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Description

Un radicalisme à la Belle-Époque sous influence :
Les républicains héraultais promoteurs de l’idéologie de l’Anti-France

* Docteur en Science Politique, Université de Montpellier I

La Belle-Époque, précédant le Premier conflit mondial est sans contexte celle de l’émergence de l’organisation politique, de la structure partisane et de son affirmation dans la société française. Forme accomplie du suffrage universel, porteur de l’éclosion de la démocratie des masses, la politique n’est plus alors le fait uniquement du personnalisme notabiliaire mais bien de marques nationales qui défendent des idéologies partout dans le territoire de la République. C’est dans ce contexte particulier d’« uniformisation » latente, où les partis politiques sont perçus comme les « enfants de la démocratie » que se crée la première formation politique en France, le Parti républicain radical et radical-socialiste (PRRRS) tant au niveau national en 1901 qu’au niveau départemental en 1904 dans l’Hérault. Son programme politique est simple, il veut enraciner la République face à ses détracteurs et en cela il s’inscrit bien dans la continuité des luttes révolutionnaires du XIXe siècle, du programme de Belleville de 1869. Le PRRRS est le parti de la défense de la République contre tous ses opposants qu’ils soient défenseurs d’une idéologie conservatrice ou collectiviste.

Le Languedoc méditerranéen est une des terres d’élection pour ce parti qui semble être hégémonique dans sa représentation politique. Parti laïc, parti de la défense de l’héritage révolutionnaire et de l’intransigeance républicaine, il ne semble en rien susceptible d’être porteur d’une revendication de rejet et de dénigrement comme celle prônée par Charles Maurras, qui dénonce tour à tour les différentes « espèces » composant l’Anti-France, « juifs, protestants, franc-maçons et métèques ». Pour autant dans l’Hérault, et en Languedoc méditerranéen, certains exemples démontrent le contraire, les radicaux-socialistes, et les républicains du Midi ont pu développer lors de campagnes électorales des arguments politiques empruntés à la frange la plus extrême des forces conservatrices.Ainsi tour à tour, nous trouvons des républicains et des radicaux-socialistes dénonçant les étrangers, les juifs, les protestants et même les francs-maçons, pourtant considérés à juste titre comme les véritables initiateurs du PRRRS. Pourquoi une telle rupture par rapport à l’idéologie prônée nationalement par le PRRRS ? Faut-il voir dans ces pratiques une forme de refus de la lente mise en place de la nationalisation du politique, avec l’affirmation de l’autorité d’une structure partisane centrale pour ne pas dire centralisée ?

Les radicaux-socialistes en dépit de leurs statuts de dignes héritiers de la Révolution française se sont montrés parmi les plus rétifs à la Belle Epoque face à cette structuration verticale, retardant même de fait jusqu’au Congrès de Pau en 1913, l’organisation de leur propre parti. Où bien faut-il seulement appréhender ces cas, comme des pics ou des expressions localisées dénuées de fondement routinier et à ce titre tout à fait exceptionnels ? L’étude des crises sociales, des pics au détriment des routines n’est pas forcément privilégiée par les politistes qui ne souhaitent pas s’attarder sur des particularismes locaux au détriment des règles générales de fonctionnement de la société. Pour autant l’étude des « moments chauds », notamment dans des périodes historiques dépassant le cadre de l’histoire immédiate, comporte de nombreux intérêts à condition toutefois de ne pas les comprendre comme des règles générales et de les replacer dans leur contexte global afin de caractériser les systèmes politiques territoriaux. L’existence de radicaux-socialistes ou de républicains, promoteurs du clivage maurrassien ne doit pas surprendre dans le contexte politico-social de la Belle Epoque, fortement imprégné par l’affaire Dreyfus. Ce fait permet seulement de revenir sur un poncif historiographique et politique qui veut qu’au lendemain de l’Affaire Dreyfus, le clivage autour des questions de l’altérité, et notamment de l’antisémitisme, intègre parfaitement les contours du clivage Gauche/Droite. L’histoire politique du mouvement républicain d’une part mais également de l’ensemble des formations politiques classées à gauche sur l’échiquier politique français ne semble pas exempte de cas rompant avec cet « idéal-type ». […]

Informations complémentaires

Année de publication

2008

Nombre de pages

7

Auteur(s)

Fabien NICOLAS

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf