Catégorie : Étiquette :

Description

La facture du hautbois en Languedoc oriental

Le hautbois languedocien, en occitan l’aubòi, occupe, depuis le XVIIIe siècle au moins, une place majeure dans la vie musicale languedocienne tant rurale qu’urbaine. Jusqu’à la fin du XIXe siècle son aire de distribution, très étendue, allait de la Vallée de l’Hérault jusqu’à Nîmes et de la mer au Mont Lozère.

Dans la partie bas-languedocienne de cette aire la persistance de son usage pour l’accompagnement musical des joutes nautiques a quelque peu occulté l’ampleur ancienne de son utilisation festive (fêtes votives, carnavals, conseils de révision, bals…) mais aussi une utilisation pastorale aujourd’hui complètement disparue. Sur le Mont Lozère, le hautbois tenait une place importante parmi les instruments de musique accompagnant la danse.

Nous avons rassemblé ici quelques renseignements sur la facture du hautbois languedocien réunis à la suite d’enquêtes réalisées dans le cadre de l’Association Musica Nostra, avec l’aide de la Mission du Patrimoine Ethnologique.

Luthiers ?

Il ne semble pas que le Bas-Languedoc ait connu, au moins à une date récente, de grande tradition de lutherie avec des centres de fabrication importants comme c’est le cas par exemple pour les vielles ou les cornemuses du Centre de la France. De plus l’habitude générale chez les facteurs de hautbois languedociens de ne pas signer leurs instruments empêche l’identification du luthier à partir de l’instrument recueilli.

Fréquemment les hautboïstes fabriquaient eux-mêmes, leur instrument « à la main », c’est-à-dire sans tour, à l’aide d’un simple couteau, parfois d’une vrille ou d’une gouge. La plupart ne travaillaient que pour leurs propres besoins, leur production ne dépassant jamais quelques unités pour toute une vie. Cette pratique était très répandue chez les bergers hautboïstes, lozériens d’origine pour la plupart. On peut d’ailleurs se demander dans quelle mesure l’apprentissage du jeu et/ou de la fabrication du hautbois ne faisait pas partie de l’initiation du jeune berger.

Mais la fabrication manuelle du hautbois n’était pas exclusivement pastorale. On peut citer, parmi les hautboïstes sétois les plus célèbres, Briançon père (1859-1934) qui préférait faire lui-même ses hautbois et ceux de ses fils plutôt que de les acheter.

Faire un hautbois sans tour demandait une grande habileté ; certains y excellaient à un tel point qu’aujourd’hui il est impossible à première vue de déceler, sans le témoignage de la famille, la fabrication « manuelle » de tel instrument.

Un berger du Mas Andrieu (commune d’Argeliers) François Cathebras (1864, 1962) s’en était fait une spécialité.

Dans ce « milieu » des bergers lozériens émigrés vers la plaine, nous avons également recensé un tourneur qui faisait des hautbois, Jean couret (1884-1964) successivement berger aux Matelettes (commune de Viols-le-Fort), puis à Massargues (commune de Camas, 30) et Junas (30). Son tour et ses outils, notamment de très belles gouges avec étuis, étaient entièrement de sa fabrication. Jean Couret, comme François Cathebras, travaillait surtout pour ses collègues bergers.

Pour une période plus ancienne signalons Richard Cyprien (1848-1925) dit l’auboi, berger originaire du Pont de Montvert (48). Installé à Garrigues (34), il avait acquis une réputation de musicien de fêtes dans le Gard et l’Hérault, fait inhabituel pour un berger. Il avait fait lui-même son instrument au tour, mais nous ne savons pas précisément s’il avait travaillé aussi pour d’autres hautboïstes.

Julien Salendres (1869-1946), autre facteur de hautbois sur lequel nous avons des témoignages, était surnommé « La vinha », nom du mas où il habitait à Saint-Martial (30). Hautboïste renommé, amateur de chansons, de monologues et d’opéras, il a, par sa prestance, fortement impressionné ses contemporains. Il travaillait sur un tour fait, semble-t-il, avec une vieille machine à coudre. Comparée à celle des autres facteurs sa production a été relativement importante, répondant surtout à une demande locale, elle-même suscitée… par ses propres talents d’hautboïste. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1987

Nombre de pages

6

Auteur(s)

Pierre LAURENCE

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf