Description
Les difficultés d’exploitation d’un service public vital
pendant et au sortir de la Deuxième Guerre mondiale.
Les chemins de fer d’intérêt local de l’Hérault (1939-1948)
Mis en service entre 1872 et 1913 pour desservir les portions du territoire départemental délaissées par les compagnies du Midi et du PLM (SNCF en 1938), le réseau des chemins de fer d’intérêt local de l’Hérault comprend à son apogée cinq lignes à voie normale d’une longueur totale de 212 km Montpellier (gare de l’Esplanade) – Palavas, Montpellier (gare Chaptal) – Rabieux, Montpellier-Chaptal – Béziers (gare du Nord) par Mèze, (Mèze) – Font-Mars – Agde et Béziers-Nord – Saint-Chinian. Les échanges avec les grands réseaux transitent par les gares de Montpellier-Arènes (PLM/Midi), Rabieux, Montbazin-Gigean (jusqu’en 1939), Agde et Colombiers (Midi). Traversant une région viticole active et peuplée, son trafic s’accroît jusqu’au milieu des années 1920. Toutefois, le déficit d’exploitation apparaît en 1921 puis se creuse sous l’effet des bouleversements économiques provoqués par le premier conflit mondial (envolée des dépenses d’exploitation non compensée par les tarifs) et du développement de la concurrence routière.
Appelé à équilibrer le budget d’exploitation, le département rachète le réseau à la compagnie concessionnaire et l’afferme en 1929 à la Société générale des chemins de fer Économiques (la SE), entreprise fondée en 1880 et titulaire de nombreux contrats de concession ou d’affermage de chemins de fer à voie normale ou métrique d’intérêt général (Bretagne, Franche-Comté, etc.) ou local (Gironde, Somme, etc.). En 1931, la SE entreprend la modernisation de la voie et du matériel roulant du réseau de l’Hérault au moyen d’un crédit de 16 millions de francs alloué par le Conseil général mais celui-ci, devant la dégradation continue des résultats, décide d’interrompre les travaux et de supprimer le transport des voyageurs sur toutes les relations, celle de Palavas exceptée, le 1er janvier 1933. La perspective de nouvelles pertes conduit finalement à voter, le 3 mai 1939, la fermeture et le déclassement de l’ensemble, à l’exception de la ligne de la mer et des raccordements de Montpellier qui équilibrent leurs comptes. Cette mesure radicale, entérinée par un décret du 16 novembre 1939 doit prendre effet le 1er janvier 1940.
Lorsque la Deuxième guerre mondiale éclate, « l’intérêt local » – comme l’appellent les « vieux » héraultais – offre donc un double visage : la ligne balnéaire de Palavas enregistre un trafic voyageur croissant. Le département a commandé en mars 1939 un autorail et une remorque pour moderniser le service – tandis que les autres relations n’acheminent sur leurs voies sommairement entretenues, dans l’attente de leur fermeture imminente, que des trains de marchandises tractés par des locomotives vieillissantes. Mais, ici comme ailleurs, les restrictions qui frappent les transports routiers dés le début du conflit rendent au rail, national comme départemental, son quasi-monopole de fait. Échappant au couperet, l’intérêt local redevient alors un outil vital pour la population et l’économie héraultaises. Si bien que, la paix revenue, le département décidera de le moderniser, prolongeant ainsi son sursis.
Nous nous proposons d’évoquer cette page de l’histoire de l’intérêt local en montrant comment, pendant plus de cinq ans, il dut affronter d’innombrables difficultés de tous ordres pour exécuter tant bien que mal, dans un contexte d’extrême pénurie, son indispensable mission : transporter voyageurs et marchandises. Cette étude restitue donc un pan de la vie quotidienne dans notre département au cours de cette sombre période.
La reprise du trafic et l'amélioration des résultats d'exploitation
La France entre officiellement en guerre contre l’Allemagne le 3 septembre 1939, mais les préparatifs militaires commencent dès après la signature du pacte germano-soviétique du 23 août, avec notamment le rappel des réservistes et la réquisition consécutive des autocars. Cette dernière mesure entrainant la suspension des transports routiers, le préfet de l’Hérault prescrit, le 25 août, la réouverture aux voyageurs, jusqu’à nouvel ordre, des quatre voies ferrées d’intérêt local fermées à ce trafic depuis 1933 : Rabieux, Agde, Béziers et Saint-Chinian. Avisé verbalement le même jour à 11 heures par l’ingénieur en chef du contrôle (Ponts et chaussées), bras séculier de la tutelle préfectorale, le chef d’exploitation Leon Morin – nommé à la tète du réseau de l’Hérault en 1938 – adopte immédiatement les dispositions nécessaires pour assurer, à partir du lendemain 26, le service spécial prévu en cas de mobilisation, soit deux allers-retours quotidiens sur chaque section : allocations supplémentaires de charbon (commandé à Graissessac), d’essence (2 000 litres) et d’huile, rappel des agents permissionnaires et suppression du « chômage du samedi » (14 agents ont reçu leur ordre de mobilisation à cette date). En attendant la fabrication de billets en carton Edmonson, les gares puisent dans la réserve des bulletins de perception supplémentaire ou des billets « passe partout », la délivrance des titres étant limitée aux billets simples, 2ème classe plein tarif ou 1/2 tarif. Des le dimanche 27 août, les convois acheminent sans incident les réservistes sur les centres mobilisateurs de Béziers et de Montpellier. Sur Palavas, où la desserte est réduite, le service dominical se limite à la circulation en navette, selon les besoins, d’une seule rame vapeur. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2013 |
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Nombre de pages | 12 |
Auteur(s) | Philippe MARASSE |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |