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Description

Le Prieuré et l’église Saint-Étienne de Prunet sur le Causse d’Aumelas

Selon J. Berthelé, l’église Saint-Étienne de Prunet se trouvait « près du château moderne d’Aumelas ». Cette indication assez vague est reprise presque littéralement par M. F. Hamlin : « à côté du Chateau Bas », sans autre précision. Toutefois l’examen toponymique du plus ancien texte connu mentionnant cette église, à savoir la charte LXXXI du Cartulaire de Maguelone, datée de 1151, m’a permis de mieux cerner sa situation géographique et, finalement, après bien des recherches aux Archives départementales ainsi que de longues marches à pied sur le Causse d’Aumelas, de retrouver son emplacement.

Voici d’abord les détails que fournit le texte du XIIe siècle sur les possessions situées dans la paroisse de Saint-Étienne de Prunet (in terminio et in parrochia ecclesie Sancti Stephani de Pruneto) : Habeba mus siqu idem in manso Petri Blanchi octo denarios et medium aus de lana, et medium gallonem, et medium caseum, et unum bovarium. In manso de Chauchalieras similiter. In manso Retro Puteum, similiter. In manso Doniparentis, similiter. In manso Poncii de Ulmo, similiter, et unum agnum in tercio anno. In appennaria que fuit Petri Amalrici quattuor denarios, et unum bovarium, et medium aus de lana, et medium gallonem, et medium caseum. Et sciendum est quod bovarii sunt per semenzas). Autrement dit : « Nous avions en effet dans le mas de Pierre Blanc 8 deniers, une toison, la moitié d’un cochet, la moitié d’un fromage et une journée de bouvier. Dans le mas de Caucalières, même chose. Dans le mas de Retro Puteum, même chose. Dans le mas de Bonparent, même chose. Dans le mas de Pons de l’Orme, même chose, plus un agneau tous les trois ans. Dans la dépendance que tenait feu Pierre Alméric 4 deniers, une journée de bouvier, une demie toison, un demi cochet et un demi fromage. Il faut préciser que les journées de bouvier seront dues à l’époque des semailles ».

Sur les 6 noms de mas ou de dépendance, 4 sont tirés de noms de personnes et de ce fait restent pratiquement inidentifiables. Restent donc les deux noms de lieux proprement dits Caucalières et Retro Puteum. En ce qui concerne le premier, aucune trace n’en subsiste dans le cadastre de 1826 et le maire d’Aumelas n’a jamais entendu mentionner ce lieu-dit. Quant au second, c’est son analyse linguistique qui, on va le voir, m’a mis dans la bonne voie.

En effet, que signifie cette latinisation, à première vue bizarre, d’un terme provençal à reconstituer. Puteum désignait évidemment un « puits » (potz devenu dans la région pous) et Retro correspondait à reire « derrière ». Le mas nommé Retro Puteum devait se trouver « derrière le puits », mais quel puits ? C’est alors qu’en examinant les États de Sections du cadastre de 1826, je notais dans la Section C, dite de Lamouroux, le lieu-dit Trespoux, situé, d’après la carte IGN au 1/25 000e (feuille Montpellier 5-6), à 500 m environ au sud-est de Lamouroux. Trespoux signifie normalement « trois puits » et ce sens me parut d’autant plus invraisemblable que la carte n’indique aucun point d’eau dans cette partie du Causse d’Aumelas. J’allai donc vérifier sur place s’il y avait tant de puits dans cette région et je constatai qu’il y avait un puits – en réalité un creux d’eau non bâti – à 400 m au sud-est de Lamouroux. Mais c’était bien le seul et personne n’en connaissait d’autres. Je compris ainsi que Trespoux devait être une déformation de *Tras Pous au sens de « derrière le puits » – tras étant un synonyme de reire qui aurait dû être latinisé en *Trans Puteum. De plus, comme le lieu-dit Trespoux est situé au sud-est du puits, j’en conclus que ce nom n’avait de sens que par rapport à une personne placée au nord-ouest de ce même puits. En d’autres termes, seul un habitant de Lamouroux avait pu considérer que le lieu-dit Trespoux (corrigé en Traspoux) se trouvait effectivement « au-delà » ou « derrière » son point d’abreuvage auquel mène un chemin rectiligne encadré par deux murailles.

Entre temps, les recherches poursuivies aux Archives Départementales m’avaient permis de compléter la documentation réunie par J. Berthelé et M. Hamlin. En plus des mentions du hameau de Prunet et de l’église Saint-Étienne en 1187 et en 1199, j’ai pu noter que, vers le début du XVIIe siècle, l’église était encore debout, qu’elle n’était alors qu’une simple chapelle rurale et qu’elle ne devait pas être très éloignée de Lamouroux. En effet une pièce d’un procès opposant le chapitre de Béziers aux représentants des paroissiens des prieurés Sainct Martin de Cardonnet et Sainct Estienne de Prunet contient les précisions suivantes, fournies par le syndic de l’église cathédrale de Béziers : car pour Sainct Estienne de Prunet ce nest ny anexe ni paroisse separee aussi. Cest une esglise champestre bastie par devocion par les predecesseurs dudit Lamouroux qui estoient plus religieux et pieux que Luy. Luy étant Isaac Lamoureux, porte-parole des rebelles, qui est ainsi présenté dans un texte de 1601. Isac Lamouroux du Mas de Lamouroux, paroisse de Sainct Estienne de Prunet et dudit Sainct Martin de Cardonnet. Ce dernier texte, rapproché du précédent, indique qu’au début du XVIIe siècle l’ancien prieuré, tout comme l’ancienne paroisse de Saint-Etienne de Prunet, étaient depuis longtemps rattachés à la paroisse et au prieuré de Saint-Martin-de-Cardonnet. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1987

Nombre de pages

5

Auteur(s)

André SOUTOU

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf