Description
La restauration de la Villa Laurens d’Agde
à la lumière des dernières découvertes
Hélène PALOUZIÉ * & Laurent FELIX **
* Hélène PALOUZIÉ, conservateur des Antiquités et objets d’art de l’Hérault, DRAC Occitanie.
** Laurent FÉLIX, chargé de la conservation du patrimoine et de la villa Laurens,
Communauté d’Agglomération Hérault Méditerranée.
Longtemps appelée château, la villa créée par Emmanuel Laurens à l’extrême fin du XIXe siècle est le reflet d’une conception nouvelle de l’aménagement intérieur appelée « l’art dans tout », qui lie architecture, décor et mobilier. Propriété de la ville d’Agde depuis 1994, classée au titre des Monuments historiques en 1996, elle est au centre d’un vaste projet de restauration et de valorisation conduit par la Communauté d’agglomération Hérault Méditerranée en partenariat avec la DRAC Occitanie. La recherche historique sur la villa Laurens, fondement de tout projet de restauration, révèle le prestige du lieu et oriente les choix de restauration.
For a long time called the ‘Château’ the villa created by Emmanuel Laurens at the very end of the 19th century, was a new concept of interior design called ‘Art dans Tout’ (this movement was a French art group which operated from 1896 to 1901), that linked architecture, decoration and furnishings. Since 1994 when it became the property of the town of Agde, classified as a Historical Monument in 1996, this villa is the centre of a vast renovation and reclamation project driven by the Communauté d’Agglomération Hérault Méditerranée in liaison with the DRAC Occitanie. The historical research of the Villa Laurens, the basis of all restoration projects, reveals the prestige of the premises and which directions to take for its restoration.
Dempuèi de temps nomenada Castèl, la villá bastida per Enmanuèl Laurens a la fin finala del sègle XIX es lo miralh d’un concebement novèl de l’agençament de l’endedins, designat coma « l’art dins tot », que fa lo ligam entre arquitectura, decòr e mobiliari. Proprietat de la ciutat d’Agde dempuèi 1994, se trapa al mitan d’un projècte ample d’adobament e de valorizacion bailejat per la Comunautat d’aglomeracion Erau-Mediterranèa amb coma sòci la DRAC Occitània. La recèrca istorica sus la villá Laurens, çò qu’es lo fondament de cada projècte d’adobament, fa mòstra del prestigi del luòc e endralha las causidas de seguir.
L’élargissement de la notion de patrimoine qui s’est imposée au tournant des années 1970-1980, a permis la sauvegarde de monuments nouveaux, – au-delà de ceux de culte et de pouvoir -, plus récents, plus représentatifs de l’ensemble de la société. Ce que l’on a appelé le processus de patrimonialisation, à partir de la légitimation « scientifique » par les spécialistes du patrimoine, a permis en 1996, le classement au titre des monuments historiques de la villa Laurens, en partie ruinée, le monument devenant ainsi un objet du patrimoine culturel digne de conservation et de restauration. Le déclencheur de cette patrimonialisation administrative – définie comme un processus de réinvestissement et de revalorisation de lieux oubliés – est sans nul doute le rachat en 1994 du domaine de Belle-Isle par une collectivité publique, la commune, dont le souhait était sa restauration en vue de son ouverture au public.
La recherche historique sur la villa Laurens, fondement de tout projet de restauration, a révélé le prestige du lieu et autorisé l’élaboration d’un programme général de travaux cohérent. Elle a renforcé l’appropriation identitaire de la commune qui a su convaincre ses administrés de la possible transformation du monument en ressource économique. La construction d’une ressource patrimoniale, le devenir du monument est l’enjeu de la restauration actuelle.
La dynamique engagée depuis une dizaine d’années en faveur de la restauration de la villa, dont les études préalables et programmes de travaux ont été confiés à l’architecte en chef des Monuments historiques, se poursuit et s’enrichit aujourd’hui des découvertes sur le décor intérieur et le mobilier. Des éléments nouveaux permettent d’appréhender de façon plus précise, d’orienter les choix de restauration, qui doivent rester fidèles à la conception initiale de la villa Laurens et remettre en valeur les effets décoratifs recherchés, tout en gardant un équilibre entre les éléments d’origine et les éléments restitués. La complexité de cette restauration est de trouver un équilibre dans le mille-feuille historique de l’oeuvre afin de rétablir une unité potentielle.
Nous terminions en 2015 le premier ouvrage consacré à la Villa Laurens par le voeu qu’objets, meubles, tentures, tapis, bronzes, lustres, lampes, vases, sculptures, tableaux, passionnément rassemblés par Emmanuel Laurens (1873-1959) pour orner sa villa, puissent un jour retrouver leur place. Nos dernières recherches éclairent la passion du commanditaire pour la décoration d’intérieur et confirment son rapport particulièrement fécond avec les artistes qu’il côtoyait. Les photographies, documents et éléments mobiliers récemment retrouvés illustrent ce foisonnement ornemental, où les frontières entre architecture, décor et mobilier s’effacent dans un continuum spatial étonnant. Ils révèlent une personnalité inclassable, qui partage avec Pierre Loti la tentation du voyage, le goût des escales exotiques dont les demeures au décor coloré et abondant sont le reflet.
Les décors du grand salon et de la salle de bain
A la faveur de nouvelles recherches en vue de la restauration générale du monument, deux grands décors peuvent être aujourd’hui précisés grâce à la découverte de nouveaux documents. Le premier, dans un état de conservation critique, est situé dans le grand salon et n’a guère été étudié car postérieur au premier aménagement de la villa autour de 1900 ; le second, celui de la salle de bain de l’appartement privé, réalisé en 1898, ou plus précisément une partie de celui-ci, est bien documenté pour avoir été publié dans les revues d’arts décoratifs.
Du décor inspiré de Maurice Denis du salon de musique à celui du grand salon
La réhabilitation générale du salon de musique entre 2012 et 2014 a permis sa restauration de la parure décorative organisée selon trois registres distincts : lambris, toiles monumentales et peintures murales dans la partie supérieure. L’exécution des peintures murales, comme celles de l’ensemble de la villa, est attribuée au peintre marseillais Eugène Dufour (1873-1941). L’état critique de conservation des onze peintures sur toile (disparition à plus de 80 % de la couche picturale) a rendu impossible toute restitution, ne serait-ce que sur le papier. Si l’iconographie est difficilement interprétable, quelques vestiges peints ont cependant pu livrer quelques informations d’ordre stylistique sur ces toiles qui les situent dans les avant-gardes picturales de la fin du XIXe siècle. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2017 |
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Nombre de pages | 16 |
Auteur(s) | Hélène PALOUZIÉ, Laurent FELIX |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |