Description
L’enseignement secondaire en Languedoc-Roussillon,
état de la recherche en 1986
Faire le point sur l’état des recherches portant sur l’enseignement secondaire en Languedoc-Roussillon, pour la période 1850-1939, implique que l’on dresse la liste des travaux menés sur ce thème et que l’on analyse quelques-uns des principaux aspects qui s’en dégagent.
La première partie de ce travail est relativement succincte, la littérature concernant cette question étant plutôt maigre. G. Cholvy le signalait dans sa communication au Congrès de la Fédération Historique du Languedoc Méditerranéen et du Roussillon à Béziers, en 1979, en écrivant : « Rien non plus sur les lycées et collèges, sinon d’anciennes monographies accordant une place fort limitée au XIXe siècle. » Dans l’Histoire du Languedoc de 1900 à nos jours, publiée chez Privat, l’année suivante, cette question n’est même pas abordée, et le tout dernier ouvrage sur la région, Le Languedoc Roussillon, Civilisations Populaires Régionales, paru chez Horvath en 1982 ne consacre qu’une place très minime à notre sujet, quelques lignes sur l’enseignement féminin et le secondaire en général (p. 487 et 509). Cela montre la misère de ce genre d’études. Y a-t-il eu des progrès depuis ?
L’État des travaux en 1986
Les articles publiés sur ce thème, depuis 1960, ne dépassent guère les cinq doigts de la main, même si l’on y inclut les Mémoires d’études supérieures ou de maîtrise. Gilbert Larguier a donné une communication au Congrès de Narbonne, en 1972, sur la construction du collège de cette ville, tandis que Francis Falcou s’attachait, la même année et à plusieurs reprises, à tracer la physionomie et l’évolution des collèges de Castelnaudary – sans faire toutefois place aux établissements privés de la ville. A ces monographies, vient s’ajouter un travail au thème plus ample, celui de Nicole Gibelin qui a étudié les origines et le développement de l’enseignement secondaire féminin public dans le Gard, à Alès et à Nîmes. A part l’article de M. Carles sur l’école préparatoire Militaire de Montpellier de 1939 à 1942 et des travaux annoncés par J.-P. Briand sur la scolarisation secondaire dans l’Académie de Montpellier, nous ne connaissons rien d’autre. Les quatorze premiers numéros de la revue Histoire de l’éducation qui recense les travaux menés par tous les chercheurs de France sur cette matière ne nous ont rien relevé de plus sur le secondaire en Languedoc-Roussillon.
La bibliographie récente sur ce point est donc bien courte. Il faut y ajouter nos diverses recherches sur « L’Enseignement secondaire libre et les Petits Séminaires dans l’Académie de Montpellier, de 1854 à 1924 », thèse de 3e cycle, qui date de 1974 et une quinzaine d’articles parus ou à paraître en 1986. Ils ont à la fois un caractère monographique, évoquant l’histoire d’une maison, (le Sacré-Cœur à Langogne, l’Assomption à Nîmes, les collèges de Perpignan et de Castelnaudary, les lycées et établissements libres de Montpellier, le Pic à Béziers…), et un caractère plus général, autour d’un thème précis : les relations villes-collèges, les problèmes des petits collèges communaux, la naissance et le développement de l’enseignement secondaire féminin, l’éducation des filles en milieu catholique, la querelle du latin chez les Frères, les questions religieuses dans les lycées et collèges, les problèmes posés par l’état des locaux et les finances… Autant de sujets abordés qui pourraient être retenus dans cet essai de synthèse sur le secondaire. Il nous paraît plus indiqué de les limiter, pour pouvoir les approfondir un peu. Nous nous en tiendrons à cinq chapitres : le caractère élitiste de l’enseignement secondaire, entre 1850 et 1939, l’entrée des jeunes filles en secondaire, la victoire du public sur le privé, la carte et la hiérarchie des établissements et un chapitre neuf sur les innovations, les évolutions et les pesanteurs sociales.
I – Le petit nombre
Il suffit de jeter un coup d’œil sur le tableau I qui donne les effectifs des élèves accueillis dans les établissements secondaires publics et privés, masculins et féminins, pour s’apercevoir qu’au total ils reçoivent moins de 10 000 élèves avant 1914 et n’arrivent pas à 20 000 à la veille de la Deuxième Guerre mondiale. Si l’on compare aux 170 000 qui peuplent aujourd’hui les collèges et les lycées, publics et privés, l’on s’aperçoit que cette population s’est multipliée par 15 en 60 ans, pour un accroissement démographique de 25 % environ. Les élèves scolarisés dans ce genre de maisons représentaient 0,65 % de la population totale du Languedoc-Roussillon en 1901 et 1,3 % en 1938; ils sont aujourd’hui près de 9 %. Cela s’explique par l’obligation scolaire, portée à 16 ans, et par l’entrée quasi automatique de la plupart des enfants en 6e. Cette comparaison fait ressortir le caractère élitiste de l’enseignement secondaire entre les deux-guerres.
Avant 1930, la gratuité des études secondaires n’existe pas. La pension, qui est le lot d’une population encore nombreuse dans des lieux dépourvus de collège, coûte cher. Avant 1914, il faut débourser 500 francs au moins. Dans les lycées, on atteint facilement 800 francs, ce qui, tous frais compris, porte la dépense aux environs de 1 000 francs. Or, l’ouvrier agricole du domaine de Malrives gagne, en 1904, 2,75 F par jour, soit en gros 800 francs par an. Comment pourrait-il envoyer son fils suivre des études secondaires ? Or les gens de condition modeste forment l’énorme majorité de la population, avant 1930. Certes, un enfant peut obtenir une bourse complète ou une part de bourse. Mais il faut en mesurer la difficulté : une sorte de concours, qu’il est impossible de présenter, même si l’on en a la capacité, sans être « poussé » par un instituteur ou un parent bien placé. Il y faut au moins de la chance et de bons résultats pour conserver cet avantage. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 1987 |
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Nombre de pages | 8 |
Auteur(s) | Louis SECONDY |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |