Un lignage lodévois et ses archives :

Les Peyrottes de Soubès aux Archives départementales de l’Hérault

*attaché principal de conservation du Patrimoine,
chef du service Archives anciennes et privées aux Archives départementales de l’Hérault
**adjoint du Patrimoine principal

[ Texte intégral ]

En février 2011 la famille Guinard, prend contact avec les Archives départementales de l’Hérault afin de leur confier les archives de la famille Peyrottes de Soubès, qui depuis le début du XIXe siècle, étaient conservées dans la propriété familiale du château de Grabels. Ce fonds de famille et de seigneuries concernant essentiellement le Lodévois, peu connu des historiens et quasiment inexploité depuis de nombreuses décennies 1, était alors conservé dans des coffres et des caisses, depuis le mariage du dernier héritier mâle de la famille en 1812 avec Marguerite de Solas, fille du marquis de Solas et propriétaire du château de Grabels. Ce fonds d’archives de 4,70 mètres linéaires, conservé en sous-série 192 J, comprenant nombre de pièces remarquables, datant pour certaines du XIIIe siècle, est enfin accessible à la recherche et désormais doté d’un instrument de recherche détaillé depuis le début de l’année 2019.

La présente communication entend présenter l’ascension sociale de la famille Peyrottes, ses alliances, les seigneuries du Lodévois (qui peuvent être désormais étudiées plus en détail) ainsi que la composition du fonds d’archives. A titre plus personnel, elle permet également de concrétiser enfin une promesse donnée à Jean Nougaret en 2012 de proposer un article scientifique sur ce fonds exceptionnel dans les colonnes d’Études héraultaises, après le classement du fonds.

La famille Peyrottes de Soubès ou l’ascension d’un lignage du Lodévois

La famille Peyrottes, puis Peyrottes de Soubès

La famille Peyrottes réside, au début du XVe siècle, au Caylar d’Alajou (Le Caylar) où elle pratique activement le négoce. Son premier représentant cité dans les archives est Guilhem Peyrottes, qui serait né vers 1410. Guilhem Peyrottes a au moins quatre garçons et une fille (Isabeau). Parmi ses garçons, trois d’entre eux embrassent la carrière ecclésiastique : Pierre Peyrottes [I.A], bachelier en droit, est chanoine du chapitre de Burlats (diocèse de Castres), Géraud Peyrottes [I.A] est recteur de l’église paroissiale Saint-Martial-du-Puy (diocèse de Castres) et Antoine Peyrottes est bénéficiaire de l’église de Lodève. (Fig 1)

André Peyrottes [I.C], quatrième fils de Guillaume, poursuit avec succès les affaires commerciales de son père et épouse en 1460 Brayde Guy, fille de Berthomieu Guy, marchand fortuné du Caylar. Accroissant considérablement la fortune familiale, il reçoit en août 1506 des lettres de noblesse attribuées par Louis XII 2, et, en 1507, s’implante durablement à Soubès en achetant les droits sur la coseigneurie de Soubès que détient Arnaud Cahuzac, lui-même héritier de la famille Feton, une des principales familles seigneuriales du lieu au Moyen-Age. La famille Peyrottes, désormais noble, s’assure ainsi la possession d’une seigneurie du Lodévois et des revenus qui y sont liés. Après avoir testé, André Peyrottes meurt en août 1510 ; son épouse lui a donné six filles et trois garçons.

Parmi les garçons d’André Peyrottes, Guillaume Peyrottes [II.B], fils cadet, est, au début du XVIe siècle, chanoine, puis doyen de l’église collégiale Saint-Pierre de Burlats, avant de devenir chanoine de la cathédrale de Lodève. En 1512, il achète la terre et seigneurie de Cazilhac, près de Lunas, puis en 1517 les droits du chapitre de Lodève sur Cazilhac. Son frère aîné, Étienne Peyrottes [II.A], coseigneur de Soubès, épouse en 1503 Catherine Delorme, fille d’un marchand aisé de Gignac ; au décès de son père André Peyrottes, en 1510, Étienne Peyrottes recueille l’intégralité des héritages familiaux, puis, lors du décès de son frère Guillaume, la seigneurie de Cazilhac. Étienne Peyrottes a deux garçons (Michel et Pierre) et deux filles (Jacquette et Jeanne [III.C], qui s’allient respectivement aux familles Rosset et du Caylar, seigneur d’Espondeilhan).

Généalogie simplifiée de la famille Peyrottes de Soubès 1ère partie, générations I-VI
Fig. 1 - Généalogie simplifiée de la famille Peyrottes de Soubès 1ère partie, générations I-VI

Michel Peyrottes [III.A], qui se fait désormais appeler Michel de Peyrottes, coseigneur de Soubès, seigneur de Cazilhac, est viguier de l’évêque de Lodève. Il épouse en 1532 Alayssette de Forès, fille de Philippe de Forès, seigneur de Carlencas et Levas. Michel de Peyrottes dispose d’une fortune personnelle bien assise et conforte son pouvoir à Soubès en acquérant en 1563 les droits subsistant à l’évêque dans cette seigneurie. Son pouvoir local grandissant fait rapidement ombrage aux droits de la famille Carcassonne, qui tient également la coseigneurie de Soubès, et c’est au cours des années 1550 que les deux familles commencent à s’affronter, d’abord juridiquement, puis par les armes, cherchant à s’assurer l’une et l’autre la primauté sur la seigneurie (le conflit persiste au fil des générations). Le couple a au moins quatre fils, dont deux seulement, Jehan [IV.B], prêtre à Lodève, et Raymond, ont laissé des actes dans le fonds d’archives familiales. Pierre de Peyrottes [III.B], frère de Michel, après avoir étudié à l’université de Paris, poursuit une carrière ecclésiastique, comme chanoine prébendé de l’église collégiale Saint-Pierre de Burlats.

Raymond de Peyrottes [IV.A] succède à son père Michel de Peyrottes vers 1576. Il épouse en 1580 Eléonore Alleman de Mirabel, belle-sœur de Gabriel de Saint-Étienne, sieur et baron de Ganges. Les Guerres de religion perturbent alors considérablement le Lodévois, et Soubès est mis à mal par le passage des troupes et des bandes armées. Raymond de Peyrottes, demeuré catholique, est fait prisonnier à Olargues, puis libéré contre rançon ; il ne réussit pas à empêcher les troupes protestantes de prendre Soubès, avec l’appui de la famille Carcassonne. Il rédige son testament en 1586 et son épouse en 1592, laissant un fils unique, Gabriel de Peyrottes (le couple a également eu une fille, Lucrèce, décédée en bas âge en 1587).

Gabriel de Peyrottes [V], seigneur de Soubès, Cazilhac, Poujols et autres places, est encore jeune lors du décès de ses parents. Il est placé sous la tutelle de son oncle, Gabriel de Saint-Étienne, baron de Ganges jusqu’en 1596, date de la reddition des comptes. En 1599, il épouse Hélène de Sarret de Fabrègues, qui lui donne deux filles, Louise [VI.A] et Françoise [VI.B], ainsi qu’un garçon, Henri I [VI.C]. Gabriel de Peyrottes décède tragiquement cinq ans après, le 6 juin 1604. Alors qu’il se rend à Saint-Maurice (dont la seigneurie est indivise entre les familles Peyrottes et Ginestous) pour recevoir le serment des nouveaux consuls, le sieur de Soubès est assassiné à l’instigation de l’autre coseigneur. En 1610, Hélène de Sarret de Fabrègues épouse en secondes noces le tuteur de ses enfants, Jean-Jacques de La Treilhe, sieur de Fozières 3.

Les deux filles de Gabriel de Peyrottes réalisent de belles alliances dans la noblesse d’épée et de robe. Tandis que Louise de Peyrottes [VI.A] épouse en 1623 Jacques du Fesc, seigneur et baron de Sumène, Rougères, Ravenc, Roquelongue, Soulanon et autres places, sa sœur, Françoise de Peyrottes [VI.B], se marie en premières noces avec Pierre de Serres, sieur de Saussan et Valantre, maître ordinaire à la Chambre des comptes (1625) et, en secondes noces, avec François de Rignac, procureur général en la Cour des comptes, aides et finances (1642).

Henri I de Peyrottes (vers 1597-1662) [VI.C], seigneur et baron de Soubès, Cazilhac, Saint-Maurice, Poujols et autres places, fils de Gabriel, épouse quant à lui en 1626 Françoise de Falc (vers 1609-1651), protestante et fille d’un trésorier provincial de l’extrordinaire des guerres en Languedoc. Le couple donne naissance à au moins neuf enfants (cinq garçons et quatre filles). En décembre 1639, Henri I de Peyrottes participe à la campagne de Roussillon au sein des troupes royales et en obtient un certificat du prince de Condé. En 1650, la famille Peyrottes et la famille Carcassonne se réconcilient, signent un accord de paix (qui va s’avérer temporaire) et unissent leurs destinées quelques années plus tard, en 1656, lors du mariage de Françoise de Peyrottes (fille d’Henri I) et d’Annet de Carcassonne. Françoise de Falc décède le 6 novembre 1651 à Soubès (où elle est inhumée dans l’église paroissiale, ce qui témoigne de son abjuration du protestantisme), tandis qu’Henri I de Peyrottes décède le 8 août 1662 à Lodève, après avoir testé le 1er août précédent. (Fig. 2)

Généalogie simplifiée de la famille Peyrottes de Soubès 2e partie, générations VI-XII
Fig. 2 - Généalogie simplifiée de la famille Peyrottes de Soubès 2e partie, générations VI-XII

Parmi les neuf enfants du couple, sept d’entre eux ont laissé suffisamment d’archives pour pouvoir être étudiés. Henri II de Peyrottes (vers 1627-1677) [VII.A], seigneur de Cazilhac, puis seigneur et baron de Soubès, est le fils aîné d’Henri I de Peyrottes et de Françoise de Falc. Il naît vers 1627, épouse en premières noces Louise Durand de Saint-Martin, puis en secondes noces, en 1659, Isabeau de Jaule (vers 1643-1713). De cette seconde union, naissent six enfants. En 1668, dans le cadre des grandes enquêtes de maintenue de noblesse initiées par Louis XIV, Henri II de Peyrottes doit, avec ses frères, apporter les preuves de noblesse de sa famille auprès de l’Intendant de Languedoc pour les faire viser par la « commission de la recherche des usurpateurs du titre de noblesse en la Province de Languedoc ». En 1674, à la tête d’une compagnie de la milice du diocèse de Lodève, Henri II de Peyrottes participe à des opérations militaires avec le comte de Schomberg. Il décède le 24 décembre 1677. Sa veuve, Isabeau de Jaule lui survit 36 ans et décède en 1713. La succession d’Henri II de Peyrottes est âprement disputée entre ses héritiers qui s’opposent par voie de justice durant près de 40 ans.

Les frères d’Henri II de Peyrottes ont des destinées militaires singulières. Pierre de Peyrottes (vers 1630­1676) [VII.B], sieur de Saint-Maurice (qui décède « à deux portées de mousquet » du château de Cazilhac le 20 décembre 1676) participe en effet, en 1669, avec deux de ses frères, Henri de Peyrottes (né en 1645) [VII.E] le jeune, dit « Le chevalier », et Joseph de Peyrottes (vers 1650-1670) [VII.G], sieur du Viala, à l’opération militaire française de Candie (Crète), aux côtés de Venise, contre les troupes ottomanes. Avant d’embarquer à Toulon, les trois frères rédigent chacun un testament instituant en cas de décès les deux frères survivants, héritiers par égale portion. Joseph de Peyrottes décède peu après, en 1670, des suites de blessures reçues à Candie.

Le dernier frère d’Henri II de Peyrottes, Gabriel de Peyrottes (vers 1639-avant 1680) [VII.D], sieur de Cazilhac, ne semble pas avoir fait le choix des armes. Il épouse Marie de Rudanel, dont il a un fils, Pierre de Peyrottes de Cazilhac (décédé en 1720), et meurt avant 1680.

Parmi les sœurs d’Henri II de Peyrottes, Françoise de Peyrottes (née vers 1630) [VII.C] permet, par son union en 1656 avec Annet de Carcassonne, vicomte de Cabannes, seigneur de Soubès, Poujols, Parlatge et Lugans, de sceller une réconciliation provisoire entre les deux familles seigneuriales concurrentes de Soubès. Sa sœur cadette, également prénommée Françoise et surnommée « Françon », née vers 1646 [VII.F], épouse Pierre Cabanettes, notaire à Lunas. Le fonds d’archives ne conserve pas de documents sur les deux dernières sœurs, Louise de Peyrottes (1643-1690), qui épouse en 1662 Guillaume de Lamouroux, sieur de La Rouvière, et Hélène de Peyrottes, entrée en religion.

Henri III de Peyrottes (1659-1719) [VIII.A], aîné des enfants d’Henri II et d’Isabeau de Jaule, succède à son père à la tête de la seigneurie de Soubès après plusieurs années de luttes et conflits familiaux. Henri II de Peyrottes avait en effet légué par testament tous ses biens à son épouse Isabeau de Jaule, à charge pour cette dernière de les transmettre à celui de ses enfants qu’elle jugerait le plus capable d’en assurer la prospérité. Isabeau de Jaule, déshéritant son aîné, transmet ainsi en 1696 l’intégralité de l’héritage à son fils cadet, Charles Jean de Peyrottes (1667-1696) [VIII.D], dit « Le chevalier », lieutenant de cavalerie dans les régiments de la Bessière, puis de Renepon. La transmission reçoit l’assentiment des autres enfants, Gabriel de Peyrottes (1665-1734) [VIII.B], sieur de Poujols, Pégairolles et Saint-Félix, et Marguerite de Peyrottes (ca 1676-1714) [VIII.E], représentée par son époux – et cousin germain – Pierre de Peyrottes (décédé en 1720), sieur de Cazilhac (Isabeau de Peyrottes (ca 1667­1682) [VIII.C], dernière sœur, est déjà décédée lors de cet accord). Finalement, le « chevalier de Peyrottes » décède peu de temps après, le 29 décembre 1696, après avoir testé en faveur de son frère Gabriel. Ce dernier finit, le 24 mai 1706, par abandonner tous ses droits à son aîné, Henri III de Peyrottes, qui entre enfin en possession de la seigneurie de Soubès. Henri III de Peyrottes épouse Anne Triboulet à Bray-sur-Seine (Seine-et-Marne) le 10 mai 1694. De leur union, naissent deux enfants : Henri IV de Peyrottes (1695-1775) [IX], seigneur et baron de Soubès, et Jean-Baptiste de Peyrottes (1698-1713). Henri III de Peyrottes décède le 29 janvier 1719 à Soubès, tandis que son épouse lui survit jusqu’au 28 septembre 1742, date de son décès également à Soubès.

Henri IV de Peyrottes (1695-1775) [IX], seigneur et baron de Soubès, naît à Bray-sur-Seine le 8 février 1695 ; il embrasse la carrière des armes et devient garde du corps du roi dans la compagnie du comte de Charrost, puis lieutenant au régiment de cavalerie de la Tour. Il succède à son père en 1719, puis épouse en 1723, après dispense de consanguinité, sa cousine germaine, Diane de Peyrottes de Cazilhac (1697-1766), fille de Pierre de Peyrottes, sieur de Cazilhac, et de Marguerite de Peyrottes de Soubès. Le couple donne naissance à un fils, Henri Raymond, et à trois filles, Anne, Diane et Louise Thérèse. Henri IV de Peyrottes est impliqué tout au long de son existence dans de nombreuses procédures qui finissent par grever la fortune familiale (c’est à cette génération que commence notamment une longue procédure de trente-cinq ans avec la communauté de Soubès qui réclame à son seigneur des arrérages de tailles sur des terres roturières). Diane de Peyrottes décède en 1766, tandis que son époux, Henri IV de Peyrottes, décède le 21 septembre 1775 à Soubès.

Les trois filles d’Henri IV de Peyrottes et de Diane de Peyrottes contractent des alliances respectables : Anne de Peyrottes, demoiselle de Cazilhac (ca 1723-1794) [X.A], épouse vers 1766 Louis Montagnol, et hérite de la seigneurie et du domaine de Cazilhac ; Diane de Peyrottes de Soubès (1724-avant 1768) [X.B] s’unit en 1746 à Pierre Dupuy de Montbrun de Granger de Montmejean (né en 1716), vicomte de Cabanis, seigneur de La Roque et autres places ; Louise Thérèse de Peyrottes de Soubès (1734­1790) [X.D], reçue demoiselle de Saint-Cyr en 1741, se marie vers 1755 avec Antoine de Trémouille (1725-1786), juge criminel au siège présidial de Béziers, mais, victime de mauvais traitements, obtient la séparation de biens avec son époux.

Henri Raymond I de Peyrottes (1729-1808) [X.C], seigneur et baron de Soubès, aîné des enfants d’Henri IV de Peyrottes et de Diane de Peyrottes, naît le 28 décembre 1729 à Soubès. Comme son père, il sert le roi par les armes, mais opte pour la marine où il est enseigne de vaisseau. Il épouse en 1777 (avec contrat de mariage en 1769) Marie Majourel (1739-1786), originaire de Soubès, qui lui donne deux filles (Marie Diane Adélaïde en 1770 et Marie Anne Eléonore en 1780) et deux garçons (Henri Raymond II en 1775 et Jean Jacques Gabriel en 1778).Admis aux États de Languedoc en 1781, Henri Raymond I de Peyrottes y représente la baronnie du Cailus ; il siège également lors des États généraux de 1788-1789. Henri Raymond Peyrottes, dernier seigneur en titre de Soubès, poursuit les nombreuses et coûteuses procédures souvent engagées par ses aïeux (contre la communauté de Soubès, contre la famille Carcassonne…) et en initie de nouvelles, qui finissent par diminuer considérablement les ressources financières de la famille et de la seigneurie (une partie de ses biens sont même séquestrés). Pendant la Révolution, même s’il demeure de convictions royalistes, il n’émigre pas et reste dans l’Hérault. Le 12 septembre 1786, Marie Majourel décède à Soubès ; Henri Raymond I de Peyrottes meurt quant à lui le 28 avril 1808 à Soubès.

Sa première fille Marie Diane Adélaïde de Peyrottes de Soubès (1770-1830) [XI.A] ne contracte pas d’alliance et décède sans postérité. Sa seconde fille, Marie Anne Eléonore de Peyrottes de Soubès (1780-1854) [XI.D], après une vaine tentative de mariage arrangé avec Monsieur d’Audiffré en 1811-1813, épouse tardivement le 5 octobre 1842 à Hérépian Raymond Auguste Bousquet (1772-après 1849), rentier originaire de Béziers et veuf en premières noces de Catherine de Gineste. Les deux sœurs obtiennent chacune en 1829, ainsi que leur frère aîné, leur inscription sur la liste civile de la Maison du roi et l’attribution d’une pension de 300 francs en réparation de la perte de leur fortune consécutive à la Révolution française et autres persécutions.

Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès (1775-avant 1838) [XI.B], fils aîné d’Henri Raymond I de Peyrottes de Soubès et de Marie Majourel, naît le 1er août 1775. D’opinions royalistes, il s’oppose aux idées révolutionnaires et mène une existence particulièrement rocambolesque durant la Révolution et le Consulat. Avec son frère cadet, Jean Jacques Gabriel de Peyrottes de Soubès, il est poursuivi pour brigandage, vols et assassinat entre l’an VII et l’an X. Finalement arrêté avec son frère, il est détenu puis libéré et assigné à résidence à Soubès en 1806. Le 23 janvier 1812, il épouse à Grabels Marie Jeanne Marguerite de Solas (1781-après 1840), fille du marquis de Solas, qui n’a pas reçu l’assentiment de son père pour cette union (le couple donne naissance à deux filles : Élisabeth Sophie en 1812 et Marie Marguerite Joséphine en 1815). En 1814, lors de la première Restauration, Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès est lieutenant de la Garde nationale sédentaire de Soubès et, en 1815, au retour définitif de Louis XVIII, il sollicite en vain un emploi de capitaine dans un régiment de ligne ou d’officier dans la Garde du roi. Il décède avant 1838, tandis que son épouse meurt après 1840.

Jean Jacques Gabriel de Peyrottes de Soubès (1778­1808) [XI.C], frère cadet d’Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès, naît le 30 janvier 1778 à Soubès. De 1785 à 1788, son père cherche à le faire admettre à l’École royale militaire de La Flèche. Manifestant des opinions royalistes comme son père et son frère, Jean Jacques Gabriel de Peyrottes de Soubès s’oppose à la Révolution. Il participe à de multiples actes de brigandage avec son frère aîné et est condamné à la peine capitale en 1799. Sa condamnation est commuée en détention au bagne de Toulon où il décède en 1808.

Élisabeth Sophie de Peyrottes de Soubès (1812-1891) [XII], fille d’Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès et de Marie Jeanne Marguerite de Solas, naît le 4 avril 1812 à Grabels. Elle y épouse en 1840 Jean Ricard (1808-1873), propriétaire. C’est la dernière descendante de la famille Peyrottes à porter le patronyme et à donner une descendance dans la famille Ricard. Sa sœur cadette, Marie Marguerite Joséphine Peyrottes de Soubès (née le 15 juillet 1815 à Grabels) décède sans alliance, ni descendance connue.

Les familles alliées à la famille Peyrottes

La famille Peyrottes de Soubès contracte des alliances tout d’abord avec la bourgeoisie au XVe siècle, puis dès le XVIe siècle avec l’aristocratie héraultaise au fur et à mesure de son ascension sociale. Plusieurs de ces familles ont transmis des archives qui sont désormais conservées dans le fonds. La présentation succincte qui suit est organisée selon l’ordre chronologique d’alliance avec la famille Peyrottes de Soubès.

La famille Falc s’allie ainsi à la famille Peyrottes, lors du mariage de Françoise de Falc avec Henri I de Peyrottes de Soubès en 1626. Françoise de Falc est la fille de Pierre de Falc (décédé en 1630), trésorier provincial de l’extraordinaire des guerres en Languedoc.

La famille Carcassonne est originaire pour sa part de Montpellier, où ses membres sont marchands depuis le XIVe siècle. L’alliance au milieu du XVe siècle de Jeanne de Carcassonne, fille de Jacques de Carcassonne, marchand et changeur, avec Guillaume Maffen (ou Maffred), docteur et professeur de droit à Montpellier, lui permet de s’installer à Soubès. En 1448, Guillaume Maffen achète des droits sur la coseigneurie de Soubès à la famille Soubès ; trois ans plus tard, il achète d’autres droits sur Soubès provenant des seigneurs de Parlatges et de la famille de Lodève. Il décède entre 1455 et 1457, laissant à sa veuve la jouissance de la coseigneurie de Soubès, où cette dernière poursuit la politique de rachat de droits initiée par son mari (Jeanne de Carcassonne réunit ainsi à la fin du XVe siècle sur sa tête les droits de 9 seigneurs sur les 18 qui se partageait la seigneurie au XIIIe siècle). En 1501, sans héritier, Jeanne de Carcassonne institue son frère Anthoine de Carcassonne comme héritier universel. Ce dernier recueille la coseigneurie de Soubès où ses descendants s’installent et vivent jusqu’au XVIIIe siècle, entretenant au fil des générations des relations souvent tendues avec la famille Peyrottes de Soubès, qui tient l’autre coseigneurie. Les conflits personnels et de préséance prennent une tournure particulièrement tragique lors des guerres de religion, les familles prenant chacune parti pour une religion différente. En 1656, la réconciliation temporaire des deux familles rivales se matérialise par l’union d’Annet de Carcassonne avec Françoise de Peyrottes, fille d’Henri I de Peyrottes et de Françoise de Falc.

La famille Jaule s’unit à la famille Peyrottes de Soubès en 1659 lors du mariage d’Isabeau de Jaule, fille de Claude de Jaule, juge de l’Equivalent à Montpellier, avec Henri II Peyrottes de Soubès.

La famille Bousquet, de Villeneuve-lès-Béziers, s’allie à la famille Peyrottes de Soubès en 1842, lors du mariage de Marie Anne Eléonore de Peyrottes de Soubès (sœur d’Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès) avec Raymond Auguste Bousquet, rentier et veuf en premières noces de Catherine Louise Françoise Adélaïde de Gineste.

Enfin, la famille Ricard, de Grabels, s’allie en 1840 à la famille Peyrottes de Soubès lors du mariage d’Elisabeth Sophie de Peyrottes de Soubès, dernière descendante de la famille Peyrottes, avec Jean Ricard. L’une des filles du couple, Joséphine Honorine « Célestine » Marie Henriette Ricard épouse en 1874 Jean-Louis Reboul, originaire de Grabels. À la génération suivante, Emma Reboul épouse en 1913 à Grabels, Ferdinand Doumergue, instituteur.

Les familles seigneuriales Soubès, Feton et Roquefeuil

Le fonds Peyrottes de Soubès conserve également quelques documents provenant d’anciennes familles seigneuriales de Soubès, qui ne sont pas forcément alliées à la famille principale.

La famille Soubès est ainsi la plus ancienne famille seigneuriale de Soubès, mentionnée depuis le XIe siècle. Avant 1090, Augier de Soubès est en effet témoin dans la donation que Pierre de Lunas fait à Guillaume V de Montpellier de son fief de Montpelliéret 4. Du XIIIe au XVe siècle, plusieurs membres de cette famille sont coseigneurs de Soubès.

La famille Feton tient également une portion de la seigneurie de Soubès au XVe siècle ; ses biens passent au XVIe siècle à la famille Peyrottes.

La famille Roquefeuil enfin est aussi présente à Soubès de 1256 à 1458, tenant une partie de la seigneurie, qui, au XVe siècle, est achetée par la famille Carcassonne.

Les seigneuries de Soubès, Cazilhac, Poujols, Aubaigues, Lauroux, La Vernède, le Viala, Saint-Maurice et autres possessions foncières de la famille Peyrottes de Soubès

La famille Peyrottes de Soubès réussit, entre le XVe et le XVIIIe siècle à réunir sous son chef de nombreuses terres et seigneuries du Lodévois.

L’ascension sociale de la famille Peyrottes, sa proximité avec l’église de Lodève et ses origines géographiques, la rapprochent de la seigneurie de Soubès, fondée par les évêques de Lodève au Xe siècle. Soubès est devenue à partir du XIIe siècle une coseigneurie partagée entre de nombreux seigneurs. Les évêques de Lodève ont en effet souhaité inféoder leurs terres et droits à des lignages locaux capables de les défendre. Aux XIVe et XVe siècles, les anciennes familles féodales de Soubès (notamment Lodève, Roquefeuil, Lauzières, Montdardier, Thézan) sont progressivement concurrencées par des familles issues de la noblesse d’affaire. Parallèlement, la longue liste des coseigneurs de Soubès tend à se réduire, certains lignages augmentant leur part en rachetant celle des autres. Soubès compte encore une dizaine de seigneurs en 1503 : le seigneur évêque de Lodève, le chapitre de Lodève, les seigneurs de Carcassonne, de la Bastide, du Puech d’Aubaigues, de Montmouton, de Saint-Martial, de Rosset, de Montpeyroux, ainsi que les Feton et Cahuzac qui détiennent la plus grande portion. Au cours du XVIe siècle, deux nouvelles familles issues de la bourgeoisie négociante – Peyrottes et Carcassonne – prennent l’ascendant et excluent progressivement toutes les autres. Ces deux familles s’assurent la possession de la majeure partie de la seigneurie par l’acquisition successive des droits des anciens seigneurs. Ainsi André Peyrottes, anobli en 1506, acquiert la coseigneurie de Soubès, à partir de 1507, en rachetant les droits d’Arnaud Cahuzac, lui-même héritier de la famille Feton, une des principales familles seigneuriales de Soubès. En 1509, André Peyrottes amorce la reconstruction du château de Soubès dans lequel s’installent ses successeurs, tandis que la famille Carcassonne investit le donjon lui faisant face. Les deux familles entrent en opposition pour la primauté à Soubès, excluant peu à peu tous les autres lignages. Des antagonismes forts et durables marquent profondément la communauté, imposant aux habitants de prendre parti pour un des deux seigneurs. La rivalité s’illustre notamment au cours d’un long contentieux de trois siècles portant sur les droits seigneuriaux et honorifiques à Soubès et à Poujols.

En 1510, André Peyrottes enrichit ses possessions par l’acquisition de la terre du Viala, dans les paroisses de Vissec et de Saint-Maurice (Saint-Maurice-de-Navacelles). À son décès survenu la même année, son fils Étienne hérite de ses droits à Soubès et au Viala, auxquels s’ajoute en 1518 la seigneurie de Cazilhac, acquise en 1512 par son frère cadet Guillaume Peyrottes, archidiacre de Lodève et doyen de Burlats. Cazilhac est un point stratégique verrouillant la vallée de l’Orb. Étienne Peyrottes lance la reconstruction du château de Cazilhac qui devient d’abord un solide ensemble défensif, puis un lieu de villégiature complémentaire de Soubès pour la famille Peyrottes. La seigneurie est composée de divers droits et possessions (terres, métairies, moulins, rentes). (Fig. 3) (Fig. 4)

Achat par Raymond de Peyrottes des seigneuries de Soubès et Aubaigues à l’évêque de Lodève : cahier en parchemin (1564)
Fig. 3 - Achat par Raymond de Peyrottes des seigneuries de Soubès et Aubaigues à l’évêque de Lodève : cahier en parchemin (1564) (Arch. dép. Hérault, 192 J 54). Il faut noter ici les différentes cotations de ce titre de propriété, reportées sur la couvrure.
Achat par Raymond de Peyrottes des seigneuries de Soubès et Aubaigues à l’évêque de Lodève : cahier en parchemin (1564)
Fig. 4 - Achat par Raymond de Peyrottes des seigneuries de Soubès et Aubaigues à l’évêque de Lodève : cahier en parchemin (1564) (Arch. dép. Hérault, 192 J 54). L’utilisation en remploi d’un manuscrit médiéval pour couvrir le cahier est à signaler ; d’autres éléments de ce manuscrit ont également servi pour d’autres couvrures conservées dans le fonds

À partir de 1563, Michel de Peyrottes rachète les droits des évêques de Lodève à Soubès, Camp Rouch, Lauroux, Aubaigues et Poujols. La terre de Camp Rouch est une importante ferme située près de Pégairolles (Pégairolles­de-l’Escalette). Aubaigues (Saint-Étienne-de-Gourgas) est plus tard revendue par Henri II de Peyrottes à Alexandre de Bonnail en 1668. Michel de Peyrottes consolide ses droits à Soubès toujours menacés par les Carcassonne. Il étend également le domaine de Cazilhac, en 1574, et achète la moitié de la seigneurie de Fozières, en 1567. Sous la seigneurie de son fils Raymond de Peyrottes, le patrimoine des Peyrottes en Lodévois atteint son apogée : Raymond de Peyrottes est notamment seigneur de Soubès, Cazilhac, Poujols, Aubaigues, Lauroux, La Vernède, le Viala, et coseigneur de Saint-Maurice (Saint-Maurice-de-Navacelles).

Les possessions de la famille Peyrottes sont morcelées lors de la succession d’Henri I de Peyrottes, mort en 1662 : l’aîné de ses enfants, Henri II, hérite de la coseigneurie de Soubès et de la seigneurie de Poujols ; son frère, Gabriel, de la seigneurie de Cazilhac ; le cadet, Joseph, de la terre du Viala. En 1668, la terre de Saint-Maurice est vendue à Pierre de Ginestous.

Au XVIIIe siècle, le patrimoine des Peyrottes est grevé par des soucis financiers notamment liés aux créances avec la communauté de Soubès, conséquence des multiples droits et hommages des anciens possesseurs de la coseigneurie qu’ils n’ont pu racheter. À Cazilhac, le domaine des Peyrottes passe, à la fin du XVIIIe siècle, à la famille Montagnol, avant d’être vendu en 1830. En 1790, le village et le château de Cazilhac sont rattachés à la commune de Lunas, puis en 1881 à celle du Bousquet-d’Orb.

Enfin, le domaine et le château de Grabels entrent pour leur part dans les propriétés familiales lors du mariage d’Henri Raymond II de Peyrottes avec Marie Jeanne Marguerite de Solas, en 1812.

Un fonds d’archives familial et seigneurial d’une grande richesse historique pour le Lodévois

Le fonds de la famille Peyrottes de Soubès est structuré en quatre parties : Inventaires des titres (192 J 1-5), Archives familiales (192 J 6-53), Archives seigneuriales et domaniales (192 J 54-111) et Pièces isolées sans rapport apparent avec le fonds (192 J 112).

La première partie, intitulée Inventaires des titres (192 J 1-5), rassemble cinq inventaires anciens du fonds d’archives familiales et seigneuriales datant des XVIe et XVIIe siècles. La rédaction des inventaires d’archives a obéi à plusieurs logiques : tantôt la famille Peyrottes a eu besoin, pour son usage personnel ou pour des raisons juridiques liées aux droits seigneuriaux, de dresser un inventaire de ses titres (192 J 1-2, 4), tantôt la rédaction de l’inventaire a été dictée par la nécessité de relever tous les titres et papiers de famille dans le cadre d’un inventaire après décès (en 1604, après l’assassinat de Gabriel de Peyrottes pour l’inventaire conservé sous la cote 192 J 3 ; en 1678, après le décès d’Henri II de Peyrottes pour celui conservé sous la cote 192 J 5). L’intérêt historique de ces documents est indéniable, puisqu’il permet de rendre compte de la richesse de ce fonds d’archives familiales depuis le XVIe siècle. Les inventaires permettent aussi, malheureusement, de constater que de nombreuses pièces se sont égarées et ont disparu depuis 1678. Archivistiquement, les inventaires renseignent également sur la manière dont les feudistes (juristes spécialisés dans le droit féodal) organisaient, structuraient, décrivaient et cotaient un fonds d’archives familiales aux XVIe et XVIIe siècles. Enfin, les inventaires rédigés postérieurement à un décès par un notaire intègrent, outre une description topographique des lieux, dans l’ordre des pièces, ainsi que la description des meubles et effets personnels, la description des malles d’archives et des actes qui y sont conservés (le fonds d’archives dans ce cas n’est pas ici structuré mais seulement décrit selon l’ordre de découverte des titres dans le coffre d’archives). Les inventaires après décès de 1604 et 1678 n’ont pas été réunis aux archives familiales car le détail des actes trouvés dans chaque coffre ou malle d’archives s’apparentait plus à un inventaire de titres (la mention de leur existence est toutefois rappelée dans l’instrument de recherche pour chaque personne concernée). (Fig. 5) (Fig. 6)

Inventaire des archives de Michel de Peyrottes (1507-1547)
Fig. 5 - Inventaire des archives de Michel de Peyrottes (1507-1547) (Arch. dép. Hérault, 192 J 1). Il faut noter l’utilisation en remploi d’un manuscrit médiéval pour couvrir l’inventaire ; cet inventaire est coté n°232 dans l’inventaire de 1678.
Inventaire des archives de Michel de Peyrottes (1507-1547)
Fig. 6 - Inventaire des archives de Michel de Peyrottes (1507-1547) (Arch. dép. Hérault, 192 J 1). Le système de cotation adopté repose sur les lettres de l’alphabet.

La seconde partie, constituée des Archives familiales (192 J 6-53), est organisée en trois sous-parties réunissant les archives personnelles et familiales de la famille Peyrottes, puis Peyrottes de Soubès (192 J 6-45), celles de ses familles alliées et de sa descendance (192 J 46­50), et enfin celles de trois autres familles seigneuriales de Soubès (familles Soubès, Feton et Roquefeuil, 192 J 51-53), probablement recueillies par la famille Peyrottes.

Pour les archives de la famille Peyrottes, le classement des documents a été effectué par génération, puis par couple. La numérotation des individus a été attribuée selon la génération (précisée en chiffres romains) et l’ordre de naissance dans chaque génération (précisé en lettres majuscules), VII.B signifiant ainsi, par exemple, septième génération, deuxième enfant. Les archives d’un couple sont en général constituées des éléments suivants : preuves de noblesse, archives généalogiques personnelles (actes de baptême et naissance, gestion de tutelle, études, contrat de mariage, dossier de décès et de succession), documents de gestion financière des biens et fortunes personnels (registres de comptabilité privée, quittances), archives professionnelles, contentieux et procédures. Le fonds familial permet l’étude de l’ascension sociale de la famille Peyrottes depuis le XVe siècle, puis de ses difficultés grandissantes à maintenir son rang aux XVIIIe et XIXe siècles. Il fournit également de nombreuses informations sur l’histoire du Lodévois durant ces cinq siècles, témoignant notamment des difficultés résultant des Guerres de Religion aux XVIe et XVIIe siècles (voir à ce sujet les dossiers relatifs à la mise en défense du château de Soubès, puis à son saccage dans les années 1580, 192 J 15) et de l’activité militaire des seigneurs de Soubès (le parcours militaire d’Henri I de Peyrottes dans les années 1620-1640 peut ainsi être suivi grâce son dossier, 192 J 19). La proximité familiale et les liens de parenté, au XVIIIe siècle, de la famille Peyrottes de Soubès avec le cardinal André Hercule de Fleury, principal ministre de Louis XV, transparaissent également dans la correspondance conservée dans le fonds familial (192 J 32). (Fig. 7)

Lettre de Charles IX adressée à l’évêque de Lodève lui demandant des subsides pour lutter contre les protestants (1568)
Fig. 7 - Lettre de Charles IX adressée à l’évêque de Lodève lui demandant des subsides pour lutter contre les protestants (1568) (Arch. dép. Hérault, 192 J 11).

Plusieurs dossiers, documents – et même objets méritent enfin d’être signalés pour leur intérêt, parfois anecdotique : une lettre de Charles IX adressée à l’évêque de Lodève en 1568 (192 J 11) ; une lettre circulaire de Pierre François Palloy, dit « Palloy patriote », entrepreneur de la démolition de la Bastille (signée de sa main) annonçant l’envoi dans chaque département d’un modèle réduit de la Bastille sculpté dans une pierre de la forteresse (10 octobre 1790, 192 J 35) ; 2 portefeuilles à soufflets, en cuir et carton (192 J 36), ayant appartenu à Henri Raymond I de Peyrottes de Soubès (1729-1808) ; des pamphlets politiques royalistes et antibonapartistes (1792-1814, 192 J 39) ; un dossier de correspondance suivie adressée à Raymond Auguste Bousquet, époux en secondes noces de Marie Anne Éléonore de Peyrottes de Soubès, par son fils Joseph Auguste Bousquet (1796-1852), servant comme garde dans la 14e compagnie du 9e escadron du 4e régiment des Gardes d’Honneur (1813-1814), relatant ses campagnes dans les armées napoléoniennes (192 J 41)… (Fig. 8)

Pamphlet royaliste et anti-bonapartiste d’Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès [vers 1820]
Fig. 8 - Pamphlet royaliste et anti-bonapartiste d’Henri Raymond II de Peyrottes de Soubès [vers 1820] (Arch. dép. Hérault, 192 J 39). Ce pamphlet permet une lecture au premier degré à la gloire de Napoléon Ier, en lisant l’intégralité du texte, ligne à ligne. En revanche, si la lecture est réalisée par moitié de texte (demi ligne par demi ligne), le pamphlet devient alors royaliste (à la gloire du duc d’Angoulême) et anti-bonapartiste.

Les dossiers relatifs aux familles alliées et à la descendance de la famille Peyrottes de Soubès constituent la deuxième sous-partie des archives familiales. Les dossiers familiaux ont été classés selon l’ordre chronologique d’alliance des familles avec la famille Peyrottes. Sont ainsi concernées les familles Falc (192 J 46), Carcassonne (192 J 47), Jaule (192 J 48), Bousquet (192 J 49), puis Ricard, Reboul et Doumergue (192 J 50). Parmi les dossiers intéressant à signaler, il faut mentionner celui consacré à la famille Carcassonne (192 J 47) : plusieurs pièces inédites permettent en effet de préciser la généalogie familiale (notamment au XVe siècle) de cette importante famille de marchands montpelliérains, qui possédait dans Montpellier un hôtel particulier aux plafonds peints richement ornés. L’article consacré à la famille Bousquet, de Villeneuve-lès-Béziers (192 J 49), comprend également un dossier concernant la transmission et la gestion du domaine de la Proudhoumette, à Maureilhan, de 1618 à 1787, ayant appartenu précédemment à la famille de Gineste. À titre tout à fait anecdotique, trois edelweiss séchées cueillies à Gap vers la fin du XIXe siècle sont à signaler (192 J 50). La troisième et dernière sous-partie des archives familiales rassemble enfin les documents relatifs à trois autres familles seigneuriales médiévales de Soubès, qui ne sont pas alliées à la famille Peyrottes de Soubès : familles Soubès (192 J 51), Feton (192 J 52) et Roquefeuil (192 J 53). Dans ces trois dossiers, outre une généalogie de la famille Soubès rédigée au XVIIe siècle (192 J 51), il s’agit essentiellement d’actes épars – originaux et copies – des XIVe-XVIe siècles.

Les Archives seigneuriales et domaniales, qui constituent la troisième partie du fonds, sont quant à elles structurées en trois ensembles : seigneuries (192 J 54-99), métairies (192 J 100-109), puis domaine et château de Grabels (192 J 110-111). (Fig. 9)

Registre de copies d’actes d’achat, échange et baux concernant les possessions de la famille Peyrottes (1586-1613)
Fig. 9 - Registre de copies d’actes d’achat, échange et baux concernant les possessions de la famille Peyrottes (1586-1613) (Arch. dép. Hérault, 192 J 56).

Les archives de seigneuries réunissent tout d’abord des documents généraux concernant plusieurs seigneuries (192 J 54-63). Il s’agit d’actes de propriété, de pièces de procédures, de copies de compoix et de reconnaissances féodales. Peut notamment être relevé, un livre sur parchemin regroupant les actes d’achat par Raymond de Peyrottes des seigneuries de Soubès et Aubaigues à l’évêque de Lodève, entre 1564 et 1566 (192 J 55). Viennent ensuite, classées par ordre alphabétique, les archives des différentes seigneuries (Soubès, Aubaigues, Cazilhac, Fozières, Laroque, Lauroux, Pégairolles et Poujols, 192 J 54-99), puis des métairies (Camp Rouch, L’Esperelle, La Vacquerie, La Vernède, Mas d’Audran, Mas de Vinas, Le Viala, 192 J 100-109). Comme la seigneurie de Soubès constitue le centre du pouvoir seigneurial des Peyrottes, ses archives sont classées en premier, avant les autres possessions. Les archives de la seigneurie de Soubès (192 J 64-83) sont en effet particulièrement riches. De nombreux titres de propriétés ont été conservés (192 J 64­66), résultant d’acquisitions, de transactions, de donations et de ventes de différents droits. Ils mettent en évidence le morcellement extrême du pouvoir seigneurial à Soubès avant la coseigneurie des familles Peyrottes et Carcassonne. Ce morcellement a notamment eu pour conséquence un long contentieux qui a opposé les deux familles et qui a produit de très nombreuses pièces de procédures sur des questions de primauté des droits seigneuriaux et honorifiques (192 J 68-71), du XVIe au XVIIIe siècle. Les relations avec la communauté sont la source de copies de compoix (192 J 74-77) et de documents sur l’exercice de la justice seigneuriale (192 J 78). Tandis que de nombreuses reconnaissances renseignent sur les droits féodaux (192 J 79-81), des baux et contrats d’afferme (192 J 83) illustrent la dimension économique de la seigneurie.

Les archives des autres seigneuries et métairies, moins riches, sont fréquemment composées de titres de propriété, pièces de contentieux et documents d’exploitation seigneuriale (192 J 84-109). Les contrats d’arrentement et d’affermage sont particulièrement nombreux témoignant de la volonté des seigneurs d’exploiter des terres qui constituent une précieuse source de revenus.

Enfin, les archives du domaine et château de Grabels, chronologiquement dernière possession des familles apparentées aux Peyrottes, clôturent la partie consacrée aux archives seigneuriales et domaniales (192 J 110-111).

La quatrième et dernière partie du fonds, intitulée Pièces isolées sans rapport apparent avec le fonds, réunit en un seul article (192 J 112) des documents familiaux et domaniaux épars qui n’ont pu être intégrés au fonds. (Fig. 10) (Fig. 11)

Publicité pour l’hôtel de l’Europe à Montpellier [fin XVIIIe siècle]
Fig. 10 - Publicité pour l’hôtel de l’Europe à Montpellier [fin XVIIIe siècle]
(Arch. dép. Hérault, 192 J 35).
Publicité pour le coiffeur et perruquier Bernard, de Montpellier [fin XVIIIe siècle]
Fig. 11 - Publicité pour le coiffeur et perruquier Bernard, de Montpellier
[fin XVIIIe siècle] (Arch. dép. Hérault, 192 J 35).

Les perspectives de recherches historiques sur le fonds de la famille Peyrottes de Soubès sont ainsi relativement vastes : il est possible de mener des recherches en histoire sociale (étude de l’ascension sociale de la famille sur plusieurs générations, conflit entre familles Peyrottes et Carcassonne), des recherches patrimoniales (châteaux de Soubès, Cazilhac, Grabels, ferme de Camp Rouch), des recherches en histoire économique (par l’étude des nombreuses métairies) et politique (étude des rapports entre les communautés et le pouvoir seigneurial, notamment). Le fonds de la famille Peyrottes de Soubès constitue ainsi pour le Lodévois un fonds d’archives familiales et seigneuriales tout à fait remarquable qui mérite désormais d’être exploité et mis en valeur par la recherche historique.

NOTES

1. Le fonds Peyrottes de Soubès a au moins été consulté en 1855 par l’érudit Jean-Ferdinand Rivez, avocat et notaire à Bédarieux, comme en attestent ses notes conservées aux Archives départementales sous la cote 11 F 377.

2. Les lettres de noblesse attribuées par Louis XII à André Peyrottes, conservées par ses descendants et donateurs du fonds d’archives, ont été numérisées par les Archives départementales de l’Hérault et sont accessibles en ligne :
https://archives-pierresvives.herault.fr/ark:/37279/vta1f77a6f1dcaa2020.

3. Une étude intitulée Monographie historique de la famille Latreilhe de Fozières, rédigée par Gabriel Bérard Latreille de Fozières (1851-1936) et dactylographiée par son petit-fils Arnaud de Fozières, permet l’étude détaillée de cette famille seigneuriale du Lodévois (un exemplaire est conservé sous la cote 11 F 416 aux Archives départementales de l’Hérault).

4. Liber instrumentorum memoralium, pièce LI, Archives municipales de Montpellier, AA 1.