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La convention et la loi agraire – la réforme agraire

C’est un thème banal de la philosophie du XVIIIe siècle que, à l’origine de l’inégalité parmi les hommes, il n’y a pas seulement la nature mais aussi la propriété individuelle. Toutefois, très rares étaient à la Convention ceux qui en arrivaient à l’idée de bouleverser l’ordre social par l’abolition de la propriété privée. Ainsi, le 24 avril 1793, Robespierre déclare : « l’égalité des biens est une chimère ». Comme tous les révolutionnaires, il condamne la loi agraire, c’est-à-dire le partage des propriétés (en 1848, apparaîtra le socialisme des partageux). Le 18 mars 1793, la Convention avait décrété la peine de mort contre les partisans de la loi agraire.

Le droit de propriété inviolable et sacré est inscrit dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789. Robespierre, encore lui, dès le 2 décembre 1792, avait subordonné le droit de propriété au droit à l’existence. Le premier droit est celui d’exister. La première loi sociale est celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d’exister; toutes les autres sont subordonnées à celle-là. La nouvelle déclaration des droits, du 24 avril 1793, fait de la propriété non plus un droit naturel mais un droit garanti, défini par la loi : « la propriété est le droit qu’a chaque citoyen de jouir et de disposer de la portion des biens qui lui est garanti par la loi ». La législation montagnarde procède de ces principes. Le 3 juin 1793 prescrit la division en petits lots, pour la vente des biens des émigrés et le partage des biens communaux. À Nissan il faudra attendre 1795 pour voir la réalisation du partage des terres du Tontoul et de Calviez, biens de la commune dans la basse plaine de Nissan tout près du lit d’Aude-Vieux.

La loi du 10 juin 1793 autorisa le partage gratuit des biens communaux par tête d’habitant. Ce morcellement permit à un certain nombre de devenir propriétaires, mais A. Soboul, dans la 1re République (p. 130), dit que le plus grand nombre ne tira pas profit de cette législation.

Le 17 juillet 1793 entraîna la disparition de la solidarité paysanne. La dissolution du monde rural s’accentua et même s’accéléra. La paysannerie propriétaire et la grande exploitation, pressées par les besoins de main-d’œuvre ne pouvaient qu’être hostiles à l’accession des ouvriers agricoles à la propriété et à la transformation des prolétaires ruraux en producteurs indépendants. Les décrets des 8 et 13 ventôse an II (26 février et 3 mars 1794) donnent satisfaction aux sans-culottes pauvres à qui on distribue des biens des suspects.

En fait ces décrets de ventôse ne pouvaient résoudre le problème agraire. Les Robespierristes, comme les Montagnards, répugnaient à intervenir dans les questions agraires. Plus sourds les uns que les autres aux revendications des paysans pauvres, ils n’envisagèrent jamais la réforme du métayage ou la division des grandes fermes en petites exploitations et furent incapables de concevoir un programme agraire conforme aux aspirations des sans-culottes des campagnes.

La Déclaration des Droits de 1793, votée le 24 juin, est précédée pourtant d’un préambule qui va plus loin que celle de 1789. Elle proclame dans son article 1er que le but de la société est le bonheur commun. Elle affirme les droits au travail, à l’assistance, à l’instruction. Mais il ne fut pas question de modifier la définition de la propriété.

Voici le contenu de l’article 16. Il explique quelles limites les conventionnels entendaient ne pas devoir dépasser : « le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens et de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie ». Et l’article 17 confirme : « nul genre de travail, de culture, de commerce, ne peut être interdit à l’industrie des citoyens ». Les montagnards ne s’engagent pas dans la démocratie paysanne et brandissent la peine de mort contre ceux qui se hasarderaient à la proposer (Gracchus Babeuf). […]

Informations complémentaires

Année de publication

1989

Nombre de pages

6

Auteur(s)

Michel MARTINEZ

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf