuvent se tromper. C’est ainsi qu’Imbert demande au sieur Gély chirurgien, de la manne : « on lui apporta une manne dont au moins les deux tiers n’étoient qu’une mauvaise matière mielleuse dans laquelle étoit enveloppé et incorporé le tiers restant de manne ». On lui rapporte également des exemples de « personnes mortes subitement parce qu’on leur avoit fait avaler une potion qui avoit été préparée pour quelqu’un d’autre » par le chirurgien, ou pire, par un garçon « ne sachant ni lire les étiquettes ni ne connaissant les dosages ». Une véritable pharmacie installée dans l’hôpital fait partie des vœux de la population. On y trouve pour le moment trop peu de remèdes.

Lorsqu’il débute en 1778, notre registre illustre donc une période de reprise en main des affaires de l’hôpital. Depuis les inspections, des sœurs hospitalières sont arrivées pour tenir les lieux. Des contacts avec les paroisses environnantes ont été pris, afin de voir si les curés seraient d’accord pour assumer la charge d’aumônier. Mais avant tout, il était temps d’établir ce qui manquait : un document normatif sur le fonctionnement que l’on souhaite pour cet hôpital en quête de réhabilitation.

Une réglementation nouvelle

Un règlement est ainsi rédigé dès les premières pages du registre qui nous intéresse. Il fait suite à des propositions rédigées par deux commissaires nommés le 13 juillet 1778, afin de faire le point sur la « manutention du service de l’hôpital ». Deux changements essentiels ont été évoqués. Le premier est en rapport avec l’administration quotidienne de l’hôpital. Elle était jusque-là assurée pendant quinze jours consécutifs par un même administrateur. Or, étant donnée la charge de travail pénible que cela peut représenter, l’on propose de réduire la durée du mandat à une semaine. L’autre point concerne le service médical. Si les sœurs de la Charité peuvent administrer des soins et des médicaments, il est important qu’un médecin dit « ordinaire » puisse faire des visites quotidiennes, à heures fixes. Il doit être rattaché à l’hôpital, à la manière de ce qui est observé notamment à l’Hôtel-Dieu de Lyon, considéré comme étant « un des plus considérables de l’Europe ». Le 7 août 1778, monsieur Olive, curé, affirme que les commissaires ont terminé leur travail 4. (Fig. 2)

Nouveau règlement de l’hôpital Saint-Charles de Sète, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 5 (1778).
Fig. 2 Nouveau règlement de l’hôpital Saint-Charles de Sète, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 5 (1778).

Le bureau des administrateurs de l’hôpital

Selon la délibération du 11 juin 1779, les choses doivent bien être claires désormais 5. « Suivant l’institution de l’hôpital et l’ordonnance de monsieur de Feuquière, évêque d’Agde 6 des premier et deux octobre 1713, qui en est le premier titre, les administrateurs de cette maison de charité doivent être nommés dans le conseil de ville, après l’installation des offices municipaux. On en doit échanger une partie chaque année. » Nous trouvons des précisions sur le déroulement de ces nominations. L’installation des officiers municipaux se fait à l’hôtel de ville le 29 juin, pour la fête de Saint Pierre, et le dimanche suivant, les consuls nomment ou confirment les administrateurs de l’hôpital de l’année. Ce sont eux qui procèdent alors à la clôture du compte annuel alors présenté par le trésorier de l’année précédente. Les administrateurs sont au nombre de six, devant se remplacer à tour de rôle. Comme évoqué en préambule, leur rôle de gestion quotidienne était jusque-là limité à une quinzaine de jours consécutifs. Il est alors décidé de réduire cette durée à une semaine 7.

L’administrateur principal doit veiller à la tenue de l’établissement, et assister à la visite du médecin, en présence des sœurs des salles, et des servants et servantes, et ce « afin que chacun puisse rendre compte de l’état des malades en ce qui le concerne. » 8

Tous les six administrateurs doivent cependant se rassembler au bureau de l’hôpital tous les vendredis de chaque mois, à trois heures de l’après-midi en hiver, et quatre heures en été. La séance commence par la prière du Veni Creator. C’est à cette occasion que sont compilées les délibérations qui composent le registre qui vient d’être déposé aux Archives départementales de l’Hérault.

On distingue parmi ces administrateurs le trésorier 9. Il est nommé le dernier vendredi du mois de juin de chaque année. C’est lui qui avance les sommes à la sœur économe pour les dépenses hebdomadaires. Il a pour charge de collecter les différents revenus de l’établissement (dons et aumônes, rentes). En cas de non-paiement, un syndic sera missionné pour entreprendre des procédures de recouvrement. C’est enfin lui qui doit enregistrer le règlement des journées d’hospitalisation des catégories sociales prises en charge, sur lesquels nous reviendrons plus loin.

Le personnel de l’hôpital

Auparavant, l’hôpital était apparemment desservi par une demoiselle nommée Isabeau Rigaille (ou Rigal), qui est alors remerciée moyennant une gratification financière adjugée lors de la délibération du 8 janvier 1779 10. Cinquante livres lui seront ainsi versées comme rente, tous les six mois, par la suite.

Les sœurs de la Charité

Le 7 août 1778, le registre rapporte que le service intérieur de l’hôpital doit reposer désormais sur des sœurs de la Charité, parfois dites sœurs grises, arrivées le 30 juin de cette année. Elles ont été envoyées par la Congrégation hospitalière dite de la Charité Notre-Dame. Fondée en 1633 par saint Vincent-de-Paul, elles constituent la première congrégation de France proposant une action charitable en dehors d’un cloître. Ces sœurs de la Charité sont alors actives dans environ 60 % des fondations hospitalières du royaume. Envoyées en général de Paris dans les institutions intéressées, elles assument progressivement un rôle prépondérant dans l’assistance locale 11.

Suite à un contrat stipulant que leurs honoraires sont fixés à 400 livres annuels, les sœurs de la Charité arrivent à Sète 12. Au nombre de quatre, elles sont affectées au service des salles, assistées d’un servant et d’une servante.

Les quatre sœurs ont chacune un rôle bien précis. La première, dite la sœur supérieure, est la sœur économe. Elle est responsable des dépenses quotidiennes, qu’elle doit consigner dans un registre qu’elle présente chaque semaine au bureau. Parmi les dépenses à assumer figurent le chauffage (approvisionnement en bois, charbon et sarments pour entretenir des poêles dans les salles des malades), la lumière (chandelles) et la nourriture (blé, huile, vin). Elle doit également y consigner les effets que les pauvres doivent lui confier jusqu’à leur sortie (habits et argent). En cas de décès, les habits seront vendus ou employés à l’usage de l’hôpital. Quant à l’argent trouvé, il sera utilisé selon les souhaits du défunt avant son décès, ou à défaut d’une réclamation pendant un an, pour l’usage de la maison 13.

Une autre sœur est responsable de l’apothicairerie. Elle doit tenir un registre des drogues et médicaments qu’elle reçoit de la part des administrateurs, et un autre de ses ventes auprès du public, dont l’hôpital doit alors tirer une partie de ses revenus.

La sœur de la cuisine confectionne quant à elle portions, bouillons et soupes. Il est bien stipulé que personne d’autre n’a le droit d’être présent dans son local.

Enfin, les sœurs affectées aux salles, que ce soit celle des hommes, ou celle des femmes, doivent assister à la visite quotidienne du médecin. Elles font donner le bouillon et la nourriture nécessaire par les serviteurs et servantes, et distribuent vêtements et linge selon les besoins de chacun. Elles assurent enfin les rondes de nuit, afin de s’assurer que personne n’entre dans le bâtiment 14.

On trouve néanmoins parmi les délibérations plusieurs mentions de problèmes de discipline interne. Le registre rapporte notamment le cas de la sœur Marguerite, qui fait l’objet d’une délibération le 8 décembre 1778 15. Le syndic de l’hôpital affirme que parmi les quatre sœurs « qui furent envoyées au mois de juillet dernier pour desservir l’hôpital, se trouve Marguerite, véritable sœur de la sœur supérieur, en charge de la pharmacie ». Les médecins reconnurent alors qu’elle n’était pas en capacité d’assumer cette charge, « n’en n’ayant aucune notion ». Les conséquences semblent effectivement désastreuses : les ordonnances sont mal ou non exécutées, les traitements sont mélangés, et les patients sont ainsi « mis en danger ». Les médecins demandent une solution, faute de quoi ils menacent de se retirer, plutôt que de voir cette inconséquence remettre en cause leur propre réputation professionnelle. Le bureau souligne que la présence de deux sœurs de la même famille au sein d’une même congrégation hospitalière n’est pas reconnue par les statuts de la Congrégation des Dames de la Charité. Décision est donc prise d’en porter plainte directement auprès du supérieur général de cette dernière. Le 9 avril 1779, on apprend que la sœur Marguerite a quitté les lieux depuis deux mois et demi, et la sœur supérieure, sa propre sœur, est également partie depuis quatre jours. Elles sont alors remplacées par les sœurs Antoinette Villiot et Élisabeth Azéma, arrivées deux jours auparavant, accompagnées et présentées par la sœur supérieur de la Miséricorde de Montpellier, représentante de la Congrégation dans la région 16. La sœur Villiot prend alors ses fonctions en tant que sœur supérieure de la petite communauté sétoise.

Les médecins

Comme évoqué plus haut, l’autre question épineuse du règlement devait concerner le service du médecin. De lui dépendent beaucoup de choses : les sœurs de la Charité ne peuvent préparer des remèdes ou donner des aliments que sur son ordonnance. Ses visites doivent donc être fixées périodiquement, afin de fournir la pharmacie en conséquence. On opte ainsi pour un médecin ordinaire, rattaché à l’hôpital, avec des horaires et des honoraires prédéfinis.

Le médecin est tenu de visiter les malades quotidiennement. Les horaires sont fixés. C’est soit le matin, soit l’après-midi. Pour le matin, les horaires sont sept heures du matin de mai à octobre, et huit heures d’octobre à mai. Pour l’après-midi, à trois heures en été et quatre heures en hiver. S’il y a plus de patients que de coutume, il devra passer deux fois par jour 17. Il doit avertir les administrateurs s’il juge que les malades n’ont pas le nécessaire, ou si l’un d’eux est en danger de mort, afin de faire prévenir le curé qui viendra leur administrer les derniers sacrements.

Un chirurgien major doit également venir une fois par jour, aux mêmes horaires que le médecin, pour effectuer les pansements, et procéder au traitement des plaies et blessures, avec l’aide de garçons ayant été sanctionnés par un examen préalable.

Pendant quelques années cependant, il semble que le service médical ait été assuré par trois médecins à tour de rôle. Lors de la séance du 25 mars 1779, on évoque le décès du médecin monsieur Bories, qui avait exercé dans l’hôpital depuis seize ou dix-sept ans. Infirme depuis deux ans, il avait demandé l’aide des sieurs Tudesq, père et fils, dans cette charge, adjonction validée par l’Intendant de Languedoc le 4 mars 1777 18. Étant donné qu’il s’agissait d’une entorse au règlement, et que Tudesq père s’est retiré suite au problème de la sœur apothicaire défaillante (évoquée plus haut), le dernier médecin en place, Tudesq fils, est prié de continuer seul sa mission de « médecin ordinaire de la maison ».

Servants et servantes

Ceux-ci assistent les sœurs au quotidien. « Ils tiennent leurs gobelets pleins de tisane ou d’eau », les lits et linge bien propres, et s’engagent à « faire avec douceur tout ce qu’ils pourront pour procurer aux malades du soulagement dans leurs maux ». Enfin ils doivent bien veiller à ce que les visiteurs n’apportent pas à manger aux patients 19.

Certaines ne font pas l’affaire. Le 23 juin 1780, la sœur supérieur affirme ne pas être contente du travail d’une servante. Elle juge à propos de la renvoyer et de lui faire payer ses gages depuis le 6 novembre 1779 20. Elle sera remplacée à la fin de l’été par une autre, qui accepte les gages de dix-huit livres par an 21.

Une nouvelle catégorie de personnel est mentionnée en août 1780 : le bureau de l’hôpital accepte la candidature de Germain Cairon, originaire du diocèse de Rodez, pour le poste d’infirmier, en remplacement d’un « valet » ayant quitté le service 22.

L’activité hospitalière

Les patients

Le règlement stipule que le Trésorier doit enregistrer le règlement des journées d’hospitalisation des catégories sociales prises en charge. Il n’est alors plus question de pauvres, mais bel et bien d’une catégorie spécifique de gens pouvant avoir accès aux soins. Le registre mentionne alors « soldats, matelots, ouvriers de la manufacture de tabac, fermes du roi et travaux publics de la Province » 23. En plus sont attendus des « ouvriers employés au compte de la Province, employés au compte des fermes du roi et ouvriers de la manufacture de tabac » 24. À cela peuvent s’ajouter également, comme le montre la pratique, des « travailleurs au canal que la province fait construire à la plage », ainsi que l’indique la délibération du 18 septembre 1778 25. Au mois de janvier 1779, plusieurs réunions concernent également le cas des ouvriers travaillant à la construction des salines 26. Ils sont alors nombreux à se présenter, mais ne peuvent être reçus. Officiellement, l’hôpital n’est pas en mesure de les accueillir, « n’ayant ni assez d’étendue, ni assez de lits ou de linge ! » On rappelle à cette occasion que l’hôpital est précisément établi « pour la ville, et non pour ce qui se passe au dehors ». Ces ouvriers se voient ainsi refoulés à l’entrée « ainsi qu’on en use à l’égard des malades qui nous viennent des villages voisins ». Un accord est finalement trouvé le 12 mai 1780 : moyennant une retenue sur les salaires des ouvriers, l’hôpital accepte finalement d’accueillir les blessés de cette profession 27. Les mots retranscrits ici rappellent bien que l’assistance y est purement locale, mais surtout désormais destinée à certaines catégories professionnelles seulement. L’hôpital accueille prioritairement le personnel militaire et administratif œuvrant au service de la Couronne. Un paquet cacheté par l’Intendance de Languedoc, et adressé aux administrateurs de l’hôpital, arrive le 6 juillet 1781. Il contient un imprimé, par lequel le roi marque la nécessité des hôpitaux des ports de faire office principalement d’hôpitaux militaires 28.

En effet, ne seront pas reçues, par exemple, les personnes atteintes de « maladies vénériennes, écrouelles, scorbut invétéré 29, fistules et cancers inopérables, gale et autres maux contagieux et incurables » 30. Il est donc inutile de chercher dans ce registre des allusions à des épidémies ou autres. Et les éventuels enfants ne seront reçus qu’à partir de l’âge de sept ou huit ans.

Le règlement est très clair 31 : s’il vient à venir des « pauvres étrangers », atteints de « maladie languissante et de longue durée », on les fera transporter aux hôpitaux voisins, pour être conduits chez eux « sans attendre la guérison ». Le service n’est donc plus ouvert à tous. Il s’agit d’une assistance locale et spécifique, où chaque communauté œuvre pour ses seuls ressortissants. À titre de comparaison, on peut évoquer des données analogues, retrouvées il y a quelques années dans la comptabilité de plusieurs hôpitaux des alentours de Montpellier à la fin du XVIIe siècle 32.

Mais il convient de souligner combien la situation de Sète est particulière : elle accueille dans son port des matelots de nationalités différentes ! Comment distinguer ceux qui peuvent avoir recours à l’hôpital ? Le 20 août 1779, le bureau reçoit une lettre du roi, s’adressant aux hôpitaux des ports. Cette lettre affirme qu’il faut porter une attention toute particulière aux officiers, soldats et matelots espagnols qui pourraient se présenter. La prise en charge est alors précisée : l’hôpital ne doit recevoir aucun matelot espagnol, s’il n’est muni d’un billet justificatif de sa situation au préalable, grâce auquel ses journées de présence seront décomptées 33.

De même, les professions militaires concernées peuvent être très variées. Par le terme « soldat » sont désignés « soldats, cavaliers et dragons, et pareil égard aux matelots, soldats et gens de mer au compte du roi ». Une demande d’augmentation de deux sols par jour, adressée au ministre de la marine le 1er décembre 1786 concerne néanmoins les matelots de commerce 34.

Il est également impératif que les soins soient limités dans le temps. Le registre évoque ainsi les cas « intraitables », qui doivent être évacués. Le 8 octobre 1779, le bureau doit ainsi délibérer sur le cas du nommé François Cartary, dit La Liberté, natif de Nanterre, juridiction de Paris, et caporal dans la compagnie des chasseurs de Champollon au régiment de Foix. Il avait été reçu trois mois auparavant, attaqué de « douleurs rhumatismales qui ont résisté à tous les remèdes », à tel point que le médecin Tudesq le juge incurable ! « C’est une charge pour l’hôpital, qui ne finiroit qu’à sa mort ». L’on propose donc d’écrire à l’Intendant afin de lui demander de prendre les mesures nécessaires, à savoir « que cet homme soit envoyé à l’hôtel royal des Invalides » 35. Passé un certain délai, l’hôpital ne peut se permettre de garder trop de malades : c’est une charge constante, et il faut qu’un roulement entre les patients puisse être assuré.

Les règles d’admission peuvent à l’occasion provoquer des esclandres, comme le montre cette anecdote. En général, lorsqu’un malade se présente, une sœur doit l’accueillir et le garder à l’entrée de l’hôpital en attendant la visite du médecin, qui jugera de son hospitalisation ou non. Mais il s’avère que certains arrivent à des heures indues ! C’est ainsi que le 7 août 1781, le bureau convoque une assemblée extraordinaire 36. La veille, un soldat de la garnison, blessé, s’est présenté à l’hôpital vers « huit ou neuf heures du soir ». Il demandait l’accès, étant grièvement blessé. Or, la sœur supérieure aurait refusé, lui affirmant que c’était « contraire aux principes de son ordre ». Ayant tambouriné plus d’une heure à la porte, on finit par lui porter un matelas, où il put s’allonger dans la rue, devant l’hôpital, en attendant le lendemain matin. Le bureau estime que cette conduite des sœurs est indigne, d’autant plus que « la foule a pu constater qu’un nécessiteux était laissé à la rue ! Ceci tend à aliéner de la maison l’esprit du public et en conséquence à en éloigner les charités ! » On ordonne donc aux sœurs de désormais ouvrir à toute heure. Or, elles persistent dans leur refus. Le Bureau évoque alors un cas d’insubordination. Il s’agit de laisser l’hôpital ouvert de jour comme de nuit, « plus fréquemment qu’ailleurs dans cette ville comme port de mer et ville de guerre, et n’y ayant pas d’autres endroits où on puisse avoir les secours nécessaires auxdits malades et blessés, notamment aux soldats et matelots. » Mais que faire si les sœurs refusent encore à l’avenir ? « L’administrateur fera enfoncer les portes en cas de refus », affirme le registre ! Une plainte est d’ailleurs déposée devant la supérieure de l’ordre de la Charité, prenant même l’Intendant de la Province à témoin 37 ! Les jours passant, le registre nous apporte d’autres détails. Que s’est-il passé ? La sœur supérieure affirme avoir reçu une lettre missive l’année précédente de la supérieure générale, lui recommandant expressément de tenir fermées les portes de l’hôpital pendant la nuit. S’agissant d’un cas de discipline concernant des religieuses, l’on décide de demander à l’évêque d’Agde, président-né de l’assemblée de prendre une délibération à ce propos. La tension monte : Monsieur Jacquier, le supérieur de l’ordre de la Charité menace d’annuler le contrat avec son ordre, par lettre reçue au bureau le 24 août 1781 38. Mais l’hôpital ne peut se permettre de se séparer de ce personnel précieux. Il demande qu’on lui envoie d’autres sœurs pour remplacer les sœurs réfractaires. La sœur supérieure et la sœur pharmacienne quittent ainsi le service le 25 janvier 1782 : une nouvelle sœur est alors envoyée par les sœurs de la Miséricorde de Montpellier, pour aider au service, « jusqu’à ce que les supérieurs de leur ordre aient fait venir les deux sœurs qu’elles ont destinées à les remplacer 39 ». Deux nouvelles sœurs, à savoir Élisabeth Forat, supérieure, et Marie Jeanne Dabon, envoyée pour diriger la pharmacie, arrivent le 1er mars 1782 40.

Médecine, dissections et soins

Les soins médicaux sont relativement peu spécifiés. Si la présence d’un chirurgien et d’un médecin laisse imaginer tout un éventail de pratiques, les registres ne rentrent pas dans le détail. Le seul domaine développé est celui concernant la dissection. L’on sait combien les autorités religieuses sont sensibles à ce sujet. À Montpellier, déjà en 1693, l’évêque donnait son accord pour que les élèves de la faculté de médecine puissent récupérer des cadavres à l’hôpital Saint-Eloi, mais aux conditions strictes de faire inhumer le cadavre ensuite et d’assumer la charge des célébrations liturgique en la mémoire du décédé 41. Il en est de même à Sète. Le nouveau règlement spécifie bien qu’on ne « souffrira aucune ouverture de cadavre, si ce n’est par le médecin ou le chirurgien de l’hôpital, et seulement dans des cas où l’utilité publique le requerrait, sur la permission qu’il en donnera par écrit, et il aura attention que la sépulture soit ensuite donnée convenablement au cadavre » 42. Et qu’est ce qui justifierait ces dissections dans un hôpital ? L’inspection de 1766, évoquée en introduction, apporte la réponse : la peur des épidémies. Nombre de patients sont des matelots de provenances diverses, dont certains peuvent avoir outrepassé la nécessité d’une quarantaine 43. Ces dissections ne seront pratiquées que par le Chirurgien major, en présence du médecin, et « à l’endroit à ce destiné », que nous évoquerons plus loin 44.

La pharmacie fait également l’objet d’un soin particulier. Rappelons qu’elle était lourdement critiquée avant l’arrivée des sœurs de la Charité, ainsi que nous l’avons évoqué en introduction. Elle est désormais régulièrement fournie. On trouve dans les registres des mentions fréquentes de drogues que le syndic envoie chercher directement à Marseille. De quoi est-il question ? Malheureusement, les registres ne donnent quasiment aucuns détails à ce propos non plus. Ils précisent que les produits sont vendus au public et utilisés sur place. Fort heureusement, les Archives départementales de l’Hérault conservent des données complémentaires. L’inspection du sieur Imbert de 1766 a eu des suites : l’on fait parvenir à l’Intendance du Languedoc un tableau récapitulatif qui fait « État des drogues simples qu’il est nécessaire de tenir continuellement dans les Pharmacies des Hôpitaux du Roy » 45. Y sont listés les différents types de racines, feuilles, fleurs, fruits, écorces, bois, plantes marines, animaux, baumes, minéraux et sels concernés. On note également la présence de « cloportes » et de « crâne humain » ! Ces données doivent être recontextualisées dans l’histoire de la pharmaceutique. Un autre cas d’étude dans ce domaine peut ainsi être évoqué à Paris en 1679, bien qu’un siècle sépare les deux apothicaireries 46. À toute fin comparative, l’on pourra également se reporter à la reconstitution de l’apothicairerie de l’œuvre de la Miséricorde de Montpellier, contemporaine de l’hôpital que nous étudions 47, ou encore à l’inventaire notarié d’un apothicaire montpelliérain en 1795 48. Enfin, le droguier Menier, constitué vers 1840, et encore conservé de nos jours au siège du Conseil de l’Ordre des Pharmaciens à Paris, donne une vision, « archéologique » pourrait-on dire, de ce qu’était une officine avant la loi de Germinal réglementant la profession, puis la spectaculaire montée en puissance de la chimie 49. (Fig. 3)

Mentionnons néanmoins l’approvisionnement en une denrée un peu particulière à notre région. Le 15 avril 1785, le sieur Devichet, propriétaires des Eaux de Balaruc, fait livrer douze cruches d’eau chaque année à titre de charité, gratuitement 50.

Notons enfin qu’il est également alors décidé de faire fabriquer un cachet, non seulement pour authentifier les produits pharmaceutiques produits dans l’hôpital, mais également les documents administratifs qui en émanent. Le 22 août 1785 (11 HDT E1, page 49), il est précisé que ce cachet a pour empreinte la figure d’un pélican donnant son sang à ses petits, auquel on pourra ajouter l’exergue « Hôpital ST Charles à SETTE ». Il a été fait par le sieur Beaumes, graveur. Nous avons la chance d’avoir pu retrouver la trace de ce cachet dans les autres documents du fonds conservé aux Archives départementales : il y figure bel et bien une représentation stylisée d’un pélican retournant sa tête pour déchirer son propre corps. (Fig. 4)

Cette représentation symbolique, très diffuse dans le domaine religieux, sied bien à l’idée et l’image que l’époque donne à la notion de l’assistance, de la charité envers son prochain. Ce qui nous permet d’aborder maintenant le domaine spirituel.

État des drogues simples qu’il est nécessaire de tenir continuellement dans les Pharmacies des Hôpitaux du Roy. Arch. dép. Hérault, G 559 (1766).
Fig. 3 État des drogues simples qu’il est nécessaire de tenir continuellement dans les Pharmacies des Hôpitaux du Roy. Arch. dép. Hérault, G 559 (1766).
Registre de comptabilité de l’hôpital, estampillé du cachet de l’établissement en haut à droite, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E2 (1784).
Fig. 4 Registre de comptabilité de l’hôpital, estampillé du cachet de l’établissement en haut à droite, Arch. dép. Hérault, 11 HDT E2 (1784).

La question spirituelle : un aspect peu connu

Dans les recherches sur l’assistance, la question de la vie religieuse, voire de la spiritualité autour de la maladie, est très peu abordée. Si elle est prépondérante pour comprendre l’essor des hôpitaux et léproseries au Moyen Age 51, elle ne fait pas l’objet de développements comparables pour la période moderne. L’historiographie se contente le plus souvent de recadrer les hôpitaux dans le contexte purement médical, sans prendre le temps d’évoquer leur place spécifique dans les conceptions religieuses de l’époque. S’ils sont synonymes bien entendu de progrès scientifiques, les hôpitaux de la fin de l’Ancien régime n’en demeurent pas moins les héritiers de conceptions sur la vie, mais surtout sur la mort, trouvant leur sources et leurs références dans l’époque médiévale.

Le registre de l’hôpital de Sète est une source historique bien précise à ce propos. Il aborde tout d’abord la question par le biais des activités liturgiques qui peuvent se dérouler dans l’établissement. À l’origine, elles n’étaient pas très développées. Il s’agissait principalement des interventions épisodiques du curé de la paroisse pour les mourants. Celui-ci est prévenu à l’occasion des décès pouvant subvenir parmi les patients hospitalisés. En plus des derniers sacrements à administrer si possible, le règlement stipule bien que l’administrateur doit envoyer au curé toutes les informations récoltées dès l’arrivée des malades, afin de pouvoir rédiger leur extrait mortuaire le cas échéant 52.

Mais la charge de travail devient de plus en plus importante. Le 25 juin 1780, les aumôniers de la paroisse estiment que leurs propres impératifs sont trop conséquents pour pouvoir également se charger de l’hôpital. Ils suggèrent que celui-ci se dote d’un aumônier en propre 53.

L’aumônier

Le 27 novembre 1780, le bureau prend les choses en main. Il est alors délibéré d’employer « tous les moyens convenables » pour procurer à la maison un aumônier 54. On songe alors à traiter avec les Révérends pères tertiaires du Picpus, du tiers ordre de Saint-François, dont le couvent est situé tout près de l’hôpital 55. Le général de l’Ordre se trouvant alors de passage à Sète, le bureau se déplace séance tenante au couvent. Moyennant l’approbation de l’évêque, un religieux des Picpus de Sète sera formé pour faire fonction d’aumônier de l’hôpital : il s’agira d’y dire la messe quotidienne et assumer les autres charges qui se pratiquent dans les autres hôpitaux, et notamment « celui de Saint-Eloi à Montpellier ». L’hôpital montpelliérain est apparemment une référence en la matière. Mais il ne s‘agit alors que d’un projet, nécessitant au préalable l’accord des pères tertiaires et de l’évêque.

Le 8 décembre 1780, on apprend que l’évêque pose comme condition l’état décent de la chapelle, ce qui semble être le cas. Et les pères du Picpus estiment qu’il conviendrait d’obtenir une validation de l’évêque pour l’ensemble de la communauté, afin de pouvoir choisir selon les possibilités du moment 56.

Commencent alors les négociations. Le 18 mai 1781, l’évêque désigne le père Dugret 57. Or le bureau répond que ce père est infirme et ne semble pas capable d’assumer sa charge sans « aménagements ». De plus les pères de Picpus demandent deux cent livres d’honoraires, ce qui semble beaucoup à l’hôpital. Les choses semblent se dégrader : le registre comporte à la suite toute une page raturée, qui est suivie par une nouvelle délibération qui va jusqu’à annuler tout le projet avec le Picpus ! On trouve par ailleurs, dans le registre de délibérations du couvent de Picpus de Sète la notification selon laquelle aucun accord n’a pu être trouvé : elle évoque la fait que la communauté souhaite pouvoir envoyer un aumônier de son choix, que la chapelle et les ornements doivent être en bon état, et qu’il n’y ait « aucune nécessité que la supérieure de l’hôpital touche les vases sacrés » 58. Il s’agit alors de bien se démarquer, par un cadre hiérarchisé et prédéfini, d’une situation antérieure jugée pour le moins digne d’amateurs, si l’on nous autorise l’expression !

Finalement, le projet sera repris intégralement la semaine suivante. Le 22 mai 1781, le registre nous apprend qu’un autre père, « bien plus raisonnable », a été envoyé 59. Il s’agit du père Doria, « très connu dans cette ville où il a résidé quelques temps ». Une convention est alors signée avec lui, en triple exemplaire (un pour l’hôpital, un pour l’évêque, un pour le Picpus), avant d’être mise « aux archives de l’hôpital ». Elle est approuvée par l’évêque d’Agde, le 10 juillet 1781 précisément 60.

Il y est stipulé que l’aumônier devra « visiter fréquemment les malades, leur donner les instructions convenables (catéchisme), les consolera et les aidera, autant qu’il pourra dépendre de lui, à supporter leurs peines avec un esprit de Religion, et leur administrera les sacrements quand il en sera besoin, fera les cérémonies de la sépulture pour ceux qui y mourront et y seront enterrés ». En outre, « il dira tous les jours la messe à la chapelle dudit hôpital, à six heures du matin en été, depuis Pâques jusqu’à la fête de la Toussaint, et à sept heures en hiver ».

Messes et chapelle

Les messes quotidiennes vont désormais se développer. Déjà le 11 février 1780, Monsieur Martinez, second consul de la ville, affirmait qu’il est dans l’urgence que les malades et les sœurs puissent assister à une messe le dimanche et à l’occasion des fêtes. Chaque dimanche, malades et convalescents doivent pouvoir entendre une messe sur place 61.

Auparavant, le curé de la paroisse effectuait en effet des messes « au monument » de l’hôpital, fournissant pour cela de la cire pour les cierges. Mais parmi les célébrations énumérées spécifiquement par la convention, figurent les messes de fondation, puis celle du jour de la célébration solennelle de Saint-Charles Borromée, qui est le patron dudit hôpital. Nous en trouvons une trace ultérieure. Le 10 novembre 1786, l’assemblée note que la fête est le dimanche de la semaine suivante (19 novembre 1786), et qu’il convient de demander au trésorier « telle somme que le bureau déterminera pour fournir aux frais de cette fête » 62. Une somme de soixante-douze livres est alors mise à disposition, mais malheureusement, la nature des dépenses n’est point précisée, ce qui aurait pu nous renseigner sur le déroulement de cette célébration liturgique au sein de l’hôpital.

L’autel est décrit à l’occasion d’une mesure pour le moins pratique décidée le 18 mai 1781 : « Comme il est nécessaire que le viatique puisse être porté promptement, aisément et à toutes les heures aux malades qui seront dans un danger pressant, le bureau d’administration agira auprès de Monseigneur l’évêque d’Agde, pour obtenir qu’il y ait toujours quelques hosties consacrées en réserve dans le tabernacle de la chapelle de l’hôpital, avec la dessence convenable, et une lampe allumée » 63.

Enfin, on trouve une évocation du mobilier grâce à un inventaire, dressé le 26 janvier 1787 : y figurent « l’autel et son marchepied, six chandeliers et une croix dorée, huit prie-Dieu, six chaises » 64. Une chapelle de taille modeste somme toute.

Elle sera surmontée d’un tambour à partir de 1784. Le 20 février, le bureau valide le paiement de sa construction 65. Elle souffre cependant de problèmes d’isolation, liée à l’humidité environnante. Le 27 mai 1785, on lit que « le couvert de la chapelle a été mal construit dans l’origine : […] on crut qu’une gorge en pierre de taille qui recevrait les eaux de toute cette partie de couvert serait préférable, ce qui occasionne la dégradation du plafond et de la corniche » 66.

Enfin, on apprend que des travaux ont été effectués dans l’urgence, afin notamment de « donner la possibilité d’entrer de la rue dans la chapelle, sans passer dans la chambre des malades », ainsi que le stipule une délibération du 25 mai 1781 67. Ceci est une notion à bien souligner. Il n’est pas question de réserver l’usage de la chapelle aux seuls patients. Il s’agit plutôt d’ouvrir ce lieu de culte sur l’extérieur, dans la paroisse. Les cérémonies qui s’y déroulent peuvent alors toucher le quartier environnant. La portée de la communion peut être élargie au quartier.

Nous avons donc l’image d’une chapelle désormais ouverte vers l’extérieur. Il est de coutume en effet que les hôpitaux de l’Ancien régime soient bâtis autour d’une chapelle, élément central de sa disposition spatiale. Elle peut y être « enfermée », située dans la cour centrale, comme c’est le cas à l’hôpital de la Charité de Marseille. Ou, comme ici, elle constitue le point de contact avec le monde extérieur. C’est également le cas à l’hôpital général de Montpellier. Cette orientation lui donne davantage de visibilité, de présence dans la ville. Car jusqu’alors, l’hôpital n’était en effet présent que par procuration dans la ville.

La charité : troncs, bassins et quêtes

Afin d’inciter la charité des fidèles, des bassins sont disposés dans des endroits stratégiques. Il s’agit de troncs qui sont régulièrement ouverts pour en récolter les dons en aumônes. On en trouve les relevés à maintes reprises dans ces registres. Une délibération quadrille ainsi en quelque sorte la ville avec des troncs pouvant récolter des subsides. Ces troncs se trouvent en premier lieu à la porte d’hôpital et dans la chapelle de l’hôpital, où fort logiquement, on relève les plus grandes sommes en général. Un troisième tronc se trouve dans l’église paroissiale, où les fidèles sont incités par le curé à venir en aide à l’établissement charitable voisin, avec un succès un peu plus modeste 68. Des chaises spécifiques y sont d’ailleurs mises à disposition pour être affermées au profit de l’hôpital : c’est ce qu’indique la délibération du 13 avril 1781 69.

Un quatrième tronc se trouve également dans l’hôtel de ville, car il semblerait bien que les pensées pieuses en direction de l’hôpital suivent, en quelque sorte, l’évolution économique et politique de la ville. Une délibération du 11 novembre 1783 apporte des précisions très intéressantes à ce propos 70. Elle note que, jusqu’à présent, puisque « les négociants s’assemblaient à l’Hôtel de ville avec les compagnies de navire pour traicter des affaires de commerce, il y fut mis un tronc pour l’hôpital, destiné à recevoir les aumônes auxquelles les négociations pouvaient donner lieu. » Étant donné qu’« ils ne s’y assemblent plus, et ont loué une salle chez le sieur Bousquet père pour y tenir leur loge, il paraît à propos d’y placer aussi un tronc pour le même objet desdites aumônes qui pourront estre faites ». En conséquence, « on pourrait retirer le tronc qui est à l’hôtel de ville, mais il n’y est pas inutile. Il est donc à propos d’en faire un ». Le lien entre le développement économique et la charité envers les nécessiteux est ici évident.

Enfin, un cinquième tronc est évoqué le 14 avril 1785 : il se trouve dans la chapelle des Pénitents 71. À l’origine de sommes appréciables, il montre comment, de manière indirecte, la piété laïque de la principale confrérie de Sète s’exerce vis-à-vis des nécessités d’une assistance publique.

L’autre point de source de revenus est constitué par les quêtes. Des quêtes en aumônes sont régulièrement demandées à l’hôpital même, mais surtout dans la paroisse environnante, et notamment à l’église 72. À quelle régularité ? Le 16 août 1784, il est stipulé qu’il y aura désormais deux quêtes annuelles au profit des malades de l’hôpital, l’une au mois d’août, l’autre en février. Mais certaines quêtes peuvent être décidées occasionnellement : c’est ainsi le cas pour celle effectuée toute la semaine du 14 avril 1785 dans toute la ville 73.

Il est à noter également que ces revenus peuvent être considérables : le 25 mars 1785, le produit des quêtes et du tronc pour le trimestre se monte à la somme de 409 livres, desquels on déduit 8 livres pour l’entretien du luminaire 74. Il s’agit du double des honoraires annuels accordés à l’aumônier de l’établissement !

Enfin, un dernier lien spirituel avec l’hôpital est évoqué à maintes reprises à travers le service des morts.

Le service des morts

Nous avons pu évoquer plus haut l’existence du cimetière de l’hôpital, où sont censés être enterrés les malades décédés à l’hôpital. Mais pas seulement. Tout comme à Montpellier, où les plus grandes familles de la ville tenaient à avoir un caveau au sein du cimetière de l’Hôpital général, le bureau de Sète envisage la possibilité d’offrir aux paroissiens un lieu de sépulture unique en son genre. D’après la délibération du 11 septembre 1778, un arpenteur a été chargé de vérifier la contenance du cimetière en question 75. L’espace est limité dans le cimetière, « mais il y en aura encore pour les particuliers, qu’on voudra y faire enterrer, au prix qui sera fixé par le Bureau, et s’il y en a qui souhaitent d’avoir des places réservées pour eux, leurs femmes et enfants, on pourra les leur assigner entre les contreforts, au nombre de quatre, ce qui représentera des espèces de chapelles qui contiendront chacun deux, et peut être même trois tombeaux ». Il semble donc envisagé de mettre à disposition des tombes localisées juste contre les contreforts de l’église, formant des sortes d’excroissances, des chapelles funéraires. La logique est la même que dans les hôpitaux et léproseries médiévales : plus on est enterré près du lieu de culte, plus l’on pourra bénéficier des prières qui y sont dites en faveur des malades et des donateurs, prières d’ailleurs réputées pour être plus favorablement entendues 76.

La délibération qui suit est précise 77 : « Sur cet exposé, l’assemblée a cru devoir déterminer d’abord qui sont ceux qu’il faut considérer comme de la maison, et qui en cette qualité, ont droit d’être enterré audit cimetière ». Il s’agit en premier lieu des « malades qui y meurent, les administrateurs en charge, l’aumônier, les médecins et chirurgiens, les sœurs de la Charité, les servants et servantes ». Sont ensuite déterminées les places mises à la disposition des familles sétoises. Situées effectivement entre les contreforts, elles sont concédées au prix de deux cent livres chacune. « Ceux qui les auront acquises y pourront faire mettre une pierre avec une inscription convenable, y seront inhumés eux, leurs femmes et leurs enfants, en ligne directe ». Le prix de la présence des sœurs de la Charité pour l’enterrement est alors fixé à la somme de cent cinquante livres. Le personnel religieux de l’établissement est donc mis à contribution pour offrir une procession et une cérémonie spécifique, qui deviennent apparemment prisées : le 21 septembre 1785, la somme demandée pour l’enterrement, le convoi et la messe, passe de 150 à 300 livres 78.

Nous trouvons un exemple précis. Le 7 septembre 1784, le bureau fait état du testament et des dernières volontés de Suzanne Fournier, veuve de noble François Dasté, ancien ingénieur du Roi et chevalier de Saint-Louis 79. Elles indiquent que cette dame fait don à l’hôpital d’une somme de deux cent livres, à charge pour l’administration de « faire dire tous les ans une messe pour le repos de son âme » dans la chapelle de l’hôpital, à la date de son décès. La famille demande également qu’elle soit enterrée au cimetière de l’hôpital, à côté de son mari qui y a été déjà enterré, la famille offrant soixante livres pour cette nouvelle sépulture. Le bureau s’engage alors à « assister en corps » le lendemain au convoi funèbre, avec les sœurs de la Charité.

Précisons qu’en cas de décès d’un administrateur pendant l’année de son exercice, les célébrations sont particulières. Tout d’abord, la présence des sœurs de la Charité pour l’enterrement est gratuite et obligatoire. De plus, à cette occasion, une délibération en date du 22 mars 1785 80 précise que la chapelle de l’hôpital sera « cordonnée en noir pendant neuf jours, durant lequel temps il sera dit journellement une messe de requiem ». Le drap mortuaire sera alors porté par « quatre administrateurs qui porteront chaperon dans le convoi ». La charge d’administrateur a donc des avantages post mortem.

Mais la mise à disposition de cet espace funéraire privilégié a finalement ses limites. C’est ce que montre le cas de la famille Gerbier, qui fait l’objet d’une délibération le 19 août 1785 81 : « A été délibéré que les administrateurs se rendront demain à neuf heures du matin au bureau pour assister au convoi de madame Mercier. Monsieur Gerbier, contrôleur à la manufacture royale du tabac, a fait tailler deux pierres pour être placées sur les tombes de feu Mr et madame Dasté, son beau-père et belle-mère, et que Mr Gerbier se flatte que d’après la bienfaisance desdits M. Dasté et son épouse qui ont fait des dons avant leur mort à l’hôpital, on ne s’oppose point au placement desdites pierres ». La famille souhaite ainsi se réserver la propriété de cette parcelle pour leurs descendants. Or, le bureau ne l’entend pas de cette manière : il accepte la famille, mais seulement jusqu’à l’entière destruction des cadavres. Et il refuse la mise en places de pierres tombales privées : « Et les voix recueillies, il a été délibéré qu’il n’est pas possible de permettre de placer lesdites pierres dans le cimetière, d’autant que les parents de plusieurs autres bienfaiteurs qui y sont inhumés pourraient avoir les mêmes prétentions, ce qui paverait bientôt le cimetière, et on ne trouverait plus moyen d’y enterrer les pauvres qui meurent à l’hôpital. »

Une sorte de mise en scène des familles notables de Sète dans le cimetière est ainsi précisément rejetée. La famille a beau tenter un recours par l’intermédiaire du curé de la paroisse, puis de l’aumônier, la réponse est la même le 2 septembre 1785 : « le sol est destiné pour les pauvres et ceux qui s’y font inhumer moyennant une somme fixée acquièrent purement et simplement le droit d’y être inhumé comme les pauvres 82. »

Car ce sont bien pour les malades décédés dans l’hôpital que le cimetière est avant tout réservé. Nous trouvons plusieurs cas précis au fur et à mesure des registres. Le 24 septembre 1779, un matelot nommé Jean Salières, originaire du lieu de Liaussac, paroisse de Saint Vincent au diocèse de Gironne en Catalogne, y décède à l’âge de vingt-cinq ans. Sur la somme trouvée sur lui sont déduits les frais des journées, et notamment « trois livres pour son suaire et sa fosse 83 ». Faute d’avoir été réclamé par sa famille, le malade finit dans la fosse commune de l’hôpital, où se trouvent les autres pauvres faisant l’objet des prières à l’intérieur de la chapelle.

C’est ainsi par plusieurs paliers que la spiritualité s’exprime dans le fonctionnement de l’hôpital Saint-Charles de Sète : de la simple aumône ou la donation sous forme de rente, jusqu’à la participation effective aux services liturgiques qui s’y déroulent, que ce soit sous la forme d’un accès physique à la chapelle, ou par une présence funéraire à proximité.

Le Bâtiment de l’hôpital

Nous l’avons dit en introduction, les données connues sur l’architecture de cet édifice sous l’Ancien régime étaient jusqu’à présent très lacunaires. En 1980, « vu l’état des archives », Alain Degage affirmait qu’il était alors « impossible de décrire les locaux de l’hôpital » 84. Mais les registres de délibérations apportent, à l’occasion de l’évocation de divers travaux, plus d’une précision.

Données architecturales

Nous avons vu, en introduction, que l’achat de maisons adjacentes avait permis la construction de deux édifices distincts. Les hommes et les femmes occupent deux salles séparées, qui se trouvent au premier étage. Celles-ci sont pavées, ainsi que le précise la délibération du 7 octobre 1780 qui en demande la réparation 85.

Les femmes logent dans le bâtiment donnant du côté de la mer, où se trouve, au rez-de-chaussée, une salle de stockage : le 16 juin 1780, il est décidé de mettre une porte avec serrure au magasin qui se trouve « sous la salle des femmes, du côté de la mer, pour y enfermer les grosses provisions » 86. C’est à cet endroit que sont dénoncés des vols le 7 août 1778 : « il y a à la salle des femmes une fenêtre du côté de la mer, qui donne sur une ruelle et on c’est aperçu qu’il a été jeté par cette fenêtre du pain et d’autres provisions, et qu’on peut en abuser pour des objets bien plus considérables ». Afin d’éviter ces « malversations », il est décidé de faire poser à cette fenêtre un grillage, « ce qui n’empêchera pas l’air de passer pour rafraîchir la salle » 87.

Inversement, le 9 mars 1787, il est observé que « certaines personnes faisaient passer des vivres et du vin aux malades par la porte du jardin qui est toute pourrie, ce qui est facilité par la pierre de seuil de cette porte qui est éméchée. Pour remédier à cet abus, et pour la sureté de la maison », des travaux s’imposent alors 88.

La salle des hommes est au nord. Le 11 septembre 1778, on apprend que « du niveau de la terrasse du côté nord, on descend au cimetière par une espèce de mauvaise rampe, coupée en travers par des rangées de pierres brutes très irrégulières, et où on risque de se laisser tomber à chaque pas » 89. L’on propose alors de transformer cette descente en une suite de marches avec des pierres plates. En face de cette descente, au rez-de-chaussée, se trouve un local « dont on n’a fait jusqu’à présent aucun usage, mais qui serait très convenable pour y entreposer les morts et y faire la dissection des cadavres, lorsque cela sera jugé à propos ». Il faudrait juste y ajouter une fenêtre car « il est nécessaire d’y voir clair pour ces dissections » !

Le 7 octobre 1780, il est souligné qu’il devient urgent de faire une porte et quelques réparations « à l’endroit où on entrepose les cadavres, qui est à portée du cimetière ». Pourquoi ? « Afin que les morts soient tirés de la salle et mis dans un endroit sûr pendant le temps ordinaire avant la sépulture ». Un devis doit être établi avant d’être « mis aux enchères » 90. C’est juste à côté en effet que se trouve le cimetière, entouré de murs qui sont rehaussés intégralement le 14 juillet 1780 91.

Retournons à l’intérieur du bâtiment. Celui-ci fait l’objet d’additions et réfections importantes. Le 10 août 1778, il semble également « nécessaire d’établir une communication entre l’ancien bâtiment et le nouveau, afin de permettre le passage de l’un à l’autre, à l’abri de la pluye et des vents violents ». Le projet prévoit la construction d’un corridor donnant sur le cabinet de la sœur supérieure 92. La chapelle semble être au centre, comme l’ont montré les données à son propos, évoquées plus haut.

Enfin, la pharmacie et le lieu où se déroulent les assemblées (nommées bureau) sont également cités le 28 août 1778 : « la pharmacie présente un problème de situation dans le bâtiment : le soleil y tape fort et la chaleur y est si considérable que les sirops et autres drogues se gâtent ». Il est délibéré que la pharmacie sera déplacée « dans le salon où se tient maintenant le bureau » 93 et vice versa.

Pour terminer, les registres donnent également des détails sur les commodités ! Lors de l’assemblée du 10 août 1778, les sœurs en profitent pour demander leurs propres latrines : décision est prise de faire des latrines dites « à l’anglaise, avec son siège et son cylindre et ses dépendants », dans le petit cabinet en vis-à-vis de l’infirmerie 94. En ce qui concerne les patients, le problème semble récurrent. Il est évoqué pendant la même réunion du bureau : « les malades faisant leurs ordures dans des pots de chambre à côté de leurs lits, il se répandoit une mauvaise odeur dans les salles ». Il semble donc à propos de faire faire des chaises percées, au moins en nombre de six, à savoir quatre pour la salle des hommes, et deux pour celle des femmes : « Les pots de chambre, ainsi contenus dans les chaises percées, répandraient moins leur odeur, et on aurait soin de les vider fréquemment » 95.

Localisation

Plusieurs plans aux Archives départementales permettent de visualiser cette implantation hospitalière. Si l’on récapitule, il s’agit d’un édifice tripartite avec un cimetière au nord, une chapelle ouverte sur la rue, le tout situé à proximité du couvent du Picpus.

Un plan de 1790 montre une grande parcelle, identifiée clairement comme étant l’hôpital (parcelle 5), à proximité du couvent de Picpus (parcelle 4), juste entre le môle et la ville à proprement parler. Cette localisation a pu simplifier l’accès aux marins en transit. (Fig. 5)

D’autres plans de la même période sont conservés aux Archives départementales, mais ils se limitent à représenter l’hôpital en un bloc du parcellaire, sans donner davantage de détail sur la composition et disposition des bâtiments 96. Il nous faut attendre le plan cadastral du port, dressé entre 1819 et 1820 pour avoir des précisions visuelles.

Il s’agit d’un édifice longiligne, délimitant à l’ouest une parcelle importante. Il s’agit fort probablement des deux grandes salles, l’une pour les hommes au nord, et celle des femmes au sud, réunies par un passage. L’aile nord donne sur un espace ouvert au nord-est, qui est adjacent aux rues : il s’agit fort probablement du cimetière, sur lequel donne la salle de dissection évoquée plus haut. À l’est se trouvent deux autres espaces ouverts, dont un jardin, séparés par un bâtiment central. Il peut s’agir de grandes cours articulées autour de la chapelle, comme cela est souvent le cas dans l’architecture hospitalière de cette époque, ainsi que nous avons pu le noter au cours de cet article. Celle-ci donnerait sur la rue à l’est, ce qui correspondrait à la volonté de l’aumônier, déjà évoquée, d’ouvrir ce lieu de culte sur l’extérieur sans avoir à passer par les salles des malades à l’ouest.

Des deux maisons isolées des prémices, nous avons alors affaire à un complexe architectural de taille qui devait être bien marqué dans le paysage portuaire. (Fig. 6)

Plan d’une partie de la ville de Cette. Arch. dép. Hérault, C 6950/10 (1790).
Fig. 5 Plan d’une partie de la ville de Cette.
Arch. dép. Hérault, C 6950/10 (1790).
Cadastre, détail de la section B2 de la ville et Saint-Clair. Arch. dép. Hérault, 3 P 3726 (1820).
Fig. 6 Cadastre, détail de la section B2 de la ville et Saint-Clair.
Arch. dép. Hérault, 3 P 3726 (1820).

Le mobilier intérieur

Les registres nous permettent enfin de rentrer à l’intérieur. Nous pouvons nous faire une idée de la disposition des meubles. Tout d’abord, les lits. Le 10 août 1778, la sœur supérieure souhaite faire refaire les lits : certains sont trop larges et doivent être « rétrécis » car ils occupent trop de place ! Il faudrait également refaire tous les cadres, et les rideaux de chaque lit. Elle a pris sur elle d’embaucher un deuxième servant pour raccommoder les matelas et paillasses 97.

On trouve également une mention d’un menuisier qui a fait deux tables : « l’une pour la grande salle des malades, l’autre pour soutenir la fontaine du réfectoire » 98. On ne sait s’il s’agit d’un réfectoire pour les malades suffisamment valides, ou pour l’usage des sœurs. D’ailleurs, le 24 mars 1780, les sœurs font la demande d’une pendule dans l’hôpital, de préférence à contrepoids, ceci afin de « régler les heures des repas et autres services » 99.

Enfin se pose la question épineuse du linge à fournir aux malades. D’après une délibération du 19 mars 1784, le linge est en quantité insuffisante, d’après les sœurs : « Ont exposé au bureau que l’hiver pluvieux qu’on vient d’éprouver, et le nombre de malade qu’on y a traité dans l’hôpital pendant cette saison rigoureuse, leur ont fait sentir combien la maison manquoit de linge. Ils assurent que la pénurie qu’il y en avoit, et la difficulté où l’on étoit de pouvoir faire sécher les lessives fréquentes qu’on étoit contraint de faire, ont exposé les malades à être servis avec du linge humide, qui a dû leur préjudicier infiniment et prolonger leurs maux » 100. Ordre est alors donné d’acheter davantage de linge. Les registres ne donnent malheureusement pas davantage de détails.

Conclusion : un hôpital « Fin de siècle » ?

Les registres s’arrêtent en 1786. Nous avons pu suivre son histoire de manière plus précise, presque quotidienne pendant un peu moins de dix ans. Où en sommes-nous ?

Les sœurs grises fatiguent. Le 26 avril 1786 se tient une assemblée extraordinaire pour demander une cinquième sœur pour le service de l’hôpital : les autres sœurs ont un emploi journalier dense et « l’état de leur santé parait faible » 101. Une demande est alors expédiée à la Supérieure Générale des Sœurs de la Charité à Paris, et la sœur Marguerite Daunix arrive en renfort le 14 octobre 1786 102.

De même, la difficulté à trouver un aumônier perdure. L’accord avec la communauté du Picpus n’aura pas été de longue durée. Le 22 août 1783, le bureau constate que le père Doria prend sa retraite à Toulouse et ne pourra plus assumer sa charge désormais 103. Il est alors noté qu’un autre accord avec la communauté serait « difficile ». On envisage d’avoir à nouveau recours aux vicaires de la paroisse, comme c’était le cas auparavant, et ce « depuis la fondation de l’établissement ». Rendez-vous est alors pris avec le curé, qui accepte volontiers de mettre un de ses trois vicaires à la disposition de l’hôpital, moyennant les mêmes honoraires de deux cent livres annuels. Ce fait est approuvé et validé par l’évêque d’Agde le 30 août de la même année.

Mais encore une fois, tout ne se passe pas comme prévu : le jeune vicaire envoyé, Monsieur Gelly, six mois plus tard, se querelle avec les représentants du bureau de l’hôpital. À l’occasion de sa première visite le 5 mars 1784, il va jusqu’à déchirer, sur le pas de la chapelle, et jeter à la rue, l‘ordonnance de l’évêque que lui montrent les membres du bureau, suite à une altercation relative à ses honoraires 104. Mais nous n’en saurons pas plus, sauf à constater que la somme est finalement réduite à cent livres en 1785 105.

De même, si le bureau a été intransigeant pour le « placement » des morts issus de familles notables et charitables dans le cimetière de l’hôpital, il semble plus disposé pour les dons faisant l’objet de testaments. Les registres fourmillent de mentions de donations effectuées à l’occasion d’ouvertures de tels documents. Le cas le plus notable est celui du cordonnier Jean Causse, qui institue l’hôpital son héritier le 4 avril 1783 : il donne notamment une maison, qu’il faut alors revendre, faute d’avoir les moyens et le temps d’administrer ces biens fonciers 106.

Et parfois, des contreparties sont difficilement refusables. Ainsi le 7 mars 1788, « Monsieur le Curé a dit que Madame Bremoud, établie à Marseille, l’avoit chargé de proposer au bureau de recevoir à rente viagère quatre mille livres, à la condition de recevoir dans la maison la veuve Gautier, sa sœur, qui est insensée, sa vie durant, et de payer à sa sœur de Gabelle deux cent livres de rente par année si elle survit à ladite veuve Gautier, et après la mort des deux, ladite rente sera éteinte et ladite somme de quatre mille livres restera acquise à la maison, sur quoi requiert de délibérer. Et les voix recueillies, il a été unanimement délibéré de prier Monsieur le Curé d’écrire à ladite Dame Bremoud pour lui faire part que le Bureau accepte son offre et conditions. Et plus n’a délibéré » 107. Pourtant, les données municipales récoltées par M. Degage, insistaient sur le fait que les fous ne devaient en aucun cas être pris en charge à l’hôpital Saint-Charles de Sète : ils doivent être envoyés à l’hôpital Saint-Eloi de Montpellier 108 ! Pourquoi ce retournement ? L’hôpital évolue au fur et à mesure des aléas économiques. Il n’a jamais été question d’un établissement aux revenus comparables à ceux de Montpellier, par exemple. De nombreuses fois, les impératifs financiers sont évoqués. Et il ne faut pas oublier que si les hôpitaux demeurent une source d’une « histoire totale, à laquelle n’échappent ni les corps, ni les âmes » 109, c’est parce qu’ils traversent les périodes historiques, en adaptant leurs missions aux contingences. À une autre échelle, les abus dénoncés dans la gestion des léproseries de l’époque moderne ne peuvent se comprendre qu’à la lumières des aléas sanitaires et économiques : à chaque période, à chaque lieu ses problématiques et ses réponses. La question est largement débattue dans les recherches de l’histoire hospitalière, en France ou ailleurs 110.

Pistes de recherches

Plusieurs autres pistes de recherche peuvent néanmoins d’ores et déjà être proposées pour compléter ce premier tableau.

La première concerne la population reçue dans cet hôpital. D’après le règlement de 1779, le trésorier est censé tenir un registre spécifique, avec plusieurs colonnes comportant les noms, surnoms, pays, âge et qualité des malades, avec leurs dates d’entrée, de sortie, voire de décès, ainsi que le nombre de journées et leur prix 111. Nous conservons de tels registres aux Archives départementales de l’Hérault, pour les années 1759 à 1768 112. Ils comprennent les noms, origine (paroisse) et l’âge des patients. En plus figurent les dates d’entrée et de sortie, et les éventuelles mentions d’enterrements.

Ces mentions de sépultures pourraient tout d’abord nous donner une idée de la nature de la population qui compose le cimetière de l’hôpital pendant cette période : catégorie sociale, âge et provenance géographique. Un registre portant spécifiquement sur les militaires mentionne également les garnisons d’origine 113, ce qui peut en faire une source supplémentaire pour suivre les mouvements des armées et garnisons de passage en Languedoc dans cette période.

Enfin, les registres que nous avons évoqués ici comprennent des comptes rendus hebdomadaires du nombre de lits occupés. Il serait peut-être possible d’évaluer l’évolution du temps de présence au sein de l’hôpital. Un registre consacré spécifiquement à la comptabilité de ces journées entre 1778 et 1782 constitue une ressource supplémentaire 114.

Mais ce sera tout : malheureusement, ces documents ne mentionnent pas la cause du décès. Du moins pour ce qui est de l’Ancien régime. Car ce sera le cas pour la période révolutionnaire ! Les registres de population de cette période, qui concerne un établissement devenu alors « hôpital civil », mentionnent en effet la nature de la consultation 115. Une évaluation médicale de l’action hospitalière est alors envisageable.

Un deuxième aspect à développer concerne l’histoire économique. Toutes ces délibérations concernent massivement les comptes : état de caisse, censives et emprunts sont évoqués chaque semaine, avec des récapitulatifs précis. Le chercheur a ainsi à sa disposition une décennie de suivi comptable complet du fonctionnement d’un établissement hospitalier.

On trouve également, dans ces comptes rendus hebdomadaires, le descriptif complet des quantités de nourriture achetés (bœuf, mouton, vin) chaque semaine, ce qui pourrait servir de base à une étude sérielle sur l’alimentation dans un hôpital de port entre 1779 et 1786. Il en est de même pour les quantités de sarments et charbon de bois pour le chauffage. Il s’agit d’une mine pour l’histoire de la consommation. (Fig. 7)

Enfin, une étude architecturale plus poussée serait envisageable en prenant en compte toutes les données des registres. Les travaux de plomberie et réparations sont très nombreux à être cités, et une bonne connaissance des aspects de maçonnerie et d’entretien technique des bâtiments pourrait apporter plus d’une précision sur les bâtiments eux-mêmes.

Compte de la consommation de la semaine du 13 au 19 mai 1780. Arch. dép. Hérault, E3, page 120 (1780).
Fig. 7 Compte de la consommation de la semaine du 13 au 19 mai 1780.
Arch. dép. Hérault, E3, page 120 (1780).

En dernier lieu, étant donné le thème du présent numéro des Études Héraultaises, qu’en est-il des éventuelles traces d’épidémies ? Alain Degage a souligné que la ville de Sète avait été épargnée des pestes de la période moderne, à la différence de Marseille en 1720 par exemple. Rappelons en effet que les dissections, évoquées plus haut, ne se justifient alors que pour déceler d’éventuelles traces d’une contagion dont la ville veut absolument se prémunir. Y-est-elle parvenue ? Il faudrait examiner à la loupe les entrées et sorties, afin de voir si des épisodes d’infection massive ne peuvent y être décelés. Nous en avons un exemple, bien que plus tardif. Quel ne fut notre plaisir d’historien de trouver dans les registres de population de l’année 1918 de ce même hôpital, des mentions étonnamment nombreuses de patients décédés des suites d’une « grippe » 116. Comme l’indique Freddy Vinet, les archives hospitalières sont l’une des rares ressources pour reconstituer l’impact qu’a pu avoir la grippe dite « espagnole » à la fin du Premier Conflit mondial 117. Définitivement, si l’on prend le temps de l’interroger avec méthode et rigueur, un hôpital a plus d’une histoire à raconter.

BIBLIOGRAPHIE

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NOTES

1. DEGAGE, 1980.

2. Arch. dép. Hérault, C 4680.

3. Arch. dép. Hérault, C 559.

4. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 3.

5. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 65.

6. Il s’agit de Philibert Charles de Pas de Feuquières, évêque d’Agde de 1702 à 1726.

7. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 3-7.

8. Arch. dép. Hérault,11 HDT E3, p. 5 et 6.

9. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 8-10.

10. Arch. dép. Hérault, 11 HDT, E3, p. 45.

11. DINET-LECOMTE, 1994.

12. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 40 et 47.

13. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 11.

14. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 11.

15. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 39-40.

16. Arch. dép. Hérault, 11 HDT, E3, p. 58.

17. Arch. dép. Hérault, 11 HDT, E3, p. 12-13.

18. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E 3, p. 53.

19. Arch. dép. Hérault, 11 HDT, E3, p. 15-16.

20. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 124.

21. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 136.

22. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 138.

23. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 9.

24. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 5.

25. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 14.

26. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 104.

27. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 119.

28. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 193.

29. Maladie alors qualifiée de « peste de la mer, vu qu’il s’agit d’une carence alimentaire liée aux voyages maritimes à longs cours ».

30. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p.13.

31. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 13.

32. HYACINTHE, 2010.

33. Arch. dép. Hérault, 11 HDT, E3, p. 78.

34. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 146.

35. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 43-44.

36. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 202.

37. Arch. dép. Hérault,, C 6667.

38. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 207.

39. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 230.

40. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 235.

41. Arch. dép. Hérault, G 1352.

42. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 6.

43. Données précisées dans l’inspection de 1766 : Arch. dép. Hérault, G 559.

44. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 14. + other to FIND.

45. Arch. dép. Hérault, G 559.

46. DINET-LECOMTE, 1996.

47. DULIEU, 1985.

48. BENEZET, 2008.

49. DEMOUY, 2011.

50. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 48.

51. LE BLEVEC, 2000 ; VAUCHEZ, 1975.

52. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 7.

53. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 108.

54. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 154.

55. MASSABIAU, 1977.

56. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 157.

57. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p.180.

58. Arch. dép. Hérault, 30 H 1, folio 10v-11.

59. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 181-183.

60. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 196.

61. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 106.

62. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 139.

63. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p.180.

64. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 160.

65. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 328.

66. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 55.

67. Arch. dép. Hérault,11 HDT E3, p. 186.

68. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p.239.

69. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p.173.

70. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 328.

71. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 54-55.

72. On en trouve des mentions dès le 2 avril 1779 : Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 56.

73. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 107.

74. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 45.

75. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 26.

76. BONFIELD… 2013.

77. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 27.

78. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 80.

79. Arch. dép. Hérault, 11HDT E1, p. 20.

80. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 44.

81. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 37-38.

82. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 76.

83. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 42.

84. DEGAGE, 1980, p. 134.

85. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 150.

86. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 123.

87. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 1-2.

88. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 83-84.

89. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 26.

90. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 150.

91. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 130.

92. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 17.

93. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 22.

94. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 17.

95. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 18.

96. Arch. dép. Hérault, C 1246/1, 1 Fi 79, 1 Fi 175 et 1 Fi 176.

97. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 17.

98. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 70.

99. Arch. dép. Hérault, 11DT E3, p. 113.

100. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 332.

101. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 109.

102. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 135.

103. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E 3, p. 159.

104. Arch. dép. Hérault, 11HDT E3, p. 330.

105. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 78.

106. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 286-291.

107. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E1, p. 108.

108. DEGAGE, 1980, p. 140.

109. TOUATI 1988, et HUGUET-TERMES, 2014.

110. HUGUET-TERMES…, 2014.

111. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E3, p. 4.

112. Arch. dép. Hérault, 11 HDT F1 à F3.

113. Arch. dép. Hérault, 11 HDT F4.

114. Arch. dép. Hérault, 11 HDT E2.

115. Arch. dép. Hérault, 11 HDT 1Q1 et suivants.

116. Arch. dép. Hérault, 11 HDT Q23.

117. VINET, 2018.