Les monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier (1820-1888)

*Historien et numismate, ancien conservateur de la collection nationale de numismatique des Pays-Bas,
actuellement chercheur à l’Université de Leyde, a.pol@arch.leidenuniv.nl
où il s’occupe de l’inventaire et de l’interprétation (production et circulation) des monnaies d’or des VI-VIIèmes siècles
en bâtissant la base de données Corpus des Monnaies Mérovingiennes (CMM).

[ Texte intégral ]

[En 2010, une équipe de numismates : G. Gentric, A. Geiser-Margarot, S. Nieto-Pelletier, J.-C. Richard Ralite a publié le Catalogue des 183 monnaies antiques, ibériques et gauloises, de la collection Calixte Cavalier léguée à la Ville de Montpellier en 1888 1. Le professeur et médecin Calixte Cavalier (1820-1888) avait acquis la collection du montpelliérain Fortuné Marie Sauvadet (1812-1869), contrôleur des contributions directes et membre de la Société archéologique de Montpellier. Cette collection est souvent citée par F. Poey d’Avant dans ses Monnaies féodales de France parues en 1858-1862. Cavalier continua d’augmenter la collection originelle par de nombreuses acquisitions avec une prédilection pour les monnaies françaises. La collection venait d’être publiée par l’avocat Émile Bonnet en 1898, et le chapitre « Monnaies françaises » de ce catalogue présentait dix-huit monnaies mérovingiennes (sans illustrations) sous les numéros 372 à 389, accrues pour l’occasion de deux pièces burgondes antérieurement décrites parmi les monnaies byzantines (nos 316-317). M. Michel Dhénin, conservateur en chef au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque Nationale, fut sollicité pour en rédiger l’étude mais, après une première reconnaissance, décida de confier la publication définitive à M. Arent Pol, spécialiste de ces monnayages. Ainsi cet ensemble se trouvera-t-il à la disposition de tous les chercheurs et permettra-t-il aux monographies d’ateliers de disposer de nouveaux exemplaires. N.D.L.R.]

L’autorité centrale de l’Empire romain a disparu dans les provinces occidentales au cours du Ve siècle, mais pas son système monétaire. Les monnaies anciennes et récentes restaient en circulation et de nouveaux exemplaires continuaient d’être importés dans les nouveaux royaumes germaniques de l’Europe occidentale. Les Ostrogoths et plus tard les Lombards qui trouvaient place en Italie, les Suèves en Espagne, les Burgondes et Visigoths en France, les Francs en Belgique et Nord de la France, tous ces nouveaux arrivants formaient une couche superficielle qui transforme la société peu à peu, comme eux-mêmes étaient transformés par la société romaine ou romanisée dans laquelle ils sont tombés (après les influences de l’Empire déjà reçues dans les siècles passées). Dès les environs de 500, ces « peuples barbares » – et quelques-uns déjà bien avant – s’occupaient de produire des imitations de monnaies plus ou moins fiables selon des critères externes ou internes (dans une première phase, la qualité du métal était conservée pour frapper des monnaies presque d’or pur comme les Byzantins), et les inscrire aux noms des empereurs actuels. Mais après une certaine période – nous parlons maintenant de la situation dans la sphère d’influence des Francs (qui ont succédé aux Burgondes et Visigoths en France) – le titre d’or devint lentement plus faible : le style des dessins et la lisibilité des légendes ont dégénéré jusqu’à un niveau inférieur. Dès le commencement du dernier quart du Ve siècle, on observe des changements et des signes de restauration. On pourrait appliquer le terme de “réforme monétaire”, mais il ne s’agit pas d’une occasion unique et ultime mais, plutôt, d’un rassemblement de mesures séparées grosso modo effectuées en même temps. Aucun de ces changements n’a laissé de trace dans les sources écrites (conservées en petit nombre), mais on pourrait trouver une évidence de leur existence historique par la cohérence présente dans la production monétaire, c’est à dire des aspects tels que métal, valeur ou dénomination, type et légendes, poids et titre. Le roi est presqu’invisible – seulement environ 5% des monnaies portent son nom. Mais sans doute peut-on accepter sa ‘présence’ en raison de cette cohérence parmi les monnaies frappées dans au moins 800 ateliers différents et par au moins 1200 monétaires identifiés au cours du siècle entre environ 575 et 675. Vers cette dernière date la production des monnaies d’or est terminée en faveur de l‘argent, après la diminution systématique et continuelle de la proportion de l’or pendant une période de cent ans.

Calixte Cavalier (1820-1888)
Calixte Cavalier (1820-1888)

Dans cette esquisse superficielle, des émissions de moindre importance ne sont pas mentionnées. Il s’agit des très minces monnaies d’argent (argentei minuti) frappées surtout au Nord de la France dans le demi-siècle autour de 500, et des monnaies de bronze ou cuivre produites surtout à Marseille pendant le VIe siècle. Au contraire, le monnayage principal était celui des monnaies d’or, des solidi et tremisses (tremissis = 1/3 solidus). Après le milieu du VIe siècle, les solidi ont perdu leur signification et la production monétaire fut réalisée presque exclusivement en tremisses, sauf à Marseille et dans quelques petits ateliers des environs, où on a continué de frapper des solidi en bien grand nombre avec des tremisses. Sur les monnaies de ce groupe d’ateliers méridionaux – et de ce point de vue ils forment l’exception dans le royaume – presque toujours le nom du roi est indiqué dans la légende, avec indication de l’atelier seulement par abréviation de quelques caractères accostant la croix.

Mentionner le lieu de frappe et le monétaire dans les légendes sur la plupart des monnaies mérovingiennes, a eu sans doute un rôle dans la conservation du poids et de la qualité du métal monétaire. Mais curieusement la lisibilité des légendes était parfois fortement diminuée par la qualité médiocre de la gravure des coins et par la fabrication des flans trop courts (ou des coins trop grands, avec le même résultat pour la visibilité partielle des légendes). Le grand nombre de monétaires ne peut masquer que leur fonction et leur prestige social ou juridique sont difficiles ou même impossibles à estimer. S’agit-il de fonctionnaires de l’État qui supervisent la production des monnaies comme à l’époque romaine, ou sont-ils des entrepreneurs monétaires confirmés par l’autorité royale comme à l’époque médiévale et moderne ? Certainement il ne s’agit pas de graveurs de coin (parce qu’on trouve des mains de graveur différentes avec un seul monétaire) ou d’ouvriers qui frappent les pièces avec leurs marteaux, mais plutôt des spécialistes pour le procédé de raffinage et d’alliage des métaux et leur titre, comme des orfèvres. On imagine que dans certains lieux de la vallée du Rhône et dans les régions voisines, il y a des monétaires mentionnés parfois ensemble, parfois séparés. Il est également possible de penser à quelqu’un associé à la perception des impôts, un responsable pour la qualité du métal recueilli. Ces monétaires ne sont connus que par des monnaies : leurs noms ne figurent pas dans les sources écrites et nous n’avons pas la possibilité de dater leur période d’activité autrement que par des informations que les objets peuvent fournir (typologie, style, liaisons des coins, titre, présence dans les trésors peu nombreux).

L’identification des ateliers nous pose également des problèmes. La légende en latin fournit un nom simple qui nous laisse parfois plusieurs choix parce qu’un nom est ‘général’: le même nom topographique est appliqué plusieurs fois dans différents endroits : sur les monnaies, il manque toute extension souvent nécessaire pour l’identifier à un nom précis de lieu moderne. De nombreuses mentions portent une qualification comme civitas, castro, vicus, villa, portus et même burgo, curia, domo, portus, mallo, pons mais à l’exception de “grands lieux” ou de lieux modesties mais bien-connus ainsi que des attributions non-contestées, il reste un bien grand nombre de ‘non-confirmés’ ou même des ‘non-identifiés’. Ces circonstances nous confrontent avec une section du patrimoine parfois difficile à identifier et interpréter. Le monnayage franc est donc extrêmement diversifié et la collection municipale de Montpellier est une petite mais bonne illustration de cette condition : elle est capable de nous montrer plusieurs aspects spécifiques.

A l’exception de monnaies byzantines non comprises dans cette section du catalogue, il existe des monnaies des Burgondes qui toutes portent le nom de l’empereur byzantin, l’une sans et l’autre avec l’indication d’une autorité royale indépendante (n° 1-2). Leurs premières émissions datent d’environ 500 et cessent avec la prise du royaume en 534 par les Francs. Sans doute le monnayage est-il continué dans cette région d’une autre manière. Ailleurs, les Francs eux-mêmes ont probablement commencé de frapper des monnaies d’or en même temps que les Burgondes, donc aux environs de 500. Un nouvel élan semble être fourni par le départ des Visigoths de la France actuelle vers la Septimanie et l’Espagne après la bataille de Vouillé en 507 2. Pour les Francs cette première phase monétaire (appelée ‘pseudo-impériale’) a occupé l’essentiel du VIe siècle, ici représentée par seulement deux exemplaires tardifs (n° 3-4).

La deuxième phase du monnayage ‘national’ est représentée par 15 exemplaires (n° 5-18) originaires de sept ateliers différents accompagnés par deux ateliers non-identifiés. La production monétaire était bien dispersée dans le territoire franc, mais cette distribution n’apparaît pas dans la collection. Presque la moitié des pièces est frappée à Rodez (7 exemplaires : n° 10-16), les autres proviennent également des ateliers de la moitié méridionale de la France actuelle – l’exception est fournie par un tremissis imitatif au nom de Dorestat, frappé dans la périphérie septentrionale de l’empire franc, par des Frisons ou des Francs mêmes (n° 19). Une monnaie italienne n’appartient pas à la production mérovingienne, mais est frappée à l’époque, et peut-être a-t-elle circulé en France (n° 20). Enfin on remarque que les monnaies de la troisième phase du monnayage mérovingien, la période de la frappe des denarii d’argent, ne sont pas représentées dans la collection de la Médiathèque Emile Zola. Ici manque également toute référence à la frappe des monnaies par des Visigoths aux VIe-VIIe siècles, en France ou en Espagne, une activité si proche de Montpellier et dont les produits sont retrouvés pleinement aux alentours 3.

Série BURGONDE

N° 1

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série BURGONDE
Fig. 1 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série BURGONDE

Burgondes, tremissis ca. 500-507, émission royale mais secrète au nom de Anastasius (491-518) : type Belfort 5077, 5080-5082, 5106, 5110-5111.

— buste à droite, D N ANASTASIVS PP AV

— Victoire à droite avec palme et couronne, exergue, VICTORIA AVCSTORVM / COMOB

or – 1,42 g – 12-13 mm – 6 h

inv. 316 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 22 n° 316

La première monnaie burgonde ne porte pas un signe explicite pour l’attribution comme la suivante, mais elle est du type (‘Victoire à droite tenant palme et couronne’) et d’une gravure soignée, aspects qui donnent raison pour placer cette émission jusqu’avant l’an 507 (bataille de Vouillé).

N° 2

Fig. 2 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série BURGONDE

Burgondes, tremissis 524-527, émission discrètement royale de Gundomarus (524-534) au nom de Justinus I (518-527) : type Belfort 3137-3138, 5198, 5214-5219.

— buste à droite, D N IVSTINVS PP AVC

— Victoire à droite avec palme et couronne, étoile et monogramme (MAR), exergue, VICTORIA AVCCCA / COMOB

or – 1,44 g – 13-14 mm – 6 h

inv. 317 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 22 n° 317

Le monogramme MAR dans le champ a été sujet à de très différentes explications, mais depuis a trouvé sa propre place avec le GVB utilisé dès 507 par Gundobaldus (491- 516), le SI de Sigismundus (516-524) et le G également appliqué par Gundomarus lui-même.

Série FRANCS

N° 3

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 3 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 550-580, émission non-attribuable de type pseudo-impérial : type non répertorié.

— tête à droite, ITIOICVN-OTACIAVC

— Victoire de face avec couronne et croix (globe crucigère), VLIOCIN….NIA / •II•

or – 1,40 g – 15 mm – 6 h

inv. 389 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 32 n° 389

Cette monnaie est une copie des monnaies impériales, relativement soignée quant aux dessins, mais les inscriptions ne portent que des pseudo-légendes. Sur l’avers le nom de l’empereur est devenu illisible, seulement les dernières lettres AVC renvoient à des originaux. Le revers est de même nature : la légende VICTORIA AVGVSTORVM est rendue méconnaissable et dans l’exergue, l’indication ‘normale’ (CONOB) est simplifié en un ‘oNo’ pour la partie centrale.

N° 4

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 4 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 550-580, émission non-attribuable de type pseudo-impérial : type non répertorié.

— tête à droite, VIINVICT….IIISIII

— Victoire de face avec couronne et croix, ……NIIAIDAN / C. B ?

or – 1,03 g – 15 mm – 2 h

inv. 388 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 32 n° 388

Le ruban qui ferme le diadème derrière la tête est devenu détaché (plus qu’au numéro précédent) et coulé vers la légende. Ce type appelé « à la boucle perdue » est souvent attribué à l’ancien royaume de Bourgogne, mais probablement l’aire de frappe était plus grande et étendue à la plus grande partie de la France actuelle.

N° 5

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 5 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 600, Tholosa (Toulouse, dép. Haute-Garonne), monétaire Baudulfus : type Belfort 4338var, 6267var .

— tête à droite, ……LVSA CIV [= TOLVSA CIV ou TVLVSA CIV]

— croix sur globe, BAVDVLV M

or – 0,54 g – 9-10 mm – 9 h

inv. 384 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 384

Les légendes sont reconstituées à l’aide des autres exemplaires tolosains de même type, mais il s’agit d’une émission bien rare et donc la lecture est présentée avec une certaine réserve. Mais en même temps on signale que les légendes se terminent par des abréviations communes sur les monnaies de la phase ‘nationale’ : CIV pour civitas et M pour monetarius, donc des qualifications du lieu de frappe et du fonctionnaire.

Cet objet n’apparaît pas de façon normale par rapport à son aspect technique. Étant trop petite et certainement trop légère, la monnaie est probablement coupée et a par conséquent perdu environ 2 à 3mm de son diamètre et la moitié ou plus de son poids. Ce traitement “faussaire” – bien connu de beaucoup de monnaies d’or ou d’argent de toutes les époques de l’histoire monétaire – est très rarement documenté pour l’époque mérovingienne.

N° 6

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 6 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 600 ?, Cannaco (Les Cannacs, département de l’Aveyron), sans monétaire : type Belfort 1378-1379.

— tête à droite, CANACO

— croix sur globe, exergue, RVTENVS CIVI

or – 1,14 g – 10-11 mm – 4 h

inv. 383 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 383

Beaucoup de monnaies mérovingiennes avec nom de l’atelier sont difficile à attribuer à un lieu moderne pour diverses raisons. Une de ces raisons est la multitude des hypothèses, parce qu’un certain nom est applicable à plusieurs lieux, et sur les monnaies il manque l’indication supplémentaire qui est toujours utilisée à l’époque moderne.

Ici le nom de l’atelier est accompagné de l’indication du civitas Rutenorum et cette circonstance limite les possibilités. Le choix entre les lieux aveyronnais de Canac (comm. Durenque), Canac (comm. Campagnac), Cannac (comm. Onet-le-Château) et Les Cannacs (comm. Saint-Izaire) n’est pas facile – d’autres tels que Canhac (comm. Millau) ou Canac (commune de Murat-sur-Vèbre) sont à négliger pour des raisons linguistiques ou historiques (divisions administratives) – mais il semble que Les Cannacs soit le meilleur (Chambon 2001, p 371-372).

N° 7

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 7 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 610, Gavalorum (Javols, département de Lozère), sans monétaire : type Belfort 644-645var, 6033var, 6414var.

— buste à droite, GAV–ON (extérieur)

— calice, O–V ou mieux A–O inversé (pour alpha-omega ?)

or – 1,28 g – 11-12 mm – 9 h

inv. 373 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 373

La légende d’avers, fort curieuse, doit être regardée comme une version impropre du nom de lieu de frappe GAVALORVM comme mentionné sur plusieurs autres variétés de cet atelier. Dans le monnayage mérovingien ce type de revers est typique pour Javols et Banassac et très sporadiquement imité : seulement quelques exemples connus, à Chantilin, Chirac et Puy-en-Velay.

Belfort 6414 donne la description et l’illustration d’une monnaie de Javols de type voisin (calice sans anses), mais apparemment frappée sur un flan légèrement différent de celle conservée à Montpellier. Malgré cette différence, il peut s’agir de la même pièce, parce que l’autre mention est fondée sur une monnaie de la collection Sauvadet. Le dessin (provenant de l’album Barthélemy : 3273) pourrait être de moindre fiabilité et pour cette raison identifiable par la suite – certainement pour l’instant on ne trouve pas un autre candidat parmi les pièces connues qui pourrait être identifié avec le dessin Barthélemy.

N° 8

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 8 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 650, Bannaciaco (Banassac, dép. Lozère), sans monétaire : type Belfort 713-714, 721, 6023.

— buste à droite, BAN

— calice, exergue, GAVALETANO FIIT (VA en ligature)

or – 1,30 g – 14-15 mm – 12 h

inv. 372 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 372

Cette monnaie est un exemple de phénomène bien étonnant. Elle appartient au vaste ensemble frappé au lieu moderne de Banassac, aujourd’hui un lieu vraiment très modeste, mais à l’époque mérovingienne un des ateliers monétaires les plus productifs 4. Cette productivité pendant les deuxième et troisième quarts du VIIe siècle est probablement à lier avec l’installation de Childebert comme roi-cadet en Aquitaine dès 629, le moment d’accès au trône du roi Dagobert pour la totalité du royaume des Francs.

N° 9

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 9 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 640, Cabilonno (Chalon-sur-Saône, dép. Saône-et-Loire), monétaire Wintrio : type Belfort 1160, 1177-1178, 1185-1186, 1192-1193, 6701.

— buste à droite, CABILONNO FIT

— croix sur degrés avec des lettres (CA) dans un cercle, VVINTRIO MONT

or – 1,18 g – 11-12 mm – 12 h

inv. 374 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 374

D’après le nombre des monnaies connues maintenant, les ateliers de Marseille, Banassac et Chalon-sur-Saône étaient les plus productifs dans le royaume franc pendant toute la phase nationale 5. À Chalon presque 30 monétaires sont documentés et environ 450 monnaies connues aujourd’hui, parmi lesquelles celles au nom du monétaire Wintrio (actif au 2e quart du siècle) se trouvent plus de 150 fois.

N° 10

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 10 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 625, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Aienius : type Belfort 3878.

— buste à droite, AIENIVS M

— monogramme arcaturé (RVTENVS)

or – 1,21 g – 12 mm – 7 h

inv. 382 : <1879 Bouillet 18... Cavalier 1888 BM

Robert (1879) p 59 n° 2 pl VIII.21* = Belfort (1892-1895)

n° 3873* = Bonnet (1898) p 31 n° 382

N° 11

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 11 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 630, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Vendemius : type Belfort 3878, 3884, 3887.

— buste à droite avec trois points devant et arrière, sans légende

— monogramme (RVTENE)… END… [= VENDIMIVS]

or – 1,27 g – 11-12 mm – 12 h

inv. 379 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 379

La légende est à compléter à l’aide de quelques autres exemplaires de ce type. La monnaie conservée à Montpellier est frappée avec les mêmes coins qu’une pièce conservée à Saint-Petersbourg 6. Cette monnaie de Vendemius compte parmi les plus anciennes frappées avec son nom.

Cette monnaie de Vendemius compte parmi les plus anciennes frappées avec son nom. Ce monétaire prolifique, qui apparemment travaillait sur plusieurs décennies, était actif après Maretomos, Ursomere et Lopus, commençait comme contemporain d’Aienius, Avitus et Anciolutrio, continuait avec Bonulfus et possiblement Evancius, et finissait son activité avec Teudegusolus, Deorerius et Aspasius ; ce dernier continuait (après la fin d’activité de Vendemius) avec Rosolus et tous les deux sont accompagnés à l’extrême fin du monnayage d’or (très bas titre) par Lopolus, Ursolenus, Jogoneus et Saturninus. Cette longue liste de noms masque le fait que la moitié des monnaies de Rodez connues à ce moment sont frappées par Vendemius, la plupart des autres noms sont documentés par un ou quelques exemplaires seulement, à l’exception de Rosolus dont quelques dizaines de monnaies sont conservées – mais qui ne représentent qu’un tiers des pièces connus de Vendemius. Cette impression d’une activité d’atelier monétaire bien courte, montre également que la production de Rodez était au plus haut durant les deuxième et troisième quarts du VIIe siècle – situation bien en accord avec beaucoup d’autres ateliers.

N° 12

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 12 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 640, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Vendemius : type Belfort 3890-3891, 3896.

— tête à droite avec losange, sans légende

— monogramme (RVTENVS), VENDEMIVS MNET (DE et NET en ligature)

or – 1,27 g – 13 mm – 12 h

inv. 376 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 376

N° 13

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 13 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 650, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Vendemius : type Belfort 3913.

— tête à droite avec palme, sans légende

— monogramme (RVTENVS), VENDEMIVS M

or – 1,27 g – 15 mm – 12 h

inv. 378 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 378

N° 14

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 14 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 650-660, Rutenus (Rodez, dép Aveyron), monétaire Deorerius : type Belfort 3929.

— tête à droite avec losange, sans légende

— monogramme (RVTENVS), DEORERIVS MON

or – 1,21 g – 12-13 mm – 4 h

inv. 377 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 377

La légende moins soignée de cette monnaie n’est pas facilement lisible, mais enfin elle ne laisse aucun doute qu’il s’agit d’un confrère tardif de Vendemius. Le seul autre exemplaire connu de ce Deorerius est d’un titre bien modeste, trouvé à la fameuse plage de Dombourg et conservé à Middelburg (Pays-Bas). Belfort mentionne une exemplaire au Cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de France, mais c’est une erreur : dans la vaste collection de Paris, ce monétaire n’est pas représenté.

N° 15

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 15 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 650-675, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Rosolus : type Belfort 3917-3918.

— tête à droite avec palme, sans légende

— monogramme (RVTENVS), ROSOLVS MN

or – 1,27 g – 13-14 mm – 3 h

inv. 381 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 381

N° 16

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 16 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca. 665-675, Rutenus (Rodez, dép. Aveyron), monétaire Lopolus : type Belfort 3933var, 6407var.

— tête à droite, sans légende

— monogramme (RVTENVS), …POLVS M

or – 1,26 g – 13-14 mm – 6 h

inv. 380 : Dassy 1869 Cavalier 1888 BM

Rollin & Feuardent (5-3-1869 : Dassy) n° 226 = Bonnet (1898) p 31 n° 380

Le seul autre exemplaire connu de ce monétaire montre une sorte de palme surmontée d’une croisette devant le visage ; sur la monnaie conservée à Montpellier, ce détail n’est pas visible parce que hors flan, cependant il est possible qu’il s’agisse d’une variété sans palme croisetée ou même des points à la place.

N° 17

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 17 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis imitatif ca. 600-650 ?, atelier non identifié et non-attribuable, monétaire illisible : type non répertorié.

— tête à droite, NANVC

— croix sur globe (dans arche), rayes des points venant du cœur de la croix, VCWIAIVLI

or – 1,16 g – 11 mm – 12 h

inv. 384 : <1860 Lindsay 1867 Cavalier 1888 BM

Lindsay (1860) p 4 n° 3 pl 3.3* = Sotheby (14-8-1867: Lindsay) n° 780.iii = Bonnet (1898) p 31 n° 385

Les pseudo-légendes n’offrent aucune possibilité de reconstruire celle du prototype, et il n’y a pas de parallèles exacts pour le dessin. Cette monnaie unique était néanmoins publiée dans une collection irlandaise du XIXe siècle, malheureusement sans provenance archéologique ni même mention du lieu de trouvaille.

N° 18

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS
Fig. 18 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCS

Francs, tremissis ca 580-675, atelier non-identifié et non attribuable, monétaire incertain : type non-répertorié.

— tête à droite, ASVDEMO (?)

— croix sur globe avec quatre points, ASVVCIDON (?)

or – 1,18 g – 13 mm – 1 h

inv. 386 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 386

Cette monnaie avec tête grossière et des légendes illisibles pourrait être une imitation sur laquelle le nom du monétaire est répété sur l’avers et le revers. À l’avers il y a plusieurs points devant le visage, détail se répétant dans la légende : A•S•VD•EMO.

Série FRANCO-FRISONNE

N° 19

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCO-FRISONNE
Fig. 19 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série FRANCO-FRISONNE

Francs ou Frisons, tremissis imitatif ca. 650-660, type pseudo-Madelinus : type Belfort 1763var.

— buste à droite, DORESTAT FIT [= DORESTATI FIT dégénéré]

— croix sur globe, NADELINVS N [= MADELINVS M dégénéré]

or – 1,18 g – 13-14 mm – 11 h

inv. 375 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 30 n° 375

Le prototype de cette monnaie est frappé en bien grand nombre à l’atelier franc de Dorestat, situé plus ou moins à la frontière (toujours fluctuante) avec les Frisons au VIIe siècle. Les monnaies mérovingiennes forment les premiers témoignages d’existence de ce port de très haute importance à l’époque carolingienne – les sources écrites pré-carolingiennes ne le mentionnent pas ; Dorestat est également presqu’invisible archéologiquement parce que le Rhin l’a détruit graduellement par son cours changeant au fil du temps.

Les imitations, frappées au long de plusieurs étapes de dégénérescence stylistique et avec un titre toujours diminuant, sont connues en nombre extrêmement élevé : presque 600 exemplaires, la plupart retrouvés dans les contrées septentrionales, mais il est impossible de discerner celles d’origines ‘frisonnes’ ou ‘franques’. Il existe quelques exemplaires trouvés en France, et cette pièce pourrait être également d’une telle source mais rien n’est connu de sa provenance.

Série LOMBARDE

N° 20

Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série LOMBARDE
Fig. 20 - Monnaies mérovingiennes de la collection Calixte Cavalier Série LOMBARDE

Lombards, tremissis ca. 620-640, émission au nom de l’empereur byzantin Heraclius (610-641), attribuable à Toscane en Italie : type cf. Wroth pl XVIII.20-31 et XIX.1-13, cf. Arslan 80-82.

— tête à droite, UHNCRAI-IIVSPRAV [= D N HERACLIUS PP AV dégénéré]

— croix, VIITORIA AVIVSTOV / COHOR

or – 1,43 g – 15 mm – 11 h

inv. 387 : Cavalier 1888 BM

Bonnet (1898) p 31 n° 387

Cette monnaie n’appartient pas à la série normalement appelée ‘mérovingienne’, mais elle est de la même époque et antérieurement considérée comme imitation franque au nom de l’empereur Justinien. La légende d’avers pourrait être reconstituée et représentée selon des manières différentes parce que l’orthographe n’est pas très claire, mais on trouve ce type de croix seulement sur des imitations langobardes de la région toscane pendant le règne d’Heraclius : Grierson & Blackburn (1986) p 63 et p. 456-457 n°s 307-310 7.

BIBLIOGRAPHIE

Source manuscrite :

Barthélemy, A. de, Recueil de dessins de monnaies mérovingiennes, données au Cabinet des Médailles par M. Anatole de Barthelemy, membre de l’Institut, en 1894 [1894], manuscrit : Bibliothèque nationale de France (Monnaies, Médailles et Antiques), Paris : Rés. Ms. 15004 BAR folio 1-3.

