Les établissements Fouga
à la lumière des archives des dommages de guerre

Construction et reconstruction d’ateliers modèles

* Chercheur, chargée de l’inventaire du patrimoine industriel, Région Languedoc-Roussillon,
Service du Patrimoine régional, Secteur de l’Inventaire général du patrimoine culturel
(caliste.lisa@cr-languedocroussillon.fr)

En 1948, 2240 ouvriers travaillent dans les ateliers biterrois de la Plaine Saint-Pierre. Ce sont les ateliers des établissements Fouga et Cie, entreprise née au lendemain de la Première Guerre mondiale et qui est devenue un des employeurs les plus importants de l’Hérault. Dès les années 1920, elle a concentré une importante main-d’œuvre dans un département où le tissu industriel est, à l’image du territoire national, avant tout fondé sur de petites ou moyennes entreprises. Elle a suscité l’intérêt de ses contemporains par son histoire sociale riche et tumultueuse : en 1936 puis en 1938, les employés dont 1 450 métallurgistes se mettent en grève ; en septembre 1944, un Comité de Libération s’impose à la tête de l’usine obligeant les membres du conseil d’administration à comparaître devant une commission d’épuration. Perçue comme singulière, l’histoire de l’entreprise a été compilée par les anciens employés, puis retracée par Raoul Balso, en 2002, dans une communication réalisée dans le cadre du 10e colloque de l’Association pour l’histoire des chemins de fer qui a regroupé les spécialistes autour de la question des ateliers et des dépôts du matériel ferroviaire 1. Plus récemment, Philippe Marassé a consacré un article aux établissements Fouga, éclairant notamment la variété de leurs productions, de la réparation des locomotives à vapeur à la fabrication de l’avion à réaction Fouga Magister, élaboré sur le site d’Aire-sur-Adour (Landes) 2. Si l’histoire des établissements Fouga a été retracée, l’architecture de leur usine biterroise n’a pas focalisé l’attention. Pourtant, l’inventaire du patrimoine industriel, mené sur le département de l’Hérault depuis 2010 3, permet aujourd’hui de souligner l’originalité des constructions.

De plus, la récente mise à disposition des fonds des dommages de guerre par les Archives départementales de l’Hérault offre de nombreux et rares documents, en particulier iconographiques. S’il est important de retracer le contexte qui a donné naissance à un ensemble bâti de près de 40 000 m² couverts et d’énoncer les caractéristiques des dossiers des dommages de guerre, cet article s’attache avant tout à présenter des documents d’archives inédits qui éclairent à la fois la construction et la reconstruction des ateliers, transposition spatiale d’un système de production.

Un contexte favorable pour l’implantation d’ateliers de réparation du matériel ferroviaire

Un paysage industriel biterrois dominé par la vigne et par le rail

Dans l’Hérault, comme ailleurs en France, les premières voies ferrées sont d’abord des moyens de circulation marchande et sont envisagées, dès leur conception, comme un « prolongement de la voie d’eau » 4. Dès les années 1830, la fonction de ce nouveau mode de transport consiste, le plus souvent, à désenclaver un bassin houiller en amenant le charbon à un axe fluvial 5. En Languedoc, le canal du Midi apparaît comme le débouché incontournable des centres miniers cévenols car il permet d’atteindre le marché méditerranéen via Sète et le marché atlantique via Bordeaux. Dans une lettre émise par la compagnie minière Usquin en 1845, cette dernière dénonce le manque de « voies de communication rapides et économiques » dans le département héraultais, alors devancé par son voisin gardois : « Les mines de La Grand Combe, favorisées dans leur développement par l’établissement des chemins de fer de Beaucaire et de Montpellier à Cette, font arriver le charbon par le canal de Beaucaire, à peu de frais, sur le canal du Midi, où elles nous rendront bientôt impossible, sur les marchés de Cette, Agde, Béziers, Narbonne etc. la lutte que nous soutenons si péniblement en ce moment, n’ayant à notre disposition que des routes ordinaires, très mal entretenues » 6. Il faut en effet attendre 1858 pour que soit mise en service la ligne reliant le bassin houiller de Graissessac à Béziers et son port dit Le Port Neuf.

Le réseau ferré se densifiant, la voie d’eau est rapidement supplantée par le transport ferroviaire, en particulier pour l’acheminement des pondéreux comme le charbon ainsi que pour celui des alcools. Au cours des années 1850, la ligne Montpellier-Sète, première voie ferrée du Midi inaugurée en 1839, est intégrée au groupe Talabot lors de la formation de la Compagnie de Lyon à la Méditerranée, future Paris-Lyon-Méditerranée 7. En 1857, la ligne Bordeaux-Sète est mise en service par les frères Pereire, à la tête de la Compagnie du Chemin de fer du Midi 8. Cette dernière reprend la gestion de la ligne Graissessac-Béziers dès 1865. Elle y gagne un approvisionnement facile en charbon ainsi que le monopole du transport de vin du Languedoc vers Paris face à sa concurrente la Compagnie Paris-Lyon-Méditerranée. Dans ce but, la Compagnie du Chemin de fer du Midi poursuit la construction de la ligne des Causses (Béziers-Neussargues) avec la mise en service, en 1872, d’un tronçon jusqu’au Bousquet d’Orb, puis en 1874, jusqu’à Millau 9. L’ouverture complète de la ligne Béziers-Neussargues, longue de 277 kilomètres, est effective en 1888, et dessert Paris à partir de 1895. Dans le nouvel équilibre établi par les liaisons ferroviaires, Sète, mais également Béziers, sont favorisées, au détriment de Montpellier. Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, le réseau ferré s’est en effet ramifié autour de Béziers : à la ligne des Causses rejoignant la transversale Bordeaux-Sète, s’ajoute le déploiement de la ligne d’intérêt local Béziers Nord-Saint-Chinian entre 1870 et 1887 10.

En structurant le territoire et en construisant les bases d’un marché national, le chemin de fer permet de diffuser, plus loin et à moindre coût, les produits languedociens. Face à une demande en augmentation, en lien avec la hausse de la population française et l’industrialisation du territoire, la viticulture profite de ce dynamisme. Ainsi, l’accroissement du vignoble languedocien s’accélère en particulier dans l’Hérault où la superficie des surfaces dédiées à la vigne passe de 63 650 ha en 1788, à 73 000 en 1816, 104 464 en 1838 et 213 899 en 1875 11. Parallèlement, la production de vin progresse : 1 158 000 hl sont récoltés en 1816, 9 423 193 en 1875 12. Les industriels placent alors leurs capitaux dans ce vignoble qui ne cesse d’augmenter 13. Grâce aux infrastructures aménagées à partir du milieu du XIXe siècle, Béziers renforce son rôle dans le commerce des vins et prend le titre de « capitale du vin » 14.

Selon les auteurs de l’ouvrage collectif Histoire de Béziers, l’alliance entre la ville et la viticulture est si étroite « qu’elle résiste aux crises, dissimule les autres activités, mêmes [sic] industrielles et, au temps des difficultés, bloque les possibilités d’évolution » 15. Toutefois, Béziers n’a pas été seulement une ville vivant de la vigne et du commerce du vin. Il est indéniable que la viticulture a engendré toute une économie en permettant la création de nombreuses entreprises dans des filières connexes. Les usines de construction mécanique se multiplient et les ateliers de travail du bois tournent leur production vers la fabrication de futailles et de foudres. Dans ce contexte, le brevet, déposé par Charles Monnin en 1895, marque les débuts d’une innovation majeure pour le matériel ferroviaire et le transport du vin 16. La généralisation du wagon-foudre, ce wagon-plat à deux essieux, comportant un ou deux foudres en bois, permet alors au transport ferré de s’imposer face à la voie d’eau. Tandis que le Port Neuf continue de recevoir le bois nécessaire à la tonnellerie et le soufre pour le traitement de la vigne 17, la gare de Béziers est largement occupée par ces wagons-réservoirs pour lesquels on aménage des quais de chargement (fig. 1).

Gare des marchandises de Béziers au début du XXe siècle
Fig. 1 - Gare des marchandises de Béziers au début du XXe siècle
(collection particulière).

La réparation du matériel ferroviaire à Béziers et la création de la société Fouga

L’ensemble du matériel ferroviaire détenu par les négociants, les loueurs et l’administration nécessite entretien et réparation. Comme l’ont souligné Raoul Balso puis Philippe Marassé, c’est le « développement d’un important dépôt-atelier, l’un des plus anciens du réseau du Midi, qui ancra dans notre cité les activités liées à l’entretien et à la réparation du matériel roulant » 18. Au milieu du XIXe siècle, le dépôt de Béziers se compose d’une rotonde et d’un atelier pour les locomotives et les wagons. La cité devenue un véritable nœud ferroviaire, ce dépôt est rapidement agrandi avec la construction de deux grandes remises de douze voies pour abriter de nouveaux ateliers 19. À la suite des grandes grèves de 1919-1920, certaines compagnies dont la Compagnie du Midi décident de fermer leurs ateliers de maintenance et de sous-traiter les opérations de réparation à des entreprises créées pour l’occasion. C’est le cas à Saint-Pierre-des-Corps, à proximité de Tours, où la Compagnie du Paris-Orléans renvoie plus de 2 000 ouvriers, réembauchés, à l’exception des syndicalistes, par la Compagnie générale de construction et d’entretien du matériel (CGCEM) nouvellement créée 20. La Compagnie du Midi suscite, quant-à-elle, la création d’une société anonyme qu’elle confie à Gaston Fouga, ingénieur des Arts et Métiers, entré au service de la traction de la Compagnie dès 1903 où il occupe successivement les postes de chauffeur, mécanicien, chef-mécanicien, sous-chef puis chef du dépôt de Béziers 21. La société des établissements Fouga et Cie est fondée le 6 décembre 1919. Portée par des capitalistes locaux, la création de cette entreprise est, en grande partie, liée au développement économique biterrois généré par la vigne.

Ainsi, les capitaux mobilisés proviennent, pour la majorité, de la région : 190 des 218 souscripteurs résident dans l’Hérault dont 105 à Béziers et 35 à Montpellier 22. Comme l’a relevé Philippe Marassé, parmi les souscripteurs se trouvent une trentaine de négociants en vin. L’un d’entre eux, Clovis Salasc, basé à Clermont-l’Hérault, est désigné comme secrétaire lors de la première assemblée générale de la société 23. Parmi les administrateurs, nous retrouvons également Robert de Chassey, à la tête des distilleries Bresson à Béziers.

Selon ses statuts, la société des établissements Fouga et Cie a pour objet la construction, l’entretien et la réparation de tous objets mécaniques et notamment du matériel de chemins de fer, voitures, camions, moteurs 24. Dans les premiers mois, l’entreprise ne s’occupe que de la réparation des wagons de marchandises de la Compagnie du Midi, installée dans des ateliers entre les voies de triage du Capiscol et le canal du Midi 25. Elle se spécialise rapidement dans l’entretien et la réparation de matériels roulants, que ce soit les wagons de marchandises, les voitures de 2e et 3e classes, les voitures-restaurants, les voitures-lits et les locomotives. Elle obtient ses principaux contrats auprès de la Compagnie du Midi et de la Compagnie Internationale des Wagons-Lits, puis auprès de la SNCF à partir de 1938. Dès les années 1920, les ateliers sont installés de part et d’autre du canal du Midi, reliés par une voie Decauville empruntant un pont-levant métallique (fig. 2).

Pont-levant sur le canal du Midi, reliant les ateliers nord aux ateliers sud
Fig. 2 - Pont-levant sur le canal du Midi, reliant les ateliers nord aux ateliers sud (Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

Les « ateliers nord » sont destinés aux voitures en bois et wagons, dont les wagons-foudres (fig. 3), tandis que les « ateliers sud » sont établis pour la réparation des locomotives et tenders (fig. 15). Dans le projet initial, l’usine est conçue pour réparer 100 locomotives et tenders et 6 000 wagons par an 26. À la fin des années 1920, employant près de 2 000 ouvriers, elle livre en moyenne 15 locomotives à vapeur par mois. À la même époque, les ateliers de voitures et de wagons traitent, en réparation et en reconstruction, une moyenne annuelle de 2 500 véhicules et procèdent également à la révision des wagons-réservoirs de propriétaires privés dont ceux des établissements Boissières de Colombiers 27. C’est alors une entreprise contribuant « heureusement à la défense et à la prospérité de l’Industrie française », « ayant pu obtenir, en dehors des travaux concernant la Cie du Midi, de nombreuses commandes pour diverses administrations publiques, des industriels et des particuliers » 28 dont fait l’éloge Léon Baylet, député de l’Hérault, en 1934.

Wagons-foudres sur les faisceaux de voies des ateliers nord
Fig. 3 - Wagons-foudres sur les faisceaux de voies
des ateliers nord
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

Le fonds des dommages de guerre et les dossiers Fouga

Le bombardement de l’usine Fouga

Le 5 juillet 1944, 76 bombes de l’aviation alliée atteignent les établissements Fouga (fig. 4). « Ce bombardement visait particulièrement la gare et a débordé sur les usines dont les voies pouvaient sembler, à distance, faire partie de la gare » 29. Il est également possible que les établissements Fouga aient été une cible stratégique : l’entreprise fournit du matériel aux autorités françaises et allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale, notamment des boulangeries de campagne 30. Dans un rapport sur les dommages subis par les établissements Fouga, l’expert, « habitant la ville de Béziers » a pu constater « au lendemain du sinistre l’importance des dégâts subis par l’Usine des Établissements Fouga et Cie » 31. Deux bâtiments sont particulièrement touchés, le bâtiment G 32, celui du montage des chaudières (fig. 5) et le bâtiment J, celui de la petite chaudronnerie (fig. 6)33.

Bombe non éclatée devant le poste d’acétylène des ateliers sud
Fig. 4 - Bombe non éclatée devant le poste d’acétylène des ateliers sud
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).
Ateliers sud, intérieur du bâtiment G (montage des chaudières) dont les poutres des chemins de roulement, la toiture, le sol ainsi que les panneaux briquetés des murs latéraux ont été touchés par trois bombes
Fig. 5 - Ateliers sud, intérieur du bâtiment G (montage des chaudières) dont les poutres des chemins de roulement, la toiture, le sol ainsi que les panneaux briquetés des murs latéraux ont été touchés par trois bombes (Arch. dép. Hérault 36W869, auteur inconnu).
Ateliers sud, intérieur du bâtiment J (petite chaudronnerie) détruit par deux bombes
Fig. 6 - Ateliers sud, intérieur du bâtiment J (petite chaudronnerie) détruit par deux bombes
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

Ce dernier a été détruit sur une longueur de 42 mètres. Sa toiture s’est effondrée, détruisant un pont roulant de 8 tonnes et ensevelissant les machines et les installations. Les bâtiments A’ (bureaux administratifs), O’ (magasin), L (bureaux d’ateliers) et P (fabrications de guerre) subissent, eux aussi, d’importants dégâts. Sur l’ensemble du site, les vitres, les châssis vitrés, les portes, certains panneaux briquetés et les rideaux métalliques sont brisés. Les 3 000 mètres de voies ferrées desservant les différents ateliers (fig. 7), les lignes électriques et les conduites d’eau, d’air comprimé, d’acétylène et de vapeur sont en partie coupées.

Ateliers sud, plaque tournante et voie étroite devant le bâtiment I des machines-outils
Fig. 7 - Ateliers sud, plaque tournante et voie étroite devant le bâtiment I des machines-outils
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).
Ateliers nord après le bombardement
Fig. 8 - Ateliers nord après le bombardement
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

De l’autre côté du canal du Midi, les ateliers nord, au plus près du faisceau de voies de la gare, sont particulièrement touchés : 60 bombes, sur les 76 larguées au total, sont tombées sur le site nord ou à proximité immédiate. De plus, le sinistre y est amplifié par les incendies des constructions en bois, déclenchés par les explosions (fig. 8). C’est ainsi qu’a totalement disparu l’atelier des foudriers.

Le 15 juillet 1944, deux déclarations de sinistre sont établies par les établissements Fouga, l’une pour les ateliers nord, l’autre pour les ateliers sud 34. Par décision du 28 juillet 1944, le secrétaire d’État à la Production Industrielle et aux Communications donne l’autorisation de principe de reconstruction des usines Fouga. Le 16 février 1946, la sous-direction des questions industrielles et commerciales, au Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme, accepte la reconstitution de l’usine de Béziers.

Composition des dossiers de dommages de guerre

Dans le cadre de la loi du 28 octobre 1946, instaurant la procédure pour l’indemnisation des préjudices subis lors du conflit, la société Fouga formule une demande au Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme afin d’obtenir des indemnités pour la reconstruction des bâtiments endommagés. Rapports, descriptions, plans et factures sont annexés au dossier des dommages de guerre. Source riche d’informations, il convient d’en présenter la nature et le contenu 35. La composition des dossiers de dommages de guerre est toujours établie selon le même ordonnancement mais peut varier en taille et en richesse documentaire en fonction de l’importance du bien détruit ou endommagé. Dans chaque dossier, on retrouve quatre sous-parties comprenant un sous-dossier administratif, un sous-dossier relatif à l’immeuble, un sous-dossier financier ainsi qu’un sous-dossier contenant les correspondances.

Le sous-dossier administratif regroupe le formulaire de dommages causés aux biens par les troupes allemandes d’occupation, le procès-verbal de constat de destruction, les fiches de renseignements administratifs sur les propriétaires dont l’état des droits de propriété du sinistré, l’état descriptif du ou des bâtiment(s) détruit(s), l’extrait de la matrice cadastrale ou extrait des rôles des Contributions Directes, le certificat négatif individuel d’inscription aux hypothèques, les témoignages de bonne foi, le contrôle administratif et financier, la décision d’abattement pour vétusté, la demande d’indemnité de reconstitution ainsi que la demande de participation financière de l’État émanant du Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme. Dans le formulaire de dommages, les victimes exposent parfois les circonstances du sinistre.

Le sous-dossier de l’immeuble fournit l’état descriptif du bien sinistré et de ses dépendances, le devis estimatif de la valeur du bien, le devis de reconstitution à l’identique du bien, les plans et parfois des photographies du bien détruit ou endommagé.

Le sous-dossier de reconstruction contient le permis de construire, le devis estimatif des travaux, le devis descriptif, les plans du bâtiment, coupes, façades et plan de situation, les photographies du bâtiment, les factures des différents corps de métier, le procès-verbal de réception définitive, la déclaration d’achèvement des travaux, la demande de règlement de l’indemnité de reconstitution, la feuille de calcul des honoraires de l’architecte et la situation récapitulative des décomptes.

Dans le sous-dossier financier nous trouvons la notification d’indemnité, la décision portant évaluation définitive d’indemnité, les décisions d’engagements de fonds et les réquisitions de fonds. Enfin, le sous-dossier correspondance est formé des courriers avec le propriétaire, la mairie et l’architecte. Il est également possible de rencontrer, dans certains dossiers, des procédures de contentieux, mais aussi des arrêtés de concessions temporaires sur le domaine public, des rapports d’expertise ou encore des tableaux des pourcentages de destruction. Pour les établissements Fouga, les Archives départementales de l’Hérault conservent l’ensemble de ces documents dans la sous-série 36 W 36.

Richesse de la documentation graphique

Hormis la plupart des documents mentionnés qui intéressent l’histoire de l’entreprise, il faut souligner la richesse de la documentation graphique conservée dans les dossiers des établissements Fouga. Parmi ces archives, une lettre signée par Stéphane Chasles, président du conseil d’administration, et adressée au Ministère de la Reconstruction, débute comme suit : « je vous envoie, sous pli séparé, un album qui pourra vous intéresser et qui montre, par des photographies prises aux mêmes endroits, exactement, en juin 1944 37 et au début de 1947 ce qu’a été la reconstruction des usines de la Société des Établissements Fouga et Cie à Béziers » 38. Il s’agit d’un classeur contenant 20 photographies noir et blanc des ateliers sud et 20 photographies des ateliers nord, sans mention du photographe. La première page est intitulée « Établissements Fouga et Cie, Béziers – Bombardement aérien du 5 juillet 1944 – Reconstruction – Documentation photographique ». Cet album est accompagné d’une « description des installations sinistrées avant et après bombardement », document dactylographié de 30 pages 39. Des plans, coupes et élévations de chaque bâtiment de l’usine complètent cette riche documentation graphique. Nous signalerons en particulier un recueil des plans des bâtiments composé de 43 folios, chaque folio étant le support du plan, de la coupe et de l’élévation des pignons et façades de chacun des bâtiments de l’usine 40.

Programme architectural et modèle productif des établissements Fouga

La construction et la reconstruction des ateliers sud

Malgré les bombardements, l’usine conserve son unité architecturale, en particulier sur la zone sud (fig. 9). Sur sept hectares dont 38 800 m² couverts, les vaisseaux des ateliers sud présentent une architecture unique pour le département de l’Hérault dont l’origine demeurait jusqu’alors inconnue. Les archives des dommages de guerre livrent des informations inédites sur la création de l’usine primitive, en particulier sur les campagnes de construction et sur les maîtres d’œuvre.

Deux campagnes de construction donnent aux ateliers sud leur configuration définitive. La première a lieu entre 1920 et 1925, la seconde entre 1938 et 1939 : « l’usine a été construite en 1924 pour la majorité des bâtiments (F, G, I, J, K, L, H, R, N), les autres bâtiments datant de 1938-1939 » 41. Les ateliers sont édifiés sur un espace alors vierge de constructions, ce qui permet de réaliser un programme architectural d’envergure, alliant logique technique et homogénéité stylistique : « les établissements Fouga constituent une unité parfaite dont les services sont parfaitement imbriqués entre eux et d’un fonctionnement harmonieux […] » 42.

Vue aérienne des établissements Fouga, ateliers nord et ateliers sud, après guerre
Fig. 9 - Vue aérienne des établissements Fouga, ateliers nord et ateliers sud,
après guerre (Arch. nat., F12/11314).

Les bâtiments industriels ont été réalisés selon les plans de l’ingénieur des établissements Fouga, Albert Gibert, ingénieur des Arts et Métiers de la promotion de 1907 43. C’est sous sa direction qu’ont été « projetés et exécutés les travaux immobiliers et professionnels de construction de l’usine […] : bâtiments en ciment armé, métalliques, centrale électrique, installation des fonctions générales de l’usine, des machines et matériels des ateliers » 44. Dans sa configuration d’origine, l’usine compte huit halles pouvant comporter plusieurs travées 45.

Pour la construction de ces grands vaisseaux, l’utilisation du béton est généralisée. Il est employé pour la structure poteaux-poutres en béton armé avec remplissage de panneaux briquetés (fig. 10), pour les fermes de la charpente et pour les voûtes, en arc segmentaire, percées de lanterneaux vitrés (fig. 11).

Ateliers sud, pignon oriental du bâtiment O’ des magasins
Fig. 10 - Ateliers sud, pignon oriental du bâtiment O’ des magasins
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).
Ateliers sud, intérieur du bâtiment G, partie dédiée au montage des chaudières
Fig. 11 - Ateliers sud, intérieur du bâtiment G, partie dédiée au montage des chaudières (Arch. nat., F12/11314).
Plan de l’usine Fouga ateliers sud (d’après le plan d’ensemble des établissements Fouga et Cie représentant les impacts des bombardements alliés du 5 juillet 1944
Fig. 15 - Plan de l’usine Fouga ateliers sud (d’après le plan d’ensemble des établissements Fouga et Cie représentant les impacts des bombardements alliés du 5 juillet 1944, Arch. dép. Hérault, 36W415).

Les travaux de gros œuvre sont réalisés par les établissements Fourré et Rhodes, spécialisés dans les constructions industrielles dès leur création en 1903. Associés à partir de 1913, à l’ingénieur suisse Henry Lossier 46, ils développent des techniques constructives en béton armé, appliquées notamment à la réalisation en 1916 du hangar à dirigeables d’Écausseville, dans la Manche. Fourré et Rhodes travaillent également avec les établissements Schneider et Cie pour la construction d’ouvrages de la Défense Nationale 47. Il est donc possible que l’entreprise Fouga ait été mise en relation avec Fourré et Rhodes par les établissements Schneider, ces derniers livrant en 1920 le pont-levant métallique qui enjambe le canal du Midi 48. Sur le site sud de l’usine Fouga, si la majeure partie des bâtiments est édifiée en béton armé, quelques ateliers présentent une construction mixte, en béton armé avec charpente métallique, notamment le bâtiment S (peinture et bourrellerie) ainsi que le bâtiment V (tôlerie) comportant trois travées couvertes de sheds. Néanmoins, lors de la seconde campagne de construction, en 1938-1939, les agrandissements sont exclusivement réalisés suivant les techniques constructives en béton, l’homogénéité architecturale étant parfaitement respectée. Deux causes peuvent expliquer ces extensions. La première est liée à l’électrification du réseau qui intervient sur la ligne Béziers-Neussargues dès 1931. Ainsi, entre 1930 et 1932, la surface des ateliers de la Compagnie Paris-Orléans, à Vitry, est augmentée de 34 % pour l’entretien des machines de traction électrique 49. Plus vraisemblablement, c’est l’entrée en guerre de l’Europe qui entraîne l’agrandissement des ateliers sud. En effet, la majeure partie des nouveaux ateliers (bâtiments G1, G2, P et N’) sont destinés aux productions de guerre (fig. 15).

Entre novembre 1944 et octobre 1946, les édifices endommagés sont reconstruits à l’identique comme l’attestent les photographies et les correspondances conservées dans les archives des dommages de guerre (fig. 12 et 13)50. La reconstruction est confiée à un bureau d’étude constitué d’ingénieurs des établissements Fouga parmi lesquels nous retrouvons Albert Gibert. Il a alors une carrière de 24 années au sein des établissements Fouga, d’abord comme chef du bureau des Études, devenu adjoint technique à la Direction, puis ingénieur-chef des services de fabrication.

Ateliers sud, bâtiment C des vestiaires et réfectoires après le bombardement
Fig. 12 - Ateliers sud, bâtiment C des vestiaires et réfectoires après le bombardement (Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).
Ateliers sud, bâtiment C des vestiaires et réfectoires après reconstruction à l’identique ; les réparations ont porté sur les piliers du bâtiment et de la marquise ainsi que les vitres et châssis
Fig. 13 - Ateliers sud, bâtiment C des vestiaires et réfectoires après reconstruction à l’identique ; les réparations ont porté sur les piliers du bâtiment et de la marquise ainsi que les vitres et châssis (Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

Au sein du bureau d’étude, Albert Gilbert est secondé de MM. Razaire, Vignon, Lamarque, Gleizes, eux aussi ingénieurs des Arts et Métiers, M. Armengaud, ingénieur des Travaux Publics, MM. Pagliai et Fau, dessinateurs, M. Coll, ingénieur de l’École Industrielle de Barcelone et MM. Resseguier et Renard, formés au sein d’une école nationale professionnelle 51. La plupart d’entre eux étaient présents dès la création de l’entreprise et la construction de l’usine sud. De même, les établissements Fourré et Rhodes interviennent de nouveau lors de la reconstruction des bâtiments. Dans ce cadre, les établissements Fouga prennent en charge les travaux de serrurerie, charpente et menuiserie ; les établissements Louis Blanc (Béziers), la vitrerie ; les établissements Magnoni (Béziers), les travaux de peinture ; et les établissements Pons (Béziers), certains travaux de maçonnerie et plâtrerie. Au cours de l’année 1944, les travaux de reconstruction sont achevés pour les bâtiments de la conciergerie, des vestiaires et lavabos, de la centrale électrique et du magasin central 52. En 1945 sont livrés les bureaux administratifs, l’infirmerie, le réfectoire, le montage des locomotives et des chaudières, la chaudronnerie, l’atelier des machines-outils, l’atelier des voitures, l’atelier des fabrications de guerre. En 1946, les travaux prennent fin avec la réparation des bâtiments de la petite chaudronnerie, du nickelage, des forges et ressorts, de la peinture et sellerie et de la tôlerie. Dans le cadre de la loi du 28 octobre 1946 sur la réparation des dommages de guerre, les travaux de reconstruction préservent l’unité architecturale et technique de l’usine.

En Languedoc-Roussillon, et plus particulièrement dans l’Hérault, les édifices industriels construits en béton armé au cours du premier quart du XXe siècle, sont très peu nombreux. À proximité des usines Fouga, la construction de la station électrique de l’usine à gaz de Béziers, aménagée lors de l’agrandissement du site en 1910, emploie déjà ce matériau. Mais la réalisation des ateliers Fouga est exceptionnelle par la reproduction en série de ces grands vaisseaux en béton. De plus, l’antériorité de ce mode constructif mis en œuvre par les établissements Fouga est manifeste pour cette région viticole. Alors que le ciment, puis le béton, sont utilisés dans la construction des cuves à vin dès la fin du XIXe siècle, il faut attendre le milieu du XXe siècle pour que l’utilisation de ces matériaux se généralise dans la conception des caves et des distilleries coopératives. Ainsi, ce n’est qu’au milieu des années 1930 que le Génie Rural donne sa préférence aux charpentes en béton armé 53. Cependant cette incitation ne s’impose aux maîtres d’œuvre qu’après la Seconde Guerre mondiale avec la réalisation d’arcs diaphragmes et de poutres en béton venant couvrir les constructions nouvelles. Dans l’Hérault, sur 167 caves coopératives, 33 sont construites en béton 54. Elles sont réalisées, pour beaucoup, par des entreprises locales de travaux publics, telles que l’entreprise Papineschi à Béziers ou l’entreprise Louis Olivier. Les ateliers Fouga, à la fois par leur maître d’œuvre et l’emploi du béton armé, font donc figure d’exception. Comment expliquer un tel unicum à Béziers ?

Une architecture révélatrice d’un modèle de production

Les ateliers sud de l’usine Fouga sont représentatifs des dépôts et ateliers de réparation du matériel ferroviaire construits après la Première Guerre mondiale. Ces halles longitudinales, en béton armé, destinées à l’entretien, à la réparation et au remisage du matériel roulant, se retrouvent sur l’ensemble de la France. À Nanterre, les ateliers de la Folie sont achevés à la veille de la Première Guerre mondiale pour le compte de la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest 55. À Bagneux, les ateliers de réparation dits de Montrouge sont édifiés de 1926 à 1928 par l’entreprise Limousin, spécialisée dans la construction en béton, à laquelle collabore l’ingénieur Freyssinet. À Sotteville-lès-Rouen, le magasin de la Compagnie des tramways de Rouen, « aux formes épurées, inspirées du Mouvement moderne » 56, est construit, plus tardivement, en 1931, mais reprend les principes constructifs mis en œuvre depuis le milieu des années 1910. Cette nouvelle architecture d’ateliers tire son origine d’une « réforme globale du programme d’exploitation » 57, issue de l’adaptation précoce du Taylorisme par les compagnies de chemin de fer 58. Ainsi, sur l’ensemble de la France, à la suite de la baisse du rendement observée dans les ateliers à la fin des années 1910, « les ingénieurs conçurent une nouvelle géographie des dépôts, qui devait satisfaire la nouvelle réglementation du travail » 59, privilégiant un meilleur outillage, les équipements de manutention, l’utilisation de l’air comprimé et de la force électrique. C’est à cette époque également que s’impose l’organisation longitudinale des fosses de montage, favorisant la mécanisation des opérations, en particulier de la manutention 60. Dans ce contexte, la construction de charpentes et de voûtes en béton apporte une réponse aux besoins industriels d’organisation de la production et de rationalisation de l’espace, à moindre coût.

L’architecture standardisée des premiers ateliers de l’usine sud laisserait supposer une adoption, par les établissements Fouga, des modèles de rationalisation de la production inspirés du Taylorisme, et cela dès les années 1920. Plusieurs documents conservés dans les archives des dommages de guerre, donnant à voir les installations et la production à la fin des années 1940 61, confirment l’application, par les dirigeants de Fouga, de ces méthodes qui s’imposent aux industriels français durant l’entre-deux-guerres, puis au cours des Trente Glorieuses 62. Ces « mesures d’organisation destinées à adapter le processus de production aux mutations nées de la seconde phase de l’industrialisation » se fondent sur une structure organisationnelle destinée à accroître production et productivité 63. Suivant les principes du Taylorisme, l’organisation de la production repose sur un système bureaucratique de commande, impliquant une distinction entre les services centraux spécialisés et les ateliers 64. Selon ce modèle, nous trouvons à la tête des établissements Fouga, une Direction générale assistée d’un directeur administratif et d’un ingénieur responsable de l’exploitation. Trois départements distincts sont chargés de l’exploitation : le département approvisionnement, le département fabrication et le département ateliers. Respectant le processus bureaucratique de planification du travail, le département fabrication comprend un service de « fabrication guerre et clients divers », un bureau de préparation et de lancement pour les travaux de remise en état des locomotives et tenders de la SNCF, un service de contrôle, un bureau d’études qui établit les plans de matériels et des installations nouvelles ainsi qu’un bureau des méthodes « chargé spécialement de rechercher les méthodes propres à améliorer le rendement des ateliers » 65. Le département fabrication établit les bons de travaux pour les différents ateliers, fondant ainsi l’organisation de la production sur un programme de réparations impliquant un échelonnement des tâches. Le département des ateliers est, quant à lui, subdivisé en cinq services correspondant aux fabrications des établissements : locomotives, guerre, voitures, wagons et entretien. L’année suivant le bombardement de l’usine, avec un effectif de 2 400 personnes, 73 locomotives, 2 184 voitures de voyageurs, 90 wagons-lits de la Compagnie des Wagons-Lits et 1 824 wagons-réservoirs sortent des ateliers Fouga 66. Par ailleurs, la recherche précoce de diversification des marchés est une caractéristique des établissements Fouga au sein des entreprises de réparation du matériel ferroviaire 67.

Concrètement, pour la préparation et la réparation des locomotives, les établissements Fouga reçoivent des matières premières des magasins SNCF de Saint-Pierre-des-Corps ainsi que des locomotives en provenance des dépôts SNCF 68. La préparation et la réparation des locomotives est la section qui nécessite le plus d’espace, l’ensemble occupant huit travées des ateliers sud, soit 51 000 m² dont 19 000 m² couverts. Les locomotives sont d’abord démontées afin d’inventorier les réparations à effectuer. Les pièces sont ensuite envoyées dans plusieurs ateliers : ateliers des machines-outils et de l’ajustage, du montage des chaudières, des roues, des forges et du montage des locomotives. Cinq travées sont réservées aux machines-outils, à l’ajustage, au potassage, à la soudure, à la robinetterie, au régulage et au traitement thermique, l’ensemble employant 400 ouvriers. L’atelier de montage des chaudières (bâtiment G), avec un effectif de 160 ouvriers, est alimenté par l’atelier préparatoire de chaudronnerie. L’atelier des forges comprend une section de fabrication et de réparation des ressorts à lames. L’atelier de montage des locomotives et des tenders (bâtiment F) dispose d’un parc extérieur et de 19 fosses de montage desservies par un chariot transbordeur de 100 tonnes. Pour traiter les commandes du service d’Intendance du Ministère de la Défense Nationale, en particulier la fabrication de boulangeries et buanderies de campagne, trois vaisseaux sont réservés à la chaudronnerie, la mécanique, le traitement thermique, le nickelage et le montage des ensembles.

Comme pour la réparation des locomotives, les ateliers des voitures reçoivent les matières premières des magasins de Saint-Pierre-des-Corps et des dépôts SNCF. Sur la zone sud, ils occupent deux vaisseaux, soit 8 000 m² couverts, réservés à la menuiserie, la tôlerie, la serrurerie, la zinguerie, le vernissage, le garnissage et la bourrellerie. La réparation des wagons est assurée dans les ateliers nord, situés de l’autre côté du canal, loués à la SNCF (fig. 14). Les wagons passent par la forge, l’ajustage, la menuiserie, la peinture et le montage. Enfin, la section « entretien » 69 occupe un vaisseau des ateliers sud et assure l’entretien mécanique et électrique, dont le fonctionnement de la centrale électrique située au centre de l’usine 70. Le nombre d’ateliers constitutifs de l’usine Fouga est lié à « l’extrême diversité des opérations, qui [résulte], tout à la fois, de la nature du travail, la réparation, et de l’absence d’unité du matériel de traction » 71. Ainsi, comme l’a souligné Christian Chevandier, les ateliers de réparation de matériel ferroviaire sont dédiés à « des réparations qui se révèlent de fait être des productions, lorsque la pièce que l’on remplace est unique, doit être fabriquée sur place » 72. Malgré cette spécificité, les compagnies ferroviaires, dont les établissements Fouga, parviennent à appliquer les grands principes de Taylor, tout en les adaptant au contexte français.

Ateliers nord, hall des grandes réparations des wagons
Fig. 14 - Ateliers nord, hall des grandes réparations des wagons
(Arch. dép. Hérault, 36W869, auteur inconnu).

L’organisation sociale des établissements Fouga : la « rationalisation à la française »

À travers les archives des dommages de guerre, il est possible d’analyser l’organisation salariale et sociale des établissements Fouga et d’appréhender ainsi la place des hommes au sein de ce complexe usinier. Dès le milieu des années 1910, dans le contexte d’adoption des modèles d’organisation scientifique du travail importés des États-Unis, la « nécessité d’intensifier le contrôle [résultant] de la tendance accrue à la spécialisation des tâches » 73 se développe sur l’ensemble du territoire. Les méthodes de suivi et de contrôle du travail sont ainsi mises en place pour « rétablir la continuité du processus de production, morcelé en une multitude d’opérations confiées à des ouvriers différents » 74. Au sein des établissements Fouga, chaque « atelier » (locomotives, guerre, wagons, voitures et entretien) est composé de « section d’atelier dite atelier divisionnaire ayant chacune à sa tête un sous-chef d’atelier assisté d’un ou de plusieurs contremaîtres » 75. Le contremaître a sous ses ordres plusieurs équipes composées, en moyenne, de 15 ouvriers chacune avec un chef d’équipe à leur tête. Ce dernier « répartit le travail dans son équipe, veille à l’acheminement des pièces et des matières, contrôle le travail fini » 76. Il est également responsable du respect du calendrier : « pour chaque matériel à réparer ou à construire, il est établi un programme et un délai de sortie que la maîtrise est chargée de faire respecter. Chaque équipe est responsable des retards apportés à la livraison des ensembles qu’elle prépare pour les ateliers de montage » 77. Comme l’a souligné Aimée Moutet, les pouvoirs accordés au contremaître sont propres à la « rationalisation à la française », son autorité étant un gage de l’intensité du travail ouvrier 78. De même, les principes de Taylor dont la planification de la production et le chronométrage des opérations étant adoptés par les établissements Fouga, il devient possible de mettre en place une rémunération au rendement 79. Après la suppression du travail à la tâche sur l’ensemble des réseaux français, en 1918, un système de primes, basée sur la formule Rowan, est mis en application dans les ateliers de matériel ferroviaire, dès les années 1920. On retrouve cette méthode chez Fouga où un bureau de pointage affecté à chaque atelier enregistre les temps passés, les arrêts en cours de travail, centralise divers bons d’une même commande et les transmet à la comptabilité qui « établit le boni d’après la méthode Rowan » 80.

Si l’organisation de la production, basée sur un système de contrôle, de comptabilité et d’intéressement, est mise en place par la direction, un nouvel acteur intervient après guerre. Alors qu’un comité de libération s’est formé à la tête de l’usine et que les membres du conseil d’administration de l’entreprise font l’objet d’enquêtes menées par une commission interprofessionnelle d’épuration 81, un comité d’entreprise représentant l’ensemble du personnel est créé le 30 septembre 1944. Présidé par le directeur général des établissements Fouga, il comprend un agent des cadres, quatre agents de maîtrise, cinq ouvriers et trois employés. Ce comité « coopère à la gestion de l’usine et recommande l’application de toutes suggestions techniques ou administratives intéressant l’organisation générale des Établissements » 82. La représentation des travailleurs et leur « participation à la direction de l’économie » selon les préconisations du programme du Conseil National de la Résistance, sous la forme d’un comité d’entreprise chez Fouga, est là encore précoce et devance l’ordonnance du 22 février 1945 et la loi du 16 mai 1946 qui instituent et organisent les comités d’entreprise dans les entreprises de plus de 50 salariés 83.

Après guerre, l’entreprise Fouga met l’accent sur la prévention des accidents et met en place un service dédié à la sécurité au travail. Des affiches et des systèmes de protection sont installés dans les ateliers. Le service est également chargé de réaliser l’étude statistique des risques, dans le but de favoriser les actions préventives. Un comité de sécurité mène, quant à lui, des enquêtes à la suite des accidents graves. En parallèle, l’entreprise renforce l’apprentissage au sein de son établissement qui possède, dès 1923, un centre de formation professionnelle installé dans les ateliers nord. L’emploi d’un instructeur qualifié permet de délivrer des cours théoriques et pratiques à des jeunes âgés de 14 à 18 ans, qui, après trois années de formation, peuvent se présenter au CAP. En 1946, l’entreprise forme 35 élèves en première année, 32 en deuxième année et 15 en troisième année 84. Les enseignements théoriques se fondent sur les mathématiques, la technologie, le français et le dessin, complétés par « des conférences sur l’hygiène professionnelle, la morale, le droit civil, l’instruction civique, la législation du travail, la prévention des accidents ». Après l’obtention du CAP, les ouvriers intègrent les différentes équipes des établissements. La formation touche également les adultes : 93 ouvriers sont concernés au cours de deux périodes d’instruction en 1942. Les conditions de travail sont également affectées par la reconstruction de l’usine. Le bâtiment de l’infirmerie est agrandi, comme les cuisines afin d’« améliorer les conditions du service » 85. Des cabines de douche à l’usage du personnel sont installées sur les sites des ateliers nord et sud. En 1946, il est prévu d’augmenter leur nombre de 6 à 24 86. Une salle de culture physique voit également le jour à la suite des travaux menés après guerre. Les cinq promotions d’apprentis effectuent journellement une séance de culture physique et de gymnastique 87. À cette date, une bibliothèque est également présente sur le site, « riche d’environ 1 000 volumes reliés » et mise à disposition du personnel.

En lien avec la création du comité d’entreprise, les actions sociales se multiplient : une commission d’entraide, une coopérative alimentaire en centre-ville, un service d’assistance sociale sont mis en place. Une caisse d’entraide, alimentée par un prélèvement sur les salaires, permet de distribuer des fonds aux familles suivies par le service d’assistance sociale, d’organiser des fêtes et des départs en colonies de vacances pour les enfants du personnel. Les actions sociales en direction de ces derniers sont favorisées. En 1945, l’arbre de Noël réunit 900 enfants qui reçoivent des « jouets confectionnés dans l’usine ». Des vêtements leur sont également distribués, notamment en novembre 1945. En 1946, les établissements Fouga ne possèdent pas de colonie mais envoient certains enfants dans des centres de vacances privés. À cette date, 45 d’entre eux se sont rendus en séjour en Suisse. Comme l’a souligné Aimée Moutet, cet attachement au « facteur humain » et aux « œuvres sociales » constitue un des « caractères particuliers de cette rationalisation à la française » 88.

Alors qu’en 1954, il n’y a plus en France que 22 ateliers de réparation de matériel ferroviaire titulaires d’un marché SNCF, les établissements Fouga intensifient les travaux pour la clientèle privée, en particulier pour les mines et les raffineries. Cependant, cet effort de reconversion n’est pas suffisant face à la baisse des commandes de l’État, sensible dès 1948. En 1950 prennent fin les réparations des wagons-lits tandis que la réparation des wagons diminue de 50 % et celle des voitures de 40 %. En 1955, le marché pour les locomotives est supprimé par la SNCF. Le 20 juillet 1956, la société Fouga dépose le bilan, entraînant une suite de liquidations au cours des années 1960. Si les établissements Fouga ont eu une durée d’activité courte, n’excédant pas 40 ans, ils ont laissé un patrimoine bâti exemplaire des ateliers de réparation ferroviaire construits après la Première Guerre mondiale. Grâce aux documents conservés dans les archives des dommages de guerre, la construction et la reconstruction des ateliers Fouga sont mieux connues. L’édification de cette usine s’inscrit dans un contexte national d’adoption de nouvelles méthodes de production par les industriels français. Si l’engagement des entreprises automobiles dans la mise en œuvre des principes de Taylor est déterminante, celle des ateliers de réparation du matériel ferroviaire n’en est pas moins précoce et tout aussi exemplaire. Participant d’une réforme globale du système de production, ces bâtiments en béton armé portent le témoignage d’une nouvelle conception de l’organisation de l’espace productif. L’occupation de l’usine sud par le constructeur d’équipements pétroliers Cameron France, dès 1958, permet aujourd’hui de préserver ce témoignage architectural exceptionnel dans le département de l’Hérault.

NOTES

1. Balso, Raoul, « Les Établissements Fouga de Béziers (1920-1966) », Ateliers et dépôts du matériel ferroviaire : deux siècles d’histoire. Actes du 10e colloque de l’AHICF, Arles, 25-27 avril 2002, Revue d’histoire des chemins de fer, n° 28-29, printemps-automne 2003, p. 44-56.

2. Marassé, Philippe, « Un fleuron industriel biterrois : les Établissements Fouga et Cie (1919-1967) », Société Archéologique, Scientifique et Littéraire de Béziers, Béziers, 2011-2012, p. 85-105. Il ne sera donc pas question des avions Fouga dans cet article, leur fabrication étant concentrée à Aire-sur-Adour.

3. L’Inventaire général du patrimoine culturel, compétence de la Région depuis la loi de décentralisation de 2004, recense, étudie et fait connaître le patrimoine culturel, scientifique et technique du Languedoc-Roussillon.

4. Dumond, Lionel, « Le chemin de fer Montpellier-Cette, 1839-1852 », Liame, n° 2, juillet-décembre 1998, p. 113.

5. Woronoff, Denis, Histoire de l’industrie en France : du XVIe siècle à nos jours, Paris, Points Seuil, 1998, p. 229.

6. Arch. dép. Hérault, 8 S 99.

7. Dumond, Lionel, art. cit., 1998, p. 109-133.

8. Buisson, Jean et al., Naissance du chemin de fer en Languedoc-Roussillon, Saint-Laurent-du-Var, éditions La Régordane, 1989, p. 45-51.

9. Ibid., p. 66.

10. Marassé, Philippe, Dans l’arrondissement de Béziers-Saint-Pons, les voies de communication routières et ferroviaires et leur impact sur l’économie et la viticulture aux XIXe et XXe siècles, XIVe Cahier de la Société Archéologique Scientifique et Littéraire de Béziers, Béziers, 2007.

11. Galet, Pierre, Cépages et vignobles de France, t. III, vol. 1, Paris, Éd. TEC et DOC, 2004, p. 183 et 196.

12. Ibid., p. 184.

13. Gavignaud-Fontaine, Geneviève, Le Languedoc viticole, la Méditerranée et l’Europe au siècle dernier (XXe siècle), Montpellier, Publications de l’Université Paul Valéry, 2006, p. 52-57.

14. Albert, Peggy, Gérard, Marc, Béziers, capitale du vin (1850-1950) à travers les collections permanentes du Musée du Biterrois, Béziers, Musée du Biterrois, 2008.

15. Sagnes, Jean (dir.), Histoire de Béziers, Toulouse, Privat, 1986, p. 229.

16. Marassé, Philippe, art. cit., 2007, p. 94-98.

17. Albert, Peggy, Gérard, Marc, op. cit., 2008, p. 16.

18. Marassé, Philippe, art. cit., 2011-2012, p. 85.

19. Buisson, Jean et al., op. cit., 1989, p. 50.

20. Ateliers et dépôts du matériel ferroviaire : deux siècles d’histoire. Actes du 10e colloque de l’AHICF, Arles, 25-27 avril 2002, Revue d’histoire des chemins de fer, n° 28-29, printemps-automne 2003, p. 23.

21. Marassé, Philippe, art. cit., 2011-2012, p. 86 ; Arch. dép. Hérault, 1M578, Lettre de Léon Baylet, député de l’Hérault, à l’appui d’une nomination de Gaston Fouga comme Chevalier dans l’Ordre de la Légion d’Honneur, datée du 26 mai 1934.

22. Ibid., p. 87.

23. Arch. dép. Hérault, 36W869, procès-verbal de la première assemblée générale constitutive du 29 novembre 1919.

24. Arch. dép. Hérault, 36W869.

25. Balso, Raoul, art. cit., 2003, p. 46.

26. Arch. dép. Hérault, 5M361.

27. Marassé, Philippe, art. cit., 2011-2012, p. 93.

28. Arch. dép. Hérault, 1M578, Lettre de Léon Baylet, datée du 26 mai 1934.

29. Arch. dép. Hérault, 36W869, note concernant les dommages de guerre.

30. Martzel, Georges, Fouga et son histoire, 1920-1966, 4 tomes, dacty., 1994, volumes conservés aux Archives municipales de Béziers, sc. ; Arch. dép. Hérault, 1000W344.

31. Arch. dép. Hérault, 36W415, Rapport d’expertise professionnelle sur les dommages industriels subis par les établissements Fouga et Cie, plaine St-Pierre à Béziers (Hérault) lors du bombardement aérien du 5 juillet 1944.

32. Nous utiliserons cette désignation alphabétique des ateliers, mise en place dès la construction de l’usine et utilisée encore de nos jours.

33. Arch. dép. Hérault, 36W578.

34. Arch. dép. Hérault, 36W415 et 36W578.

35. La présentation de ce fonds d’archives est issue de l’inventaire réalisé par les Archives départementales de l’Hérault.

36. Arch. dép. Hérault, 36W415, 36W872, 36W579, 36W578, 36W869, 36W884.

37. Le bombardement a eu lieu le 5 juillet, il est donc certain que les photographies n’ont pas été prises en juin 1944 mais plutôt en juillet 1944.

38. Arch. dép. Hérault, 36W869, lettre datée du 22 juillet 1948.

39. Arch. dép. Hérault, 36W415.

40. Arch. dép. Hérault, 36W415, Recueil des plans des bâtiments.

41. Arch. dép. Hérault, 36W415, Rapport général descriptif, 1949.

42. Balso, Raoul, art. cit, 2003, p. 47.

43. Arch. dép. Hérault, 36W578.

44. Arch. dép. Hérault, 36W578.

45. Arch. dép. Hérault, 5M361, plan, 1925.

46. Barjot, Dominique, « L’innovation dans les travaux publics (XIXe-XXe siècles). Une réponse des firmes au défi de la demande publique ? », Histoire, économie et société, 1987, 6e année, n° 2, p. 209-231.

47. D’Angio, Agnès, Schneider et Cie et les travaux publics, 1895-1949, Paris, École des Chartes, 1995.

48. Informations relevées sur la plaque de constructeur du pont-levant.

49. Moutet, Aimée, Les logiques de l’entreprise. La rationalisation dans l’industrie française de l’entre-deux-guerres, Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1997, p. 292.

50. Arch. dép. Hérault, 36W415.

51. Arch. dép. Hérault, 36W578.

52. Arch. dép. Hérault, 36W869, Programme des phases d’exécution.

53. Ganibenc, Dominique, Les bâtiments du monde viticole en Languedoc-Roussillon des années 1860 à nos jours. Étude d’une infrastructure privée et communautaire, Thèse de Doctorat : Histoire de l’Art, Montpellier 3, 2012.

54. Informations issues des bases de données de l’Inventaire général du patrimoine culturel, Région Languedoc-Roussillon.

55. Jantzen, Hélène, Viallès, Jean-Bernard. 1860-1960 : cent ans de patrimoine industriel dans les Hauts-de-Seine, sl., Association pour le patrimoine de l’Île-de-France, 1997, p. 83.

56. Réal, Emmanuelle, Reconversions, l’architecture industrielle réinventée. Haute-Normandie, Rouen, Région Haute-Normandie, 2013, p. 191.

57. Caron, François, « À propos de la rationalisation du travail dans les ateliers des compagnies de chemins de fer en France, 1880-1936 », Ateliers et dépôts du matériel ferroviaire : deux siècles d’histoire. Actes du 10e colloque de l’AHICF, Arles, 25-27 avril 2002, Revue d’histoire des chemins de fer, n° 28-29, printemps-automne 2003, p. 202.

58. Moutet, Aimée, « La rationalisation dans l’industrie française : une réponse aux problèmes de la seconde industrialisation ou l’invention de la consommation de masse ? », Histoire, économie et société, 1998, 17e année, n° 1, Industrialisation et société en Europe Occidentale (1880-1970) : nouveaux aperçus, p. 109.

59. Caron, François, art cit., 2003, p. 202.

60. Ibid., p. 192-193.

61. Arch. dép. Hérault, 36W415, se reporter notamment au « tableau synoptique de l’organisation intérieure des Établissements » ainsi qu’à la « notice explicative à l’organisation de l’établissement ».

62. Moutet, Aimée, op. cit.

63. Moutet, Aimée, art. cit., 1998, p. 101.

64. Moutet, Aimée, op. cit., 1997, p. 17.

65. Arch. dép. Hérault, 36W415.

66. Marassé, Philippe, art. cit., 2011-2012, p. 97.

67. Ateliers et dépôts du matériel ferroviaire : deux siècles d’histoire. Actes du 10e colloque de l’AHICF, Arles, 25-27 avril 2002, Revue d’histoire des chemins de fer, n° 28-29, printemps-automne 2003, p. 24-25.

68. Arch. dép. Hérault, 36W415, tableau synoptique des fabrications Fouga.

69. Les opérations d’entretien comprenaient les visites, le ramonage des tubes, la préparation des combustibles, l’entretien courant, le lavage des machines, le nettoyage extérieur des machines, l’entretien ou la préparation du feu (Caron, François, art. cit., 2003, p. 197).

70. À partir des années 1930, l’usine est alimentée par le réseau de la SNCF. Après guerre, si la centrale thermique des établissements peut encore fournir 750 kW, elle n’est plus utilisée. Le bâtiment a été depuis détruit.

71. Moutet, Aimée, op. cit., 1997, p. 106.

72. Chevandier, Christian, « Les établissements, les hommes, le travail, l’espace », Ateliers et dépôts du matériel ferroviaire : deux siècles d’histoire. Actes du 10e colloque de l’AHICF, Arles, 25-27 avril 2002, Revue d’histoire des chemins de fer, n° 28-29, printemps-automne 2003, p. 13.

73. Caron, François, art cit., 2003, p. 196.

74. Moutet, Aimée, op. cit., 1997, p. 18.

75. Arch. dép. Hérault, 36W415, note explicative.

76. Arch. dép. Hérault, 36W415, note explicative.

77. Arch. dép. Hérault, 36W415, note explicative.

78. Moutet, Aimée, art. cit., 1998, p. 110.

79. Moutet, Aimée, op. cit., 1997, p. 106.

80. Arch. dép. Hérault, 36W415, note explicative.

81. Arch. dép. Hérault, 1000W344.

82. Arch. dép. Hérault, 36W415, Organisation sociale des Établissements Fouga et Cie, 5 janvier 1946.

83. Il faut attendre 1955 pour que ces nouvelles relations sociales dans l’entreprise soient mises en œuvre par l’État au sein de la Régie Renault, voir Moutet, Aimée, art. cit., 1998, p. 116-117.

84. Arch. dép. Hérault, 36W415, Organisation sociale des Établissements Fouga et Cie, 5 janvier 1946.

85. Arch. dép. Hérault, 36W415, note explicative.

86. Arch. dép. Hérault, 36W415, Organisation sociale des Établissements Fouga et Cie, 5 janvier 1946.

87. Arch. dép. Hérault, 36W415, Organisation sociale des Établissements Fouga et Cie, 5 janvier 1946.

88. Moutet, Aimée, art. cit., 1998, p. 110.