Un barrage perdu dans les sables de la vallée de l’Hérault : l’écrêteur de crues de Saint-Guilhem-le-Désert

Un barrage perdu dans les sables de la vallée de l’Hérault :
l’écrêteur de crues de Saint-Guilhem-le-Désert

* Docteur en sociologie, Président de l’association le MAS des Terres Rouges.

Après la seconde guerre mondiale, une reconversion agricole est envisagée pour le Languedoc dont la monoculture de la vigne est en crise depuis de longues années. Toutefois, ce projet ne peut se réaliser qu’en modifiant les conditions d’irrigation de terres particulièrement « ingrates » et, jusqu’alors, peu productives dans tout autre développement agricole.

Afin d’apporter une réponse à cet objectif d’aménagement, les planificateurs des politiques publiques nationales 1 et les ingénieurs de la CNARBRL 2 des années 50 et 60 se sont notamment inspirés du modèle de valorisation de la vallée du Tennessee 3, une des régions les plus pauvres des États-Unis. Cette dernière était régulièrement le théâtre de très importantes inondations. En conséquence, les sols érodés avaient perdu une grande partie des terres arables ! À partir de 1933, de nombreux barrages-réservoirs et des barrages hydroélectriques furent construits pour réguler le cours de cette rivière et mieux en utiliser l’énergie. Le bas prix de l’électricité ainsi produite a favorisé l’implantation d’industries. Les retenues ont créé de nombreux lacs le long de la vallée, favorisant, par le biais d’écluses, la navigation sur plus de 1 200 km ! En parallèle, une importante politique éducative et sociale a permis aux agriculteurs originaires des lieux de diversifier leur production tout en luttant mieux contre l’érosion des sols. Cette expérience a permis de retenir l’efficacité d’un aménagement conçu d’une manière globale et totale, tout en soulignant l’effet positif d’une large concertation avec les populations locales.

Aujourd’hui, tout en reconnaissant le côté novateur de l’approche, on doit en retenir l’absence de protection de l’environnement et les dégâts écologiques qui en ont résulté. Mais, il faut convenir que cet aspect entrait peu dans la représentation sociale et psychologique d’économistes soucieux d’une « meilleure productivité » au sens des années 30-40.

Les objectifs d’aménagement de la Région « Bas-Rhône-Languedoc » s’inspirent donc de cette vision d’une action globale qui dépasse le seul aspect de l’irrigation des terres. Ainsi, notre regard se doit d’être mieux armé pour situer « le projet d’un barrage à Saint-Guilhem-le-Désert ». En effet, en dehors du canal dit du « Bas-Rhône-Languedoc » chargé de transporter, en grande quantité et au-delà du cœur de l’Hérault, l’eau vivifiante du Rhône, il s’agit aussi de mieux utiliser l’eau des fleuves cévenols et de préparer une véritable reconversion, voire une diversification, économique et sociale du pays. Plus à l’Ouest, la décision de construire un barrage-réservoir sur l’Orb permet de compléter ce premier dispositif pour l’irrigation des terres héraultaises, la production électrique et l’assurance d’un meilleur contrôle des crues du biterrois.

Potentiellement désigné comme ressource d’irrigation, le fleuve Hérault se singularise par un débit important et irrégulier. Il est projeté d’y établir une retenue d’eau d’une capacité estimée, à l’origine, à 200 millions de m3 afin d’irriguer les terres agricoles de la vallée ! Dans l’édition de 1958 4 du célèbre ouvrage « Paris et le Désert Français », Jean-François Gravier indique que l’aménagement régional envisagé fera « vraisemblablement » appel à l’usage d’apports hydrauliques secondaires, et il cite les avantages offerts par ce fleuve. Un barrage est projeté en amont de Saint-Guilhem-le-Désert, mais il pose, dès les premières études, des problèmes géologiques 5, ce qui n’empêche point d’envisager qu’il irriguera, a minima, la vallée entre Aniane et Pézenas. La superficie agricole couverte par l’arrosage est ainsi estimée, avec optimisme, à environ 15 000 ha.

Le contexte de l’époque indique également que les préoccupations des élus du Département de l’Hérault se tournent prioritairement vers la sécurité des populations. En effet, celles-ci sont périodiquement affectées par les inondations catastrophiques de ce fleuve qui se conjuguent avec celles de l’Orb à l’Ouest et de la Mosson, du Lez et du Vidourle à l’Est. Au-delà de la lutte contre les importants dégâts aux biens ruraux et urbains provoqués par l’inondation des terres et le ravinement des sols, les pouvoirs publics locaux souhaitent mieux protéger les héraultais des risques humains régulièrement dénoncés par la presse régionale. En effet, les récentes inondations des 30 septembre et 4 octobre 1958 ont, à nouveau, entraîné des pertes humaines et déterminent la nécessité d’un barrage écrêteur de crues sur l’Hérault ! C’est donc en toute logique que le Conseil Général décide la réalisation de ce barrage dans sa session des 5 et 6 décembre 1958, après avoir validé le rapport, opportunément présenté par le préfet, au mois de mai de la même année 6.

Entre l’urgence d’intervention d’élus bousculés par l’opinion publique et l’échelonnement dans le temps d’un aménagement cohérent du pays, le projet de barrage à Saint-Guilhem-le-Désert est d’emblée placé au centre d’enjeux parfois contradictoires. Comment peut-on expliquer, aujourd’hui, l’abandon d’un projet qui semblait prioritaire dans les années 50 ? Les difficultés techniques sont-elles les seules à justifier l’absence d’un barrage écrêteur de crues sur l’Hérault ? L’évolution des mentalités et des connaissances scientifiques explique-t-elle la construction d’un nouveau regard sur la problématique des inondations ? Est-ce aussi un doute sur la rentabilité économique du projet et une perception plus large des enjeux sociétaux ? En parcourant les archives et en les situant dans leur contexte, l’auteur de ce texte vise à mieux identifier et illustrer le changement de perspective dans la lutte contre les inondations et la gestion de l’eau.

La récente thèse d’Audrey Richard-Ferroudji confirme la pertinence de ce questionnement dès les premières lignes de l’introduction : « Au cours des quarante dernières années la politique française de l’eau a évolué d’une gestion centralisée et sectorielle vers une gestion se voulant plus locale, intégrée et participative. Les processus de décision ont été ouverts à un ensemble d’acteurs jusque là exclus » 7. Cet auteur relève la récente mise en place d’outils de gestion tels les contrats de rivière et les schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) 8. C’est par un arrêté préfectoral du 19 décembre 1999 que ce « schéma » est mis en en œuvre pour le fleuve Hérault. On y note l’importance du périmètre couvert, soit 166 communes, les incidences d’une gestion globale des inondations et des usages de l’eau, et le contrôle déterminant de l’Etat sur le dispositif « décentralisé », dans une ambigüité relevée par cette universitaire : « Dans le cas des SAGE comme des contrats de rivière, l’État n’est plus l’acteur central, mais il garde la décision finale, les documents élaborés devant être approuvés par le préfet. Par ailleurs, le SAGE reste soumis au SDAGE 9 (…) il s’agit d’un processus de "déconcentration" plutôt que de "décentralisation" (…) il s’agissait de redéfinir d’en haut les compétences de l’Etat et des collectivités locales (…) selon des exigences de cohérence hydrographiques » 10.

Il importe de décrypter cette évolution de l’idée, de la conception et de l’abandon d’un barrage dans les gorges de l’Hérault au cours de ce dernier demi-siècle. Une perspective historique s’impose donc pour mesurer la nature et la « bascule » des enjeux dans la gestion du territoire.

Une histoire de quelques crues de l’Hérault et de leurs effets

Ce texte relève les crues les plus importantes afin d’identifier les risques économiques, sociaux et humains dont elles sont la source. Cette approche « extrême » permet également de situer la singularité du fleuve par la répétition de ses débordements catastrophiques. En effet, sur ce thème, l’opinion des géographes spécialisés est sans appel : « L’Hérault se signale par des crues dont quelques-unes l’ont rendu justement célèbre dans le monde des hydrologues ; mais hélas bien terrifiant pour les populations riveraines. En effet, l’homme qui vit sur les rives de l’Hérault ou l’un de ses affluents sait très bien qu’une crue est toujours possible surtout en automne » 11.

La mémoire collective a retenu que la crue du 5 octobre 1812 a été la plus importante 12 qui se soit produite en amont du Pont du Diable sur la commune de Saint-Jean-de-Fos. Les connaissances sur cette crue sont malheureusement ténues, mais nous savons qu’elle « atteignit la cote de 7,72 m au Pont de Cazilhac à Ganges… 13 » et que la hauteur d’eau a atteint, le 18 octobre à Gignac, un pallier à 12 m ! Nous ignorons quelle a été la hauteur d’eau à Agde pour cet épisode catastrophique. Il est important de relever que ces mesures ont été effectuées en amont des autres gros affluents de la rive droite de l’Hérault que sont la Lergue, la Boyne, la Peyne et la Thongue. Pour avoir une perception plus nette des risques d’inondation de la basse vallée de l’Hérault, il convient donc de mesurer les apports spécifiques de ces rivières lorsqu’elles sont en crue. C’est à partir de Gignac que les indicateurs sont les plus pertinents car ces rivières ont leur confluent en aval de cette ville. En guise de références, il faut retenir la crue de 1890 dont la hauteur mesurée à Gignac atteint 10,80 m pour 2,75 m à Agde ; celle de 1900 dont les caractéristiques sont respectivement, de 10 m et 2,70 m ; enfin celle de 1907 pour 10,60 m et 3,80 m. Nous ne retrouvons une hauteur en amont de Gignac supérieure à 10 m qu’en 1958 pour une hauteur d’eau à Agde de 2,30 m 14 ! Les variations de ce rapport entre la hauteur d’eau à Gignac et celle-ci à Agde situent l’apport de ces affluents à partir de la moyenne vallée de l’Hérault. Ce rapport des hauteurs d’eau n’est pas constant et peut être moins marqué lorsque les apports sont plus importants au niveau de la moyenne vallée de l’Hérault. Par exemple, le 21 décembre 1932, on relève une hauteur de 5 m à Gignac pour une hauteur 3,20 m à Agde ! L’importance des débordements dans la basse vallée de l’Hérault semble donc fortement dépendante des affluents de la moyenne vallée de l’Hérault et de la conjonction en intensité, en durée et en localisation des épisodes orageux, facteurs essentiels de la violence des crues. Ces éléments sont donc connus au moment de la décision de construire le barrage de Saint-Guilhem-le-Désert.

C’est ce qu’indique la CNARBRL en déclarant que cet ouvrage réduira le débit du fleuve à 500 m3/sec, quelle que soit l’importance de la crue, ce qui « contribuera dans une proportion importante à atténuer les crues de l’Hérault dans la basse vallée. Cependant, (souligne le rapport) si l’on tient à assurer la protection totale de cette basse vallée, il ne sera plus possible de négliger les apports des affluents de l’Hérault en aval de St Guilhem le Désert ». Ainsi, les experts sont d’avis qu’un barrage à Saint-Guilhem-le-Désert contribue seulement en partie à l’écrêtement des crues qui inondent la basse-vallée de l’Hérault 15.

C’est pourtant dans cette dernière partie de la vallée que les dégâts économiques sont les plus conséquents. En effet, on considère que les crues qui dépassent 3 m à Agde ont lieu « en moyenne tous les trois ans et peuvent parfois durer jusqu’à une semaine et (…) que le champ d’inondation peut avoir jusqu’à 4 km de largeur dans la basse vallée de Florensac et atteindre une superficie (…) de 4 700 ha en aval de Saint-Guilhem (…) et qu’elles sévissent fréquemment dans les mois de septembre et mars, c’est-à-dire pendant les vendanges, soit au début de la végétation de la vigne, ce qui favorise le développement du mildiou 16 ». Il s’agit donc de protéger les terres agricoles, c’est-à-dire la vigne, qui sont périodiquement inondées à hauteur de Florensac et d’Agde. Par le passé, l’histoire de la ville d’Agde 17 retient que, bien avant le développement de la vigne dans la plaine, « les inondations qui se renouvellent plusieurs fois dans l’hiver ne laissent communément à déplorer après elles que la perte de quelques semences. Elles sont occasionnées par les débordements de l’Hérault, grossi à sa source par les pluies que produisent les nuages qui s’élèvent de la mer ; ceux-ci poussés par les vents d’est, sont amoncelés contre les montagnes des Cévennes, où ils se résolvent et d’où ils se précipitent en torrents qui inondent le plaines et qui entraînent les arbres, les animaux, même quelquefois les maisons ». La mémoire des agathois retient qu’en novembre 1766 la ville n’était plus qu’une île impossible à aborder ! Le niveau des eaux était alors plus considérable que nous ne l’avons indiqué ci-dessus, avec une perception plus mesurée, semble-t-il, des effets catastrophiques. En effet, la description de l’événement montre que la population, encore très proche de la nature, a intégré comme allant de soi la répétition des débordements du fleuve.

C’est la crue du 30 septembre 1958 18, dans la haute vallée de l’Hérault qui pousse les élus à voter la construction du barrage. En effet, la description de cet événement souligne la violence des flots et leur incidence sur les représentations sociales : « Ce fut un gonflement monstrueux et soudain de l’Hérault supérieur et de ses affluents cévenols l’Arre, le Rieutord et la Vis. La rivière en fureur cota 8 m à Ganges et 10,80 m à Gignac 19 ». Sachant que le débit moyen du fleuve est de 43,7 m3/sec, on peut mieux comprendre l’impression produite lorsqu’on atteint 2 360 m3/sec au Pont de Bertrand 20 ! Les effets les plus visibles d’un tel déferlement s’observent par l’importance des ravinements, des glissements de terrains et des transports d’alluvions 21. Les débordements à Agde sont également impressionnants, mais comme nous l’indiquons ci-dessus, ils n’atteignent pas, au cours de cette crue, des valeurs aussi élevées qu’en 1907 22.

Au-delà de la légitime protection des populations des risques d’inondation et de la prévention des dégâts aux biens, quelles sont les contraintes économiques et les représentations sociales qui motivent la décision d’élever un barrage ?

L’économie régionale, l’opinion publique et la demande sociale des années 50-60

Les premières réunions de la commission de modernisation et d’équipement de la région Bas-Rhône-Languedoc 23 ont pour objet l’étude de la faisabilité d’une reconversion agricole. Différentes propositions sont faites pour trouver des cultures de substitution à la vigne. Au plan gouvernemental, le Ministère de l’Agriculture souhaite développer la culture du maïs dans le cadre du nouveau plan d’aménagement prévu de 1952 à 1956, mais la commission 24 souligne les difficultés d’une coordination de la production et du marché et fait preuve de prudence dans ce domaine. Dans les faits, les décisions prises visent à garantir les prix et à donner une assurance sur l’écoulement de la production. En effet, le problème est complexe car il faut également veiller à prendre les mesures indispensables à la conservation du maïs, à son séchage et à la mise au point d’une méthode de lutte contre les parasites, ce qui est loin d’être résolu. Par contre, la réussite du développement de la culture du riz en Camargue et l’analyse de la demande du marché incitent son président à recommander ce type de culture « partout où elle est techniquement possible et encouragée dans les cas les plus intéressants : sols incultes, culture de substitution, etc.  ». Mais les choix ne sont pas seulement techniques malgré l’éventail des productions céréalières possibles et les ouvertures envisagées dans le domaine de l’élevage. Ils sont aussi confrontés aux mentalités des populations concernées par ces changements.

En effet, le regard porté sur les bienfaits supposés de l’irrigation montre qu’il y a des risques induits à anticiper, car « l’eau (mise) à la disposition du viticulteur risque d’accroître les dangers d’une surproduction déjà redoutable 25 ». Selon le rapporteur de la commission 26, il semble que de nombreux viticulteurs de la vallée de l’Hérault « désirent l’eau dans la seule pensée d’arroser leur vignobles ». On doit donc envisager de compléter les efforts des économistes et des techniciens « par une enquête auprès des usagers, sinon par leur éducation (…) la réussite du projet dépend de la coïncidence entre les réactions des agriculteurs, devant cette richesse nouvelle, et les perspectives des organisateurs ». Il y a donc une prise de conscience de la nécessité de s’adapter à la psychologie des populations locales. En effet, le succès de cet aménagement est lié à la participation effective des hommes et à l’accompagnement de leur activité productrice. À l’appui de ce constat, on note la dépendance du Conseil Général de l’Hérault 27 aux contraintes d’une production et d’un marché non maîtrisé. À titre d’exemple, on relèvera non sans humour que les problèmes du vin et de l’eau d’arrosage sont, dans ce domaine, intimement liés. En 1956, les stocks de vins sont encore de l’ordre de 20 millions d’hectolitres ! Et, ce ne sont pas les gelées de février et les événements d’Algérie qui vont entraîner un approvisionnement insuffisant du marché. En effet, les prévisions de récoltes permettent de considérer qu’il y aura un excédent important et qu’il convient de prendre des mesures de sauvegarde de l’économie locale.

Malgré cela, la proposition d’une reconversion partielle de l’agriculture n’arrive qu’au septième rang des propositions des élus, bien loin derrière les mesures traditionnelles de la distillation ou de la fixation d’un prix « social » du vin. Les mentalités ne sont pas encore prêtes à abandonner, même partiellement, la viticulture profondément ancrée dans les usages culturels du pays. Le programme d’action cité ci-dessous confirme cette analyse :

  • Organisation permanente du marché des vins par la création d’une société d’intervention ;
  • Fixation du prix social du vin ;
  • Distillation prévisionnelle ;
  • Revalorisation du prix des alcools ;
  • Arrêt des importations de Tunisie et du Maroc et contingentement des vins d’Algérie ;
  • Détaxation définitive des droits sur les vins ;
  • Aide plus efficace à la production des jus de fruits… avec distribution dans les écoles ;
  • Une aide plus substantielle pour les viticulteurs décidés à faire de la reconversion agricole ;
  • Aide plus large à l’exportation des vins ;
  • Mesures énergiques contre « les saboteurs de la viticulture » qui, sous couvert d’une lutte antialcoolique, mènent une campagne contre le vin.

Ce contexte économique difficile pour la viticulture héraultaise est alourdi par les effets encore présents de catastrophes naturelles majeures. Comme cela a été souligné dans le paragraphe précédent, l’année 1953 est celle des grandes inondations d’après-guerre. La sollicitation d’une aide de près de deux milliards de francs de l’époque auprès du Conseil Général de la part d’une association biterroise de sinistrés pour protéger les bas quartiers de la ville de Béziers devient l’élément déclencheur d’une nouvelle politique publique en matière de protection des populations héraultaises. Jusqu’à présent, la prise en charge des constructions de défense contre les inondations est du seul ressort des communes concernées et parfois de certaines associations syndicales autorisées en matière de gestion de l’eau d’irrigation. Dans le cas présenté, il s’agit de mieux protéger la ville et d’agir en amont du cours du fleuve Orb. Les discours des élus portent sur la faisabilité d’attribution d’une aide financière à un interlocuteur potentiel : la ville   Elle n’a rien demandé ! L’association ? Est-ce juridiquement possible ? Le Conseil Général ne semble pas avoir cette compétence d’intervention, mais pense qu’il faut agir d’une manière globale en amont, sur le parcours du fleuve. Il faut une coordination sinon chaque commune, responsable de sa défense contre les inondations, va renvoyer le problème à celle qui est située en amont. Le partage des dépenses de protection, sous la forme d’un endiguement, est très compliqué à résoudre et dépend fortement des moyens de chaque commune, ainsi que de l’importance du risque à couvrir.

Le 21 mars 1954, une association des riverains de l’Hérault des cantons d’Agde, de Florensac, de Montagnac et Pézenas est à l’initiative d’une résolution 28 : « Considérant l’importance des dommages occasionnés aux sols et aux ouvrages de protection par les inondations successives, considérant qu’il n’est pas possible aux agriculteurs d’entreprendre des cultures sur des terres ravinées plusieurs fois par an par des inondations successives, demandent instamment au Gouvernement de prévoir les crédits nécessaires à l’étude d’un barrage régulateur de crues et permettant également l’irrigation de la vallée, demandent que ce barrage soit compris dans le projet d’aménagement et de modernisation de la région Bas-Rhône-Languedoc dont ils souhaitent la réalisation la plus rapide ». Ce texte est prudent car il ne demande que le financement d’une étude pour la construction d’un barrage sur le fleuve et souhaite l’inscription de la construction de ce dernier au plan d’aménagement régional.

Cette résolution est opportune pour le maire de Pézenas, Jean Bène, également Président du Conseil Général. En effet, il adresse, deux mois plus tard 29, la copie de cette résolution au Préfet pour qu’elle soit transmise aux ministères concernés. Par la suite, le Conseil Général adopte, dans sa session de novembre 1954, le vœu suivant : « À l’unanimité, l’assemblée départementale a adopté cette motion qui réclame l’exécution rapide des travaux envisagés qui permettront à de nouvelles cultures de se développer, à des industries de s’installer, et à la main d’œuvre au chômage de trouver la sécurité par le travail 30 ». La conjonction de ces demandes semble témoigner du sens stratégique de Jean Bène pour obtenir les aides souhaitées du pouvoir central et aller dans le sens d’une mutation économique du département.

Une résistance à ces projets s’organise rapidement, car les viticulteurs sont contre l’irrigation des vignes. C’est par exemple le syndicat des vignerons de Béziers-Saint-Pons 31 qui exprime « sa réserve » sur ce vœu en raison « de l’équivoque trompeuse qui est entretenue au sujet du projet d’irrigation » et entend subordonner un avis favorable « à la condition que l’irrigation n’intéresse pas les vignes et n’entraîne aucune obligation d’arrachage ». Le discours politique visera à rassurer les viticulteurs en les laissant libres de leur choix.

Poursuivant sa stratégie de transformation du paysage économique du pays, le Conseil Général de l’Hérault entre, le 30 octobre 1955, dans le capital de la CNARBRL 32 et souscrit pour cent millions de francs 33. Le Président Jean Bène, sénateur SFIO, devient administrateur de cette compagnie. Un second siège d’administrateur est demandé pour un autre membre de la majorité départementale (radical-socialiste). Dans le droit fil de cet engagement, le troisième plan d’aménagements régionaux 34 pour le Bas-Rhône-Languedoc réserve 4 milliards de francs destinés à la réalisation du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert en soulignant qu’il est « non concédé à la CNARBRL ». Il n’entre donc pas, a priori, dans le programme d’irrigation de cette compagnie. Cette proposition est reprise dans le bulletin du Ministère de l’Agriculture 35 : « le barrage de St Guilhem reste en dehors des travaux concédés à la Cie (…) prévus pour 4 milliards ». Paradoxalement, ce barrage figure au « bilan » des activités de la compagnie dans son rapport du 31 mars 1957 dans lequel il est écrit que « Dans la vallée de l’Hérault, il est envisagé de construire, en amont de Saint-Guilhem-le-Désert, un barrage susceptible de retenir 150 millions de m3. Une partie des eaux retenues permettra d’assurer éventuellement l’irrigation de la moyenne vallée de l’Hérault, entre Gignac et Pézenas ».

Le fait de ne pas entrer dans le cadre des travaux définis par les statuts de la CNARBRL permet donc de poursuivre sans entrave le projet de construction d’un barrage sur l’Hérault. En effet, il ne semble plus nécessaire de faire de l’irrigation une contrainte absolue. Toutefois, on conserve la possibilité d’ouvrir cette perspective si la réserve d’eau peut être réalisée. Cette démarche permet d’obtenir, malgré les incertitudes, l’adhésion d’une majorité d’élus cantonaux.

Dans sa session de décembre 1958, l’assemblée départementale 36 pose principalement le problème de la régularisation du cours de l’Hérault et souligne la nécessité de mener une étude approfondie des terrains calcaires à partir de « reconnaissances spéléologiques extrêmement importantes ». Cette double demande témoigne des hésitations des élus devant les enjeux présentés… et le coût de la réalisation. Un dossier a été établi par la CNARBRL malgré son « incompétence supposée » en matière de construction de barrages régulateurs de crues et est présenté aux élus. Le rôle du Président du Conseil Général, administrateur de la compagnie, semble avoir été déterminant car l’étude présentée revient à 86 millions de francs et n’a pas été prise en charge sur les finances départementales. Il est surprenant qu’une étude de cette ampleur ait été réalisée sans aval politique ! Conscient de la nécessité d’établir une cohérence à son action, Jean Bène rappelle que le Département est actionnaire de cette compagnie et que lui-même, administrateur, « n’a eu de cesse qu’on fasse les études nécessaires pour la protection des crues dans le département de l’Hérault » 37. En retour, certain élu lui fera judicieusement remarquer que « ce sont des études faites surtout pour l’irrigation 38 ». La discussion montre que la construction du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert est possible et que l’ouvrage est en mesure d’écrêter toutes les crues sauf une tous les dix ans… mais qu’il ne sera pas rentable pour vendre l’eau !

Pour comprendre la position des conseillers généraux, il faut se replonger dans le contexte de cette session. Les élus sont sous l’emprise de l’émotion provoquée par les récentes inondations et les pertes humaines 39. Le pouvoir central et les élus du département semblent en accord total sur l’analyse des événements. Le « nous avons pensé avec M. le Préfet » indique bien qu’il s’agit de mettre en œuvre une solidarité institutionnelle après les « inondations catastrophiques du Gard et de l’Hérault ». Fort à propos, il est souhaité d’utiliser « l’émotion justifiée… qui s’était emparée à la fois des populations et des pouvoirs publics devant les désastres que représentaient ces inondations » pour obtenir des financements de la part de l’Etat. Une stratégie est mise en place pour présenter un dossier cohérent avec l’appui du directeur général du Génie Rural 40. La demande de crédits est donc adressée au Ministère de l’Agriculture et non aux « Ponts et Chaussées », car une réponse favorable semble plus réaliste si l’on présente « cette affaire comme aménagement agricole ». Les évaluations faites estiment que la subvention pourrait atteindre 30 % de la dépense avec obtention d’un prêt très favorable du Crédit Agricole 41. Le montant de la dépense est évalué à 2 246 millions de francs, y compris les frais d’études de la CNARBRL ! On ne fait pas mention de la réserve financière inscrite au IIIe plan des aménagements régionaux (1955-1957). Le financement par l’Etat ne semble donc pas garanti au moment de la délibération de l’Assemblée ! Une étude complémentaire s’avère nécessaire pour expliquer ce décalage financier.

Pour obtenir un vote favorable des conseillers généraux, Jean Bène insiste sur l’intérêt économique de l’opération pour les collectivités publiques et privées héraultaises : « Cette œuvre est économiquement rentable parce que sans paiements nouveaux, tous les riverains de l’Hérault connaîtront les bienfaits de ces barrages, puisqu’ils ne seront plus menacés par les inondations, que les terres ne partiront plus à la mer, que les communes ne seront plus obligées de bâtir et d’entretenir des digues, et que l’on pourra faire des cultures tout à fait différentes de celles que l’on fait actuellement, que l’on pourra essayer de faire des polycultures qui seront peut-être plus intéressantes même que la vigne de ces plaines ». Jouant sur l’intérêt général des populations héraultaises, il ajoute que les revenus ainsi obtenus entreront dans le revenu collectif de la nation. C’est donc une contribution au développement du pays et une marque de solidarité nationale. Le conseiller général Delmas 42 modère ce discours enjoué en relativisant l’intérêt national car, dit-il : « Il est question de demander à l’Etat une subvention de 60 % 43 qui intéresse un seul département… et dont la société mixte du canal du Bas-Rhône-Languedoc estime qu’il n’est pas intéressant pour elle !  ». En effet, quelques mois plus tôt, une note technique 44 de cette compagnie a donné un avis sur l’utilité de ce barrage dans l’écrêtement des crues : « La base de données utilisée (qui) s’appuie sur 70 années d’observations – hydro-pluviométriques – (…) montre que l’efficacité du barrage bien qu’importante n’est point totale pour la vallée de l’Hérault ». Cet avis recommande une étude approfondie des relations entre les orages et les crues afin de jouer sur le débit lâché à Saint-Guilhem-Le-Désert et asseoir ainsi une meilleure efficacité. L’action de la CNARBRL est avant tout de favoriser l’irrigation pour convertir les cultures et son implication dans ce projet reste ambiguë !

Malgré ces incertitudes, la décision de construire le barrage est votée le 6 décembre 1958. Il s’agit de construire un ouvrage qui doit prioritairement permettre d’écrêter les crues de la haute vallée de l’Hérault et secondairement d’irriguer une partie des terres agricoles de la moyenne vallée de ce fleuve. Nous avons vu que ces deux objectifs comprennent de nombreuses interrogations quant aux résultats attendus. Comment les ingénieurs ont-ils résolus les problèmes posés ?

Etudes préliminaires et choix de l’emplacement du barrage

Une plaquette de la CNARBRL 45, éditée en 1955, montre qu’il existe « un excellent site pour un barrage important en amont des gorges de Saint-Guilhem-le-Désert » (Fig. 1). Mais les premières études sur la qualité des sols relèvent un substrat essentiellement karstique, ce qui est un indicateur de risque élevé d’une insuffisance d’étanchéité de la cuvette du futur réservoir. Des études complémentaires sont donc nécessaires.

Carte de l’aménagement hydraulique de la Région du Bas-Rhône et du Languedoc (1953-1955)
Fig. 1 - Carte de l’aménagement hydraulique de la Région du Bas-Rhône et du Languedoc (1953-1955)

Dès les premiers moments, les aménageurs portent un regard optimiste sur la résolution de ce problème par l’injection de béton dans le sol, afin de colmater les fissures. Cette technique a été expérimentée sur d’autres sites semblables et a apporté des résultats satisfaisants. On envisage donc de créer un barrage de type poids qui « mesurerait 60 m de hauteur » et d’une longueur au sommet de 250 m (Figures 2, 3, 4, 5). Selon les indications fournies, la réserve d’eau pourrait atteindre 150 millions 46 de m3 et éventuellement irriguer « 12 000 ha ». Dans les prévisions, la gestion de la retenue d’eau aurait, dans le temps, une double fonction : l’irrigation de la fin de l’hiver à la fin de la période d’irrigation, puis, à l’automne, la réserve serait entièrement vidée pour amortir les crues. Cette vision discontinue et complémentaire des usages de la cuvette du réservoir est originale et correspond bien à la manière de penser la polyactivité par les ingénieurs des années 50.

Plan de l’élévation amont du barrage
Fig. 2 - Plan de l’élévation amont du barrage – La partie supérieure de l’ouvrage comporte un système évacuateur de crues lorsque les apports d’eau sont trop importants (Il permet d’évacuer jusqu’à 2 500 m3/sec pour le niveau de retenue soit 125 m). Archives départementales de l’Hérault, 471 W 32 5b.
Plan de l’élévation aval du barrage
Fig. 3 - Plan de l’élévation aval du barrage – On peut observer l’architecture de l’ouvrage qui permet de dissiper l’énergie à l’occasion des lâchers d’eau de l’évacuateur de crues. Archives départementales de l’Hérault, 471 W 32 5c.
Coupe développée du voile d’étanchéité.
Coupe développée du voile d’étanchéité. « Le voile d’étanchéité, d’une profondeur moyenne de l’ordre de 40 m, aura pour principal objet d’éviter les débourrages de cavités remplies d’argiles risquent de compromettre, par le tassement des fondations, la stabilité des ouvrages ». Archives Départementales de l’Hérault, 471 W 32 6b.
Dessin des ouvrages – La technique utilisée
Fig. 5 - Dessin des ouvrages – La technique utilisée, « barrage à gravité (…) peu incurvé en recherchant l’économie maximum au moyen d’évidements aménagés dans le corps de l’ouvrage ». On notera l’importance de la largeur à la base d’un édifice dont la coupe a un aspect pyramidal. L’ouvrage « affecte en plan, une forme légèrement incurvée dans la partie déversante, afin d’améliorer la restitution aval des nappes déversantes ». Archives départementales de l’Hérault, 471 W 32 5a.

La CNARBRL est chargée des études préliminaires et élabore un dossier de faisabilité. Dans sa réalisation, ce barrage doit être implanté entre St Guilhem-le-Désert et Saint-Bauzille-de-Putois, sur la zone dénommée « bois des Fontanilles ». L’emplacement exact est situé « à un kilomètre en amont du point où la route touristique RD 4 qui de Saint-Jean de Fos conduit par Saint-Guilhem-le-Désert à Causse-de-la-Selle, quitte les gorges de l’Hérault pour monter sur le causse par la Combe du Cor 47 ». Cette précision permet de retrouver encore aujourd’hui les traces de cet emplacement (Figures 6 et 7). Il semble qu’aucun autre positionnement n’était envisageable en raison du substrat karstique rencontré dans les gorges de l’Hérault.

Ouverture d’une galerie de sondage du massif calcaire sur la rive droite de l’Hérault
Fig. 6 - Ouverture d’une galerie de sondage du massif calcaire sur la rive droite de l’Hérault. Ces sondages ont été réalisés en 1957 au cours de travaux de reconnaissance « par tranchées, galeries et sondages ». (Cliché Christian Guiraud, 8 novembre 2008)
d’une galerie de sondage des ancrages rocheux latéraux du barrage, rive droite de l’Hérault
Fig. 7 - Intérieur d’une galerie de sondage des ancrages rocheux latéraux du barrage, rive droite de l’Hérault. (Cliché Christian Guiraud, 8 novembre 2008)
Carte du bassin versant. Emplacement du barrage sur la ligne de partage des eaux
Fig. 8 - Carte du bassin versant. Emplacement du barrage sur la ligne de partage des eaux (pointillés) et panorama du système d’alerte des crues en 1958 (stations pluviométriques et hydrométriques). Archives départementales de l’Hérault, 471 W33 31.

En effet, au plan géologique, l’ingénieur de la compagnie souligne qu’«  en définitive la seule section de la gorge, où les deux rives ne présentent aucune condition s’opposant à la construction d’un barrage, est comprise entre l’alignement balise 6 en rive droite et balise 5 en rive gauche en aval et l’alignement balise 30 en rive droite et balise 5 bis en rive gauche en amont 48 » (Figure 8). Ces balises n’existent plus aujourd’hui, hormis une balise cylindrique de plusieurs mètres de haut, ayant abrité une station hydrométrique en bordure du fleuve (Figure 9).

Tour cylindrique de la station hydrométrique n° 5 située sur l’emplacement prévu pour le barrage de Saint-Guilhem-le-Désert
Fig. 9 - Tour cylindrique de la station hydrométrique n° 5 située sur l’emplacement prévu pour le barrage de Saint-Guilhem-le-Désert. Cette implantation nous a été aimablement communiquée par Gérard Maffre ingénieur et chef de région à la CNARBRL, qui a travaillé sur ce chantier entre 1956 et 1958 (entretien du 2 octobre 2008 à Paulhan). A l’intérieur de cette tour, dont la hauteur prenait en compte l’amplitude des crues connues du fleuve, il y avait un « limnigraphe », d’origine allemande, qui enregistrait les variations du niveau du fleuve… sur papier (Les relevés étaient quotidiens). (Cliché Christian Guiraud, 8 novembre 2008)

Ce géologue précise que les conditions indispensables à la réussite du projet s’appuient sur une logique des fonctions d’un barrage écrêteur de crues : « seules importent la valeur et la stabilité des appuis et de la fondation, et sous l’ouvrage et ses abords immédiats une étanchéité naturelle ou des possibilités d’étanchement pour éviter toute fuite pouvant compromettre sa stabilité 49 ». En reprenant ce point de vue, il s’avère indispensable de considérer les avis des experts sur l’étanchéité du barrage et, par la suite, de la cuvette elle-même si l’on souhaite aussi utiliser cet ouvrage pour l’irrigation des terres agricoles. Le professeur Marres, géographe à l’Université de Montpellier, considère que «  la cuvette du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert pourrait être rendue assez étanche par des travaux d’injection appropriés pour que la retenue correspondante puisse être utilisée pour l’irrigation ».

Cette analyse est contestée par la CNARBRL qui estime que le professeur Marres est avant tout un géographe, qu’il s’appuie sur l’exemple de la retenue d’eau du Moulin de Bertrand qui n’offre pas le même substrat géologique. Enfin, elle estime que cet universitaire ne possède pas l’expertise des géologues consultés, tels Grosnier-Leconte, Lambert ou Barbier qui confortent l’avis du géologue de la compagnie. Au-delà de cette querelle d’experts, il apparaît que «  les chances (sont) extrêmement réduites que le barrage soit assez étanche pour permettre de constituer une certaine réserve en vue de l’irrigation ». En fait, pour la CNARBRL, la construction du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert « ne saurait se justifier que pour la protection contre les crues de l’Hérault ». En effet, la réserve envisagée, plus précisément, à 144 millions de m3 semble satisfaisante pour contrôler les crues de la haute vallée de ce fleuve. Mais, s’il devait y avoir une réserve d’eau pour l’irrigation, cela aurait un effet négatif sur l’objectif principal. En effet, le volume d’eau « écrêté » serait diminué d’autant plus que la réserve pour l’irrigation serait importante ! Par comparaison, le barrage du Salagou, en cours d’étude, serait d’un effet très inférieur sur les crues de l’Hérault, tout en ayant un usage à caractère « polyvalent 50 ».

Il faut donc envisager 51, dès à présent, un « arbitrage » car ce barrage construit sur l’Hérault pour protéger contre les inondations pourrait être également utilisé d’une manière polyvalente. Les incertitudes sur l’usage du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert perdurent et ont une incidence certaine sur les technologies mises en œuvre.

Genèse d’un choix économique, technique et politique

Un dossier intitulé « Projet d’écrêtement des crues de l’Hérault au moyen d’un barrage situé en amont de Saint-Guilhem-le-Désert 52 » est communiqué pour étude aux élus du Département, le 23 mai 1958. Les éléments techniques généraux indiquent que la cote maximale du barrage permet d’éviter de submerger le village de Saint-Bauzille-de-Putois. La retenue envisagée réalise un plan d’eau d’une surface d’environ 850 ha.

Au plan environnemental, il existe, en amont du barrage, une usine de production d’électricité qui appartient à la coopérative d’électricité de Saint-Martin-de-Londres. Les administrateurs de l’époque sont peu informés des projets et, en général, ne sont pas très favorables à la submersion de leurs installations situées au lieu dit « Moulin de Bertrand ». Tout au plus, le dossier présenté aux élus indique-t-il qu’il faudra envisager d’indemniser les coopérateurs et que cela constituera une dépense importante à ajouter au prix prévisionnel du barrage. Ce sont des difficultés auxquelles les administrateurs de la CNARBRL ont pensé, mais qui interpellent directement le Conseil Général. Toutefois, la compagnie rappelant que « cet ouvrage ne peut être inclus dans le programme des travaux concédés », se propose pour assurer la direction des travaux 53 et envisage, s’il devient possible d’utiliser le barrage pour l’irrigation, de constituer une société mixte 54 dont le but serait l’irrigation des plaines de l’Hérault. En conséquence, c’est l’intérêt économique de l’opération qui devient l’élément moteur principal et il est alors possible de l’inscrire au plan d’aménagement national.

Peu de temps après, le projet de construction d’un barrage sur la rivière Salagou est élaboré et présenté aux élus du Conseil Général. Ce projet répond bien aux critères économiques définis ci-dessus. Il sera rapidement voté par l’assemblée départementale qui conservera tout de même la possibilité de réaliser, plus tard, un barrage sur l’Hérault 55. Mais, la volonté ministérielle de ne subventionner que la construction du barrage du Salagou ne permet pas d’envisager la construction d’un second barrage sur les seuls fonds départementaux. C’est donc un abandon de fait du barrage de Saint-Guilhem-le-Désert.

Ce n’est qu’en 1975 que ce projet sera à nouveau présenté à une inscription au plan d’aménagement national. En effet, le 16 octobre 1975, le préfet de la Région Languedoc-Roussillon relance le projet de barrage à Saint-Guilhem-le-Désert en soulignant que les crues de l’Hérault sont parfois catastrophiques et que le Conseil général de l’Hérault se préoccupe de leur « régularisation ». Il note que les « études ont montré que le palliatif le plus efficace, techniquement et économiquement, était la construction d’un barrage écrêteur de crues en amont de Saint-Guilhem-le-Désert. Tous les avis des services compétents ont été favorables sauf celui de l’agriculture qui dans une lettre du 5 juin 1974 adressée à Monsieur le Ministre de l’équipement a estimé que les intérêts agricoles n’étant pas prépondérants, sa participation ne pourrait être que modique ». Ce projet ne sera pas retenu dans le programme du plan et disparaît, une nouvelle fois, au fond des tiroirs car il n’entre plus, semble-t-il, dans les hypothèses de travail des aménageurs du département de l’Hérault. Quelles sont les explications possibles de cette mise à l’écart quasi-définitive ?

L’aménagement de la vallée de l’Hérault et une brève analyse
des « risques naturels » actuels

Depuis l’abandon du projet de barrage écrêteur de crues à Saint-Guilhem-le-Désert, quelles sont les analyses et les aménagements réalisés par les pouvoirs publics pour protéger les espaces ruraux et urbains inondables de la haute, de la moyenne et de la basse vallée de l’Hérault ? Il semble que rien d’important n’ait été aménagé, au plan des endiguements, mais un nouveau barrage, dit des Olivettes 56, a été construit et régule les crues de la Peyne, tout en contribuant à l’irrigation des cultures.

Dans la basse vallée de l’Hérault, une des solutions consisterait à aménager des déversoirs permettant de contrôler les débordements 57. En effet, l’inventaire des protections aménagées par la plupart des communes 58 montre qu’il existe un système d’endiguement protecteur de crues, à l’exception des communes de Bélarga, Bessan et Canet. Les spécialistes considèrent que ces protections ayant été installées à l’issue des grandes inondations de 1907 ne sont pas efficaces si une crue supérieure survenait et seraient même, dans le cas d’une maintenance suffisante, plus dangereuses que les crues elles-mêmes en cas de rupture brutale.

Les analyses actuelles cherchent à mieux identifier les différents types d’inondation et à anticiper le risque qu’elles présentent. Pour ce qui concerne le fleuve Hérault, on considère deux types de débordement : « de plaine par débordement relativement lent du cours d’eau » et « torrentiel pour lequel la vitesse d’écoulement est à prendre en compte » (Figure 10). Le premier type concerne surtout la moyenne et la basse vallée de l’Hérault pour lesquelles la solution la plus efficace consiste à endiguer les zones inondables, tout en sachant que cette solution est peu efficace vis-à-vis des crues dites « décennales ». Pour des communes comme Canet, Belarga, Clermont-l’Hérault ou encore Pézenas, une grande partie de leur domaine bâti est situé en zone à risque, ce qui pose un problème évident de protection des populations et des biens. Le second type concerne les gorges de l’Hérault. Les communes de Saint-Martin-de-Londres, Saint-Guilhem-le-Désert et Aniane sont particulièrement concernées.

Illustration du caractère torrentiel de la haute vallée de l’Hérault
Fig. 10 - Illustration du caractère torrentiel de la haute vallée de l’Hérault. Crue du 3 novembre 2008 (photo du haut, barrage du moulin de Bertrand ; photo du bas, barrage dit « de Gignac » en amont de Saint-Guilhem-le-Désert) - (Cliché Christian Guiraud 3 novembre 2008). À l’étiage, sur cette seconde photo, l’eau ne franchit pas la crête du barrage et passe par un conduit sous l’ouvrage.

Les analyses actuelles cherchent à mieux identifier les différents types d’inondation et à anticiper le risque qu’elles présentent. Pour ce qui concerne le fleuve Hérault, on considère deux types de débordement : « de plaine par débordement relativement lent du cours d’eau » et « torrentiel pour lequel la vitesse d’écoulement est à prendre en compte » (Figure 10). Le premier type concerne surtout la moyenne et la basse vallée de l’Hérault pour lesquelles la solution la plus efficace consiste à endiguer les zones inondables, tout en sachant que cette solution est peu efficace vis-à-vis des crues dites « décennales ». Pour des communes comme Canet, Belarga, Clermont-l’Hérault ou encore Pézenas, une grande partie de leur domaine bâti est situé en zone à risque, ce qui pose un problème évident de protection des populations et des biens. Le second type concerne les gorges de l’Hérault. Les communes de Saint-Martin-de-Londres, Saint-Guilhem-le-Désert et Aniane sont particulièrement concernées.

Afin de préparer les populations à s’approprier « une culture du risque d’inondation » et à se protéger des effets des inondations sur leurs biens et/ou sur leur personne, un plan de prévention des risques a délimité les zones inondables en cas de crue « centennale » ou « de la plus forte connue ». Des comportements adaptés sont préconisés. Lorsqu’on considère que les inondations de 1997 ont « coûté » plus de 38 millions d’euros 59 pour le seul bassin versant de l’Hérault, il semble nécessaire d’envisager une meilleure protection contre ces catastrophes en les anticipant par des mesures d’aménagement du territoire, par une meilleure gestion de l’usage des sols et une éducation des populations, comme les objectifs du SAGE de l’Hérault le préconisent.

Enfin, la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 porte un regard novateur sur les risques et les contraintes de la gestion des eaux. Désormais, « l’eau et les milieux aquatiques singulier sont définis comme un patrimoine commun de la nation (…) l’eau est prise en compte sur l’ensemble de son cycle : aucune action susceptible d’avoir une incidence sur cette unité de ressource ne se trouve exclue. Sa gestion doit être globale et équilibrée afin d’assurer la préservation des écosystèmes aquatiques, la protection qualitative et quantitative de l’eau avec ses multiples usages à satisfaire ou à concilier ».

Les responsables du SAGE de l’Hérault prennent en compte cette approche globale du risque social et écologique des inondations. Ils définissent leurs trois priorités d’action par :

  1. L’approche politique : « La gestion du risque d’inondation constitue un enjeu important » ;
  2. La conception d’une gestion anticipée des risques et d’une préservation de l’environnement : « Une approche globale permet d’organiser les débordements et l’inondation pour aboutir à une véritable gestion des crues dans la plaine de l’Hérault » ;
  3. La mise en place d’un dispositif d’éducation des populations par la promotion d’une « culture du risque ». Ce dernier est « encore embryonnaire ». Il s’agit de « préparer les populations à l’inondation par l’information et la vigilance pour limiter les dommages ». Tous les acteurs sociaux sont conscients de la nécessité de « donner du temps au temps » afin de permettre l’appropriation effective de nouveaux comportements face aux catastrophes naturelles. Les récents événements dans le sud-ouest de la France en portent témoignage !

La prévention et la prévision l’emportent donc sur la seule protection par une formation à une véritable pédagogie du risque, même si celles-ci sont, seules, insuffisantes à maîtriser les problèmes matériels et humains engendrés par les crues importantes du fleuve. Il ne s’agit plus, comme dans les années 50 et 60, de faire obstacle, par un barrage, à un épisode pluvieux particulièrement important en stockant l’eau dans une réserve suffisante, mais plutôt d’en anticiper les effets en éduquant les populations (zones non constructibles, comportements en cas de crue, entretien des berges, etc.) et en organisant un écoulement des eaux qui limite sa vitesse, organise les débordements, mais aussi l’étalement de la crue en zone naturelle 60. L’endiguement des berges est donc une des solutions à moindre coût et le maintien de zones inondables libres 61 de toute emprise humaine devient un enjeu écologique 62.

Conclusion

Notre étude constitue une introduction à une recherche plus approfondie qui fera l’objet d’une prochaine publication 63. L’approche historique met en relief, avant la décentralisation, la difficile prise en compte par les élus locaux des décisions du pouvoir central. En effet, celles-ci s’opposent parfois à la demande sociale et économique héraultaise et, il est alors impératif, pour chaque élu, de préserver sa crédibilité politique.

Le poids d’un électorat peu enclin à céder à des mutations imposées a obligé les élus à en anticiper les obstacles sociaux et économiques possibles. Progressivement, des outils institutionnels nouveaux ont permis une meilleure information et participation des populations aux décisions politiques et économiques. Cette démarche permet de mieux légitimer les choix effectués.

Le barrage de Saint-Guilhem-le-Désert a alimenté les discours des ingénieurs-aménageurs et des décideurs socio-économiques sur une durée d’un quart de siècle. Il a été un enjeu politique déterminant des années 50 et 60 avant de disparaître, peu à peu, dans « les sables du fleuve Hérault » 64. Cette aventure illustre bien l’évolution des politiques publiques. Si, par le passé, la décision n’appartenait pas tout à fait aux décideurs locaux et aux populations concernées, aujourd’hui, malgré l’effet « panoptique 65 » des politiques de l’Etat dans la gestion des bassins versants, les acteurs locaux augmentent leur pouvoir d’action sur l’aménagement de leur territoire de vie. Il faut les préparer à cette manière de « se penser » qui entre dans la logique des politiques décentralisées.

Aujourd’hui, les pouvoirs publics visent le développement d’une sensibilité à une culture environnementale 66 source d’un meilleur équilibre dans les aménagements du territoire. À partir d’une nouvelle manière de questionner la notion de risque, que perçoit-on des changements économiques et sociologiques du bassin versant de l’Hérault ou tout simplement de la manière de vivre 67 un territoire ? Le barrage écrêteur de crues de Saint-Guilhem-le-Désert permettrait-il, aujourd’hui, de réduire considérablement les coûts économiques et sociaux des épisodes catastrophiques ?

Pour répondre à ces questions, il faut prendre en compte la hiérarchie des priorités d’action d’un SAGE telle qu’elle est présentée, car c’est pour chaque bassin, un indicateur pertinent des représentations sociales actuelles. Aujourd’hui, la qualité de l’eau et la lutte contre la pollution sont les actions prioritaires d’une gestion durable qui prend en compte l’importance de « ce que l’on ne voit pas », c’est-à-dire les eaux souterraines. Le modèle écologique organise la pensée de l’homme moderne. La lutte contre les inondations n’est plus qu’un des aspects possibles de la gestion des risques liés aux multiples usages de l’eau.

Les inondations concernent, pour la vallée de l’Hérault, près de 13 000 personnes 68 ! Quels sont les outils conceptuels nouveaux pour gérer ce risque ? La thèse de Mme Audrey-Richard, citée au début de ce texte, apporte une contribution qui devrait permettre de les construire. L’extrait suivant est particulièrement inducteur d’une nouvelle manière de penser ce problème : « La gestion de l’eau est appréhendée non pas à partir d’un projet, tel celui d’un barrage, ou d’un enjeu, telle la pollution d’une rivière, mais à partir d’éléments disposés et susceptibles d’être appropriées par des personnes. Ces éléments en relations et à disposition des humains, peuvent être des conventions, des règles, des procédures ou des objets matériels.(…) Ils concernent la gestion d’un bassin versant 69 ».

L’histoire du projet de barrage de Saint-Guilhem-le-Désert se révèle un indicateur pertinent de l’évolution des politiques publiques, des idées qui les induisent et des contraintes sociales qui les accompagnent.

Notes

Remerciements de l’auteur aux personnes qui ont accompagné cette recherche et plus particulièrement (par ordre alphabétique) Monsieur Daniel CAUMONT, Président-fondateur de la section spéléologique du CLPA de Montpellier, Mme Paul DUBOIS, Présidente du CA de la société Gabriel VILA gestionnaire de la grotte de la Clamouse, Monsieur Pierre CHEVALLIER, Directeur de recherche à l’IRD, Directeur de l’Institut Languedocien de Recherche sur l’Eau et l’Environnement, Mme Annie DENIZART et Mme Michèle RAUZIER, Archives départementales de l’Hérault, Mme Cécile RETAILLEAU, chef du service hydraulique et des barrages départementaux au Conseil Général de l’Hérault, Monsieur Jean-Claude RICHARD, Directeur de recherche (ER) CNRS, Monsieur Christophe VIVIER, animateur du SAGE du fleuve Hérault.

Cette recherche a été demandée à l’auteur par Jean-Claude RICHARD, dans le cadre des études sur l’histoire de la commune de Saint-Guilhem-le-Désert.

  1.Une commission rattachée au commissariat du plan, appelée « commission de modernisation et d’équipement de la Région du Bas Rhône Languedoc » présidée par Philippe Lamour lance les premières études et projets pour cette région dès 1951.

  2.Compagnie Nationale d’Aménagement de la Région Bas-Rhône Languedoc créée en 1955.

  3.La CNARBRL fait référence à la loi créant la « Tennessee Valley Authority » et, c’est le premier exemple cité, mais d’autres références sont également prises en compte comme la Californie ou le bassin de la rivière « Colombia ». L’URSS est également citée pour ses aménagements au sud-est de l’Union et l’Italie pour ceux des régions défavorisées du sud.

  4.La première édition de cet ouvrage est de 1947.

  5.Les ingénieurs de la CNARBRL estiment qu’il devrait être possible, après études complémentaires, de colmater les fissures du substrat karstique par des injections de béton, afin d’obtenir une étanchéité suffisante de la « cuvette » du réservoir ainsi créé.

  6.Session de l’assemblée départementale du 23 mai 1958.

  7.Audrey RICHARD-FERROUDJI, L’appropriation des dispositifs de gestion locale et participative de l’eau. Composer avec une pluralité de valeurs, d’objectifs et d’attachements, École des Hautes Études en Sciences Sociales, thèse de doctorat de sociologie, mars 2008, p. 11.

  8.Ouverts par la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 – Article 1 : « L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général. L’usage de l’eau appartient à tous dans le cadre des lois et règlements ainsi que des droits antérieurement établis ».

L’article 2 vise une gestion équilibrée de l’eau selon le schéma suivant :

– la prévention des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année ;

– La protection contre toute pollution et la restauration de la qualité des eaux superficielles et souterraines et des eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales ;

– Le développement et la protection de la ressource en eau ;

– La valorisation comme ressource économique et la répartition de cette ressource ; de manière à satisfaire ou à concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences :

– De la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l’alimentation en eau potable de la population ;

– De la conservation et du libre écoulement des eaux et de la protection contre les inondations ;

– De l’agriculture, des pêches et des cultures marines, de la pêche en eau douce, de l’industrie, de la production d’énergie, des transports, du tourisme, des loisirs et des sports nautiques ainsi que de toutes autres activités humaines légalement exercées.

  9.SDAGE = schéma directeur aménagement et de gestion de l’eau.

 10.Audrey RICHARD-FERROUDJI, op. cit., p. 26.

 11.Jacqueline ROUGE, Hydrologie de l’Hérault, fleuve côtier méditerranéen, Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie, Montpellier, janvier-juin 1959, pp. 116-118.

 12.La littérature cite des hauteurs parfois supérieures, mais dont la valeur scientifique est sujette à caution. C’est ainsi que Jacqueline ROUGE cite, en p. 134, une hauteur de 16,76 m, en 1868, à la sortie des gorges ! Elle cite également, en page 153, la crue exceptionnelle de 1715 dont l’église de Laroque porte la marque.

 13.Jacqueline ROUGE, op.cit., p. 156.

 14.Jacqueline ROUGE, op. cit., p. 118, une erreur de relevé donne 8 m à Agde…

 15.SAGE Hérault : « Les crues sont de type torrentielles, rapides sur le bassin amont et les affluents. Par contre, dans la plaine aval, l’Hérault déborde largement, la crue devient alors plus lente. Cette vaste plaine d’inondation joue un rôle essentiel dans l’écrêtement des pointes de crues et donc dans la protection des zones urbanisées d’aval, notamment Agde. »

 16.Archives départementales, cote 471 W 33.

 17.Balthazar JORDAN, Histoire de la ville d’Agde depuis sa fondation, Montpellier, 1824 p. 107.

 18.DIREN Languedoc Roussillon, Prévention des inondations en Languedoc-Roussillon, note générale, mars 2006. p. 2 : « Les inondations du 30 septembre au 4 octobre 1958 (ont été la cause directe) de 36 décès ».

 19.Jacqueline ROUGE, op. cit., p. 173.

 20.En amont de Saint-Guilhem-le-Désert, cité par Jacqueline ROUGE, op.cit. p. 182.

 21.Jacqueline ROUGE, op. cit., p. 182, cet auteur « calcule » un débit maximal au Pont du Diable mais fait part de son doute sur ce résultat.

 22.SAGE Hérault : « En septembre 1907, 6 jours de pluie intense entraînent une crue record de l’Hérault qui reste la référence pour le cours aval du fleuve. La plaine est gravement sinistrée ».

 23.Créée le 13 novembre 1951 par arrêté ministériel. Elle dépend de la présidence du conseil par le truchement du commissariat du plan. Cette commission a rencontré les élus du département de l’Hérault les 6 et 7 juin 1952 afin d’étudier les conditions d’une régénération économique des régions montagneuses.

 24.Archives départementales de l’Hérault, Fonds GRASSET-MOREL, cote 157 J 34, Compte rendu des réunions du 23 avril 1952, pp. 8-9.

 25.Archives Départementales de l’Hérault, cote 157 J 34, Fonds GRASSET–MOREL, Document dactylographié : « Irrigation du Bas-Languedoc », 23 septembre 1952, p. 1.

 26.Archives Départementales de l’Hérault, cote 157 J 34 Fonds GRASSET–MOREL, « Irrigation du Bas-Languedoc », op. cit., p. 2.

 27.Délibération du Conseil Général de décembre 1956.

 28.Cette réunion se déroule à Pézenas en présence de Jean BENE.

 29.Lettre du Président du Conseil général au Préfet de l’Hérault du 17 mai 1954.

 30.Lettre du Préfet du 8 novembre 1954 au Ministre des finances, des affaires économiques et du plan.

 31.L’Éclaireur Méridional, 7 novembre 1954.

 32.Créée par décret ministériel du 3 février 1955.

 33.Midi Libre du 30 octobre 1955 : « Le Conseil Général de l’Hérault décide de participer à l’œuvre entreprise par la CNARBRL et de souscrire un capital de cent millions de francs dont la ressource sera fournie par un emprunt à la caisse de dépôts et consignations. Il désigne pour le représenter au conseil d’administration son président M. Jean BENE »

 34.Note du Commissariat du plan, Groupe actions régionales, novembre 1956.

 35.Études et Monographies, Janvier 1957, n°157.

 36.Archives départementales de l’Hérault, cote 1162 W 4 , p. 81.

 37.Archives départementales de l’Hérault, cote 1162 W 4 , p. 82.

 38.Intervention du Conseiller Général BADIE.

 39.36 morts dans l’Hérault et le Gard !

 40.M. DAVID, commissaire du gouvernement auprès de la CNARBRL.

 41.Prêt à 30 ans avec un taux de 1,25 %.

 42.Archives départementales de l’Hérault, cote 1611 w 4, Session du Conseil Général de décembre 1958, p. 92.

 43.L’intervention de l’élu à la note 41 montre qu’il a confondu les subventions des « ponts et chaussées » qui s’élèvent à 30 % de la dépense retenue et celles du Ministère de l’agriculture, qui s’élèvent à 60 % de la dépense totale du projet subventionnable.

 44.Note du 18 avril 1958.

 45.La documentation française, L’irrigation du Languedoc, août 1955, n° 104, p. 24.

 46.Soit beaucoup moins que les 200 millions de m3 initialement annoncés !, mais il s’agit de sauvegarder le village de Saint-Bauzille-de-Putois.

 47.Gilbert Cheylan, Études géologiques des aménagements hydrauliques de la Compagnie du Bas-Rhône-Languedoc, Thèse de doctorat ès-sciences, Université de Grenoble, 1966, op. cit. p. 157.

 48.Gilbert Cheylan, 1966, op. cit. p. 165.

 49.Gilbert Cheylan, 1966, op. cit. p. 157.

 50.Compagnie Nationale d’Aménagement de la Région du Bas-Rhône et du Languedoc, Division des études et des travaux, Aménagement du Salagou, note relative aux objections formulées par le syndicat intercommunal de défense de la vallée du Salagou contre le projet d’aménagement présenté par la CNARBRL.

 51.Selon la CNARBRL.

 52.Établi par la CNARBRL et transmis aux élus du département par le préfet sous la forme d’une communication.

 53.Elle n’a pas les moyens d’être maître d’ouvrage…

 54.CNARBRL et Conseil Général de l’Hérault.

 55.Christian GUIRAUD et Philippe MARTIN, Le lac du Salagou ou le majestueux destin d’une rivière qui coule la nuit et s’évapore le jour…, Communauté de Communes du Clermontais, Association Le MAS des Terres Rouges, déc. 2007, p. 10 « Décision approuvée par le Conseil Général de l’Hérault dans sa session du 22 mai 1959 ».

 56.Il a été construit entre 1986 et 1988.

 57.Conseil Général de l’Hérault, DARE, SAGE Hérault , cahier n° 2 « Crues et inondations, état des lieux », 2005.

 58.Les communes sont responsables des aménagements à réaliser sur leur territoire pour le protéger des inondations.

 59.Tous dommages confondus, mais en intégrant les dégâts dus à la tempête sur le littoral.

 60.Protection qui diminue la violence de la crue.

 61.Les zones recensées couvrent 150 km2 dont 110 km2 pour la plaine de l’Hérault.

 62.Cette analyse rejoint les recommandations de l’Etat, suite aux inondations de 1997, qui préconise de mener dans le cadre du SAGE « une étude de type inondabilité pour dépasser la problématique agricole et revoir le schéma d’endiguement de la moyenne et basse vallée ».

 63.Ce projet de recherche a pour question de départ : « L’action publique et le discours des experts : le risque n’est-il qu’une construction sociale ? »

 64.Les calcaires des gorges de l’Hérault sont particulièrement sensibles à l’érosion comme en témoignent les nombreuses grottes et failles. G. Cheylan avait souligné cet aspect dans sa thèse.

 65.Michel FOUCAULT, Surveiller et punir, Gallimard. 1975. Le « panoptique » est un système de surveillance à caractère essentiellement psychologique qui conduit à l’auto-contrôle de soi et, ainsi, permet à l’institution dominante de conserver son pouvoir.

 66.Dans le sens d’une écologie humaine, c’est à dire dans la recherche d’un équilibre de vie de l’homme dans son habitat.

 67.Dans le sens d’appréhender.

 68.La DIREN (Direction Régionale de l’environnement) a estimé le nombre de personnes résidant en zone inondable à 12 700… sans compter la partie du fleuve qui coule dans le Gard.

 69.Audrey RICHARD-FERROUDJI, op. cit., p. 421.