Sources imprimées :

a) livres, articles :

Arslan, E., Le monete di Ostrogoti, Longobardi e Vandali. Catalogo delle Civiche Raccolte Numismatiche di Milano (Milano 1978).

Belfort, A. de, Description générale des monnaies mérovingiennes (Paris 1892-1895).

Bonnet, E., Bibliothèque de la Ville de Montpellier. Monnaies, médailles, jetons et sceaux légués par le dr C. Cavalier. Catalogue (Montpellier 1898).

Chambon, J. P., « L’identification des noms d’ateliers monétaires mérovingiens (Arvernie et entours) : points de vue de linguiste », Revue Numismatique 157 (2001) 347-405.

Grierson, P. & Blackburn, M., Medieval European coinage, I : The Early Middle Ages, 5th-10th centuries (Cambridge 1986).

Lafaurie, J., « Monnaies mérovingiennes du Gévaudan », Le Club Français de la Médaille 10.41 (1973) 126-133.

Lafaurie, J., « VVic in Pontio : les monnaies mérovingiennes de V. Vicus », Revue Numismatique 151 (1996) 181-239.

Lafaurie, J. & Pilet-Lemière, J., Monnaies du Haut Moyen âge découvertes en France, Ve-VIIIe siècle (Paris 2003).

Lindsay, J., Notices of remarkable Greek, Roman, Anglo Saxon and other medieval coins, in the cabinet of the author (Cork 1860).

Pol, A., « Mons 1820 revisited. An enquiry into the composition and nature of a hoard of the Merovingian period from Belgium », Bulletin du Cercle d’Études Numismatiques 53.2 (2016) 34-51.

Wroth, W. W., Catalogue of the coins of the Vandals, Ostrogoths and Lombards and of the empires of Thessalonica, Nicaea and Trebizond in the British Museum (London 1911).

a) catalogue de vente :

Rollin & Feuardent (Paris, 5-3-1869 : collection Dassy).

NOTES

1. J.-C.Richard Ralite, A. Geiser-Margarot, G. Gentric, S. Nieto-Pelletier, « Monnaies antiques (ibériques, massaliètes, celtiques) de la collection Cavalier de la Médiathèque Centrale d’Agglomération Emile Zola de Montpellier », Archéologie en Languedoc 1 (2009-2010) 311-355.

2. L’expansion des Francs et Burgondes était un effort combiné, et l’argument numismatique est fondé sur un parallélisme : c’est sur les monnaies burgondes au nom de l’empereur Anastasius (491-518) et monogramme du roi Gundobaldus (473-516), que les premiers monogrammes royaux apparaissent et se continuent sous les empereurs/rois suivants.

3. Lafaurie & Pilet-Lemière (2003) p 150-153 mentionnent 7 pièces visigothiques trouvées à Lézignan (2x), Montpellier, Nissan, Pouzolles, Quarante et Villeneuve parmi 10 autres trouvailles isolées des monnaies d’or des VIe-VIIe siècles dans le département de l’Hérault, et une dans le trésor de Roujan (presque totalement conservé au Musée de Lattes).

4. Au milieu du VIIe siècle, comme indiqué déjà par Lafaurie (1973) et Lafaurie (1996) p. 182.

5. Dans la totalité d’environ 9 000 monnaies franques de la phase nationale regroupées dans la base de données Corpus des Monnaies Mérovingiennes, les trois ateliers sont représentés respectivement par environ 430, 450 et 500 monnaies.

6. Provenant du trésor de Mons 1820 : Pol (2016) p 40 n° 9 fig. 10.

7. Nous remercions M. G. Gudin de Vallerin, directeur de la Médiathèque Émile Zola, d’avoir bien voulu autoriser cette étude, M. M. Dhénin de nous avoir confié le dossier de la publication, Mme G. Gentric pour sa mise à disposition des photos, et M. J.-C. Richard Ralite, directeur de recherche (er) au CNRS, pour sa collaboration active.