Tragiques pourparlers à Grabels, Bel-Air, et combat des résistants de Montpellier à Montferrier, le 24 et 25 août 1944, avec la colonne allemande dite de Rodez

Publication du
G.R.E.C. n° 228-229-230-231
(2e semestre 2021)

p. 98 à 108

Dossier coordonné par Pierre-Joan Bernard et Jean-Claude Richard Ralite

« Montferrier fut le Valmy de notre Cité ».
P. Weil de Villers dit « Colonel LEROY », 1945.

Introduction

Les 17 et 18 août 1944, Hitler donne l’ordre aux troupes allemandes du Sud-Ouest de la France de gagner d’urgence le nord et l’est (par la vallée du Rhône) afin de contribuer aux combats à la suite des deux débarquements de Normandie et de Provence. Dès le lendemain et jusqu’au 25 août plusieurs colonnes vont traverser le département de l’Hérault empruntant de préférence les routes secondaires, plus sûres que les nationales, cibles de l’aviation alliée, et évitant les villes susceptibles d’organiser des combats et des barricades. Néanmoins, tout au long, des attaques de maquisards ont lieu qui font de nombreux morts et blessés des deux côtés et les colonnes n’hésitent pas à abattre des civils même non armés 1.

La colonne dite « de Rodez »

Cette colonne se forme à Rodez et regroupe les militaires allemands (FK 802 Rodez) ainsi qu’une batterie Luftwaffe et la légion azerbaïdjanaise  2 : elle est sous le commandement du Colonel Steuber. Elle va gagner, avec des fortunes diverses, le Sud puis l’Ardèche, où a lieu sa reddition à Chomérac.

Partie de Rodez la colonne gagne Millau par Pont-de-Salars et la route nationale 111. Un certain nombre de combats vont se produire avec des morts-et parmi eux des civils 3.

À Millau la colonne intègre les Allemands présents et quitte la ville le 22 août par la nationale 9. Au passage sur le Larzac, la colonne absorbe les troupes présentes sur le camp. C’est à la limite du département de l’Aveyron et de l’Hérault, le 22 août, au lieu-dit La Pezade, qu’une embuscade organisée par le maquis Paul CLÉ finit tragiquement par la mort de 23 maquisards et la destruction d’un avion américain 4. Au même lieu, à la hauteur de la ferme de Servières, cinq miliciens en provenance du Gers sont abattus 5.

Parvenue au Caylar, deux itinéraires sont possibles, soit vers Lodève par le pas de l’Escalette, soit vers la vallée de l’Hérault par Saint-Pierre-de-la-Fage. Le passage de l’Escalette a été miné et obturé par le maquis si bien que c’est le second itinéraire qui est choisi. Avant l’arrivée à Saint-Pierre, deux civils à vélo sont abattus en bordure de la route départementale.

La colonne continue sa route, fait étape le 23 à Montpeyroux, puis traverse Saint-Jean-de-Fos, le pont du Diable, Aniane, La Boissière.

Parvenant à Montarnaud, la colonne va continuer ses exactions en abattant quatre civils 6.

Fig. 1 : Marches des colonnes allemandes août 1944 d’après B. Chaix (2017)
Fig. 2 : Marches des colonnes allemandes août 1944 d’après B. Chaix (2017)

Les pourparlers de Bel-Air à Grabels (Hérault)

C’est au carrefour de la D 111 et de la D 102, et en bordure de la N 109, que se trouve le hameau de Bel-Air, sur le territoire de la commune de Grabels. Il est constitué de quelques maisons et, en contrebas sur la N 109, du château Paulhan de Bel-Air, domaine agricole appartenant alors à la famille PAULHAN, industriels dans le textile à Montpellier et dans le Gard.

Le 24 août 1944, étaient parvenues à Montpellier des informations selon lesquelles une colonne allemande désirait se rendre, sans que nous puissions préciser par qui et comment elles avaient été transmises.

Nous possédons le procès verbal, non daté, de ce qui s’est passé par le Capitaine ELY (« Commandant Quarante »), Commandant le Quartier Général de l’État Major de la 16ème région militaire 7 :

Compte-rendu du Capitaine ELY (ex Commandant Quarante),
Commandant le Quartier Général de la 16ème R.M.

Le 24 août, dans l’après midi, vers deux heures, je recevais l’ordre de la Préfecture de me mettre en rapport avec le Commandant HUMBERT, Commandant la Police Urbaine, pour me rendre au devant d’une colonne allemande stationnée à Bel-Air et qui désirait se rendre.

J’ai essayé, en vain, de trouver le Commandant HUMBERT qui, d’après les déclarations d’un agent de garde, venait de partir en auto pour aller au devant d’une colonne allemande, pensant qu’il s’agissait de la même colonne signalée par la Préfecture, et après m’être concerté avec les Lieutenants SERY et ANDRÉ, nous décidions d’essayer de rattraper le Commandant HUMBERT.

Au moment de quitter la Préfecture, Monsieur KHUN, interprète aux relations franco-allemandes, nous fut adjoint.

Arrivés à Celleneuve, nous prîmes des renseignements auprès de la population. Certaines personnes nous affirmèrent avoir vu passer une auto contenant des gens en uniforme. Pensant toujours qu’il s’agissait du Commandant HUMBERT, nous poursuivîmes notre route ; le nommé GARNIER, sous-officier d’aviation, se joignit à nous comme volontaire.

En arrivant au domaine de PAULHAN, au bas de la côte de Bel-Air, un civil vint à nous, nous disant que les Allemands attendaient des militaires en uniforme pour se rendre.

À ce même moment, nous apercevions, en haut de la côte, à l’embranchement de la route de GRABELS, une auto en panne barrant la route sous la garde de deux Allemands armés de mitraillettes.

N’ayant pas jusque là vu le Commandant HUMBERT, je décidais de faire demi-tour, mais, sous les instances du Lieutenant ANDRE [pseudonyme d’Albert DELRANC] et à la vue du drapeau blanc que les Allemands agitaient nous décidâmes d’engager des pourparlers.

Laissant au bas de la côte notre auto sous la garde de notre chauffeur RUSCASSIE, nous nous dirigeâmes vers les Allemands ; l’interprète, muni d’un drapeau blanc, s’avança et, sur l’affirmation du sous-officier Allemand qui nous reçut, nous déclarant qu’il voulait se rendre et nous demanda d’attendre l’arrivée de ses Officiers, un des deux Allemands partit en vélo pour aller les chercher…

L’attente fut longue… Un quart d’heure environ se passa. J’avais décidé d’effectuer un mouvement de repli à l’effet de nous dégager d’un éventuel encerclement. À peine cette opération commandée, nous fûmes, mes camarades et moi, encerclés de toutes parts et immédiatement désarmés, sans avoir eu le temps de nous défendre. J’avais par devers moi deux révolvers : l’un, placé règlementairement dans son étui, l’autre coincé par la ceinture de mon pantalon entre la peau et la chemise. Ce deuxième n’avait heureusement pas été vu par les Allemands. À la suite de leur fouille, les Allemands paraissaient furieux, j’eus l’explication de leur colère, ils venaient en effet de trouver sur le Lieutenant ANDRE, un brassard bleu-blanc-rouge portant l’inscription F.F.I. un V et la Croix de Lorraine.

Une discussion s’engagea entre les Officiers Allemands pour décider de notre sort. Le dispositif qu’ils prirent nous fit comprendre que nous allions être fusillés.

À ce moment, un Officier Allemand aperçut notre voiture et désigna deux de ses hommes pour aller la chercher, un deuxième Officier intervint à ce moment déclarant que si le chauffeur français voyait venir à lui deux Allemands il s’enfuirait avec l’auto qui, d’ailleurs, avait déjà fait demi-tour et dont le moteur était toujours en marche.

Après une discussion assez longue, l’Officier Allemand décida d’envoyer le Lieutenant SERY chercher l’auto. Puis, se ravisant, me dit de l’accompagner. En arrivant à une cinquantaine de mètres de l’auto, un Officier Allemand nous dépassa, s’arrêta près de l’auto, et, sans un mot, tira deux balles de révolver sur le chauffeur RUSCASSIE, dont l’une l’atteignit à la tête.

Devant ce fait, je sortis l’arme cachée dans ma ceinture, pris le pas de course j’arrivai près de l’Officier que, malgré sa blessure, RUSCASSIE avait maîtrisé en partie. L’Officier Allemand me mit en joue mais n’eut pas le temps de faire feu, l’abattant moi-même d’une balle à la tête.

Avec l’aide du Lieutenant SERY, nous montâmes notre blessé dans l’auto, voyant que les Allemands se préparaient à venir vers nous, balayant dans notre direction la route de balles de mitrailleuses.

Sentant notre impuissance à sauver nos trois camarades et le civil restés dans leurs mains, nous décidâmes de regagner Montpellier, à toute allure, poursuivis par les Allemands pendant quelques kilomètres.

Nous pûmes regagner la ville. Dès notre arrivée, je rendais compte de ces faits au Commissaire de la République 8. Je demandais la constitution d’une colonne de volontaires pour essayer de sauver nos quatre camarades restés aux mains des boches. Cette colonne fut organisée dans la nuit du 24 au 25 août. Les Allemands ayant fait mouvement depuis la veille, après avoir assassiné et mutilé affreusement nos camarades que nous avons retrouvés sur le lieu de l’exécution.

Nous pûmes accrocher une colonne allemande aux environs de Montpellier [à Montferrier]. Après un combat d’une journée, nous infligions à l’ennemi de lourdes pertes en hommes et en matériel. Nous avons eu ainsi la satisfaction d’avoir vengé nos camarades, lâchement assassinés.

Le Capitaine ELY

Fig. 3 : Le carrefour de Bel-Air (photographie P-J Bernard)
Fig. 3 : Le carrefour de Bel-Air (photographie P-J Bernard)

La stèle en marbre érigée sur le lieu porte l’inscription suivante :

ICI LE 24 AOUT 1944
Un commando FFI chargé de la reddition d’une troupe allemande tombait dans un guet apens
Le Lieutenant DELRANC (André) 9
L’interprète KHUN 10
L’Adjudant chef DAVERDIS [pour Daverdisse] 12
furent lâchement abattus
Le Commandant ELY (Quarante) 13
Le Capitaine SERY
Le chauffeur RUSCASSIE réussit à s’échapper après avoir abattu
le Capitaine SS qui commandait le détachement Allemand.

Fig. 4 : Ancienne stèle commémorative des événements de Bel-Air (photographie JC Richard)
Fig. 4 : Ancienne stèle commémorative des événements de Bel-Air (photographie JC Richard)
Fig. 5 : Nouvelle stèle dévoilée en août 2020 à la Mairie de Grabels (photographie JC Richard)
Fig. 5 : Nouvelle stèle dévoilée en août 2020 à la Mairie de Grabels (photographie JC Richard)

Il manque à cette relation ce qui s’est passé après le départ des Français. La vindicte allemande a été non seulement marquée par l’exécution des quatre résistants, mais également par l’incendie du domaine voisin Paulhan de Bel-Air.

Cette propriété qui appartenait à Henri PAULHAN était, à ce moment là, occupée par des employés mais aussi par une fille et deux petits enfants du propriétaire. Les Allemands enfermèrent ces habitants dans une remise et mirent le feu au château. Par bonheur, l’un des enfants put sortir par une petite fenêtre et, faisant le tour du bâtiment, ouvrit la porte fermée de l’extérieur. Ils s’échappèrent tous et gagnèrent la propriété TEMPLE, BELLEVUE, au sud-est du château.

Il s’en est donc fallu de peu pour que l’assassinat des résistants soit suivi de l’assassinat de civils qui n’avaient eu aucune part dans ces tragiques pourparlers 14.

Au même lieu, fut abattu par la colonne le jeune André BELOT, originaire de Montarnaud, qui revenait de Montpellier à vélo.

La traversée de Grabels et le combat de Montferrier

Ce qui vient de se passer à Bel-Air ne semble pas avoir ralenti la route de la colonne qui arrive à Grabels 15. Émile BERTHOMIEU, qui voulait s’opposer au troisième vol d’un de ses vélos, est abattu sur le Plan de la Fontaine.

Dans le village, les Allemands se livrent, comme chaque fois, à des déprédations et des vols, en particulier de nourritures et de boissons.

La colonne poursuit sa route vers Montferrier où les autorités de Montpellier ont décidé d’organiser une attaque de la colonne. Nous disposons d’une relation officielle qui a été publiée dès 1945 dans le volume collectif sur la Libération 16.

Nous disposons d’un compte-rendu détaillé du Commandant ELY Lucien (« Quarante ») et d’un autre anonyme que nous transcrivons en entier 17 :

Compte-rendu des opérations du 25 août 1944 au village de Montferrier,
Chef Quarante, Commandant les Groupes Francs.

Participaient aux opérations :

— un détachement d’infanterie coloniale sous le Commandement du Colonel MEAR
— un groupe de F.F.I.
— et un groupe de F.T.P. sous mon commandement 
18.

Installés au petit jour sur la route de Montferrier, à hauteur du lieu-dit « le Tinal », avec mission de défendre la route de Montpellier contre un retour offensif de l’ennemi.

Armement dont je disposais : 1 mitrailleuse lourde allemande, des mitraillettes, des armes individuelles (mousquetons), 1 fusil mitrailleur, des munitions en quantité relativement faible.

Mon encadrement comprenait : les chefs de Groupe : SAVOIE, VINCENT, LAFFONT, VIALA.

La mitrailleuse tenait sous son feu la sortie de Montferrier et la route de Clapiers. Un détachement d’allemands s’est présenté et a été immédiatement détruit. Par la suite, 2 camions ont été immobilisés, en flammes, les conducteurs ayant été tués au volant, le reste des Allemands s’étant enfuis à travers bois.

Le groupe VIALA, avec CÉSAR et trois hommes dont un Sénégalais, avaient une mission de surveillance de la route de Ganges à Mende et était en position près du cimetière de Montferrier. Sur ordre du chef Quarante demandant un renfort d’une vingtaine d’hommes, ce groupe s’est porté en bordure de la route à quarante mètres du cimetière en Compagnie du F.F.I. RAYMOND.

Un ordre du Lieutenant-colonel, commandant les troupes régulières, nous nous sommes repliés sur le village de Montferrier et nous avons contourné pour prendre position face au pont du Lez. Après entente entre le Lieutenant-colonel et le chef SAVOIE, celui-ci décide de se porter à l’avant, face au pont et au transformateur d’énergie tenu par l’ennemi. Par une progression par bonds successifs sous la protection des F.M des troupes malgaches, nous avons pu prendre position sur un mamelon, face aux positions ennemies. La mitrailleuse entre en action, prenant à partie les Allemands dispersés à la lisière du bois dominant la route de Clapiers d’une part, contre le transformateur d’autre part, jusqu’à épuisement des munitions.

Le groupe VIALA s’était transporté au bord de la route dans la ferme du Tinal avec mission de tenir le gué (point possible d’une filtration pour l’ennemi) ce qui permet de prendre à partie les Allemands abandonnant leurs voitures stoppées ou anéanties. Une ripostade de leur part ne tarda pas à se faire sentir (mitrailleuses et canons de 25) pendant vingt minutes.

La pénurie de munitions ralentit le combat dans notre secteur et l’ordre de repli du Colonel Commandant les troupes coloniales nous parvint ; repli effectué sur le village sans incident. Pendant ce temps, le chef VINCENT, le sergent-major JOUBE, de leur propre initiative, allèrent chercher des munitions, des armes et du renfort à Montpellier. Un certain flottement régna pendant quelque temps à la suite d’un ordre mal interprété. Devant une situation qui menaçait de devenir dangereuse pour les hommes et les habitants, le Colonel MEAR et le chef SAVOIE reprenant les hommes en mains, et après réception et distribution de munitions, ont ouvert le feu à outrance de la nouvelle position qu’ils avaient prise à la gauche du village. Le Chef SAVOIE s’est déplacé au P.C. du Lieutenant-colonel Commandant des Malgaches faisant comprendre qu’il fallait tenir coûte que coûte, car des renforts arrivaient. Le Lieutenant-colonel lui-même a magnifiquement redressé la situation dans son secteur. Après un combat extrêmement violent, l’ennemi était anéanti et laissait sur le terrain de nombreux morts et blessés ainsi qu’un important, butin (canon antichar, véhicules lourds et légers).

À ce moment-là, le Lieutenant-colonel donna au chef SAVOIE l’ordre de rester sur les positions. Pendant ce temps, des patrouilles en vue d’examiner les prisonniers, étaient envoyées par les soins de l’officier supérieur.

Le groupe VIALA, de son côté, abordait le Lez en vue de la capture des prisonniers agitant des drapeaux blancs. Les F.F.I. GRIOTIER et BOUTE se mirent à l’eau pour ramener un prisonnier blessé. Treize prisonniers furent faits dont un adjudant, un sergent et deux blessés, et remis au Lieutenant-colonel commandant les coloniaux.

Ces prisonniers furent à leur tour remis aux chefs QUARANTE et SAVOIE qui eurent l’honneur de les ramener à Montpellier sans incident, en reconnaissance du courage et de l’esprit de sacrifice dont ils ont fait preuve au cours des opérations. De son côté le chef LAFFONT ramena à Montpellier une 201 Peugeot des P.T.T. chargée d’armes et de munitions.

Se sont distingués particulièrement :

Le chef SAVOIE qui grâce à ses capacités exemplaires de chef, est à l’origine de la victoire ; Armé d’un cran à toute épreuve, a entraîné ses hommes d’un élan audacieux et a facilité ainsi l’obtention du résultat final.

Le lieutenant VIALA, officier de grande valeur combattive, excellent entraîneur d’hommes, a magnifiquement et courageusement porté ses combattants à l’assaut des positions adverses, permettant ainsi la capture de nombreux prisonniers.

Le F.T.P. OUILLE, se servant d’une mitrailleuse allemande lourde, qui a jeté l’affolement dans les rangs ennemis.

Le chef VINCENT F.T.P., les F.F.I. Adj. Chef GRIOTIER, FASQUET, GARCIA Jean, GARCIA Gabriel, SEVEGNIER, BOUTE, RICHARD [?].

Les F.F.I. DAUDE, BIAU, PITTON qui, par leur ardeur au feu et leur courage, contribuèrent à rétablir une situation compromise, L’Adjudant ROUQUEL assurant la liaison et reconnaissance d’une façon remarquable et a rempli sa mission malgré de fréquentes embuscades (Grabels, Bel-Air, Montarnaud, Gigean, Gignac).

Le Sergent major JOUBE, le F.T.P. VINCENT ont assuré à un moment périlleux, le ravitaillement en munitions, armes et renfort, contribuèrent pour une large part, à la reprise du combat jusqu’alors compromis.

Le Lieutenant X… des troupes coloniales dans le secteur du chef SAVOIE a fait preuve de qualités indomptables de ténacité, de courage et d’esprit de sacrifice digne d’un chef.

Je termine en rendant hommage au Colonel MEAR qui a engagé d’abord dans la bataille ses hommes, ménageant ainsi les jeunes des Milices Patriotiques qui sont montés volontairement en 1ère ligne.

Je rends également hommage aux Officiers, S/Officiers et hommes de troupe des coloniaux pour leur courage et les abnégations au cours de la bataille.

Montpellier le 26 août 1944.
Le Commandant ELY LUCIEN,
Commandant les Bataillons de Sécurité de l’Hérault.

Signé : QUARANTE-ELY-LUCIEN.

Un second compte-rendu, plus critique pour le commandement, accompagnait le précédent.

Anniversaire de la Libération de Montpellier et la région
[mention manuscrite : Par VINCENT] 19

Le 21 août 1944 au matin, réunion de tous les chefs de groupe de la Résistance, chez le Commandant RIVE. Distribution à tous ces chefs de tracts incitant la population à la révolte et à l’insurrection nationale ; fermeture obligatoire de tous les débits de boissons ; arrestation immédiate de tous les miliciens et collaborateurs. Quelques heures plus tard, les F.T.P.F. dirigés par VINCENT, doivent se replier du théâtre car plusieurs blindés allemands font le tour de l’œuf et les moyens dont disposent ces hommes ne permettent pas encore d’attaquer des chars. À peu près à la même heure, le fondateur des Milices Patriotiques, Georges COSTES, est abattu dans le Courreau, alors qu’il distribuait des tracts à la tête d’un groupe, tous de moins de 17 ans.

Les convois ennemis traversent la ville à chaque instant, aussi c’est dans l’angoisse que la population regarde l’armée populaire, le brassard tricolore au bras, faire des va-et-vient dans la ville.

Le 22 août 1944, les Allemands redoutent de passer par Montpellier et empruntent la route de Clapiers-Castelnau, une colonne passant par cette route, brûle, fusille et pille tout sur son passage. 8 hommes du Groupe VINCENT gardent l’entrée de Montpellier au château de Fontfroide, route de Ganges, à 2 kilomètres de Font d’Aurelle. Quelques allemands mettent le feu au château de Fontfroide, ils n’ont pas le temps de terminer leur œuvre néfaste attaqués par 8 hommes du Groupe VINCENT, dirigés par le camarade BONNY qui repoussent les Frisés après leur avoir pris une camionnette de pain. Aussitôt ces quelques hommes de l’armée populaire combattent l’incendie du château aidés par la population des alentours et distribuent la camionnette de pain à la population des villages les plus près.

Pourtant tout n’est pas fini, la femme de BONNY vient prévenir VINCENT que les boches incendient tout sur la route de Clapiers. Tout d’abord on la prend pour une folle mais devant son insistance, VINCENT réussit à convaincre les autres chefs de la Résistance et on décide d’aller à la rencontre de l’envahisseur.

Le Colonel d’Active M., Commandant les troupes malgaches à Montpellier, décide après bien des difficultés, à donner quelques armes supplémentaires à l’armée populaire ainsi que 30 cartouches par homme et un peu de vivres.

Dans la nuit, nous partons camper à proximité de Montferrier, accompagnés des soldats malgaches et de quelques officiers d’active dont le Colonel M.

À la pointe du jour, le colonel M. demande aux F.T.P.F. d’aller en reconnaissance. VINCENT part avec 20 hommes et revient peu après, ayant repéré le passage des boches. Le Colonel M. déploie les troupes et nous partons ainsi, le Colonel a défendu de tirer sans ordre et nous marchons, marchons toujours, dans le sens inverse des Allemands qui pillent et brûlent tout ; toujours défense de tirer sans l’ordre de M. ; nous arrivons ainsi jusqu’à la tannerie de Montferrier. Le F.T.P.F. GUSTOU porte la mitrailleuse et demande à VINCENT si nous allons marcher encore longtemps, avant d’ouvrir le feu. VINCENT lui répond, nous attendons l’ordre du Colonel M. GUSTOU dit à VINCENT, pas plus de colonel que de beurre dans la roulante, il nous faut attaquer. VINCENT est de cet avis depuis longtemps et sans s’occuper plus longtemps de M. il donne l’ordre d’ouvrir le feu.

Les Allemands passent sur une route, les F.T.P.F. sont sur une autre route séparés seulement pas le Lez qui à cet endroit est bordé d’arbres assez touffus. Pourtant il y a un passage à nu d’environ 50 mètres, GUSTOU braque sa mitrailleuse sur ce passage et lorsqu’un camion boche chargé à bloc arrive au milieu, il ouvre le feu sur le camion tuant net le chauffeur qui a stoppé ; les Allemands se cachent derrière le camion et dans la forêt. Lorsqu’apparait un deuxième camion, VINCENT est tout étonné que GUSTOU n’ouvre pas le feu, mais GUSTOU est un vieux malin et connaît la région, il sait que la route est très étroite et que le deuxième camion ne peut passer tant que le premier est sur la route. Voyant que le feu a cessé, les Allemands des deux camions se rassemblent et après quelques secousses, réussissent à culbuter le premier camion dans le fossé. C’est l’instant qu’attendait le F.T.P.F GUSTOU, il ouvre le feu sur les boches qui sont à découvert, ce qui créa la panique parmi eux.

À ce moment, le Colonel M. par l’intermédiaire d’un agent de liaison, nous donne l’ordre de cesser le feu et de venir le rejoindre au village de Montferrier qu’il a pris avec tous ses Malgaches, bien entendu sans ouvrir le feu, car l’ennemi n’était pas dans le village. Nous allons rejoindre le Colonel M., mais un groupe de 8 à 10 hommes est resté à la tannerie pour empêcher que les Allemands traversent le Lez sur la passerelle. Bien nous en prit, car nous aurions eu les boches sur le dos.

J’arrive à Montferrier et demande à PM. où se trouve l’ennemi, il me répond je ne sais pas, quelque part là devant ! Mais nous allons les attaquer par derrière. Je réponds que nous, nous avons ouvert le feu à la tannerie et que nous savions où ils se trouvaient. Je lui demande de me prêter ses lunettes d’approche et après inspection du terrain, je lui indique un détachement ennemi au transformateur de Clapiers. Aussitôt, je pars avec GUSTOU et une trentaine de soldats sans uniforme. Un capitaine d’active nous suivit avec deux autres officiers d’active également et quelques malgaches. Au cours du combat, je constatais qu’un de ces officiers était assis, son fusil entre les jambes et tremblait comme une feuille ; craignant qu’il démoralise mes hommes, je lui donnais l’ordre de partir à Montferrier, son capitaine d’ailleurs a été de mon avis. Ce capitaine là, je ne le connais pas, mais je dois dire qu’il a tenu sa place d’officier et de combattant jusqu’au bout.

Nous sommes arrivés ainsi à proximité du transformateur. À ce moment, je fais l’inventaire des cartouches qu’il nous reste en main et je constate que chacun de nous n’a plus qu’une ou deux cartouches, un seul chargeur pour la mitrailleuse et impossible de s’en servir car il est abîmé et ne rentre plus sur la mitrailleuse.

Deux jeunes gens que nous avions pris au départ de Montpellier ont encore toutes leurs cartouches, aussi je leur demande des explications. Ils me demandent alors comment on les met dans le fusil. Toutes mes félicitations à ces deux jeunes gens qui, sans savoir se servir d’un fusil, sont venus jusqu’à quelques mètres des boches. Le gros des Malgaches restés dans Montferrier et qui eux ne manquaient pas de munitions se trompaient quelquefois et nous tiraient dessus.

Devant cette situation, je fis replier mes hommes dans Montferrier ainsi que les quelques malgaches qui nous avaient suivi au grand regret de ces derniers qui voulaient continuer le combat, mais qui ne comprenaient pas que nous n’avions plus de munitions. Devant notre retraite, les Allemands en profitent pour contre attaquer et en même temps tentent de passer le Lez à la tannerie, mais le groupe LAPIE qui était à la tannerie les bloqua à la passerelle. Croyant la bataille perdue, le colonel M. donne l’ordre de repli. Je donne l’ordre de rester et prenant une voiture, je vais à la tannerie où se trouve également une mitrailleuse. Je dis au camarade CÉSAR du Front National de ne plus s’occuper des boches mais de braquer sa mitrailleuse sur la route et de tirer sur tous ceux qui voudraient abandonner le combat.

C’est ainsi que M. fut contraint de rester à Montferrier jusqu’à la fin de la bataille. Quelques instants plus tard nous étions maitres de la situation et les boches se rendaient.

7 civils avaient été tués la veille par les incendiaires et étaient au pied de l’église, je voulus fusiller des Allemands devant les cadavres de nos camarades mais M. ne voulut pas.

Je pourrais prolonger cette histoire authentique de Montpellier et je pourrais parler de beaucoup d’autres qui se sont distingués à ce combat. Mais mon but est simplement de rappeler à la population montpelliéraine quel a été le rôle de l’armée du Peuple dans la Libération de notre territoire et faire une mise au point sur une histoire déjà éditée depuis longtemps où on parle de Héros qui n’ont pas mis les pieds à Montferrier et où l’on oublie de parler de ceux qui s’y trouvaient.

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Fig. 6 : Extrait de l’ouvrage Le combat de Montferrier, La Libération de Montpellier,
août 1944, Montpellier, 1945.

Ces deux comptes-rendus se complètent et apportent la vérité des combats au rapport du Colonel MEAR publié en 1945. On note l’opposition qui n’est pas seulement formelle aux militaires de l’Armée d’Armistice dont, en quelque sorte, leur engagement lors de ce combat est celui de la « dernière heure » 20.

Ce sont les Milices Patriotiques 21 qui constituent le fer de lance, envoyées par les autorités de Montpellier pour ce combat (avec un armement très limité) mais auxquelles on doit ajouter d’autres origines : F.F.I., Maquis, Groupes Francs… Avec le régiment des Malgaches commandé par le Colonel MEAR, de lourdes pertes ont été infligées à l’arrière-garde de la colonne de Rodez. Les Allemands qui ont échappé continueront d’être harcelés tout au long de leur route qui s’achèvera à Chomérac en Ardèche où aura lieu la reddition finale 22.

Le combat de Montferrier – le seul dans lequel la ville de Montpellier considère avoir « gagné » sa Libération – a montré la détermination de certains résistants alors que l’arrivée des maquis aura seulement lieu le vendredi 25 pour le maquis Bir-Hakeim, et le dimanche 27 pour la colonne LEROY des maquis de l’Aveyron avec Gilbert DE CHAMBRUN. C’est à ce moment là que va se poser la question de l’avenir des maquisards. G. DE CHAMBRUN est partisan d’une intégration par unités FFI constituées et donc telles quelles dans l’armée. Une unité a cependant été constituée : « la Brigade Légère du Languedoc ». Ce ne sera pas ce qui sera décidé : chaque homme devra s’engager individuellement dans l’armée « pour la durée de la guerre » ou bien rentrer dans ses foyers ! La venue à Montpellier, le 2 septembre, du général DE LATTRE DE TASSIGNY mettra un terme au projet de G. DE CHAMBRUN de créer une armée nouvelle à base populaire. Au début de février 1945, DE LATTRE retire à G. DE CHAMBRUN le commandement du 81ème R.I. et lui conseille de rejoindre son poste au ministère des Affaires étrangères. La décision devient officielle le 24 mars mais n’est pas acceptée si bien que le 18 avril G. DE CHAMBRUN est mis aux arrêts de forteresse où il reste jusqu’au 30 mai : libéré il est rendu à la vie civile 23.

NOTES

  1.J.-C. RICHARD RALITE, « Les passages des colonnes allemandes dans le Cœur d’Hérault au mois d’août 1944 et l’embuscade d’Aniane (26 août) par le maquis Rolland », Études Héraultaises, 43, 2013, p. 185192 (avec la bibliographie p. 191-192) ; B. CHAIX, L’occupation allemande en Ardèche (1942-1944) et la retraite de la Wehrmacht du Midi de la France en août 1944, Privas, 2017.

  2.La légion azerbaïdjanaise est faite de volontaires, constituée en 1943, et succédant à un élément SS croate. Elle comprend 5 compagnies de combat, trois compagnies auxiliaires pour un effectif total de 1 800 à 2 000hommes. L’encadrement allemand est complété par quelques officiers ou sous-officiers azéris, accompagnés de mollahs car les hommes sont de religion musulmane : d’après B. CHAIX, op.cit., p. 400. Sur l’occupation de Rodez et le départ des troupes allemandes : J.M. COSSON, « Rodez : clichés d’une ville sous l’occupation »,Revue du Rouergue, 38, été 1994, p. 146-1076, avec le rapport du capitaine Staubb d’octobre 1944, p. 167-174.

  3.Mémorial du Rouergue en Résistance, Rodez, 1991, recense les combats et les stèles dressées après la guerre : Prades-de-Salars (un officier FFI et un soldat azerbaïdjanais, le 19 août), Vezins-de-Lévezou (4 civils le 18 août), Saint-Léons (141 civils et 6 maquisards, les 1820 août), Millau (un civil le 22 août).

  4.H. MOIZET, Moïse ne savait pas nager, histoire de la Résistance « Armée secrète » du Sud Aveyron, Saint-Affrique, 2014, p. 118-131, et, p.158-159 : J. Robin, Le pilote inconnu du Larzac, le 2ème lieutenant Richard-Francis Hoy.

  5.J.-C. RICHARD RALITE, « Les miliciens du Gers abattus au Caylar par la colonne de Rodez le 23 août 1944 », Études héraultaises, 48, 2017, p. 179-181.

  6.À Montpeyroux l’agent de liaison Marcel Compan est abattu et à Saint-Jean-de-Fons un civil J. Cambon. La stèle de Montarnaud porte les noms de A. Belot, R. Paroutel, H. Diguelman, P. Sauvan. Sont aussi abattus deux Indochinois Bui Van Phu et Tran Van Hieu.

  7.AD Hérault, 11 F 379. Nous remercions M. J. Duvaux de nous avoir communiqué ce compte-rendu. Le Commandant Ely (« Quarante ») avait fondé, « sous l’égide des MUR » un groupe paramilitaire de cent-quarante hommes. En janvier 1943, ce groupe (dit « groupe Morel ») se met à la disposition du Colonel Guillaut de l’ORA et en février 1944 à la disposition du Front National : J. ALRIC, L’ORA en Languedoc Roussillon (R23), Montpellier, 1995, p. 32 et 58. Un premier accrochage a eu lieu à Bel-Air avec le groupe de J. Senatore, membre du Groupe Franc Léon (ADH, 11 F 379) : « Le 19 août l’ordre est donné de se rendre à Montpellier. Au cours de ce mouvement, le groupe de Joseph Senatore, composé de 13 éléments, occasionne un accrochage avec l’ennemi au niveau de Bel Air à l’entrée de Montpellier. Cet accrochage a permis de faire prisonnier un soldat allemand et de récupérer armes et munitions. Arrivée à Montpellier, la Résistance prend position au domaine de Touchy à la Croix d’Argent et attend les ordres ».

  8.J. BOUNIN, Beaucoup d’imprudences, Paris, 1974, qui précise, le lundi 21 août (p. 149-150) qu’il avait fait imprimer en allemand sous le titre L’Enfer de la vallée du Rhône des tracts pour démoraliser les Allemands et leur conseiller de rejoindre les maquis. C’est en distribuant ces tracts que Georges Costes des Milices Patriotiques est abattu rue du Courreau ce jour-là (F. NICOLADZE, Passant souviens-toi, Montpellier, 1999, p. 104). J. Bounin, sous la responsabilité du Capitaine ELY avait mis en place sur toutes les routes aboutissant à Montpellier, à deux kilomètres, des éléments des Milices Patriotiques pour renseigner et, éventuellement abattre les isolés sans s’attaquer à des colonnes.

  9.Albert Delranc « André » était né à Mende le 12 juillet1917. (Dossier à Vincennes, GR 16P 172281 et à Caen, AC 21 P 116-328). Le dossier de Caen donne le témoignage de sa mère : Au moment où il est entré dans la Résistance, mon fils était cuisinier de l’École de Santé Navale réfugiée à Montpellier [A. BORGOMANO, « L’École de Santé Navale et Coloniale à Montpellier (1940-1943) », Études Héraultaises, 40, 2010, p. 163-172]. Pendant l’Occupation et la période des combats pour la Libération, il ne m’a donné aucun détail sur ses missions. Je l’ai tout juste vu deux fois alors qu’il effectuait des liaisons avec Mende et il faisait un léger détour pour venir nous voir à Chirac où j’habite. Et il a été tué avant la « Libération définitive ». De 1943 à sa mort, il est au maquis et relève de « l’AS groupe Quarante, Montpellier » (attestation de Henry Tricou, alias Charles, chef d’arrondissement de l’AS à Montpellier) et la mention marginale de son acte de décès précise : « Mort pour la France, lieutenant des FFI ». Une attestation de G. de Chambrun précise « qu’il a été agent de liaison du Commandement régional de l’Action ouvrière dans la région de Montpellier. En cette qualité, il a procédé personnellement au transfert des explosifs pour les sabotages sur la voie ferrée ».

 10.Eugène Kuhn était né à Haguenau, le 13 juillet 1899.Il était interprète à la Préfecture de l’Hérault. Il fait partie du groupe parti de Montpellier pour aller rencontrer la colonne allemande.

 11.Jules Daverdisse était né à Sugny (Namur, Belgique) le 10 octobre 1899.Il demeurait alors à Saint-Paul-et-Valmalle où il dirigeait un détachement de travailleurs tonkinois. Il ne faisait pas partie de la délégation du Commandant Quarante qui ne le cite pas dans son rapport (cf. supra). D’après des témoins oculaires, en compagnie de deux indochinois Bui Van Phu et Tran Van Hieuqui chassaient des sauterelles, ils furent abattus par les Allemands.

 12.Le sergent d’aviation Paul Pallier était né à Brenat (Puy-de-Dôme) le 17 février 1916. Il était affecté à l’État-Major de la 4ème région aérienne, base de Fréjorgues.

 13.Lucien Ely « Quarante » était né le 11 juillet 1904 à Médéa (Algérie) (Archives de Vincennes, GR 16P 209-124). De 1923 à 1936 il suit une carrière militaire qui le fait parvenir de Brigadier au grade d’Adjudant Chef. Il est fait prisonnier en 1940 et incarcéré dans un Stalag. Il s’en échappe dans un convoi de rapatriés Nord Africains et s’en évade en février 1941. À Châteauroux, il est réintégré dans l’armée au 15ème Régiment d’Artillerie. Il s’engage dans la Résistance (M.U.R.). A Montpellier il préparer un plan de destruction des voies ferrées. Quatorze équipes (140 hommes) sont formées pour, le moment venu, mettre en action le plan. Une partie des hommes du CAT partis à Rodez, Ely rejoint le Front National. Il lui reste sept équipes avec lesquelles il réalise la destruction d’équipements et récupère des armements. À la Libération l’effectif atteint deux cents hommes et Ely prendra la direction des Milice patriotiques. Le Cdt Ely fera partie avec le Lt. Colonel Leroy, le Lt. Mehu, le Colonel Rolland et le Cdt. Planès de la première Cour Martiale des F.F.I.

 14.Il s’agissait de Mme Ricome (née Paulhan) et de ses deux enfants, Madeleine (15 ans) et Charles (10 ans), avec deux employés de la propriété. Nous remercions le docteur B. Paulhan des renseignements sur cet ultime épisode et M. J.-M. Astor, actuel propriétaire du château.

 15.P. COUDER, Mémoires pour une journée particulière, Grabels – 24 août 1944, Montpellier, 1994.

 16.Le combat de Montferrier, La Libération de Montpellier, août 1944, Montpellier, 1945, p. 74-121, qui dresse, p. 87, un bilan des morts et des blessés. À Montferrier, en fin d’après midi, cinq civils sont abattus : J. Costes, R. Guérin, L. Long, P. Sutra et A. Thibal (H.CHAUBIN, « André Thibal, 1906-1944 », Dictionnaire Maitron des fusillés). Dans le combat, J. Pervent perd la vie et 6 combattants sont blessés : Resbeuf, Adjudant-chef Martre, Sergent indochinois Phu, Tirailleur Indochinois Konan, Adjudant-chef Sabiani, Maréchal-des-Logis Planaud. Du côté des Allemands, on décompte : 10morts, 60 blessés et 15 prisonniers (dossier Senatore, ADH 11 F 379). Le lieutenant-colonel Mear donne un rapport détaillé sur le combat (p. 89-113), ainsi que F. Malric, le Lt. Colonel Leroy et J. Caussignac (p. 115-121) avec quatre croquis portant les emplacements d’attaque. On consultera toujours les ouvrages de G. BOULADOU, L’Hérault dans la Résistance, 1940-1944, Nîmes, 1992, p. 158, et Les maquis du Massif central méridional, 1943-1944, Montpellier, 2001, p. 579-581.

 17.Ces documents sont aussi conservés aux Archives de l’Hérault sous la cote 11 F 379, communiqués par M. J. Duvaux. Le second compte rendu dactylographié porte une mention manuscrite : « par Vincent ». Il s’agit de Robert Euvrard, dit capitaine Vincent, ancien des Brigades Internationales, F.T.P., (1916-2003). J. A. BAILLY, La Libération confisquée, Le Languedoc 1944-1945, Paris, 1993, p. 203 et 377, et Y. LEQUIN, « Euvrard Robert », Dictionnaire Maitron.

 18.Ne sont cités ni le maquis Valmy ni le Corps-Franc Léon : « Léon est déjà parti à pied du village de Celleneuve, avec la moitié de son groupe, en direction de Montferrier. Le reste, une soixantaine d’hommes, est amené sur place à bord d’un car et d’une camionnette […] Henri Tricou arrive avec la moitié du maquis Valmy où il participe au combat. Arrivant sur les arrières des Allemands dans l’après-midi [du 25 août], Léon et ses hommes chargent avec une telle détermination que les Allemands prennent la fuite et du même coup se découvrent au tir du groupe Méar.  » J.-A. BAILLY, La Libération confisquée, op. cit., p. 227 qui signale un rapport de Léon« fonds privé », dont nous n’avons pas eu connaissance. La présence et l’action du groupe Léon sont aussi confirmées par un membre de cette formation, Joseph Senatore (ADH, 11 F 379) : « le groupe prend position dans la nuit du 24 au 25 et dresse le bilan général, soit, pour les allemands : 10 morts, 60 blessés et 15 prisonniers ».

 19.J.-A. BAILLY, op.cit., p. 204, 236, 377. Il s’agit de Gabriel Pacull, adjoint de L. Ely.

 20.Il s’agit de Robert Euvrard, dit Capitaine Vincent (1916-2003). Y. LEQUIN, « Euvrard Robert », Dictionnaire Maitron, Paris, 2009-2016. Nous remercions Mme M.-J. Guigou qui nous a communiqué les comptes rendus rédigés par R. Euvrard de son engagement dans les Brigades Internationales en Espagne avant 1939. Ces documents avaient été confiés à son père, M. J. Ars qui avait combattu en Allemagne en 1944-1945 sous les ordres du « Capitaine Vincent ».

 21.Sur l’armée d’armistice et l’engagement de certains militaires dans la Résistance on consultera : A. de DAINVILLE, L’ORA, la résistance de l’Armée (guerre 1939-1945), Paris, 1974 ; J. ALRIC, L’Organisation de Résistance de l’Armée en Languedoc Roussillon (R3), Montpellier, 1995 ; F. MARCOT et alii, Dictionnaire historique de la Résistance, Paris, 2006, p. 201-202 (par J. Delmas). L’armée française avait été réduite à 100 000 hommes, chiffre exact de la réduction appliquée à l’Allemagne en 1919 !

 22.F. MARCOT et alii, op. cit. p. 195-196 (R. Bourderon).Réclamées par le Parti communiste en 1943, les Milices Patriotiques sont créées en 1944, plus ou moins rapidement et selon les départements. Elles participent aux évènements de l’été 1944 et vont se transformer en sorte de police supplétive pour l’épuration. En octobre le Gouvernement prononce leur dissolution qui sera validée par M. Thorez, en janvier 1945, au profit d’une seule et unique police nationale.

 23.B. CHAIX, op.cit., suit la colonne, après l’attaque aérienne près de Sommières, jusqu’à Lussas avec différents éléments militaires ou isolés qui s’agrègent à elle, pour un total d’environ 3800 hommes, et la reddition, le 31 août à Chomérac.