La grippe espagnole dans l’Hérault, impacts et gestion d’une épidémie hors normes
La grippe espagnole dans l’Hérault :
impacts et gestion d’une épidémie hors normes
Freddy VINET * et Guillaume PAPAIX **
* Professeur. Directeur du département de géographie.
Université Paul-Valéry Montpellier 3 route de Mende 34199 Montpellier Cedex 5.
** Étudiant Master 2 Santé et Territoire Université Paul-Valéry Montpellier 3.
P. 111 à 123
La grippe espagnole a peu suscité l’intérêt des historiens en France. Occultée par l’ombre mémorielle de la Première Guerre mondiale, elle soulève pourtant de nombreuses interrogations quant à son bilan humain, sa diffusion géographique, sa perception et son vécu par les populations d’alors. Partant de trois sources locales que sont les registres d’état civil, les archives des hôpitaux et la presse, cet article montre que la ville de Montpellier est touchée dès le mois d’août par des décès massifs de jeunes adultes alors qu’il est couramment admis que la deuxième vague de grippe commence en septembre 1918. Par ailleurs, dans les zones rurales l’épidémie est relativement courte (deux à trois semaines) en revanche la phase aiguë dure plus de deux mois dans les villes. Les mesures restrictives sont prises tardivement par les autorités sanitaires et politiques. Elles sont minimalistes et relèvent plutôt d’une réaction à l’épidémie que d’une stratégie de réduction de la contagion.
The Spanish flu in l’Hérault: impact and management of an exceptional epidemic
The Spanish flu has attracted little interest from historians in France. Obscured by the shadow of the First World War, it nevertheless raises many questions about its toll on human lives, its geographical diffusion, its perception and its experience by the populations of that time. Based on three local sources such as civil registers, hospital archives and the press, this article shows that the city of Montpellier was affected as early as August by mass deaths of young adults, although it is commonly accepted that the second wave of influenza began in September 1918. Moreover, in rural areas the epidemic was relatively short (two to three weeks) but on the other hand the acute phase lasted more than two months in the cities. Restrictive measures were taken late by health and political authorities. They were token efforts and more a response to the epidemic than a strategy to reduce contagion.
La gripa espanhòla dins Erau : impactes e gestion d’una reba fòra nòrma
La gripa espanhòla a pauc despertat l’interès dels istorians en França. Amagada per l’ombra memoriala de la Primièra Guèrra mondiala, planteja pr’aquò fòrça interrogacions quant a son bilanç uman, son espandiment geografic, sa percepcion e son viscut per las populacions d’alara. Partissent de tres sorsas localas que son los registres d’estat civil, los archius dels espitals e la premsa, aqueste article mòstra que la vila de Montpelhièr es tocada tre lo mes d’agost per de decèsses massisses de joves adultes, alara qu’es correntament admés que la segonda ondada de gripa comença en setembre 1918. En mai d’aquò, dins las zònas ruralas la reba es relativament corta (doas a tres setmanas). En cambi, la fasa aguda dura mai de dos meses dins las vilas. Las mesuras restrictivas son presas tardièrament per las autoritats sanitàrias e politicas. Son minimalistas e ressortisson mai una reaccion a la reba que d’una estrategia de reduccion de la contagion.
Introduction
La grippe espagnole est un quasi angle mort de l’historiographie française. Une dizaine à peine d’articles lui est consacré. Pourtant l’épidémie comporte de nombreux volets sous explorés. Les aspects épidémiologiques requièrent des études plus précises sur le bilan humain établi en France à 240 000 morts mais dont la répartition géographique (entre les régions françaises, entre les zones rurales et les villes) reste méconnue 1. De même la chronologie de la grippe est mal établie. Si les premiers cas apparaissent en avril 1918 en France, on cerne mal la progression géographique de l’épidémie. Enfin, le contexte de guerre occultant les effets de la grippe et censurant les paroles, on connait peu de choses sur sa perception par les contemporains et sur sa gestion par les autorités locales. Comment la population vécut-elle l’épidémie ? Quels impacts réels sur le fonctionnement de l’économie l’épidémie engendra-t-elle ? Quelles furent les mesures prises par les autorités et furent-elles efficaces ?
Par ailleurs, il faut reconnaitre que l’historiographie de la grippe espagnole tant en France qu’à l’étranger est très dépendante des sources militaires. En France, les archives du service de santé des armées au Val de Grâce sont très riches mais ne donnent qu’une vision partielle de l’épidémie et de sa gestion. Aussi semble-t-il nécessaire de convoquer d’autres sources locales qui, par leur précision, permettent de répondre à un certain nombre des questions problématiques soulevées plus haut. Après une présentation générale de la pandémie de grippe espagnole de 1918-1919, l’article s’attarde sur l’épidémie dans le département de l’Hérault au travers de trois sources principales : les archives des hôpitaux, les registres d’état civil et la presse. Les deux premières sources entrent dans l’épidémie par la mortalité et sa chronologie. L’article revient ensuite par la presse et diverses sources officielles sur l’impact de la grippe sur la vie économique et sociale, son vécu par la population et les mesures restrictives prises par les autorités.
1. La grippe espagnole. Une pandémie unique au XXe siècle.
Avant d’aborder le vécu et les impacts de la grippe espagnole dans l’Hérault, il faut dépeindre les éléments de contexte nationaux et internationaux qui conditionnent notre vision de cette pandémie.
1.1. La grippe espagnole en France et dans le monde
La grippe espagnole se répand à travers le monde entre mars 1918 et l’été 1919. L’agent pathogène, le virus A(H1N1) découvert en 1933 et identifié en 2006, est particulièrement agressif. Outre le tableau clinique classique d’une grippe (céphalée, fièvre, fatigue), il induit des formes compliquées à localisation broncho-pulmonaire parfois mortelles. La classe d’âge la plus touchée se situe entre 15 et 45 ans ce qui la distingue de la grippe saisonnière touchant principalement les personnes les plus âgées.
En France, les premiers cas de grippe compliquée entraînant des décès sont détectés dans l’armée en avril 1918. À plusieurs endroits (Montolieu dans l’Aude 2, Villers-sur-Coudun dans l’Oise 3…) des épidémies fulgurantes de grippe sont signalées. Le centre hospitalier mixte de Sète 4, enregistre les décès de deux adultes de 33 et 28 ans les 4 et 6 mai pour « pneumonie droite » et « bronchite spécifique ». Un navigateur originaire de Bordeaux âgé de 48 ans qui décède le 7 juin 1918 y est le premier signalé mort de la « grippe ». Néanmoins ces quelques cas mortels n’inquiètent pas les autorités. Cette phase peu létale dure jusqu’en juillet 1918. La seconde phase débute en août ou septembre selon les endroits. Elle associe un grand nombre de malades comme dans la première phase mais avec un taux de létalité anormalement élevé pour une grippe. Le mois d’octobre est le pic de l’épidémie. L’économie du pays, déjà mise à mal par l’effort de guerre, est malmenée par l’absentéisme dû au grand nombre de malades et aux personnes restant à domicile pour les veiller. Une troisième vague intervient en février-mars 1919. Les derniers cas sont recensés en mai 1919 en France et en août 1919 en Océanie 5. Par la suite, le virus se « saisonnarise », revenant lors des hivers 1920, 1921… en faisant à chaque fois quelques milliers de victimes 6.
Le bilan mondial a été établi entre 50 millions et 100 millions de morts, l’incertitude régnant sur la mortalité en Chine et dans les empires russe et ottoman 7.
1.2. La diffusion géographique
Pour des raisons inconnues (mutation du virus, développement des pathogènes respiratoires ?), les cas mortels se multiplient à partir d’août 1918 principalement chez de jeunes adultes (15-45 ans). Curieusement les classes âgées sont relativement épargnées. À partir du mois de septembre, la diffusion de la grippe à l’échelle internationale se fait par les transports de troupes entre l’Europe, les pays alliés et leurs colonies. L’arrivée de navires chargés de soldats coïncide avec l’éclosion de la grippe en Afrique, en Asie puis en Océanie. À Dakar, au Cap, à Bombay… on sait désigner le navire source de la contagion, la maladie essaimant ensuite vers les intérieurs par les voies ferrées mais aussi de proche en proche par les déplacements à pied.
Les voies de la diffusion à l’échelle nationale et locale sont assez obscures. Les recherches entreprises pour identifier un point de départ de l’épidémie en France ou même en Europe sont restées vaines 8. Les témoignages écrits évoquent une épidémie se déclarant dans tel village puis disparaissant après avoir touché 30 à 50 % de la population pour aller sévir dans le village voisin. Car c’est bien là une limite essentielle de la reconstitution rétrospective de cette maladie : on ne dispose pas de statistiques fines de la morbidité à l’échelle locale. Or la grippe est extrêmement contagieuse. Elle produit certainement une bonne part de malades asymptomatiques ou bénins qui s’en tirent avec un écoulement de nez ou une petite fièvre. Les décès qui, eux, laissent une trace plus fiable dans les statistiques, ne sont que la partie émergée de l’iceberg épidémique.
Ainsi lorsque l’on enregistre des décès dans un village ou une région, la maladie y rode depuis plusieurs jours au moins. On a montré dans d’autres pays le rôle du rail dans la diffusion de l’épidémie 9. En dehors de ces quelques cas, il faut reconnaitre que l’épidémie est quasi anisotropique comme si elle éclatait ici ou là de façon aléatoire. Il faut rappeler que les populations de cette époque sont très mobiles. On n’hésite pas à faire 20 km en une journée à pied, à vélo ou en carriole pour aller vendre telle marchandise dans la ville voisine, aller vendanger à l’autre bout du département ou revenir en permission.
1.3. Une épidémie en temps de guerre
L’économie et la société européennes sont engluées dans une guerre interminable et ce contexte de guerre pèse évidemment sur le pronostic de la pandémie. Dans de nombreux pays, les ressources humaines et matérielles médicales sont réquisitionnées pour l’effort de guerre. En France, tous les personnels de santé de moins de 50 ans sont mobilisés. Les médecins âgés sont rappelés pour exercer dans le civil 10. Les pharmacies sont tenues par les épouses ou les parents des militaires mobilisés. La pénurie matérielle est chronique. Les médecins manquent de carburant pour visiter leurs malades. Cette ponction des moyens pour l’effort de guerre explique aussi le manque de données sanitaires sur la population civile.
Après la Première Guerre mondiale, la grippe espagnole tombe dans l’oubli. Ce silence est particulièrement fort en France et s’explique par plusieurs facteurs. Tout d’abord la grippe est une maladie réputée bénigne, non soumise à déclaration obligatoire, et tant que ses complications restent sous contrôle (c’est-à-dire jusqu’en août 1918), elle ne suscite pas d’inquiétude outre mesure de la part des autorités militaires et politiques. De plus la construction de la mémoire collective de la Première Guerre mondiale s’est cristallisée sur des héros comme le poilu, Foch, Pétain, Clemenceau et sur des lieux symboliques (Verdun, l’Arc de Triomphe, les monuments aux morts…). Il n’y avait pas de place dans cette mémoire collective pour la grippe espagnole. Enfin, la grippe ne fait pas sens non plus dans le discours de l’époque sur le progrès de la médecine. Grâce à l’asepsie, aux vaccins et aux progrès de l’hygiène, l’homme du début du XXe siècle pense que les épidémies seront tôt ou tard jugulées. Les maladies infectieuses qui restaient au XIXe siècle la principale cause de mortalité (typhus, rougeole, choléra, etc.), appartiennent au passé. Or, les autorités politiques et médicales se sont trouvées démunies face à la grippe espagnole. Elles ont été incapables de la combattre et le bilan a été très lourd : 240 000 morts en France. Les élites médicales ont été en échec total et n’ont pas tenu à ce que l’événement soit célébré.
2. Un évènement sous exploré
Pour ces raisons, la grippe espagnole reste un événement sous-exploré par les historiens. C’est particulièrement le cas en France où elle n’a suscité que quelques études générales et locales 11. Pourtant, à y regarder les sources locales sont abondantes et sous exploitées.
2.1. Questions de recherches locales
Dépeindre l’intégralité d’une épidémie d’une telle ampleur est difficile car, comme la Grande Guerre, elle touche tous les compartiments de la société : armée, économie, rapports sociaux, démographie…. Tout n’est pas élucidé sur la grippe espagnole (et sans doute ne le sera-ce jamais). Outre les questions de l’origine géographique du virus à l’échelle mondiale qui relève de la virologie, la géographie de l’épidémie à l’échelle nationale et locale reste floue comme on l’a vu : comment s’est-elle diffusée ? A partir de quels foyers ? A quoi correspondent les trois phases habituellement identifiées ? Comment expliquer la mortalité des jeunes adultes ? D’autres questions concernent la confirmation des bilans existants. En France, deux études convergent avec des méthodes différentes pour donner un bilan de 240 000 morts mais les sources sur lesquels elles s’appuient sont lacunaires 12. La statistique sanitaire est la dernière des préoccupations dans la médecine civile en déshérence de 1918. Un réexamen des taux de mortalité par des sources démographiques serait bienvenu. Enfin on sait peu de choses sur le vécu des populations et sur les impacts économiques de l’épidémie. Quel était le sentiment des populations ? Peur, banalisation, indifférence, résignation ? Les réponses, si elles existent, ne viendront que de l’examen précis de sources locales. Nous en avons mobilisé trois pour l’Hérault : les données hospitalières, les registres d’état civil de décès et la presse. Les archives des hôpitaux permettent de reconstituer la chronologie fine de la mortalité et concentrent la plus grande misère liée à cette maladie. Les données démographiques et chronologiques sont confirmées par l’examen (non exhaustif) des registres d’état civil. Enfin, l’examen de la presse renseigne – pour qui veut bien lire entre les lignes – sur les impacts sociétaux et le vécu de la grippe dans la société du sud de la France en 1918-1919.
2.2. Les sources militaires
Les plus abondantes sont les sources militaires. L’institution militaire surveille de près la santé de ses soldats, soucieuse de ne pas reproduire les erreurs du XIXe siècle lorsque la moitié des rangs de l’armée étaient ravagés par la dysenterie, le typhus ou autre rougeole. Les archives du service de santé des armées au Val de Grâce à Paris forment une mine considérable largement exploitée et qui permet de relater les hésitations de l’institution militaire face au fléau 13 et donnent accès à la réglementation (arrêtés, circulaires) encadrant la gestion de l’épidémie.
2.3. Les sources locales
Les sources médicales sont aussi intéressantes et abondantes. Nous avons exploré précédemment les thèses de médecines déposées à l’Université René Descartes à Paris mais la faculté de médecine de Montpellier doit recéler le même type de thèse, fort précieuse pour la description des cas cliniques ou la description monographique de l’épidémie dans une région donnée 14.
Pour revenir aux sources de première main, les archives municipales et départementales disposent de fonds spécifiques sur la grippe. Aux archives départementales de l’Hérault, des liasses conservent les correspondances entre les instituteurs et directeurs d’école et la hiérarchie (inspecteur et recteur) sur les cinq départements de l’académie 15. Les archives des hôpitaux sont également intéressantes, nous y reviendrons. Encore cette liste est-elle loin d’être exhaustive : sans doute existe-t-il dans les archives préfectorales ou certains fonds communaux des traces de cette épidémie.
Les registres d’état civil fournissent les listes annuelles des naissances décès et mariages depuis le début XIXe siècle en général. Ils sont conservés en mairie et sont consultables après 70 ans pour les décès. Pour le département de l’Hérault, la plupart des registres décès de 1918-1919 sont consultables en ligne aux archives départementales. Les registres communaux des actes de décès fournissent l’identité de la personne, son adresse, sa date de naissance, la date, l’heure et le lieu du décès. La cause du décès n’est pas mentionnée sauf exception. On connait en général la profession de la personne décédée et les identités de son conjoint et de ses parents. En l’absence d’indication sur la cause du décès, comment établir qu’il y a eu un impact de la grippe sur la mortalité communale ? Quels décès attribuer à la grippe ? Il faut un faisceau d’indices combinant une concentration de décès sur certains mois en particulier septembre et octobre 1918 voire sur certains jours. L’âge des personnes décédées en particulier la surreprésentation des jeunes femmes est un autre indice. Les effets de famille lorsque plusieurs décès sont observés dans une fratrie ou dans un voisinage sont aussi révélateurs. Une fois l’impact de la grippe espagnole établi, il peut être quantifié par comparaison avec la mortalité des années précédentes tout en défalquant les effets de la guerre (morts pour la France, transcriptions).
2.4. La presse pour qui sait lire entre les lignes
La dernière source à nos yeux la plus intéressante car la moins transparente est la presse. Elle laisse entrevoir les impacts économiques et sociaux. Même affaiblie après quatre ans de guerre, la presse écrite est le médium omnipotent à l’époque. La presse quotidienne parisienne a déjà été exploitée 16. Aussi nous pencherons nous sur la presse régionale encore plus hermétique et lacunaire que sa consœur nationale sur la grippe espagnole. Ce mutisme relatif n’est pas à mettre sur le compte de la censure officielle. D’après Bouron 17, il n’y aurait eu en France qu’un seul article véritablement censuré traitant de la grippe espagnole. On peut expliquer ce silence de la presse par plusieurs facteurs : la grippe est bénigne et il n’y a pas lieu de s’émouvoir outre mesure. Par ailleurs, la France est fort préoccupée par l’offensive allemande qui, depuis le mois de mars 1918, menace Paris. Les Allemands tentent de mettre tous leurs efforts dans la bataille avant que les renforts américains, qui arrivent depuis 1917, ne soient pleinement opérationnels. En réalité, la censure est plus inquiète des grèves qui éclatent dans les usines métallurgistes du pays en mai 1918. Le péril révolutionnaire parait bien plus dangereux que le péril grippal 18. Enfin, en quatre ans de guerre, la presse a été débarrassée de ses éléments déviants qui ne participeraient pas à l’« Union sacrée ». C’est plutôt l’autocensure qui bâillonne la presse, de crainte de subir des sanctions a posteriori 19. La presse étrangère est plus loquace en particulier en Espagne où elle raille le Roi Alphonse XIII et ses ministres cloués au lit en mai 1918, parlant d’« épidémie à la mode ». La presse espagnole sera reprise par les journaux anglais et français qui consacreront le terme d’« espagnole » pour qualifier une pandémie qui n’a rien d’ibérique dans son origine.
3. Les hôpitaux : l’enfer des malades
3.1. sources, méthode et limites
Dans le département de l’Hérault, la ville de Montpellier comptabilise en 1918 une vingtaine d’hôpitaux avec un nombre de lits variant entre « 5 500 et 6 200 » 20. Pour la ville de Sète, ce sont une dizaine d’établissements 21 qui cumulent au moins 1 173 lits. Les hôpitaux supplémentaires gérés par l’administration militaire s’organisaient ainsi :
- Hôpital temporaire,
- Hôpital complémentaire,
- Dépôt de convalescent,
- Hôpital auxiliaire,
- Hôpital bénévole,
Notre enquête dans l’Hérault s’est concentrée sur trois centres hospitaliers mixtes (CHM) :
- CHM Montpellier (hôpital suburbain) 22
- CHM Sète (hôpital Saint-Charles) 23
- CHM Beziers (hospice Saint-Joseph, Hôtel Dieu) 24
Les registres hospitaliers de Montpellier, Béziers et Sète sont uniquement disponibles en consultation directe en salle de lecture des archives départementales de l’Hérault. Ils contiennent des informations générales sur la personne décédée (âge, sexe, lieu de résidence), le motif de décès, la durée du séjour dans l’hôpital ce qui permet de reconstituer le profil des patients et la chronologie de la mortalité 25. Le registre du centre hospitalier mixte de Sète précise le statut du défunt (personnel militaire, infirme, réfugié) mais pas ceux de Béziers ni celui de Montpellier.
3.2. La vie dans les hôpitaux
L’accueil des malades est une question centrale dans la gestion de l’épidémie. Dans un contexte de saturation des capacités hospitalières suite à la guerre, la recherche de locaux où accueillir les grippés est un véritable casse-tête pour les préfets dont les demandes passent après les exigences de l’Armée. Le gouvernement se refuse à prendre des mesures nationales qui seraient trop visibles. Les consignes vacillent entre d’une part le fait de prendre en charge les grippés pour les extraire de la population civile et les soigner et d’autre part la réalité qui impose parfois de ne pas les prendre en charge faute de place. Les médecins recommandent de « trier » et isoler les malades ce qui transforme l’hôpital en un gigantesque ferment viral où les grippés « compliqués » sont au contact des grippés « simples » et des personnels de santé qui paient ainsi un lourd tribut à l’épidémie. Début octobre, la plupart des directeurs d’hôpitaux décident d’interdire les visites. Le Directeur général de l’Assistance publique de Paris affirme que c’est « une erreur pour le malade que son envoi à l’hôpital en raison de l’encombrement de tous les services…» 26.
Les préfets de leur côté recherchent tout ce qui peut accueillir des grippés en s’appuyant sur les autorités municipales et les commissions départementales d’hébergement : lieux de culte désaffectés, hangars que l’on réchauffe rapidement, hôtels… Les établissements scolaires sont très convoités. Signe que les problèmes ne sont pas réglés, la circulaire du 19 octobre 1918 invite dès le deuxième alinéa les préfets « à augmenter les ressources hospitalières à [leur] disposition afin d’assurer plus complètement l’isolement et l’hospitalisation des personnes atteintes » 27.
La pharmacopée du début du XXe siècle regorge de potions et panacées en tout genre sur lesquelles nous ne pouvons nous appesantir. Dans les hôpitaux, la piqure est à la mode et l’on administre aux malades toutes sortes de substances dont l’or ou l’argent colloïdal, la strychnine, l’huile camphrée, l’oxygène en injection… sans parler des saignées. À Mende, le médecin major De Jong note que sur 275 paludéens seuls 6 ont présentés des cas graves de grippe. Il poursuit : « les médecins de Mende semblent admettre que la quininisation intensive a joué un rôle prophylactique » 28.
En réalité, les descriptions de situation dans les hôpitaux dressent des tableaux peu réjouissants mêlant une forte promiscuité, des thérapeutiques hasardeuses, un bruit incessant et parfois le manque de chauffage combinée aux consignes d’aération. Le destin des malades est variable suivant leur résistance au virus… et aux traitements 29.
3.3. Les décès dans les hôpitaux
Les registres hospitaliers contiennent de précieux renseignements. Toutefois ils donnent comme tout document une vision partielle de la réalité. La grippe n’étant pas une maladie à déclaration obligatoire, la recherche des causes de décès n’est pas toujours approfondie. Si le décès est parfois désigné sous le terme de « grippe » ou « grippe infectieuse », l’attribution à l’épidémie de décès liés aux complications est plus délicate surtout au début de l’épidémie lorsque les médecins n’ont pas une connaissance bien précise de la maladie. Les complications létales les plus fréquentes sont les « pneumonies » ou « broncho-pneumonies » mais le doute subsiste sur les « congestions pulmonaires » ou les « pleurésies purulentes », les « bronchites bacillaires » et autres « bacilloses pulmonaires ». Ainsi, une première approche en surmortalité générale examine l’ensemble des décès afin d’inclure ce que l’on appelle aujourd’hui les comorbidités qui interviennent en cas de grippe (insuffisance rénale, pathologie cardiaque…). Elle compare donc le nombre de décès pendant l’épidémie avec la mortalité « normale ». Pour l’étude chronologique de l’épidémie, l’analyse se focalise sur les causes de décès notées « grippe » et les affections respiratoires (« pleurésie, pneumonie, bronchopneumonie ») croisées avec l’âge des victimes, les jeunes adultes décédés de pathologie pulmonaire ayant une forte probabilité d’avoir été contaminées par le virus de la grippe. Nous avons exclu les bronchites chroniques et la tuberculose. Pour cette dernière, les publications n’attestent pas d’une surmortalité des phtisiques lors de la grippe 30.
L’hôpital suburbain de Montpellier nous servira de fil rouge, après quoi nous comparerons à la mortalité dans les hôpitaux mixtes de Béziers et Sète. Les décès par pathologie respiratoire font partie de la mortalité courante (trois morts par mois à l’hôpital suburbain) et correspondent à la dégradation de l’état général de malades relativement âgés. De janvier à juillet 1918, 20 personnes sont décédées de pneumonie, broncho-pneumonie ou pleurésie purulente à l’hôpital (Fig. 1). L’âge moyen des personnes décédées est de 55 ans pour les hommes et 69 ans pour les femmes. Il faut ajouter sept enfants de moins de deux ans dont certains atteints de rougeole. Le terme de grippe n’est alors pas mentionné dans les causes de décès.
Entre le 1er août et le 31 décembre 1918, 92 malades décèdent de la grippe et de ses complications pulmonaires à l’hôpital. L’âge moyen des adultes (plus de 15 ans) au décès est de 33 ans pour les hommes et 29 ans pour les femmes. Il reste toujours des enfants de moins de deux ans. Les personnes âgées disparaissent quasiment 31. L’hôpital suburbain est le mieux équipé de la ville et reçoit les cas graves 32. La durée des séjours va de moins d’un jour à 14 jours mais la durée moyenne est de 4 jours et la durée médiane de moins de deux jours. Les malades sont admis tardivement et/ou l’évolution de la maladie est rapide. Plus terrible, les médecins observent que les malades arrivent par fratries entières ou entre collègues d’une même usine. Le 23 août, quatre travailleurs coloniaux d’origine tunisienne et vivant à Quissac (Gard) sont admis. Deux d’entre eux sont frères (?) (même nom de famille) et les quatre sont âgés de 20-23 ans : un seul des quatre décède à l’hôpital. Les trois autres guérissent ou sont envoyés dans d’autres établissements. Les travailleurs coloniaux, venus en France pour remplacer les hommes partis au front sont particulièrement nombreux dans les décès de l’hôpital mais rien ne permet de dire au vu de ces seuls documents que mortalité, morbidité et létalité sont supérieurs dans cette population. Le docteur Netter note que « presque tous les enfants admis pour la grippe avaient des frères ou sœurs malades et le père ou la mère soignés à l’hôpital ou en ville. Dans la plupart des familles où nous avons été appelé, il y avait plusieurs malades. Nous en avons vu 4, 6, alités simultanément ou successivement » 33.
À l’hôpital suburbain de Montpellier, on peut estimer le nombre de décès attribuables à l’épidémie à 168 sur la période août 1918 – mai 1919 (Fig. 2). La mortalité totale à l’hôpital sur cette période est de 507 décès soit une augmentation de près de 50 % de la mortalité normale. On passe de 34 décès par mois en moyenne à plus de 50.
Au CHM de Sète, sur les huit mois de l’épidémie, on recense 218 décès (septembre 1918-avril 1919) soit presque le double des 111 enregistrés pendant les huit mois précédents (janvier-août 1918). Le mois d’octobre, pic épidémique comptabilise 17 décès non grippe et 27 décès de grippe et complications soit 44 décès au total (Fig. 3).
Au CHM de Béziers, en 1918, le nombre mensuel moyen de décès passe de 20 sur la période janvier-août 1918 à 60 en septembre et 59 en octobre 1918 soit un triplement de la mortalité sur les deux mois du pic. Sur l’ensemble de la période (septembre 1918-février 1919), on peut estimer à une centaine le nombre de décès supplémentaires attribuables à la grippe. On observe toutefois une diminution des décès à partir de mars 1919, baisse sur laquelle nous reviendrons (Fig. 4).
On retrouve dans les trois hôpitaux les deux vagues caractéristiques de l’épidémie : la vague mortelle de septembre à novembre 1918 et une deuxième vague au printemps 1919 centrée sur février. Le creux de décembre-janvier est moins marqué à Béziers. Dans les trois cas, les derniers décès liés à la grippe sont signalés en mai 1919. Les différences résident dans les dates de début de l’épidémie. À Montpellier, la première mention de « grippe » apparait pour une jeune femme de 15 ans admise à l’hôpital le 3 août et décédée le 9 août. Les admissions pour cas grave suivies de décès s’enchainent ensuite (une admission pour grippe le 14, une le 15 et une autre le 16 août) avec un changement dans l’âge des personnes atteintes de pathologie respiratoires (plus de jeunes adultes).
À Béziers, le premier décès mentionné « grippe à forme pulmonaire » intervient le 9 septembre. Un premier adulte de 37 ans est mort de « pneumonie » le 29 août. À Sète, le premier décès inscrit pour « grippe » est le 31 août mais des décès de jeunes adultes sont enregistrés dès le 4 août pour « pleurésie purulente gauche », « courbature fébrile infection généralisée », « broncho-pneumonie » ou « bronchite spécifique ».
Ainsi il semble que les décès à l’hôpital aient été plus précoces à Montpellier et à Sète qu’à Béziers. Ce décalage peut être dû à une contagion initiale à partir de cas importés (troupes ?) par bateau au port de Sète. Le début de la seconde phase de la grippe marquée par une plus grande virulence est souvent donné pour septembre 34. En réalité, la deuxième phase de l’épidémie aurait commencé en août voire en juillet. Bien sûr, la principale limite de cette étude est qu’elle se fonde sur les décès et non les malades. Faute d’un signalement systématique de ces derniers, il est difficile de détecter le foyer d’origine de la maladie. La deuxième limite est l’incertitude du diagnostic des médecins d’alors. Faute d’une détection systématique du virus, impossible à l’époque, il reste un doute sur l’imputabilité de tel ou tel décès à la grippe.
4. La diffusion de l’épidémie
4.1. Sources, méthodes et limites
Outre les données hospitalières, une autre source encore sous-exploitée est le registre d’état civil. Les registres « décès » sont consultables en mairie. Dans l’Hérault, la plupart sont consultables en ligne aux archives départementales. Comme indiqué plus haut, moyennant certaines précautions, on peut détecter le passage de l’épidémie par l’étude des décès, leur nombre, l’âge des personnes décédées et certains effets de groupe (plusieurs décès dans une même famille à quelques jours d’intervalles par exemple) faute d’avoir dans ces registres l’information sur la cause du décès.
La perception de la durée de l’épidémie est avant tout question d’échelle spatiale. Il faut bien différencier la perception de la grippe au niveau local et au niveau national ; La chronologie que nous évoquions au début de cet article (en trois phases sur un an) est valable à l’échelle nationale voire mondiale. Mais localement, l’épidémie évolue par « bouffées », explosant là dans un village ou une caserne puis, ayant fait sa moisson, part contaminer une localité voisine.
4.2. L’épidémie dans les villages
Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner la mortalité dans un village de l’Hérault, Saint-Drézéry, peuplé de 600 habitants. Situé à 20 kilomètres au nord de Montpellier, il n’est pas desservi par une voie ferrée. Alors que le nombre moyen annuel de décès est d’environ une dizaine, 1918 compte 22 morts civils (Fig. 5). Le taux de mortalité brut civile passe de 17 ‰ en temps normal à 38 ‰ en 1918. La période du 20 au 28 octobre concentre dix décès c’est-à-dire le bilan d’une année moyenne (Fig. 6). Un mort par jour. Surtout des jeunes. Huit des dix défunts ont moins de 35 ans dont 3 enfants de moins de 5 ans. Par ailleurs, au moins deux des treize « morts pour la France » inscrits au monument aux morts de la commune sont décédés de la grippe. Dans ce village, le bilan de la grippe est équivalent à celui de la guerre soit un an de mortalité moyenne. En 1919, les décès attribuables à la grippe en fonction des critères énoncés plus haut sont au nombre de 2 à 3 maximum. Ainsi en ajoutant les décès lors du pic de l’épidémie, les décès militaires et ceux de 1919 on peut estimer le nombre de décès total attribuable à la grippe entre 15 et 20 soit 2,54 à 3,3 % de la population.
Ainsi l’épidémie prend-elle les villages un par un au hasard de l’arrivée d’une personne contaminée venant de l’extérieur. La grippe touche un tiers ou la moitié de la population (?), tue quelques jeunes adultes puis s’en va comme si de rien n’était.
Le travail de dépouillement exhaustif des registres d’état civil de l’Hérault est en cours mais on peut signaler par exemple qu’à Saint-Gély-du-Fesc, autre village à quelques kilomètres au nord de Montpellier, on retrouve la même dynamique. Le village de 600 habitants compte comme le précédent 10 décès par an (hors militaires). L’épidémie fait 23 morts en 1918 dont 0 en septembre mais 7 entre le 24 octobre et le 2 novembre puis 3 seulement entre mi-novembre et le 31 décembre. Les décès débutent donc 4 jours après Saint-Drézéry et l’épidémie, pour ce qui est des cas létaux, dure à peu près 10 jours comme dans le village précédent. La morbidité s’est sans doute étalée sur une période plus longue (deux à trois semaines ?) mais nous n’avons pas de données statistiques fines pour l’étayer.
Ainsi, la France rurale (où vivent près des deux tiers des Français) ne reste-t-elle pas longtemps dans la réalité de l’épidémie. Cela n’exclut pas dans certaines communes des passages multiples du virus en un même lieu 35.
4.3. Une épidémie plus durable dans les villes
Dans les villes, la durée de l’épidémie est plus longue comme on peut en juger par l’examen de la mortalité à Béziers (Fig. 7). La surmortalité a été évaluée en comparant la mortalité de 1918 à la moyenne des années 1912-1921 en excluant les décès liés à la guerre. La population de Béziers est estimée à 55 000 36 en 1918. On dénombre 1 079 décès par an en moyenne entre 1912 et 1921 (1918-1919 exclus). On compte 1 530 décès à Béziers en 1918 soit 450 décès de plus que la moyenne. On a donc en 1918 un taux de mortalité brut de 28 ‰ contre 20 ‰ en moyenne. Pour 1919, les chiffres annuels ne laissent pas apparaitre d’impact de l’épidémie sur la mortalité. Cependant, si l’on observe la mortalité mensuelle, on constate une surmortalité en janvier, février et mars 1919 compensée par une sous mortalité les mois suivants. Il se peut qu’il y ait eu un effet moisson de la grippe qui expliquerait cette sous mortalité dans la seconde moitié de 1919 (Fig. 8). Ce phénomène est couramment observé après des épidémies ou des épisodes de surmortalité collective massive 37.
Ces résultats confirment les observations dans les hôpitaux où plus la ville est peuplée (Montpellier puis Béziers puis Sète par ordre décroissant) plus la période de surmortalité liée à la grippe est longue à tel point que la rémission observée en décembre à Sète et Béziers est à peine perceptible à Montpellier.
Pour comprendre le peu d’inquiétude que suscite l’épidémie à l’époque, il faut sans doute prendre en compte cette progression a priori erratique, combinée à une relative fugacité au moins dans les zones rurales. Dans les villages, l’épidémie semble durer 8 à 10 jours. Ainsi la fulgurance du feu épidémique forge-t-elle une perception de l’épidémie qui ne participe pas à son ancrage dans les esprits. Cela contraste avec les bornes temporelles de la pandémie à l’échelle nationale (13 mois) et mondiale (18 mois). À l’échelle locale, dans les villages, le pic du printemps 1919 est peu marqué. Pour l’historien ou l’épidémiologiste, la pandémie de grippe espagnole a duré plus d’un an mais les contemporains ne l’ont véritablement touché de près qu’une à deux semaines dans les villages et deux mois environ dans les grandes villes entre mi-septembre et début novembre 1918 38.
5. La vie sociale au ralenti
Ce vécu de l’épidémie par les populations est précisément peu documenté. Au-delà des consignes prophylactiques officielles, il est malaisé de retrouver la perception qu’en avaient les populations et le degré de gêne occasionné. Le gouvernement s’appuyant sur les instances médicales comme le Conseil Supérieur d’hygiène ou l’Académie de médecine, relayées par la presse, rappelle les mesures générales d’hygiène comme la nécessité de se laver les mains au savon fréquemment, la limitation des « agglomérations » de personnes, la nécessité de désinfecter les lieux fréquentés par des malades à forme grave… Mais rien de coercitif. Les mesures contraignantes sont laissées à l’appréciation des préfets et des municipalités. Ces derniers hésitent à prendre des mesures radicales dans un pays épuisé par quatre ans de restrictions.
5.1. Les impacts sur la vie publique (sociale et économique)</
Comme précisé plus haut, la presse régionale est très discrète sur le sujet. L’analyse du traitement de la grippe dans deux quotidiens régionaux languedociens (le Petit Méridional et l’Éclair) montre une volonté évidente d’évoquer le moins possible la grippe. Notre étude porte sur le suivi de la grippe dans ces deux journaux au mois d’octobre 1918, au pic de l’épidémie. Les articles ont été recherchés à partir de mots clés comme « grippe », « épidémie », « maladie » … ou des portions de mots (« rippe », « démie »…) car la reconnaissance optique de caractère ne restitue pas toujours les mots correctement 39. Les articles relativement conséquents c’est-à-dire dépassant le simple stade de la brève et dont le titre renvoie explicitement à la grippe espagnole sont au nombre de 13 soit 8 articles dans l’Éclair et cinq dans le Petit Méridional. Ces articles sont redondants. Il s’agit d’articles « perroquet » reprenant des consignes nationales de prévention émanant du gouvernement, de l’Académie de médecine ou du Conseil d’hygiène départemental. La présentation est très factuelle. Le Petit Méridional du 20 octobre annonce : « Avis à la population ! Nous avons reçu la communication suivante : « le Conseil départemental d’hygiène de l’Hérault…. Considérant que la propagation de la grippe est le plus souvent due à une contagion interhumaine, invite les populations à s’abstenir aussi rigoureusement que possible de fréquenter les lieux de réunions tels que cinémas théâtres, cafés, les édifices consacrés au culte… » 40. Invitation mais pas de coercition. Nous sommes alors au pic de l’épidémie.
S’ajoutent à cela les brèves ou dépêches. Là, l’analyse est on ne peut plus claire : le monde entier et même la France sont touchés par la grippe mais pas Montpellier ni l’Hérault : pas moins de 12 dépêches dans le Petit Méridional nous apprennent que l’épidémie « cause de grands ravages » en Catalogne, en Allemagne bien sûr et à Copenhague 41. À Vienne, les « autorités étudient la question d’ériger des hôpitaux spéciaux » 42. Le Petit Méridional annonce même que le choléra a fait 16 morts à Berlin 43. La moitié des brèves relatant les méfaits de la grippe concerne les pays ennemis. Deux brèves concernent la France dont le Finistère où « le préfet demande la suppression de toute réunion pouvant être un foyer de propagation des épidémies en cours » 44. Les journaux relativisent en toutes occasions. Un courrier des lecteurs nous apprend que « la grippe a toujours existé » 45. Les nouvelles positives sont mises en avant et la découverte par les savants de l’Institut Pasteur Nicolle et Lebailly du virus filtrant à l’origine de la grippe a droit à la première page. De même, le 24 octobre, les deux journaux annoncent qu’un vaccin a été trouvé au Canada et que 7 000 doses ont déjà été distribuées 46.
Pour le reste, il faut lire entre les lignes car il n’y a aucune analyse détaillée de la situation sanitaire comme peuvent le faire les journaux parisiens qui diffusent parfois les chiffres de mortalité (avec des commentaires rassurants). On lit au fil des articles sur les difficultés d’approvisionnement (charbon, courrier, transports), sur la suppression de certains concours, sur l’annulation de la séance inaugurale à la faculté 47… que les fonctions de la société sont altérées non pas par des mesures coercitives visant à juguler l’épidémie mais par l’absentéisme des employés. « Par suite de l’épidémie, un grand nombre de facteurs sont malades, il en résulte […] du retard dans les distributions de courrier » relate le Petit Méridional du 11 octobre. De même, la charcuterie municipale de Montpellier ne peut ouvrir, les ouvriers ayant été soudainement atteints de grippe 48. Toujours faute de personnel, la fréquence des trains diminue. « L’état sanitaire du personnel des chemins de fer laisse grandement à désirer, l’épidémie de grippe exerçant des ravages parmi les mécaniciens et les chauffeurs où l’on compte près de 30 % de malades », écrit l’Éclair le 23 octobre. Les journaux se font le relais de plaintes sur la carence des services de nettoyage municipaux ou d’enlèvement des immondices à Sète, Montpellier, Paulhan… Le maire de Sète reconnait que « l’insuffisance de personnel et de main d’œuvre, due à l’épidémie de grippe cause un peu de flottement dans tous les services publics : enlèvement des immondices, entretien des rues et des égouts, etc. » 49
Les cours du conservatoire de musique sont interrompus à partir du 20 octobre jusqu’au 4 novembre et une séance du baccalauréat supplémentaire est annoncée pour le 11 novembre pour les candidats n’ayant pas pu se présenter à cause de l’épidémie de grippe 50.
On mesure la gravité de la situation au débordement des services mortuaires. Dès la mi-août 1918, le médecin major De Jong signale une pénurie de cercueil dans la population civile à Montpellier : « bien que nous n’ayons aucun document officiel, il est de notoriété publique que les pneumococcies graves sont nombreuses dans la population de Montpellier, nous en avons une preuve indirecte par le lugubre détail du manque brusque de cercueils» 51. En plein pic épidémique, le Petit Méridional du 31 octobre 1918 décrit ainsi la situation à Sète : « Les pluies torrentielles qu’il a fait depuis quelques jours ayant rempli d’eau les fosses creusées à l’avance […] on a déposé les cercueils dans le caveau de la chapelle du cimetière ». Le journal évoque ensuite une lettre dans laquelle l’auteur se plaint de l’absence de mesures de désinfections empêchant les familles de « rendre les derniers devoirs à leur mort, parce que chassés par les odeurs putrides » 52.
Si l’on continue à lire entre les lignes, on peut supposer une certaine réticence d’une partie de la population à sortir pour tout ce qui n’est pas utile. L’Éclair publie le 27 octobre un avis à caractère commercial disant qu’« en raison des circonstances actuelles, beaucoup de personnes désirant ne pas se déplacer, nous les informons que les cours de comptabilité et de correspondance commerciale peuvent se faire chez soi grâce à nos excellentes méthodes ».
Globalement la grippe occupe très peu de place dans les journaux (quelques % de l’espace papier). Ces derniers s’en tiennent à un « service minimum ». Ils relaient les consignes d’hygiène des autorités, cherchant à relativiser l’importance de l’épidémie qui est surtout grave dans les autres régions (à Paris) et à l’étranger. L’absentéisme touche de nombreux secteurs (services publics, transport et ravitaillement, commerces) sans toutefois les mettre complètement à l’arrêt. Les lignes de chemin de fer sont réorganisées et certaines ne sont plus desservies. Toutefois, la vie économique et sociale semble continuer puisque le congrès radical et radical socialiste se tient fin octobre à Montpellier, les résultats du baccalauréat sont publiés, on recrute des dactylographes pour les postes, télégraphe, téléphone…. Commerces, services, marchés restent ouverts. Dans ce contexte, les mesures coercitives arrivent tardivement.
5.2. Des mesures prophylactiques tardives
Les autorités sanitaires et politiques ne prennent que tardivement la mesure de la gravité de l’épidémie. Il s’agit de la grippe donc d’une maladie a priori bénigne. Au mois d’août 1918, le médecin major De Jong, adjoint technique du Directeur du service de santé de la 16e région militaire, en poste à Montpellier, se plaint de ne pouvoir faire tous les tests bactériologiques nécessaires faute de personnel qualifié et de matériel. Pourtant, en tant que médecin, il n’envisage pas de mesures restreignant la circulation des personnes. « Consigner une ville de 100 000 habitants comme Montpellier serait une mesure illusoire » écrit-il dans son rapport 53.
Comme dans de nombreuses régions, les mesures contraignantes pour la population de l’Hérault (restrictions de circulation, fermetures de lieux publics) sont tardives. Elles ne sont pas prises en prévention pour éviter la contagion mais en réaction à la dégradation de la situation. Ce n’est qu’à la fin octobre 1918, alors que la mortalité commence à décliner, que le maire de Montpellier (et d’autres maires du département), suivant les avis du Conseil Départemental d’Hygiène, arrête un certain nombre de mesures 54 :
Dans l’article premier de l’arrêté municipal sont interdites les représentations dans les théâtres, cinémas, bals publics. Les établissements où sont donnés des spectacles en général sont fermés. L’article 2 concerne la fermeture des cafés à 19 h sauf ceux servant des repas qui peuvent fermer à 21 h 30. L’article 3 interdit les cérémonies religieuses susceptibles d’entrainer une agglomération de fidèles. Ces mesures entrent en vigueur le 31 octobre. On le voit, la portée des mesures est très limitée. Les écoles ne sont pas fermées car le Conseil départemental d’hygiène estime que « notre situation sanitaire n’exigeait pas cette mesure radicale » 55. Nulle part on n’interdit la tenue des marchés. Commerces et services publics restent ouverts dans la mesure de leur disponibilité en personnel. Pourtant ces mesures coercitives du 30 octobre suscitent un billet d’humeur dans l’Éclair du 31 octobre qui, tout en remarquant qu’elles sont tardives 56, remet en cause leur efficacité soulignant que « dans les villages, il n’y a ni théâtre, ni cinémas, les cafés n’ouvrent pour ainsi dire que le dimanche, et la grippe y sévit terriblement » 57.
Les mesures sont-elles appliquées ? Difficile de le savoir. Les cinémas affirmaient juste avant l’arrêté que « la salle est désinfectée et parfumée chaque soir » 58. Sont-elles efficaces ? sans doute que non, compte tenu de leur portée plus symbolique que prophylactique. Le mois de novembre et plus encore décembre 1918 connaissent une décroissance de l’épidémie que n’entament pas les festivités du 11 novembre. Cela n’empêchera pas l’épidémie de repartir au printemps 1919 pour une troisième vague comme nous l’avons vu plus haut.
Conclusion
La grippe espagnole a suscité d’innombrables publications de par le monde. Pourtant il reste de nombreuses zones d’ombre comme la répartition géographique de la mortalité, le taux de mortalité lui-même, la diffusion de l’épidémie, la succession des fameuses trois phases. Nous avons tenté d’apporter des éléments de réponse en valorisant des sources locales. L’exploitation est incomplète et demanderait un travail beaucoup plus conséquent ; néanmoins un certain nombre de conclusions peuvent en être tirées. L’épidémie semble avoir débuté plus tôt à Montpellier, dès le début du mois d’août pour la phase « sévère » qui commence fin août début septembre à Béziers. Le cas de Sète est ambigu. Les cas de décès précoces (début août comme à Montpellier) sont difficiles à relier à l’épidémie. Il se peut qu’il y ait eu une contamination par des navires ayant accosté dans ce port mais c’est à confirmer.
Le passage de l’épidémie est très rapide dans les villages ruraux : une à deux semaines en octobre 1918. La vague du printemps 1919 est peu visible en termes de mortalité. En revanche la maladie persiste plusieurs mois dans les villes (Montpellier, Béziers, Sète) où les vagues de décès de septembre à novembre 1918 et janvier-mars 1919 sont bien visibles tant dans les registres d’état civil que dans les archives des hôpitaux. Ainsi ce type de recherche locale invite à relativiser l’impact psychologique de la crise sur les populations. En effet, si la pandémie a duré plus d’un an à l’échelle mondiale, localement sa phase intense correspondant à une forte mortalité et à des perturbations socioéconomiques palpables ne dure que deux mois maximum c’est-à-dire septembre et surtout octobre 1918. À partir de novembre 1918, l’épidémie continue mais à bas bruit jusqu’au printemps 1919.
La grippe espagnole a été oubliée, effacée de notre mémoire collective. Les raisons en sont nombreuses et ont déjà été exposées (Vinet, 2018). Mais ce décalage entre la reconstruction a posteriori par l’historiographie d’une pandémie longue, en plusieurs phases et cette relative brièveté vécue par les populations d’alors explique en partie que cette épidémie ne se soit pas imprimée outre meure dans les mémoires. La presse, muselée par la guerre a participé aussi à cette minimisation d’une épidémie qui avait l’impudeur de surgir quelques semaines avant une victoire tant souhaitée et si longtemps promise.
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VINET 2018 : VINET (Freddy) La grande grippe. 1918, la pire épidémie du siècle. Éditions Vendémiaire, Paris, 2018, 260 p.
NOTES
1. DARMON 2000 ; ANSART 2009.
2. Ce cas d’épidémie au camp de Montolieu fait l’objet de nombreux rapports et d’une abondante correspondance. On notera en particulier le rapport du médecin major Ducamp au médecin inspecteur directeur du service de santé de la 16e région du 7 mai 1918 relatant par le menu le décès du soldat en question. Archive du service de santé des armées au Val de Grâce (noté ASSA par la suite), carton 811.
3. DELATER 1923, 4114.
4. Source : AD 34 11HDT1Q49. Nous avons conservé la graphie contemporaine de la ville bien qu’elle fut orthographiée Cette jusqu’en 1928.
5. VINET, 2018.
6. DELATER, 1923.
7. JOHNSON 2003 ; CHANDRA, 2013 ; SPREEUWENBERG 2018.
8. ANSART 2009.
9. VINET 2018.
10. VIET 2015.
11. DARMON, 2000 ; RASMUSSEN, 2010 ; HILDRETH, 1991 ; FELTGEN, 2007 ; FELTGEN, 2019, etc.
12. DARMON, 2000 ; ANSART 2009.
13. VINET 2018.
14. Voir la thèse de GUÉDEL 1991 pour la grippe espagnole à Lyon.
15. Archives départementales de l’Hérault, cote 1 T 3536.
16. BOURON, 2009 ; BAR HEN, ZYLBERMAN, 2015.
17. BOURON, 2009.
18. Les Soviets sont au pouvoir en Russie depuis le mois de novembre 1917.
19. VINET 2018.
20. 21. https://sete1914.wixsite.com/setois-14-18/les-hopitaux
22. Archives départementales de l’Hérault. 3HDT1Q313 : registre matricule des malades civils (hommes et enfants males moins de 15 ans). 3 HDT1Q339 : registre matricule des malades civils (femmes et filles de moins de 15 ans). 3HDT1Q667 : registre des décès de l’hôpital Suburbain de Montpellier.
23. Archives départementales de l’Hérault, 11HDT1Q49.
24. Archives départementales de l’Hérault, 4HDT1Q133.
25. Les personnes grippées ont pu séjourner dans d’autres établissements avant cet établissement.
26. Rapporté par le Petit Journal du 13 octobre 1918. Disponible en ligne sur http://gallica.bnf.fr 27. Circulaire du 19 octobre 1918, Présidence du conseil, Ministère de la guerre. ASSA, carton 814. 28. On ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec la question de l’utilisation de l’hydroxychloroquine lors de l’épidémie de COVID19 au printemps 2020. En 1918, la quinine est abondamment utilisée comme antipyrétique. 29. On se référera aux nombreuses thèses de médecine soutenues dans les années qui suivirent la grippe espagnole, par exemple : Barbier Marguerite, La Grippe de 1918-1919 dans un service de l’hôpital Saint-Antoine, thèse pour le doctorat en médecine, faculté de médecine de Paris, 1919. BIU Medic@, Université Descartes, Paris. https://www.biusante.parisdescartes.fr/histoire/medica/index.php 30. Médecin major A. Pic, « La grippe en Suisse », rapport de mission auprès du sous-secrétaire d’État du service de santé militaire, 15 novembre 1918, ASSA, carton 813, p. 9. Voir aussi ICHOK 1923. 31. Les cas de pneumonie chronique touchant des personnes âgées ont pu être traités dans d’autres hôpitaux. Par ailleurs, il se peut aussi qu’on ait moins volontiers envoyé à l’hôpital des patients déjà malades et âgés que de jeunes adultes. 32. Médecin major A. Pic, « La grippe en Suisse », rapport de mission auprès du sous-secrétaire d’État du service de santé militaire, 15 novembre 1918, ASSA, carton 813, p. 9. Voir aussi ICHOK 1923. 33. NETTER 1918, 546. 34. PATTERSON 1991. Les auteurs estiment que la seconde vague aurait été signalée en premier lieu en France à Brest le 22 août 1918. 35. Voir dans VINET, 2018 le cas de Limoux (Aude) touché par plusieurs vagues entre septembre et décembre 1918. 36. 51 000 habitants au recensement de 1911 et 56 000 en 1921 avec un afflux de personnes venant du nord de la France et de l’étranger pendant la guerre. 37. IZRAELEWICZ, 2012 ; GARENNE, 2007. 38. Ceci est confirmé par le cas parisien où l’épidémie se prolonge compte tenu de la population très importante et du brassage continuel des populations. (Voir : Préfecture de la Seine, Épidémie de grippe à Paris. 30 juin 1918-26 avril 1919, Recueil de statistique de la ville de Paris et du département de la Seine, Paris, Service de la statistique municipale, 1919). Les journaux parisiens entretiennent tout au long du mois d’octobre la présence de l’épidémie en tenant quasiment une chronique quotidienne du mal. 39. Source : https://ressourcespatrimoines.laregion.fr 40. Le Petit Méridional du 20 octobre 1918. 41. Le Petit Méridional du 14 octobre 1918. 42. Le Petit Méridional du 12 octobre 1918. 43. Le Petit Méridional du 3 octobre 1918. 44. Le Petit Méridional du 3 octobre 1918. 45. Il s’agit évidemment d’un vaccin qui ne concerne pas le virus mais des bacilles responsables de co infections. Le virus ne sera identifié qu’en 1933 (Smith et al, 1933). Les premiers vaccins contre la grippe circuleront après la Seconde Guerre mondiale. 46. Le Petit Méridional du 30 octobre 1918. 47. L’Éclair du 25 octobre 1918. 48. L’Éclair 28 octobre 1918. 49. Le Petit Méridional du 31 octobre 1918. 50. Rapport du médecin major De Jong au directeur du service de santé de la 16e région. 18 août 1918 p.V. ASSA, carton 811. 51. L’Éclair du 10 octobre 1918. 52. Le Petit Méridional du 31 octobre 1918. 53. Rapport du médecin major De Jong au directeur du service de santé de la 16e région. 18 août 1918 p.V. ASSA, carton 811. 54. Le Petit Méridional du 30 octobre 1918. 55. L’Éclair du 28 octobre 1918. 56. A Lyon, un arrêté municipal de même nature a été pris le 14 octobre (GUÉNEL, 2004). 57. L’Éclair du 31 octobre 1918. 58. L’Éclair du 29 octobre 1918.