Description
Où en est aujourd’hui la recherche sur saint Roch ?
Le présent article a pour origine un bref échange de courriel avec M. Jean-Claude Richard, directeur de recherche au CNRS (E.R.) qui nous écrivait après avoir consulté le volume des Subsidia Hagiographica consacré aux Actes de Colloque de Padoue, organisé les 12 et 13 février 2004, relatif à nos travaux, à leurs conséquences et aux réactions qu’ils suscitent. Il nous y posait une question : « Quelles sont à ce jour les réactions à votre thèse ? Est-elle maintenant acceptée, y a-t’il des réticences, lesquelles ? ». Il nous y faisait également une suggestion : « Il y a peut-être des sources encore non exploitées y compris ici (ndla, à Montpellier). Quand on sait le nombre de cotes d’archives du diocèse de Maguelone-Montpellier qui ne sont pas exploitées (ni éditées) on peut supposer qu’on risquerait d’y trouver des éléments… Mais c’est vraiment l’aiguille dans la botte de foin ». Nous avons pensé que l’une et l’autre pouvaient servir d’ossature au présent article, dans la mesure où cette interrogation et cette idée nous semblent bien résumer ce que pourrait être aujourd’hui l’attente du lecteur érudit et intéressé par l’histoire de Montpellier face à nos travaux. La question renvoie à ce qui peut être considéré comme acquis par la communauté scientifique sur le plan de la genèse du culte et de l’authenticité de la figure de sainteté. La suggestion renvoie à la place que Montpellier tiendrait encore dans ce dossier, en particulier sur le point des perspectives de recherche, dans la mesure où tous les récits connus jusqu’à une époque récente (sur cette restriction cfr infra) s’accordaient précisément sur la naissance du saint dans la cité languedocienne.
Dans l’ordre des choses, sans doute convient-il donc de résumer tout d’abord ce que nos travaux ont apporté de neuf et qui, jusqu’à présent il est vrai, est demeuré confiné dans des revues assez spécialisées. Au fond, quelle est notre thèse et en quoi rompt-elle avec tous les travaux de nos prédécesseurs ? Elle recouvre deux aspects complémentaires qui ont trait d’une part à la filiation textuelle des différents récits dont nous disposions jusque-là et dont nous disposons aujourd’hui et d’autre part à la genèse de la figure de sainteté elle-même, le tout étant soutenu par une véritable remise en cause de la méthode employée par nos prédécesseurs depuis deux siècles. Il n’est pas imaginable dans le volume traditionnellement imparti aux articles d’une revue telle que celle-ci de rendre compte de ces trois aspects du dossier dans toute leur complexité. Toutefois, le fait de disposer aujourd’hui d’un corpus de contributions issues de notre thèse et de nouveaux travaux va nous permettre d’aller à l’essentiel, tout en renvoyant les lecteurs les plus exigeants à ces publications. Nous nous risquerons même, en fin d’article, à lever un coin du voile sur nos découvertes très récentes en Languedoc qui apportent de nouveaux arguments à notre thèse.
Une méthodologie ignorée : séparer le saint de sa légende
Dans le premier domaine, nos travaux ont complètement renversé la filiation textuelle qui depuis l’article de référence d’Augustin Fliche paru dans les Analecta Bollandiana – qui synthétisait en fait toute une série de travaux italiens parus dans l’entre-deux-guerres -, prévalait sans partage et servait de socle à la reconstitution d’une sorte de biographie historique plaçant l’existence du saint dans la deuxième moitié du XIVème siècle.
En tout premier lieu, nous nous devons de faire une remarque d’ordre méthodologique sur cette synthèse et les travaux qui l’avaient inspirée. Cet aspect méthodologique est en fait tout aussi fondamental que nos résultats eux-mêmes et explique en grande partie pourquoi la rupture avec le passé peut paraître aussi soudaine et radicale au lecteur peu familiarisé avec les études hagiographiques. Alors que la « méthode hagiographique », héritière de trois siècles de publications et de critique depuis Rosweyde, était déjà remarquablement aboutie dès la première moitié du XXème siècle, il est singulier de constater que tous les travaux relatifs à saint Roch sont marqués du sceau d’une méthode dite « traditionnaliste », dont les limites ont été remarquablement décrites et analysées dans des ouvrages tels que ceux d’Hippolyte Delehaye, de René Aigrain ou plus récemment de Dubois-Lemaître. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2009 |
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Nombre de pages | 15 |
Auteur(s) | Pierre BOLLE |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |