Où en est aujourd’hui la recherche sur saint Roch ?
Où en est aujourd’hui la recherche sur saint Roch ?
p. 45 à 59
Le présent article a pour origine un bref échange de courriel avec M. Jean-Claude Richard, directeur de recherche au CNRS (E.R.) qui nous écrivait après avoir consulté le volume des Subsidia Hagiographica consacré aux Actes de Colloque de Padoue, organisé les 12 et 13 février 2004, relatif à nos travaux, à leurs conséquences et aux réactions qu’ils suscitent. Il nous y posait une question : « Quelles sont à ce jour les réactions à votre thèse ? Est-elle maintenant acceptée, y a-t’il des réticences, lesquelles ? ». Il nous y faisait également une suggestion : « Il y a peut-être des sources encore non exploitées y compris ici (ndla, à Montpellier). Quand on sait le nombre de cotes d’archives du diocèse de Maguelone-Montpellier qui ne sont pas exploitées (ni éditées) on peut supposer qu’on risquerait d’y trouver des éléments… Mais c’est vraiment l’aiguille dans la botte de foin ». Nous avons pensé que l’une et l’autre pouvaient servir d’ossature au présent article, dans la mesure où cette interrogation et cette idée nous semblent bien résumer ce que pourrait être aujourd’hui l’attente du lecteur érudit et intéressé par l’histoire de Montpellier face à nos travaux. La question renvoie à ce qui peut être considéré comme acquis par la communauté scientifique sur le plan de la genèse du culte et de l’authenticité de la figure de sainteté. La suggestion renvoie à la place que Montpellier tiendrait encore dans ce dossier, en particulier sur le point des perspectives de recherche, dans la mesure où tous les récits connus jusqu’à une époque récente (sur cette restriction cfr infra) s’accordaient précisément sur la naissance du saint dans la cité languedocienne.
Dans l’ordre des choses, sans doute convient-il donc de résumer tout d’abord ce que nos travaux ont apporté de neuf et qui, jusqu’à présent il est vrai, est demeuré confiné dans des revues assez spécialisées. Au fond, quelle est notre thèse et en quoi rompt-elle avec tous les travaux de nos prédécesseurs ? Elle recouvre deux aspects complémentaires qui ont trait d’une part à la filiation textuelle des différents récits dont nous disposions jusque-là et dont nous disposons aujourd’hui et d’autre part à la genèse de la figure de sainteté elle-même, le tout étant soutenu par une véritable remise en cause de la méthode employée par nos prédécesseurs depuis deux siècles. Il n’est pas imaginable dans le volume traditionnellement imparti aux articles d’une revue telle que celle-ci de rendre compte de ces trois aspects du dossier dans toute leur complexité. Toutefois, le fait de disposer aujourd’hui d’un corpus de contributions issues de notre thèse et de nouveaux travaux va nous permettre d’aller à l’essentiel, tout en renvoyant les lecteurs les plus exigeants à ces publications 1. Nous nous risquerons même, en fin d’article, à lever un coin du voile sur nos découvertes très récentes en Languedoc qui apportent de nouveaux arguments à notre thèse.
Une méthodologie ignorée : séparer le saint de sa légende
Dans le premier domaine, nos travaux ont complètement renversé la filiation textuelle qui depuis l’article de référence d’Augustin Fliche 2 paru dans les Analecta Bollandiana – qui synthétisait en fait toute une série de travaux italiens parus dans l’entre-deux-guerres -, prévalait sans partage et servait de socle à la reconstitution d’une sorte de biographie historique plaçant l’existence du saint dans la deuxième moitié du XIVème siècle.
En tout premier lieu, nous nous devons de faire une remarque d’ordre méthodologique sur cette synthèse et les travaux qui l’avaient inspirée. Cet aspect méthodologique est en fait tout aussi fondamental que nos résultats eux-mêmes 3 et explique en grande partie pourquoi la rupture avec le passé peut paraître aussi soudaine et radicale au lecteur peu familiarisé avec les études hagiographiques. Alors que la « méthode hagiographique », héritière de trois siècles de publications et de critique depuis Rosweyde, était déjà remarquablement aboutie dès la première moitié du XXème siècle, il est singulier de constater que tous les travaux relatifs à saint Roch sont marqués du sceau d’une méthode dite « traditionnaliste » 4, dont les limites ont été remarquablement décrites et analysées dans des ouvrages tels que ceux d’Hippolyte Delehaye 5, de René Aigrain 6 ou plus récemment de Dubois-Lemaître 7.
De quoi s’agit-il ? Tous ces auteurs ont en commun de s’être exclusivement servis dans leur travail des récits hagiographiques, ignorant ainsi un des acquis les plus fondamentaux de la méthode hagiographique : le récit hagiographique est une des sources les plus médiocres pour établir la personnalité d’un saint. En se fondant sur ces sources narratives, les traditionnalistes se sont en fait laissé prendre au même piège que les « hypercritiques ». Les premiers tiennent un récit pour authentique parce qu’il ne contient aucune incohérence et les autres l’écartent parce qu’il est truffé d’invraisemblances 8. Mais leur erreur commune est de considérer implicitement qu’une Vie saint est le meilleur moyen, si pas le moyen exclusif, de rassembler des renseignements relatifs à la biographie d’un saint. Cette attitude nous renvoie aux mises en garde d’Hippolyte Delehaye dans ses deux célèbres synthèses sur la méthode hagiographique et notamment celle-ci : « La conclusion qui s’impose, et qu’une étude plus approfondie de l’hagiographie ancienne ne fera que confirmer, c’est que, sauf des circonstances exceptionnelles, la partie littéraire d’un dossier hagiographique n’est guère utilisable pour fixer la personnalité d’un saint » 9. Nous avons ainsi pu confirmer au cours de nos travaux combien les sources liturgiques, iconographiques et même civiles peuvent beaucoup plus sûrement nous apporter ces renseignements, mais surtout combien la méconnaissance de la spécificité du genre en soi que constitue la légende hagiographique a amené les traditionnalistes à commettre des erreurs monumentales. En témoigne par exemple le nombre d’auteurs qui se sont interrogés depuis Jean Pion (Pinius de son nom latinisé), le rédacteur de la notice des Acta Sanctorum parue en 1737, sur la naissance royale ou aristocratique du saint 10, déclarée dans certains récits, sans jamais y percevoir un lieu commun des plus fréquents de la littérature hagiographique. Jamais, dans aucun ouvrage publié jusqu’à nos jours ne seront répertoriés les dizaines de topoi pourtant évidents du récit, comme celui de la scène finale de reconnaissance par des parents qui l’ont eux-mêmes emprisonné (cfr. Infra) 11. Si de telles omissions sont assez compréhensibles à l’époque de Pinius qui ne disposait pas de l’outillage méthodologique qui s’est progressivement forgé depuis, elles le deviennent beaucoup moins dans le chef d’historiens du XXème, comme Augustin Fliche 12, spécialiste de l’Église ou, par exemple, du rédacteur de la notice de la New Catholic Encyclopedia 13.
Ces auteurs perdent de vue que la légende hagiographique est avant tout un récit édifiant, écrit de très nombreuses années après des faits réels ou imaginés et qui ne s’encombre que très rarement de scrupules historiques. Celle de saint Roch ne déroge pas aux lois du genre. Il s’agit d’une histoire belle et vertueuse qui propose un modèle de sainteté charitable bien en accord avec son siècle celle d’un jeune homme montpelliérain qui, à la mort de ses parents, donne tous ses biens aux pauvres pour partir en pèlerinage à Rome. En chemin, à Acquapendente, il a l’occasion de se mettre au service d’un hôpital de pestiférés et d’y accomplir des guérisons miraculeuses. Il délivre Rome de la peste et y rencontre un cardinal qui le présente au pape et auprès duquel il demeure trois ans. À l’issue de ce séjour, Il reprend sa route vers le Nord et, à Plaisance, est lui-même atteint de la peste. Il s’isole alors dans un bois où un chien nourricier vient chaque jour lui apporter un pain qu’il dérobe à son maître Gothard, lequel devient bien vite un disciple du saint. Une fois guéri, il reprend sa route vers sa patrie, mais arrivé dans une ville en guerre, il est pris pour un espion, arrêté et présenté au seigneur du lieu, un oncle qui ne le reconnaît pas et à qui il ne dévoile pas son identité. Il est alors jeté dans une prison et y meurt au bout de cinq années. Il est alors identifié par les signes merveilleux qui accompagnent sa mort et surtout par la croix qu’il portait sur la poitrine à la naissance et que reconnaît sa grand-mère paternelle. Les seigneurs du lieu s’apercevant de leur méprise lui font des funérailles grandioses, une vénération publique s’empare alors de sa sépulture et gagne bien vite l’Europe entière.
L'établissement d'une biographie historique et d'une « nouvelle chronologie »
D’emblée, tous ces auteurs se sont donc fondés sur les deux récits publiés jusque-là par les Bollandistes, la Vita Sancti Rochi publiée par le Vénitien Francesco Diedo en 1479 et une Vie plus courte, les Acta Breviora, ainsi nommés par Pinius, qu’ils croyaient antérieure et dans laquelle ils voulaient voir l’héritage d’une Vie originelle perdue, rédigée en italien. Ils sont évidemment tombés sur des invraisemblances et des contradictions internes… et de ces deux récits ont alors retenu le plus vraisemblable, celui qui posait le moins de problèmes les Acta Breviora. Pourquoi ? Essentiellement parce que la chronologie proposée par Francesco Diedo était tout simplement inconciliable avec l’histoire une peste entre 1295 et 1327 était tout aussi invraisemblable qu’une rencontre avec un pape à Rome à la même période. Pour ces deux seules raisons il était bien plus commode de se référer aux Acta Breviora qui ne contenaient aucune chronologie. D’autre part, la mort du saint dans ce texte à « Angleria », aujourd’hui Angera, petite ville sur les rives du Lac Majeur, s’accordait beaucoup mieux avec le fait qu’on n’avait jamais pu mettre en évidence à Montpellier la moindre trace d’une sépulture et d’une vénération originelle.
Ainsi est née la « nouvelle chronologie italienne » puisque les Acta Breviora ne comportaient aucune chronologie, ils permettaient aux historiens de se mettre à chercher commodément dans l’histoire quand les faits racontés étaient imaginables… et ils ont naturellement trouvé. Les événements devenaient possibles en les reportant aux années 1350-1380, moment où non seulement les pestes réapparaissaient à intervalle régulier mais où il était permis au saint de rencontrer un pape à Rome : Urbain V, de retour dans la Ville éternelle entre 1367 et 1370, Montpelliérain d’origine et accompagné de son frère, le cardinal Anglic de Grimoard qui fut bien vite assimilé au « Cardinalis quidam titulo Angleriae » des Acta Breviora. En outre, certains auteurs n’hésitèrent pas, malgré l’absence du moindre élément matériel ou philologique, à suggérer que les Acta Breviora devaient être les héritiers d’un récit en italien antérieur, composé entre la fin du XIVème et le début XVème, celui-là même qu’évoquait brièvement Diedo dans son introduction. Outre la Vita Sancti Rochi, il aurait aussi influencé les Acta Breviora et une Vie en allemand, déjà connue par ailleurs. Certains allèrent même jusqu’à proposer en guise de rédacteur Gothard, le compagnon du saint du récit.
Ce faisant, ces auteurs ont commis une deuxième erreur méthodologique : la confusion du vrai et du vraisemblable. Des deux récits, ils ont considéré comme le plus digne de foi et le plus ancien celui qui comportait le moins d’invraisemblances 14. D’autre part en amont des récits hagiographiques des questions beaucoup plus fondamentales eussent dû les inviter à les lire avec davantage de prudence. Comment se faisait-il qu’un saint de la fin du moyen âge – et donc relativement récent – n’ait laissé strictement aucune trace archéologique d’enracinement d’un culte sur le lieu d’une sépulture ? Car à vrai dire, pas plus à Angera qu’à Montpellier on est en mesure de mettre en évidence le plus infime indice d’une sépulture et d’un culte originel. En jargon hagiologique, nous conclurions que des deux coordonnées hagiographiques fondamentales qui sont la signature d’un saint, le jour calendrier (et non la date comme chacun le sait) et le lieu de sa mort, il manque à saint Roch la deuxième.
Après avoir nous-mêmes, jeunes étudiants, commencé nos recherches selon cette absence de méthode (c’est ainsi que, comme d’autres, nous nous étions mis à tenter d’identifier le saint dans les familles montpelliéraines…), nous nous sommes rapidement aperçus que notre travail demeurerait dans une impasse s’il ne s’attelait pas prioritairement à une analyse bien plus poussée des textes eux-mêmes : non pas à ce qu’ils racontaient, mais à leur forme et à leur filiation. Il nous parut indispensable de déterminer lesquels avaient influencés les autres, lesquels étaient les plus anciens, quelle pouvait y être la part légendaire, en nous fondant sur des critères plus formels et plus sûrs que leur vraisemblance, postulée a priori. En résumé, s’attaquer au statut de ces textes avant de commencer imprudemment à en interpréter le contenu. N’est-ce pas la règle d’or de toute bonne critique historique.
Le rétablissement d'une tradition solide des différents récits
Ce long travail d’essence philologique qui occupe près d’un tiers de notre thèse nous permit enfin de rétablir une tradition des textes vraiment fiable et renversa la filiation unanimement admise depuis les années 50. De la Vita Sancti Rochi du Vénitien Francesco Diedo et des Acta Breviora, les plus anciens ne sont pas les seconds, mais bien les premiers et ce même si les second paraissent plus vraisemblables ! Mieux, nous avons démontré que ces Acta Breviora ne sont que l’expression d’un genre très en vogue à la fin du moyen âge et auquel appartient la Legenda aurea : un abrégé publié pour la première fois dans un ouvrage complémentaire à ce célèbre recueil, quatre années après le récit de Diedo, à Cologne en 1483, l’Historie plurimorum sanctorum 15.
Comme expliqué plus haut la démonstration de caractère essentiellement philologique occupe plus de 200 pages de notre thèse, édition de textes comprise. Elle est aussi de caractère codicologique car nous y avons démontré que les textes publiés par les Bollandistes dans les Acta Sanctorum n’étaient pas les plus anciens. Déformé par sa formation classique, Jean Pinius avait publié ces deux textes de référence au départ de manuscrits qui avaient déjà subi des altérations significatives. Or, aussi bizarre que cela puisse paraître à première vue, les supports les plus anciens de ces textes étaient des imprimés : La Vita de Sancto Rocco de Francesco Diedo publiée à Milan en italien en 1479, la même année quela Vita Sancti Rochi, sa sœur latine, et les dénommés Acta Breviora publiés en Latin à Cologne en 1483. Tous les manuscrits connus dont ceux publiés sont postérieurs et sont des copies d’imprimés ! Entre les deux se situait la Vie en allemand publiée pour la première fois à Vienne en 1482 16 et ensuite à Nuremberg en 1484 et dans laquelle tous les partisans de la nouvelle chronologie italienne avaient aussi voulu voir une version inspirée du même récit italien primitif. Le travail de comparaison nous amenait au contraire à conclure que cette version allemande appartenait elle aussi à la tradition de la version italienne de Vita de Sancto Rocco de Diedo.
L'écroulement de la « nouvelle chronologie » et l'apparition d'une œuvre de fiction
Avec la valeur ainsi attribuée à tort aux Acta Breviora, c’est donc aussi toute « la nouvelle chronologie » et ses implications historiques qui s’écroulaient, en même temps que nous rétablissions Francesco Diedo comme le premier hagiographe de saint Roch. Nous devons ici à la déontologie scientifique d’ajouter que parmi tous nos prédécesseurs, il en est un qui avait approché cette méthode et pressenti cette conclusion et il était montpelliérain : il s’agit de Joseph Despetis 17. Nous sommes allés plus loin en replaçant le récit de Diedo dans sa vraie dimension : celui d’un roman hagiographique reposant sur une trame légendaire ancienne extrêmement mince, là où lui voyait un récit quasi historique. Une conclusion qui nous rappelle combien il est important de s’attacher au préalable au genre d’un récit 18 avant toute velléité d’exploitation historique, mais qui nous renvoie à nouveau aux recommandations remarquablement argumentées d’Hippolyte Delehaye : les chercheurs imprudents avaient d’autant mieux postulé le caractère authentique de l’abrégé – les Acta Breviora – qu’il est effectivement dépouillé des extravagances, surtout chronologiques, du roman initial – La Vita Sancti Rochi, ou Vita de Sancto Rocco. L’abrégé avait « meilleure mine » que l’original !
Il est assez remarquable que cette démonstration, reposant jusque-là sur des critères littéraires et codicologiques, se soit vue récemment confirmée par des éléments matériels indiscutables : la découverte de deux nouveaux textes, et en particulier du récit versifié en italien d’un certain Domenico Da Vicenza publiée entre 1478 et 1480 extrêmement proche du récit de Diedo. S’il est encore impossible aujourd’hui de déterminer avec une certitude absolue si cette Istoria di San Rocco a inspiré le récit de Diedo (ce qui est plus probable : il s’agirait alors de ces « versi vulgari scripti rude et grossamente » 19 dont il parle dans son introduction), ou en est au contraire inspirée, il est indubitable par contre que c’est cette Istoria qui a directement engendré la Vie allemande et les Acta Breviora. Cette filiation nous ramène donc bien à la tradition d’un roman très proche de celui de Diedo. Loin de nous livrer des faits historiquement exploitables, ces textes révèlent au contraire que les éléments sur lesquels se sont fondés des générations d’historiens, croyant y voir les lointaines traces d’une version plus authentique, ne sont en fait que l’héritage d’éléments chronologiques, topographiques ou onomastiques romanesques que les adaptateurs et abréviateurs successifs ont progressivement gommés ou assagis. Nous pouvons en citer quelques exemples.
Ainsi en va-t-il de l’Angleria des Acta Breviora, lieu que tous les partisans de la nouvelle chronologie italienne ont voulu voir comme Angora, sur le Lac Majeur, endroit historique d’arrestation et de mort du saint. Qu’en est-il au regard de la tradition des textes ainsi restituée ? Cet Angleriam provinciam Longobardorum at Almanie versus, des Acta Breviora provient en fait, dans l’Istoria di San Rocco de Da Vicenza de l’Anglia – l’Angleterre ! – vers laquelle le saint se dirige 20 alors qu’il est arrêté dans un lieu verso Lamagna 21 près de l’Allemagne.
Ainsi en va-t-il du cardinal. Dans les versions des textes les plus anciens, la Vita de Sancto Rocco de Diedo et l’Istoria di San Rocco de Da Vicenza, le cardinal n’est pas qualifié de quidam titulo Angleriae, mais respectivement d’« Inglese » et à nouveau d’Anglia 22. Et ce n’est pas tout ! Que dire encore de ce texte latin manuscrit de 1487 retrouvé à Vérone par Francesca Lomastro et dont elle nous a appris l’existence au sein des journées d’étude de Padoue déjà citées. Non seulement le saint retourne également vers l’Anglea 23… mais il en vient ! Et en plus son rédacteur nous livre un lieu et une famille d’origine bien curieux : « De généré unus ex duodecim paladinis, scilicet Austolphi, fuit in Anglea in vico qui vocatur Moncuchaler quidam Johannes equestris ordinis vir » 24. En toute première analyse, par bien des aspects, et notamment la présence de cet Anglea, mais aussi d’une guerre entre allemands et anglais 25 qui sert de cadre au dénouement final, ce texte se rattache aussi au récit de Domenico Da Vicenza. Nous avons là un nouvel exemple de la grande imprudence des tentatives d’interprétations historiques de ce genre de précisions toponymiques dans les Vies de saint, qui nous renvoie à ces fameux passages des Acta Breviora (« cardinalis quidam titulo Anglerie, quae provincia Longobardorum est » 26 ou « ad Angleriam provinciam Longobardorum at Almanie versus appbicat » 27).
En conclusion, nous pouvons dire que les nouveaux textes découverts dans le sillage du Colloque de Padoue de 2004 confirment la traditions des textes rétablie par notre thèse et la complètent il faut se résoudre à admettre d’une part que la Vita de Sancto Rocco de Francesco Diedo et l’Istoria di San Rocco de Domenico Da Vicenza, pour invraisemblables qu’ils soient n’en sont pas moins les textes le plus anciens et que d’autre pat ceux que l’on croyait plus authentiques – Acta Breviora, Vie allemande – n’en sont que des adaptations successives ayant gommé progressivement leurs invraisemblances et anachronismes !
Et pour répondre à la première question posée sur les réactions à notre thèse, sur cette partie du dossier voici, ce qu’en disait en tout cas André Vauchez dans l’introduction des actes du colloque de Padoue : « Pierre Bolle a montré de façon indiscutable que, dans son cas [ndla saint Roch], les Vies manuscrites que les Bollandistes avaient cru devoir privilégier pour leur édition, comme il est de règle, sont plus tardives et moins fiables que les textes qu’en ont transmis les éditions incunables, et que ceux-ci procèdent tous, à des degrés divers, de la Vita Sancti Rochi écrite par Francesco Diedo, gouverneur de Brescia, et de sa traduction italienne, publiées toutes deux à Milan en 1479. Cette constatation ruine toutes les tentatives faites par divers historiens (P. Guerini, A. Maurino et bien d’autres à leur suite) pour mettre en valeur l’originalité des Acta Breviora – une Vie abrégée de saint Roch dépourvue de toute référence chronologique et faisant mourir son héros à Angleria (Angora), et non dans un oppidum en Languedoc – par rapport à la Vie de Diedo et pour en faire la traduction latine d’une biographie en italien aujourd’hui disparue, qui aurait été composée dans les années 1420/30. Elle rend également vains leurs efforts pour trouver une cohérence chronologique et historique au récit de Diedo, qui fait mourir Roch en 1327, en proposant de reporter la vie du saint aux années 1325-1380. En fait, il faut se résigner à admettre que la Vita Sancti Rochi est un roman hagiographique et nullement une « biographie historique » 28. In fine, nous dit André Vauchez « une fois admis que saint Roch est un personnage de fiction et que tous les textes hagiographiques le concernant procèdent de l’œuvre de Diedo, il reste à expliquer le contenu de cette dernière et l’impact extraordinaire qu’elle a eue dans les années qui suivirent immédiatement sa publication » 29. Nous nuancerions quelque peu il reste aussi et surtout à expliquer, si le récit ne s’est pas construit sur des faits, sur quel fond légendaire antérieur il a bien pu se créer. Car ces résultats ne permettent pas d’affirmer qu’un saint Roch « historique » n’ait pas existé. Ils permettent simplement de dire que s’il a existé, il n’a strictement rien à voir avec le personnage de fiction du roman initial de Diedo ou de Da Vicenza et de ses adaptations. Ceci n’exclut nullement un héritage légendaire voire historique antérieur complètement différent, pouvant se résumer à peu de choses au moment des premières mises en forme du récit : un nom, quelques attributs, un culte local…
Et c’est là le deuxième apport de nos travaux. Il n’était pas tout de mettre en relief les limites de la méthode en vigueur jusque-là et d’établir enfin une tradition solide des textes. Etait-il encore possible d’approcher par quelque moyen ce qui s’était produit en amont du processus d’invention romanesque ? Aucun auteur n’avait jamais tenté d’investiguer dans cette direction faute de disposer de la moindre source le permettant, mais davantage encore de se faire une conception adéquate du récit hagiographique. La « nouvelle chronologie » ne trahit en effet que trop la représentation totalement erronée d’une hagiographe proche des faits (voire chez Maurino compagnon du saint !) et rédigeant un récit, point de départ d’un culte. Se fondant exclusivement sur les vitae publiées, et tout impatients de trouver la confirmation de l’existence du saint par rapprochement avec d’autres sources historiques, les chercheurs avaient complètement négligé d’autres sources spécifiquement hagiographiques autres que les vitœ, comme la liturgie, les messes, les prières, les mentions dans le calendriers ou encore l’iconographie, dont on ne peut se passer dans l’établissement du dossier d’un saint 30 et qui sont parfois plus anciennes que les vitae. Nous y avons ajouté une dimension originale très rarement utilisée dans les études hagiographiques : les archives.
Peste et Tempeste
C’est l’iconographie qui commença par éveiller notre curiosité, grâce à une insolite gravure provençale du début du XVIème siècle (Fig. 3) associant saint Roch de Montpellier et saint Roch d’Autun dit aussi Raco ou encore Racho, évêque d’Autun (5 décembre et translation le 28 janvier) 31.
Au pied de saint Roch de Montpellier on peut lire : « Sant Roc glorioux martir vulhaiz nos gardar de peste e de tot péril », et au pied de saint Roch d’Autun, « Sant Roc evesque et confesor velhaiz nos gardar de tempeste ».
Nous avons longtemps manipulé une reproduction de cette xylographie sans rien y discerner d’autre qu’une bizarrerie ayant pour seul dessein de juxtaposer plaisamment deux saints pratiquement homonymes et entraînant d’ailleurs l’inversion entre les qualités de confesseur et de martyr des deux saints. Or, l’information capitale que nous livre cette gravure ne réside pas là. Elle se trouve dans la consonance des mots « peste » et « tempeste ». Mais jamais cette singulière association n’aurait éveillé notre curiosité si les incunables, sur lesquels nous avions déjà travaillé à l’époque, ne nous en avaient fourni maints autres exemples remarquables. Nous y avions en effet déjà retrouvé l’association de ces deux mots, non pas dans des Vies du saint, mais dans les prières en moyen français ou les messes latines qui y sont parfois annexées. En outre, ces deux domaines d’intercession, peste et tempête, ne relevaient pas dans ces sources de deux saints différents, mais bien du seul saint Roch de Montpellier ! C’est le cas par exemple au dernier folio de l’édition parisienne de 1494 de Pierre le Caron du texte de Jehan Phelipot 32, dans un quatrain exemplaire, également présent dans un bréviaire de la Bibliothèque de Genève de la deuxième moitié du XVème répertorié par Pierre Rézeau 33 :
Qui sert saint Roch il le garde
De pestilence et de tempeste
Prenons le donc pour sauvegarde
Tousiours craignant en tout temps peste
Mais nous retrouvions encore de multiples exemples de rapprochement entre l’épidémie et la météorologie dans les messes en latin qui accompagnent l’édition la Vita Sancti Rochi de Nuremberg en 1485 (GW 8331, f. 10v-11v), celle de Mayence en 1495 (GW 8332, f. 10v-11v) et de Paris en 1495 (GW 8333, f. 10r-11r).
La supplique pour un aeris temperies se retrouve dans le graduel :… ut apud deumiz preces nostre non sint vane et nobis aeris temperiem concede et in fine tecum in celis congratulemur… O beate confessor Roche quam magna apud deum sunt merita tua quibus credimus nos a morbo epidemie posse liberari, et aeris temperiem concedi ; plus loin, dans l’offertoire : Te beatum Rochum Christi confessorem exortatum facimus et preces ad te patrem nostrum dirigimus ut tua intercessione a languoribus epidemie saivemur et aeris temperie potiamur, et enfin dans la communion :… veni et salva nos a morbo epidemie et aeris temperiem nobis concede.
Le sens exact de cet aeris temperies, dans une acception proprement météorologique est celui de « temps calme » par opposition à la mutatio aeris ou aeris intemperies qui signifie perturbation ou tempête 34. Quant aux languores epidemiae il s’agit bien entendu des souffrances de l’épidémie 35.
Cette association nous renvoyait clairement aux conceptions médiévales en matière d’épidémies, héritières d’Hippocrate et de Gallien et notamment, chez ce dernier, de la théorie miasmatique. On en retrouve encore la trace au XIVème siècle chez le spécialiste de la peste, Guy de Chauliac 36 : une conjonction défavorable des planètes entraîne une « corruption de l’air » qui, elle-même produit les miasmes de la pestilence. Une expression précise s’en trouve dans un autre texte contemporain de la Peste Noire, celui de la Consultation parisienne sur la peste de 1348 37, qui identifie clairement comme cause de la peste « ces vapeurs eslevees et enflammees et encore enflammé et pour ce ont esté multeplié foudres, tonnoirres, tempestes, feus et plusieurs pestilences » 38 en mettant d’ailleurs sur le même plan les phénomènes atmosphériques et épidémiques en tête de chapitre : « causes des pestilences et des tempestes » 39. Les vents y sont évoqués à plusieurs reprises 40, de même que la perturbation des saisons ou « mutations du temps » qui sont assimilés à une cause première de la pestilence.
Roch et Racho, un possible doublet hagiographique
Ceci nous amena à nous intéresser à Racho ou Roch d’Autun, un saint évêque de l’époque mérovingienne très obscur et précisément invoqué pour se protéger des tempêtes. Précisons d’emblée que le nom de Ragnobertus, très fréquemment présenté comme nom latin du saint dans les dictionnaires, n’apparaît jamais dans les documents anciens de la région d’Autun, où il est toujours dénommé Raco, Racho et même Rocho, et que cette assimilation avec un évêque du VIIème siècle dont on trouve la signature sur un privilège accordé par Emmon de Sens en 660 au monastère de Sainte-Colombe, n’est en réalité pas la bonne, comme nous l’a appris Robert Godding au sein même du Colloque de Padoue 41. Il s’agirait plutôt d’un certain « Rocco » dont le nom apparaît parmi les signataires du Concile de Paris en 614 et mentionné par Duchesne dans ses fastes épiscopaux comme honoré le 28 janvier et le 5 décembre 42.
Nous sommes donc en présence, d’un saint quasi homonyme de saint Roch de Montpellier et nous savons qu’avec les confusions de dates, les homonymies sont un des facteurs les plus courants de création de doublets hagiographiques, dont Louis Réau reprenait une série d’exemples significatifs dans sa synthèse consacrée à l’iconographie des saints 43.
Mais en outre, le fait que Roch d’Autun soit aussi un protecteur des captifs ne doit pas être négligé. Nous décelons en effet, dans la deuxième leçon de la légende extrêmement très tardive du XVème siècle, que Robert Godding qualifie à juste titre de tissu d’absurdités, une autre similitude avec saint Roch de Montpellier : il aurait lui aussi été emprisonné,par « un roi », non pas dans une geôle, mais sur le rocherd’une île déserte appelée Affrica dans l’espoir qu’il y meure de faim. Son gardien l’ayant vu au contraire resplendir d’une grande clarté en avertit son maître qui lui ordonna alors de le précipiter dans la mer. Mais un miracle le retira des flots meurtriers, qui fut suivi d’une apparition de la Vierge. C’est alors que Raco demanda au Seigneur que ceux qui observeraient sa fête soient protégés de la tempête. Mais si nous prenons la peine de lire attentivement le reste du texte, nous y constatons qu’à cet endroit encore il évoque la détention 44 : nec potestate inimici detinerentur.
Quel que soit le personnage historique qui se cache derrière Raco et pour fantaisiste et tardive que soit sa légende, l’intérêt de cette figure de sainteté réside pour notre dossier, dans le fait qu’elle a été honorée non seulement dans la région d’Autun mais aussi en Languedoc. Sur la base de l’examen des missels, bréviaires et sacramentaires des bibliothèques publiques de France répertoriés par Victor Leroquais, nous avons montré que le culte de saint Roch d’Autun connaît en France, au XVème, siècle, deux zones de diffusion principales : la région d’Autun où il est célébré le 5 décembre et le Languedoc, où il est célébré le 16 août. Après avoir rassemblé ces différents témoignages, il est en effet devenu complètement insoutenable de voir encore l’inscription d’un saint Roch « évêque » au 16 août dans un calendrier manuscrit de Maguelone du XVème siècle bien connu, comme le produit d’une étourderie de copiste, comme l’ont fait tous les historiens montpelliérains. En effet, grâce aux répertoires de Leroquais, nous avons pu identifier non moins de cinq manuscrits languedociens d’origines différentes qui présentaient cette même caractéristique 45. L’inscription de l’évêque d’Autun au 16 août en Languedoc n’est donc pas le fruit de confusions, mais indubitablement bien le témoignage d’un véritable usage liturgique régional du même saint évêque d’Autun, originellement fêté dans cette région le 5 décembre.
Mais pouvons-nous aller jusqu’à prétendre que ce soit le culte de ce même saint évêque bourguignon, devenu protecteur de la tempeste qui ait gagné l’Italie du Nord et pris dans le roman hagiographique de Diedo la forme d’un saint pèlerin protecteur de la peste ? Un témoignage italien nous en donne un indice suffisant, cette fois encore dans un imprimé plus tardif. Nous avons retrouvé dans la vita de Lelio Gavardo imprimée à Venise en 1576 46, une bien cocasse tradition locale liée à la vente des reliques par des gens de Voghera aux Vénitiens. Les vendeurs, redoutant d’être découverts, y auraient incité les acheteurs à s’enfuir dans une charrette couverte de fumier. Mais c’est sur l’épilogue de cette histoire rocambolesque que nous souhaitons attirer l’attention. Le récit nous dit : « epercio la Maesta d’Iddio li castiga ogn’anno con tempesta, et sono detti da confinanti, Li venditori di S. Rocco ». Une tradition populaire régionale racontait donc encore au XVIème siècle en Italie qu’en punition de la cupidité de quelques-uns de leurs concitoyens qui avaient vendu les reliques du saint, les gens de Voghera étaient chaque année frappés d’une tempête ! Le rapport direct entre le châtiment et la fonction protectrice du saint évêque d’Autun, inscrit dans ce lointain souvenir, marque ici clairement que la figure de sainteté parvenue en Italie était encore bien chargée du patronage de la tempeste malgré son évolution au gré des pestes des XIVème et XVème siècles.
Nous avons montré les liens conceptuels entre peste et tempête dans les mentalités médiévales, engendrés par l’héritage des théories de Gallien et d’Hippocrate. Mais il existe aussi une évidente relation linguistique entre les deux mots. Elle tient d’un phénomène de dérive fréquent du langage populaire : celui de l’aphérèse, qui voit disparaître la première syllabe d’un mot. Bien connu dans l’onomastique de toutes les langues4747, il viserait ici la fonction du saint plutôt que son nom. À cet égard, la fin du premier quatrain de la prière provençale… craignant en tout temps peste nous paraît suffisamment explicite.
En outre, que le saint, doté de cette fonction et devenu languedocien ait plus particulièrement séduit cette partie septentrionale de l’Italie peut aussi s’expliquer. Il en existait un puissant vecteur : la Via Francigena, sur laquelle se trouventVoghera 48 et Plaisance, était au moyen âge une artère communeà trois grands pèlerinages. À l’ouest Saint-Jacques-de-Compostelle, à l’est Jérusalem, via l’embarquement à Venise ou d’autres ports de l’Adriatique, et enfin au sud Rome. En d’autres termes, sur cette voie se croisaient Jacquets, Palmieri et autres Romieux, en particulier dans des villes étapes où la figure des saints pèlerins était extrêmement populaire, ce qui explique aussi que saint Roch en ait pris tous les attributs… En direction du Languedoc, via Susa et les cols du Mont-Genèvre ou du Mont-Cenis, la Durance, l’ancienne Via Domitia et la Via Tolosana, le flux des pèlerins était très intense. Il existe également un deuxième facteur géographique déterminant : comme en Languedoc, les tempêtes de la fin de l’été y sont particulièrement rigoureuses et redoutées.
Tel est donc le deuxième apport de notre thèse. En recourant à des sources jamais exploitées jusque-là, prières, offices, messes, calendriers et iconographie, nous parvenions à la conclusion que saint Roch de Montpellier, confesseur, intercesseur contre la peste, honoré le 16 août, constituait un doublet hagiographique de Raco d’Autun, évêque et martyr, célébré autrefois le 5 décembre dans la région d’Autun.
Ce dédoublement avait pu germer sur le terreau fertile de l’homonymie des deux saints, d’un processus d’aphérèse relatif à leur patronage – « tempeste » s’étant transformé en « peste » – et des conceptions médiévales en matière d’épidémies de peste. Les sources semblaient indiquer alors que ce dédoublement s’était produit en deux temps. En Languedoc tout d’abord, où un usage liturgique du saint d’Autun avait pris place le 16 août. Sur la Via Francigena ensuite, où le saint allait être invoqué contre la peste lors des épidémies du XVème siècle. C’est au départ de ce modèle qu’il ne connaissait, à l’en croire, que par quelques vers assez frustes, que Diedoré digera en 1479 sa Vita de Sancto Rocco. De là allait naître une nouvelle figure de sainteté qui allait se répandre dans toute l’Europe à la faveur du rayonnement vénitien, du développement de l’imprimerie et du retour régulier des épidémies.
Les réticences à la thèse du doublet hagiographique : saint Roch présent en Italie avant le Languedoc
Pour répondre à nouveau à la question du M. Richard, il convient d’ajouter qu’à cette proposition, l’adhésion des scientifiques est pour l’instant plus frileuse. Pourtant, comme nous venons de le montrer, le faisceau d’indices de dédoublement est loin d’être léger et univoque : homonymie, inscriptions indubitables du saint évêque à la date du 16 août en Languedoc antérieures aux récits relatifs à saint Roch de Montpellier, fonctions voisines (tempêtes/pestes, captifs), rémanences d’anciennes fonctions du saint évêque jusque dans une tradition locale italienne (Plaisance). À notre connaissance, la seule véritable critique de ce schéma reposant sur de réels arguments scientifiques, a été émise par notre ami, le Bollandiste Robert Godding au cours du même colloque de Padoue et porte sur la chronologie : « L’ingénieuse explication de Pierre Bolle ne me semble pas rendre compte de la complexité de la situation, en particulier sur le plan de la chronologie. Tandis que les témoignages liturgiques ne remontent pas au-delà du XVème siècle (le plus ancien est de1441), Bolle voudrait voir le culte de Raco d’Autun établi à Montpellier déjà au XIVème siècle (ndla, nous n’avons jamais parlé de Montpellier mais du Languedoc). La raison en est claire : les premières traces en Italie remontent à 1391 à Voghera, même si, comme nous l’avons appris d’AntonioRigon au sein de ce congrès, la date traditionnelle de 1394 n’est pas crédible pour Padoue ; si nous voulons faire de Roch un doublon de Raco d’Autun, passant par Montpellier avant d’arriver en Italie, le culte doit forcément être antérieur en Languedoc. Mais outre le fait que ces traces plus anciennes se trouvent en Italie, on semble oublier une trace encore plus ancienne, parfaitement connue de Bolle : il existe un psautier de Trévise du XIIIème siècle qui fixe la fête de saint Roch au 1er juillet 49 » 50. En vertu de ces observations, Robert Godding pense plutôt qu’il y avait au départ deux figures de sainteté différentes qui se sont contaminées. Cette chronologie indiquerait selon lui l’antériorité d’un culte de saint Roch en Italie, vénéré le 1er juillet à Trévise au XIIIème siècle et à Voghera au XIVème siècle et qui se serait imposé en Languedoc au XVème siècle le 16 août. On aurait alors confondu le saint avec le saint évêque d’Autun. Ensuite, du Languedoc 51 où il aurait été vénéré contre la tempête et où l’on aurait sans doute rédigé sa légende, la figure de sainteté aurait été réexportée en Italie où, à la faveur de l’épidémie de 1468-69, elle aurait intégré la protection des pestiférés.
Robert Godding comptant parmi les plus éminents hagiologues au monde, il convient de ne pas prendre ses objections à la légère. Il convient aussi de considérer ce que représenterait pour la thèse que nous défendons le fait de lever ce dernier obstacle, le seul en vérité à reposer sur une argumentation : sans doute une réponse de plus aux questions du professeur Richard sur les résistances encore possible à la thèse du doublet hagiographique.
Une réponse toute récente : un saint Roch honoré le 16 août en Languedoc dès le début du XIVème siècle
Or, suite à la dernière campagne de recherches que nous avons menée entre l’automne 2007 et l’été 2008 en Languedoc, il paraît bien que cette objection n’est plus soutenable.
Grâce à plusieurs monographies d’histoire locale, nousavons en effet pu identifier à Pamiers, en Ariège, une mention indubitable du culte dans un manuscrit consulaire de 1407 52 que nous nous sommes empressés de vérifier sur place. À la date du 25 avril 1407, on peut lire en effet dans un des manuscrits du Conseil de Ville ou « Trentat », toujours conservé aux Archives Municipales de Pamiers, un procès-verbal qui restera désormais une source de tout premier plan sur l’histoire de la genèse de ce culte.
Il y est en effet question, ni plus ni moins, que du point de départ du culte à Pamiers, et ceci est assez rare sur le plan archivistique : la décision du Conseil, face à une épidémie qui n’est d’ailleurs ni expressément décrite ni nommée, de célébrer la fête de saint Roch le lendemain de la fête de « Notre-Dame d’août », dans les églises du Mercadal et du Camp et d’y établir deux confréries 53.
Certes, nous dirons à juste titre les lecteurs les plus exigeants, mais 1407, ce n’est pas encore 1391. Mais un peu plus loin, il est décidé de charger un marchand, Pierre Barrau, d’aller s’enquérir des conditions dans lesquelles est célébrée la fête de ce saint à Limoux et d’en rapporter une biographie édifiante. Ceci signifie qu’en 1407, le culte du saint était déjà bien enraciné dans l’Aude toute proche. Par chance, nous avons conservé les manuscrits consulaires de Limoux qui ont été analysés en détail par le Chanoine Sabarthès 54 et sont aujourd’hui conservé aux Archives Départementales de l’Aude, à Carcassonne, sous les cotes AA1 et AA2. Dans le deuxième volume de ces manuscrits que Sabarthès datait du début du XIVème siècle 55 on trouve effectivement, du fol. 10 r° au fol. 15 v° un calendrier qui au mois d’août, au XVII des calendes de septembre comporte la mention « Roqui, confessons et episcopi ». Toutefois, cette mention est ajoutée d’une main postérieure à la rédaction initiale, d’ailleurs datée erronément d’avant 1327 par Sabarthès sur la base de la présence de saint Roch, par référence à la date de sa mort dans la chronologie du récit de Diedo. Même si elle est incontestablement d’une graphie ancienne, l’ajout ne permet donc pas de déterminer avec sûreté un terminus a quo.
Mais il n’en fallait pas plus pour que nous nous mettions en chasse d’autres sources de ce type dans la région et nous avons trouvé. Une seule jusqu’à présent, mais de taille. Toujours aux Archives Départementales de l’Aude, il existe un autre manuscrit du XIVème siècle qui a aussi été analysé par Sabarthès 56, le Leudaire de Montréal. Comme le décrit Sabarthès, la matière qu’il contient se subdivise en trois parties. La première, composée de onze feuillets (fol. 1 à 12) et qui nous intéresse plus particulièrement ici, contient aussi un calendrier julien pour le diocèse de Carcassonne et quatre leçons d’évangiles ainsi que le canon de la messe jusqu’à la Communion. La deuxième partie comprend les droits consulaires de Montréal : la leude 57, le droit d’encan (marché aux enchères), la taxe du pain, les ordonnances des Consuls sur la police rurale et enfin les ordonnances relatives au poids publics. La troisième partie contient les procès-verbaux des élections consulaires de Montréal de 1382 à 1622.
Après avoir fait remarquer qu’à cette époque les registres publics s’ouvraient toujours par des extraits d’évangile ou autres marques de piété (c’est aussi le cas du manuscrit de Limoux) et que c’est sur ces feuillets que les Consuls entrant prêtaient serment, Sabarthès, un peu en contradiction avec cette remarque liminaire, veut croire que cette partie du manuscrit n’a pas été destinée primitivement à figurer dans le registre consulaire mais provient sans doute d’un manuscrit liturgique. C’est que, comme le manuscrit de Limoux, il le date erronément d’après 1327… et cela l’embête fort car, il a du mal à comprendre pourquoi le canon qui suit immédiatement appartient à la fin du XIIIème siècle et que toute la partie qui traite des droits consulaires – soit la partie la plus importante du manuscrit – ne saurait être postérieure à 1321,date où il est explicitement dit que les consuls y firent transcrire les ordonnances. Toujours aussi erronément, il pense que le « scribe » a eu tort de qualifier le saint d’évêque 58 et finit par conclure que cette partie religieuse du manuscrit est donc postérieure au reste et proviendrait d’un manuscrit liturgique. Nous savons aujourd’hui que la date de 1327 est une pure invention d’hagiographe et n’a donc aucune valeur de référence sur le plan de la chronologie du culte. Il s’avère donc que le manuscrit est incontestablement bien plus homogène que ne le croyait Sabarthès car il n’y plus aucune bonne raison de penser que la rédaction de ces feuillets est postérieure à 1327 et s’écarte donc de celle de l’ensemble du manuscrit, ce que confirme l’écriture. Nous sommes donc incontestablement en présence d’un calendrier du premier quart du XIVème siècle. Or, cette fois, l’inscription est de la même main que la rédaction de l’ensemble du calendrier, et donc de la même époque !
Une confirmation : la création d'un doublet hagiographique en Languedoc
Ce qui est intéressant dans ces nouvelles découvertes, c’est qu’elles viennent non seulement confirmer, contrairement à ce que pensait Robert Godding, que le culte de Roch, saint évêque d’Autun était déjà bien enraciné et célébré le 16 août en Languedoc au début du XIVème siècle, mais qu’elles permettent aussi d’expliquer la présence dans la région d’autres témoignages plus délicats que l’on avait du mal à interpréter jusque-là, en particulier sur le plan de la chronologie. Tel est par exemple l’établissement par l’évêque Jean IV de la Vergne de deux confréries en l’honneur du saint en l’église des Carmes de Lodève en 1410 59 et en l’église Saint-Paul à Clermont-l’Hérault en 1413 60. Il n’y a plus à douter aujourd’hui que ces deux confréries avaient bien été fondées en l’honneur, non pas du saint Roch de Montpellier, héros de la légende de Francesco Diedo de 66 ans postérieure, mais bien de saint Roch évêque d’Autun, comme l’avait déjà bien soupçonné l’archiviste et érudit montpelliérain Pierre Louvet, dans une lettre qu’il adressait au Bollandiste Henschenius en 1664 61. Sans doute également ces découvertes nous permettent-elles de donner davantage de crédit à l’assertion de Guillaume de Catel dans ses mémoires de l’histoire du Languedoc, en 1633, où il fait état de la translation, en 1392, d’un « saint suaire » de Monastère de Cadoin dans une chapelle saint Roch nouvellement construite dans un faubourg de Toulouse 62.
Résumons-nous. La découverte de nouveaux documents d’archives à Pamiers. Limoux, Montréal, vient confirmer ce que nous laissaient bien entrevoir les manuscrits liturgiques étudiés dans notre thèse : le culte de saint Roch, évêque d’Autun célébré le 16 août est bien attesté en Languedoc, non seulement au XVème siècle mais dès le début du XIVème siècle. Il paraît même déjà suffisamment établi et enraciné pour faire partie d’un calendrier consulaire officiel, celui de Montréal. II n’est donc plus possible de suivre l’objection de Robert Godding selon laquelle « la chronologie atteste la priorité du culte de saint Roch en Italie » 63.
Et le psautier de Trévise ? Notons tout d’abord que si Leroquais le date effectivement du XIIIème siècle, le seul élément interne de chronologie incontournable est le terminus ante quem de 1356 donné par un ajout d’une autre main et d’ailleurs cité par Leroquais 64. Mais même s’il est du XIIIème, ce que semble bien attester une forme d’écriture plus ancienne, avec toutes les réserves qu’il faut toujours mettre face aux critères paléographiques, pourquoi faudrait-il ipso facto y voir un saint différent ? Pourquoi l’hypothèse qu’il s’agisse encore du saint d’Autun à une autre date de célébration ne mériterait-t-elle donc pas d’être considérée ? N’aurait-elle pas droit à quelques égards lorsqu’on sait combien, en matière de liturgie, les usages locaux sont fréquents et variés. Et à supposer encore que le saint de Trévise soit un saint différent et antérieur typiquement italien, cela modifierait-il fondamentalement notre conclusion ? Il nous semble que non car une autre certitude est acquise : la figure de sainteté originale de saint Roch honorée le 5 décembre à Autun s’est bien dédoublée en Languedoc avant le début du XIVème siècle pour être honorée le 16 août, et ce en dehors de toute influence italienne. La date du 16 août est donc bien incontestablement d’essence languedocienne et non italienne. Or c’est celle-là et nulle autre qui s’est imposée en Italie dans les récits les plus anciens 65. Diedo s’est donc bien inspiré d’une tradition qui vient du Languedoc et si on imaginait encore avec Robert Godding qu’un saint homonyme en aurait contaminé un autre, ce serait donc bien plutôt le saint français qui aurait supplanté le saint italien.
Et enfin, l’importation d’une figure française n’est-ce pas le processus brossé par Diedo, l’hagiographe lui-même, dans son introduction où nous avons déjà noté qu’il est souvent bien plus près de l’histoire que dans son récit romanesque : le saint était connu en France et en Allemagne avant l’Italie 66. Et à la fin de son récit, il nous dit encore qu’entre la mort du saint, qu’il place donc en 1327, et les premiers témoignages de dévotion en Italie, il s’est écoulé environ 80 ans 67. Il invente même un point de départ le Concile de Constance, en 1414. Or on peut être sûr que s’il avait eu connaissance d’un culte en Italie avant cette époque, Dieclo eût été le premier à exploiter l’information. Face à un tel constat, ce dernier trait de l’hagiographe a tous les atours d’une explication destinée à ses lecteurs du Nord de l’Italie comment se faisait-il qu’avant la fin du XIVème début XVème, ils n’avaient jamais entendu parler de ce saint ?
Le culte du saint était donc bien présent dès le début du XIVème siècle en France. Il s’ensuit que son émergence originelle ne donc peut être liée aux épidémies de peste stricto sensu et en particulier à la peste noire de 1348-1349. Par contre, il est clair que son expansion à partir de la fin du XIVème est liée aux épidémies de manière générale, ce qu’atteste le témoignage de Pamiers, où c’est à l’occasion d’une épidémie que le saint est introduit par les autorités civiles en 1407. Par des réminiscences folkloriques qui ont survécu jusqu’à nos jours dans la région d’Autun et en Languedoc, nous savons aussi que le saint a continué à être invoqué contre la tempête, mais de manière générale pour la protection des récoltes et du bétail. Chronologiquement, ces découvertes confirment une fois de plus combien vaines étaient les tentatives de placer dans le dernier quart du XIVème siècle la mort du saint, mais elles invalident tout autant et une fois de plus la chronologie de Diedo, dans la mesure où le manuscrit de Montréal montre que la célébration d’un saint Roch le 16 août été déjà bien enracinée en Languedoc dès le premier quart du XIVème siècle… tandis que Dicdo allait faire mourir son héros en 1327.
Mais ces découvertes invitent encore à d’autres réflexions. Ainsi, et contrairement à notre sentiment initial que rejoignait encore Robert Godding en 2006 68, la chronologie du développement du culte montre encore que le processus de passage de la protection de la « tempeste » à la « peste » a dû se passer en Languedoc et non en Italie, ce qui est en outre plus conforme aux possibilités lexicales offertes par ces deux langues 69. Alors que les mentions du saint dans les manuscrits liturgiques ne remontent pas au-delà du milieu du XVème siècle, il est par contre attesté dans des archives civiles dès le début du XIVème siècle. Ceci dénote que le saint posait sans doute déjà alors un problème de reconnaissance officielle sur le plan liturgique et confirme au contraire le rôle déterminant qu’ont joué les autorités laïques – comme en Italie dans la deuxième moitié du XVème siècle – dans la première vague d’expansion de ce culte en Languedoc.
En outre, sur le plan heuristique et méthodologique cette remarque prend un sens particulier : si on ne doit plus attendre de grandes découvertes en matière de manuscrits liturgiques – en tout cas en France où la toute grande majorité des manuscrits est bien répertoriée depuis les travaux de Leroquais – les archives civiles offrent par contre un champ d’investigation très prometteur à qui aura la patience et le courage de s’y atteler. Nous nous permettons donc de rendre les chercheurs régionaux attentifs à ce qu’ils pourraient encore retirer d’un inventaire et d’un examen exhaustif de sources telles que manuscrits consulaires ou registres de procès verbaux de l’administration urbaine des XIVème et XVème siècles en Languedoc, en tenant à l’esprit que l’absence de traces ultérieures ne signifie pas nécessairement absence du culte à ces époques, voire antérieurement. C’est ce que semblent indiquer en tout cas les découvertes de Pamiers, Limoux et Montréal : alors qu’au XVème siècle le culte connaît en Italie l’expansion que l’on sait, il semble bien en Languedoc tomber dans une relative désuétude. La confirmation et la compréhension de tels phénomènes pourraient valoir aux chercheurs qui voudront s’y consacrer de belles découvertes.
Et Montpellier ?
À qui voudrait encore croire à la thèse de saint Roch « enfant de Montpellier », les pages qui précèdent ne manquerons pas de renforcer le trouble voire le dépit. Le fait qu’aucune mention indubitable de culte ne soit établie avant 1505 à Montpellier 70 se rappelle d’autant plus cruellement à notre bon souvenir que nous savons maintenant qu’un saint Roch était bien honoré le 16 août dans de multiples lieux del’Ariège, de l’Aude et même de l’Hérault dès le XIVème siècle. Même le manuscrit de Maguelone, dont la mention concernetout aussi indubitablement l’évêque d’Autun fait pâle figure et paraît très tardif.
On ne peut, hélas !, mettre en évidence la moindre trace de culte ancienne à Montpellier qui se raccroche à la figure de Roch de Montpellier, comme à celle de Roch d’Autun. Nous ajouterons par ailleurs un élément important sur ce point : aucun texte, à commencer par les plus anciens ne font jamais revenir saint Roch mourir à Montpellier ! Par ailleurs, nous avons eu l’occasion de démonter dans notre thèse et dans un article récent que toute la tradition relative aux reliques autrefois conservées en Arles qui proviendraient d’un prétendu transfert de Montpellier opéré par Jean Le Meingre de Boucicault en 1372 est totalement fausse. Cette tradition remonte au Martyrologium Fransiscanum d’Arthur du Monstier 71, mais le recours au matériau archivistique originel heureusement toujours conservé aux Archives Départementales des Bouches-du-Rhône, permet de constater que la provenance déclarée de ces reliques est non pas Montpellier mais bien Jérusalem et que la date de 1272 initialement écrite dans l’acte a été grossièrement modifiée postérieurement sur l’original en 1372 72 ! Au passage, il n’est pas inutile de rappeler ici que cet ordre des Trinitaires était spécialisé dans le rachat des captifs, mission qui nous ramène à nouveau au patronage de Raco d’Autun. À n’en pas douter, c’est donc en réalité bien de ce dernier dont il est question dans cet acte 73.
Mais si le saint Roch du récit de Diedo n’a pas pu mourir à Montpellier, n’aurait-il pas pu cependant au moinsy naître ? La proposition est déjà bien difficile à admettre si l’on se range à notre idée que le saint Roch de Diedo n’est qu’un personnage romanesque venu se greffer sur la figure antérieure légendaire et sans doute historique d’un saint évêque d’Autun. Mais en outre sur le plan même de la tradition narrative il faut bien avouer que la découverte par Francesca Lomastro du texte de Bartholomeo del Buove de 1487 qui renvoie à une tradition – qui paraît bien ancienne et apparentée à Diedo et Da Vicenza – faisant de saint Roch un Anglais né à « Moncuchaler » 74 jette encore le trouble sur des éléments topographiques qui étaient déjà assez obscurs chez Diedo 75. On en vient alors à considérer que ces formulations maladroites trahissent sans aucun doute davantage la difficulté de nos hagiographes à mettre à tout prix un nom sur la terre qui a vu naître le saint qu’un héritage historique.
Sur le plan de l’archéologie c’est une historienne montpelliéraine, Louise Guiraud qui a démontré en 1895 que Maison et Puits Saint-Roch n’ont jamais appartenu à une famille Roch ou Roque 76. Et même si ce dernier gentilice a bien existé à Montpellier aux XIIIème et XIVème siècles, nous avons démontré dans notre thèse de 2001 sur la base des archives municipales de ces époques que cette famille ne pouvait en aucun cas être assimilée à celle du saint du récit,de même que celle des Rubei, comme le croyait Despetis 77… sur la base de la chronologie de Diedo. En outre, il convient dans ce débat de ne pas perdre de vue une constante fondamentale de l’hagiographie : Roch, comme tous les noms de saints est un prénom et non un nom defamille !
Aussi, nous répondrons à la dernière question de Jean-Claude Richard par un rappel des avertissements méthodologiques cités plus haut : si on tente de retrouver dans des archives, quelles qu’elles soient, des éléments qui peuvent se raccrocher peu ou prou à un récit hagiographique, le problème n’est pas tant qu’on cherchera « une aiguille dans une botte de foin », il est en réalité qu’on en trouvera autant qu’on veut. C’est ce qu’on fait les Despetis, Germain, Coffinières, Maurino, Guerrini, Pitangue… en proposant tous des solutions aussi, ou aussi peu valables les unes que les autres. Tout cela pour une raison centrale : ils opèrent des rapprochements opportunistes entre faits historiques et légende hagiographique, en méconnaissant totalement la spécificité de ce genre qui est sans prétentions historiques.
Si le dossier de saint Roch n’a jamais autant progressé que ces dix dernières années, c’est sans aucun doute parce que nous avons été amenés à abandonner ce procédé pour nous intéresser à l’élaboration de la tradition narrative elle-même et à la découverte et à l’analyse d’autres sources qui nous ont conduits à une figure de sainteté originelle plus ancienne. Dès lors que nous sommes parvenus à montrer que la tradition littéraire d’un récit est une fiction, les efforts démesurés pour tenter d’en retrouver à tout prix la confirmation dans l’histoire ne deviennent-il pas vains ? À notre avis, il n’ya pas à douter que tous ceux qui persisteront dans cette voie traditionnaliste continueront à trouver de multiples solutions aussi vraisemblables les unes que les autres dont aucune ne sera plus convaincante qu’une autre. Tous ceux qui poursuivront selon la méthodologie éprouvée que nous avons esquissée dans ces pages, dégageront au contraire demain des résultats insoupçonnés aujourd’hui qui tantôt confirmeront tantôt infirmeront l’état actuel de nos conclusions. Mais, avec toujours moins d’ambigïtés, ils aboutiront progressivement à dégager une explication toujours plus solide, s’accordant avec la totalitédes sources disponibles. Il importe donc aujourd’hui de continuer à rechercher ces sources et à affiner leur analyse.
Abréviations
AASS = Acta Sanctorum Antwerpiae, 1737. Nouvelle édition Paris et Rome, 1867. Pour saint Roch, voir Augusti t. III, p. 380-415BHL = Bibliotheca Hagiographica Latina, Bruxelles, 1898-1899.COPINGER = W. A. COPINGER, Supplement to Hain’s Repertorium bibliographicum or collection towards a new edition of that work, London, 1902.
GW = Gesamtkatalog der Wiegendrucke. Herausgegeben von der kommission für den gesamtkatalog der wiegendrucke. Band VII. Leipzig 1938.
HAIN = L. HAIN, Repertorium bibliographicum, in quo libri omnes ab arte typographica inventa usque ad annum MD. typis expressi ordine alphabetico vel simpliciter enumerantur vel adcuratius recensentur, Stuttgartiae, Lutetiae Parisiorum 1826-1838.
SCHREIBER = W. L. SCHREIBER, Handbuch der Holz- und Metallschnitte des XV. Jahrhunderts, Stuttgart, vol. III, 1927.
Notes
1. BOLLE, Saint Roch. Genèse et première expansion d’un culte au XVème siècle, 3 tomes, Thèse présentée en vue de l’obtention du titre de docteur en Philosophie et Lettres, Université Libre de Bruxelles, Année académique 2000-2001 ; P. BOLLE, Saint Roch de Montpellier, doublet hagiographique de saint Raco d’Autun. Un apport décisif de l’examen approfondi des incunables et imprimés anciens. Scribere sanctorum gesta. Recueil d’études d’hagiographie médiévale offert à Guy Philippart, éd. E Renard – M. Trigalet – X. Hermand – P. Bertrand (= Hagiologia, 3), Brepols, Turnhout 2005 ; P. BOLLE, Saint Roch, une question de méthodologie, dans San Rocco Genesi e prima espansione di un culto. Incontro di studio – Padova 12-13 febbraio 2004 a cura di Antonio Rigon e André Vauchez, Subsidia hagiographica 87, Société des Bollandistes, Bruxelles, 2006, p. 9-56 ; P. BOLLE, La versione « arlesiana » delle reliquie di san Rocco. Una maldestra giustificazione. Vita Sancti Rochi, Rivista del Comitato Internazionale Storico-Scientifico per gli Studi su San Rocco e la Storia Medievale, Voghera, 2008, p. 45-60 ; P. BOLLE, San Rocco. Dai racconti agiografici alle origini leggendarie e liturgiche. Ibidem, Voghera, 2006, p. 58-106.
2. FLICHE, Le problème de saint Roch. Analecta Bollandiana, t. LXVIII, 1950, pp. 343-361.
3. Nous lui avons consacré un article entier, P. BOLLE, Saint Roch, une question de méthodologie…Cit.
4. On peut classer dans cette catégorie les travaux de A. GERMAIN, Histoire de Montpellier, depuis ses origines jusqu’à son incorporation définitive à la monarchie française, Montpellier, 1850, t. 3, p. 273-290 ; P. COFFINIERES, Saint Roch. Etude historique du Montpellierau XIVe siècle, précédée d’une introduction et suivie de pièces justificatives inédites concernant saint Roch, Montpellier, 1855 ; J.-C.-F. CHAVANNE, Saint Roch, histoire complète en trois parties…, Lyon 1875 ; J.-E. SAUMADE, L’admirable pèlerin de Montpellier saint Roch. Avec une lettre approbative de Monseigneur de Cabrières, Evêque de Montpellier, Montpellier, 1876 ; J. DESPETIS, Conférence sur Saint-Roch, patron de Montpellier. Revue Historique du diocèse de Montpellier, n° 1, 15 mai 1913. La conférence sera rééditée en tiré-à-part en 1914 augmentée d’une préface historiquere situant le problème au travers des thèses de différents auteurs,dont la plupart ont été cités plus haut ; P. GUERRINI, S. Rocco.Appunti critici attorno a una devozione popolare. La Scuola Cattolica, sept. 1921, réédité dans un recueil très précieux de l’auteur : Miscellanea Bresciana (= Memorie storiche della diocesi di Brescia, 21 = Monografie di storia Bresciana, 42), I, Brescia, 1953, p. 117-132 ; A. MAURINO, San Rocco di Montpellier, Confronti Storici, Torino, 1936 ; A. MAURINO, Chi fu verosimilenteil primo biografo di S. Rocco : il patrizio piacentino Gottardo Pallastrelli. Bolletino Storico Piacentino, Anno 34, Fascicules 1-2, Piacenza 1939 ; A. FLICHE, Cit. ; P. GUERRINI, S. Rocco e i Borromeo di Angera. Miscellanea Bresciana (= Memorie storiche della diocesi di Brescia, 21 = Monografie di storia Bresciana, 42), I, Brescia, 1953, p. 139-142 ; F. PITANGUE, Nouvelle contribution à l’étude de l’authenticité de saint Roch, Montpellier, 1972-1975.
5. DELEHAYE, Les légendes hagiographiques, 1e éd., Bruxelles, 1905 ; H. DELEHAYE, Cinq leçons sur la méthode hagiographique, Bruxelles, 1934 ;
6. AIGRAIN, L’hagiographie. Ses sources. Ses méthodes. Son histoire, Bruxelles, 1953.
7. DUBOIS, J.-L. LEMAITRE, Sources et méthodes de l’hagiographie médiévale, Paris, 1993.
8. DELEHAYE, Les légendes hagiographiques, 1e éd., Bruxelles, 1905, 4e éd., Bruxelles, 1955 p. 203 : « La première erreur, la plus répandue, consiste à ne point séparer le saint de sa légende. On admet un récit, parce qu’il se rapporte à un saint bien authentique ; on met en doute l’existence d’un saint parce que les histoires qui le concernent sont peu croyables, voire ridicules ».
9. DELEHAYE, Cinq leçons sur la méthode hagiographique, Bruxelles, 1934, p. 12.
10. Il n’y a jamais eu de Jean, « seigneur de Montpellier », au début du XIVème siècle, où Montpellier est toujours une possession des rois de Majorque. C’est Jacques III d’Aragon qui vendra la ville à Philippe de Valois en 1349. D’autres s’interrogeront aussi sérieusement sur cette question, comme A. GERMAIN, Histoire de Montpellier, depuis ses origines jusqu’à son incorporation définitive à la monarchie française, Montpellier, 1850, 3 tomes, p. 274.
11. On en trouve pour la première fois une analyse dans des travaux non publiés comme I. VASLEF, The role of St. Roch as a plaguesaint : a late medieval hagiographic tradition. A dissertation submitted to the Faculty of the School of Arts and Sciences of the Catholic University of America in Partial Fulfillment of theRequirements for the Degree Doctor Philosphy, Washington, 1984 ; V. THEUNISSEN, Sinte Rochus. Functie, uiterlijk en verering vaneen laat-middeleeuwse heilige in Nederland (+/- 1480 – +/- 1550), Doctoraalscriptie Mediëvistiek Universiteir Utrecht, 1996 ; mais surtout, pour la scène finale de reconnaissance par son oncle, voir : P. BOULHOL, Anagnorismos, La scène de reconnaissance dansl’hagiographie antique et médiévale, Université de Provence, Aix-en-Provence, 1996, 260 p.
12. FLICHE, Op. Cit, p. 355-356 : « on ne voit pas pourquoi on aurait suscité un concurrent au célèbre saint Sébastien, si le souvenir des guérisons de S. Roch n’était resté vivace dans plusieurs villes d’Italie centrale, où l’on montrait les lieux témoins de ses miracles ou de ses propres souffrances » et plus loin, « les hagiographes italiens, s’ils avaient forgé sa légende de toutes pièces, ne lui auraient certainement pas attribué une origine montpelliéraine, qui faisait rejaillir sa gloire sur un autre pays que le leur. En d’autres termes, le fait que S. Roch est Languedocien de naissance et que ses guérisons se sont toutes produites en Italie est une garantie de son existence ».
13. CAMBELL, Roch, St., in New Catholic Encyclopedia, San-Francisco – Toronto – London – Sidney, 1967, c. 540-541, « Ahistorical figure, Roch is the unfortunate victim of incompetent biographers ».
14. DELEHAYE, Les légendes hagiographiques Cit., p. 210-211 : « Il sera facile de faire subir une épreuve du même genre à beaucoup d’autres récits abrégés dont le modèle existe. Mais la confusion du vrai et du vraisemblable s’est traduite, fréquemment, dans des procédés de haute critique, au moyen desquels on a prétendu reconnaître, sous le fatras légendaire, la relation historique qui se dérobait aux regards. Supposons que toutes les invraisemblances d’un récit soient des interpolations ; il suffira de réduire cet élément étranger pour ramener le document à son état primitif. Le procédé peut paraître naïf. Il a été pratiqué par des hommes qui ne l’étaient nullement. Je citerai simplement, comme cas intéressant, celui d’un savant comme Lami, composant, à l’aide d’un certain nombre de traits convenablement choisis dans la légende fabuleuse de saint Minias, une histoire raisonnable, mais aussi peu véridique que l’autre ».
15. COPINGER, II, n° 6434. Hystorie plurimorum sanctorum, F°452d-455a et dont l’exemplaire que nous avons traité est conservé à la Herzog-August-Bibliothek, Wolfenbüttel, n° 505.1 Theol. 2°.
16. Dy histori von Sand Roccus, Vienne 1482, Hain 1398, Copinger 5136.
17. DESPETIS, À propos de la falsification germanique de la légende latine de saint Roch, Montpellier, [1920] ; Idem, La falsification germanique de la légende latine de saint Roch de Montpellier, dans Bulletin de l’Archiconfrérie Saint-Roch, Montpellier, s.d.
18. Voir H. DELEHAYE, Les légendes hagiographiques Cit., p. 1-11 ; R. AIGRAIN, L’hagiographie. Ses sources. Ses méthodes. Son histoire, 2e Bruxelles, 2000, p. 206-246 ; G. PHILIPPART, Les légendiers latins et autres manuscrits hagiographiques, in Typologie des sources du moyen âge occidental, Turnhout, 1977, p. 21-26.
19. Franciscus DIEDUS, La Vita de sancto Rocco, [Milan 1479], GW 8334, fol. 1r.
20. Domenico DA VICENZA, Istoria di San Rocco, [Milan, 1478-80], GW 8637, f. 5vb: « E in verso de Anglia adriçato sue… Per ritrovarsi nel suo bel paixe ».
21. Ibidem.
22. Ibidem, f. 2vb : « E d’Anglia monsignor se chiamoe ».
23. Batholomeo DEL BUOVE, Vita sancti Rochi, publiée dans la contribution de Francesca LOMASTRO, Di una Vita manoscritta e della prima diffusione del culto di san Rocco a Vicenza. Incontro di studio – Padova 12-13 febbraio 2004 a cura di Antonio Rigon e André Vauchez, Subsidia hagiographica 87, Société des Bollandistes, Bruxelles, 2006, p. 114, f. 77r « consuetis versus partes Anglie iter suum cum Dei benedictione cepit » et plus loin « nisi quam servus Christi esset et preregrinus qui ad partes Anglicas accedere cupiebat ».
24. Ibid., f. 73r.
25. Ibid., f. 77r: « Apropinquans autem ad partes suas in quibus bella maxima gerebatur inter Anglicos et Iermanos ».
26. Historie plurimorum sanctorum, Cologne 1483, BHL 7275, f. 453c
27. Ibidem, f. 454c
28. André VAUCHEZ, Introduction, Incontro di studio – Padova 12-13 febbraio 2004 a cura d Antonio Rigon e André Vauchez, Subsidia hagiographica 87, Société des Bollandistes, Bruxelles, 2006, p. 3.
29. Ibidem, p. 4.
30. DELEHAYE, Cinq leçons Cit., p. 42-74 ; 117-146 ; R. AIGRAIN, L’Hagiographie Cit., p. 11-106 ; J. DUBOIS – J.-L. LEMAITRE, Sources et méthodes de l’hagiographie médiévale, Paris, 1993, p. 59-153 ; p. 211-233.
31. L. SCHREIBER, Manuel de l’amateur de la gravure sur bois et sur métal au XVe siècle, vol. III, Leipzig, 1927, n° 1669m ; P. HEITZ, Pestblätter des 15. Jahrhundert. Einblattdrucke des XV. Jahrhundert, t. II, Strassburg, 1901, table 42 ; A. BLUM, Les origines de lagravure en France. Les estampes sur bois et sur métal. Les incunables xylographiques, Paris-Bruxelles, 1927, table 47, voir également P.-L. DUCHARTRE et R. SAUNIER, L »imagerie populaire, Paris, 1925, qui n’y font qu’une brève allusion.
32. Jehan PHELIPOT, La vie, legende miracles et oraison de monseigneur saint Roch, glorieux amy de Dieu pour les merites et intercession du quel Dieu a ottroye a ung chascun devotement le reclamant remede contre toute pestilence, Paris, Pierre le Carron, [1494], BHL 7273, fol. 18r.
33. REZEAU, Les prières aux saints en français à la fin du moyen âge. Prières à un saint particulier et aux anges, Genève, 1983, t. 2, p. 438 ; Genève, Bibliothèque publique et Universitaire, lat. 31, f. 2r-2v. Voir aussi l’introduction du tome 1 qui est très précieuse sur la méthode employée par Rézeau, Les prières cit., Introduction. Les prières à plusieurs saints, Genève, 1982, pp. 1-27
34. PRINZ, J. SCHEINDER, Mittelateinisches Wörtebuch bis zum ausgehenden 13. Jahrhundert, Band I, München, 1967, c. 319-321.
35. Voir F. BLATT, Novum Glossarium Mediae Latinitatis ab anno DCCC usque ad annum MCC, Hafniae, 1957, « L », c. 30.
36. La théorie miasmatique, dans l’œuvre de Gallien, décrivait la transmission de la peste par un flux passant de l’œil d’une personne infectée à celui d’une personne saine. C’est encore cette conception qui prévalait sous la plume du célèbre professeur montpelliérain Guy de Chauliac, médecin personnel du pape avignonnais Clément VI : Guy de CHAULIAC, Quidam tractatus de epidemia compositus quodam practito de Montepessulano anno 1349, complété en 1363 et édité par E. NICAISE, La grande chirurgie, Paris, 1890.
37. Texte latin publié et étudié par E. REBOUIS, Etude historique et critique sur la peste, Paris, 1888. Deux traductions françaises contemporaines de la Consultation existent dans les manuscrits de la Bibliothèque Nationale de France sous les numéros ms. français 12323 et 2001.
38. Bibliothèque nationale de France, ms. français 12323, fol. 136v.
39. Ibid., fol. 135v.
40. Ibid., fol. 136v : « fors vens lesquels viennent le plus de miediet cil vent ont engendré chaleur et moisteurs superflues » ; plus loin encore, fol 137, il évoque à nouveau le rôle du « soufflement des vens de miedi grans et merveilleus ».
41. Robert GODDING, San Rocco di Montpellier, un doppione agiografico ? Incontro di studio – Padova 12-13 febbraio 2004 Cit. p. 71-82. Voir aussi à ce sujet A. CHARMASSE, Le prieuré de St.-Racho-lez-Autun, de l’ordre de Cluny. Mémoires de la Société Eduéenne, 10 (1882). Il existe une vita très rudimentaire dans un ms. du XVème: Paris, B.N.F., 916, fol. 111r-114r (Vita beatissimi Rochi (sic) episcopi [Aeduensis] et martyris), publiée dans le Catalogus codicum hagiographicorum latinorum antiquiorum saeculo XVI qui asservatur in Bibliotheca Nationali Parisiensi, I, Bruxelles – Paris, 1889, p. 50-52. Mais nous avons trouvé la plus ancienne invocation inédite qui ne remonte pas au-delà du XIIème s. dans le Missel manuscrit d’Autun : Autun, Bibl. mun., 43 (40), fol. 48v à 58v, répertoriée sous le n° 115 par V. LEROQUAIS, Les sacramentaires et les missels manuscrits des bibliothèques publiques de France, I, Paris, 1924, p. 248, au fol. 61 : S. Raconis. Cette oraison très courte ne l’invoque pas encore contre la tempête, mais bien contre toute adversité (ab omini adversitate liberemur) et signale déjà la vénération de reliques : quatinus cuius sacratissimas reliquas hic pio amore venerabiliter amplectimur. Nous en avons trouvé six leçons liturgiques inédites dans trois mss éduéens : Bréviaire d’Autun (Hiver), 1440-1442 = Autun, Bibl. mun., 185 S, texte au fol. 13v a ; Bréviaire d’Autun (Hiver), fin XVe s. = Autun ; Bibl. mun., 171 S (Libri 148*), texte au fol. 309 ß, ; Bréviaire d’Autun (Hiver), XVe s. = Autun, Bibl. mun., S 170 (Libri 148), texte au fol. 353, respectivement répertoriés sous les numéro 53, 171 S et 51 dans V. LEROQUAIS, Les bréviaires manuscrits des bibliothèques publiques de France, I, Paris 1934. Grâce au flair et à la perspicacité de Guy Philippart, nous savons aujourd’hui qu’il s’agit d’un emprunt pur et simple à une homélie d’Eusebius Gallicanus du VIIème s. sans rapport avec Raco ! Cf. EUSEBIUS GALLICANUS, Collectio homiliarum (= Corpus Christianorum. Series Latina, 101A), éd. F. GLORIE, Turnhout, 1971, p. 593-596 (homélie 51).
42. DUCHESNE , Fastes episcopaux…, t. II, p. 179. Cf. Concilliae Galliae A. 511 – A. 695, ed. C. DE CLERCQ (=Corpus Christianorum, Series Latina, 148 A), Turholti, 1963, p.280 : Ex civitate Agustidunum Rocco episcopus.
43. REAU, Iconographie de l’art chrétien, t. I. Introduction générale, Paris, 1955, p. 318., on retiendra, parmi de nombreux exemples, saint Alban, protomartyr d’Angleterre (22/6) qui a donné naissance à deux autres saints céphalophores : saint Alban de Mayence (21/6) et saint Aubain de Namur (3/1), saint Vincent d’Agen (9/6), qui n’a jamais existé est un doublet de saint Vincent de Saragosse (22/1).
44. Catalogus codicum hagiographicorum latinorum Cit., p. 51 : « Tunc beatus Roho (sic) tale donum requisivit a Domino, ut omnescolentes et venerantes suam festivitatem seu ejus memoriam agentes, nunquam tempestatem paterentur nec potestate inimici detinerentur ».
45. Il existe notamment un Missale Magalonense du XVe, toujours conservé à bibliothèque de la Société Archéologique de Montpellier, dont le premier folio est daté de 1481 et qui, au calendrier, fol. 4v porte au XVII des calendes de septembre la mention S. Rochusepiscopus et martyr. Pierre Louvet, historien montpelliérain, avait déjà rapporté au bollandiste Henschenius l’existence d’un « bréviaire » maguelonnais (s’agit-il d’un autre manuscrit ou d’une confusionavec le missel ?) et d’un bréviaire de Lodève qui comportaient la même anomalie (Lettre de 1664 conservée à Bruxelles, Bibliothèque des Bollandistes,…
… Collectaneae bollandiane, 128, fol. 207-209).Cependant, une étude approfondie montre que cette confusion n’est pas limitée à la région de Montpellier mais déborde très largement sur le Languedoc. Ainsi, le saint Roch du psautier 239 d’Albi repris par V. LEROQUAIS, Les psautiers manuscrits latins des bibliothèques publiques de France, Mâcon, 1940-1941, sous le nom de Roch de Montpellier est saint Roch d’Autun : psautier hymnaire à l’usage de Saint-Salvi d’Albi, 2ème moitié XVème s. = Paris, B.N.F., lat. 769, fol. 2-7, calendrier d’Albi (16 août) : Roconis ep. et conf. semidupl. Il en va de même pour le saint Roch du ms. 181 de V. LEROQUAIS, Les livres d’heures manuscrits de la Bibliothèque nationale, Paris, 1927, repris dans sa table sous la rubrique Rochd’Autun : Heures à l’usage de Rome, fin XVème s. = Paris, B.N.F., lat. 10561 (16 août) : Rochonis (sic) ep. et conf. Il semble bien lui aussi provenir du Languedoc. Le calendrier est franciscain et mentionne un certain nombre de saints du Languedoc ; la fête la plus récente est celle de la translation de saint Bernardin de Sienne (1472). Même chose encore pour un missel de Béziers de 1441 répertorié sous le n° 658 par V. LEROQUAIS, Les sacramentaires et les missels manuscrits des bibliothèques publiques de France, Paris, 1924 : Paris, B.N.F., nouv. acq. lat. 1690, fol. 236v. D’une autre main (XVème s.) : Oratio beatissimi Roqui Omnipotens et misericors deusqui est merito vite eterne beatum roqum (sic) pontificem atque confessorem per amabilem dedisti rectorem gratiam...
46. Lelio GAVARDO, La vita di S. Rocco discritta gia LX anni inlingua latina dal signor Giovanni Pino di Tolosa, senatore del christianissimo re di Francia, et ambasciatore alla serenissima republica venetiana, et hora tradotta in lingua volgare da Lelio Gavardo.Venetia, 1576, « Dichiaratione » qui accompagne son plande la région de Plaisance.
47. Citons les cas classiques de Bastien pour Sébastien, Colas pourNicolas, Rita pour Margherita…
48. La plus ancienne mention du saint se trouve dans un calendrierdes fêtes à observer dans les statuts civils de Voghera de 1391 Archivio Civico. Voghera. MSS 30 (fin XIVème début XVème) Fol. 52v et MSS 31 (fin XVe) fol. 19.
49. Nous avions effectivement repéré ce psautier de Trévise dès notre mémoire de licence rédigé en 1980 : Paris, B.N.F.n ms. lat. 10488 (cf. V. LEROQUAIS, Les psautiers manuscrits latins des bibliothèques publiques de France, II, Mâcon, 1940-1941, p. 99).
50. Robert GODDING, San Rocco di Montpellier, un doppione agiografico ? Incontro di studio – Padova Cit., p. 81, traduction de l’italien.
51. « peut-être à Montpellier » avance même un peu témérairement R. GODDING, Ibidem., p.82.
52. Jean BARBIER (Abbé de), L’église et la paroisse de Notre-Dame du Camp à Pamiers, notes historiques, Pamiers, 1889, qui confond avec 1406 ; M.-J. de LAHONDES, Annales de Pamiers, t. 1, des origines à la réforme, Toulouse, 1882, p. 194 ; F. Baby, Y. BENEZECH-LOUBET, A. DENJEAN, M. DETRAZ, Henri LAFONT, Guy LECLERCQ, A. NOUZIES, D. PEDOUSSAT, M. SEBASTIEN, Histoire de Pamiers, Pamiers, 1981.
53. Archives Municipales de Pamiers, Registres du Conseil de Ville, 1407, fol. 12 : « A totz platz que se fassa festa de sant Roc lendeminde nostra dona daost y ay a la gleysa del Mercadal e lautre a la gleysa del Camp en quascuna gleysa ai una imageina de sant Roc e que yaia balles confrayria ».
54. SABARTHES, Les Manuscrits consulaires de Limoux (Aude) Etude historique et philologique, Paris, 1930.
55. Ibidem, p. 161-162 : « Puisque dans la partie primitive, c’est-à-dire avant les vingt additions, les jours à office sanctoral y sont en nombre à peu près égal aux jours à office férial ; – que les fêtes de la sainte Vierge y figurent à peu près toutes ; – que nous y trouvons inscrit saint Louis, mort en 1270 et canonisé en 1297, il est évident que le calendrier ne saurait être antérieur à cette date. Il peut donc, pour cette partie, être attribué à la fin du treizième siècle et tout au moins aux premières années du quatorzième. Quant aux inscriptions postérieures, il est bien difficile de leur attribuer une date certaine. On y relève en effet des noms de saints de divers siècles dont le culte était pourtant depuis longtemps connu et imposé par la liturgie ; il y a donc lieu de s’étonner de l’inscription tardive de ces saints dans le calendrier de Limoux. Mais on y relève deux saints qui nous permettent de fixer une date approximative : saint Thomas d’Aquin, canonisé en 1323, et saint Roch, mort vers 1327. Ces additions n’ont pu être faites antérieurement à ces dates ; de plus, étant donné les formes de l’écriture, ont peut vraisemblablement les attribuer à la deuxième moitié du quatorzième siècle, tout au plus aux premières années du quinzième ».
56. SABARTHES (Abbé de), Les coutumes libertés et franchises de Montréal (Aude), texte inédit de 1318, Carcassonne, 1897.
57. On désignait sous le nom de leude dans le Midi le péage prélevé sur les marchandises, les animaux et même sur les personnes à l’entrée des villes, ou en d’autres endroits déterminés. On appelait leudaire le bureau où l’on percevait cet impôt ou encore l’ensemble du tarif pour le prélèvement de ce droit. Cf, SABARTHES, cit., p. 7.
58. Ibidem, p. 78.
59. Voir M.-G. PARIS DE MAZAMET, Histoire de la Ville de Lodève, de son diocèse et de son arrondissement actuels, depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos jours, p. 337 mais la source première de cette information est Ioanne PLANTAVIT DE LAPAUSE (Episcopo Lodovensi), Chronologia praesulum Lodovensium, Aramantii, 1634, p. 330-331. L’auteur dit avoir trouvé son information dans un cartulaire des Carmes aujourd’hui introuvable (« Constatetiam ex Chartulario Carmelitarum ipsum [Joannes IV de la Vergne] S. Rochi sodalitium in ipsorum Ecclesia instituisse eodem anno »).
60. L’abbé A. D., Histoire de la Ville de Clermont-l’Hérault, et de ses environs, avec vue et plans lithographiés, Montpellier, 1837, p. 173 qui cite sa source « …les statuts de la confrérie, qui existent encore,écrits en patois du temps sur parchemin, et qui furent plus tard traduits en français et approuvés par M. de Fumel (Archives de la Confrérie de Saint-Roch) et dont nous n’avons pas plus que pour le registre des Carmes de Lodève, retrouvé la trace mais dont une confirmationdu XVIIIème siècle est consultable aux Archives Départementales de l’Hérault : Statuts octroyés par Jean de Lavergne, Evêque de Lodève, à la confrérie Saint-Roch établie dans l’église Saint-Paul de la ville de Clermont, 1413. Confirmation par Jean Felix Henry, évêque de Lodève, le 20 janvier 1752.
61. « Un vieux bréviaire de Maguelone que iay tenu à la main sur velin en vieux caractères gothiques met dans le calendrier le lendemain de l’assomption de nostre dame s. roq martyr. (Barré) [L’ancien breviaire de Lodève fait mémoire à pareil iour de s. roq. Evesqued’Authun et confesseur qui guérit la fille de l’empereur, possédée des démons mais parce que cest Evesque ne convient pas avec celuy duquel je traitte en ceste présente histoire je laisseroy a par ce que contiennent les neufs leçons de ladite legende pour dire qu’un homme qui se mesle d’escrire est bien en peine de donner son sentiment surtant de différentes opinions] » Bibliothèque des Bollandistes,Collectaneae bollandianae, Ms. 128, Fol. 207 ou p. 7.
62. Guillaume DE CATEL, Mémoires de l’histoire du Languedoc, curieusement et fidèlement recueillis de divers auteurs Grecs, Latins, François et Espagnols et de plusieurs Titres et Chartes tirés des Archives des Villes et Communautez de la même Province et autres circonvoisines, A Tolose, Par Pierre Bosc, Marchand Libraire, 1633, Livre II, p. 220 : « L’est noté dans les annales de la maison de Ville de Tolose, comme l’an mille trois cent nonante et deux, en laquelle mesme année le saint suaire fut apporté de l’Abbaye de Cadoing a Tolose, Pierre estant Archevesque de la dite ville, on bastit une nouvelles Eglise hors la porte d’Armand Bernard ; et comme il est dit dans lesdites Annales « In cercio Sancti Quintini ».Cette église, ou chapelle fust bastie à l’honneur de Dieu, et invocationde sainct Roch » ; Livre V, p. 928 : « Auquel iour, Messire Pierre Archevesque de Tolose accompagné de neuf Prelats monstra solennellement ledit saint suaire en l’Eglise de saint Roch nouvellement bastie,
… en presence de plus de trente mille hommes ». Le seul problème est que les annales en question ne citent pas nommément la dédicace de saint Roch « et dictum sanctum sudarium portatum per villam perdominum Petrum, archiepiscopum tholosanum, et novem aliosprelatos et dicta die mostratum in capelle noviter hedificata in cersio Sancti Quintini extra portam Arnaldi-Bernardi ubi erant XXXamilia persone », Archives de la Mairie de Toulouse, Annales, BB273, folio 45, 1392-1393. La Chapelle fut ensuite donnée en 1502au Couvent des Minimes nouvellement fondé et tout proche. VoirMarc MIGUET, Les Minimes, un quartier de Toulouse, Pagesd’histoire de jadis et naguère, Toulouse, 2003, p. 43 : « Les chanoines de Saint-Sernin possèdent depuis l’aube du deuxième millénaire, un modeste oratoire au milieu des vignes entre les chemins de Fenouillet et de Launaguet, à proximité de l’emplacement de l’actuelle église des Minimes. À la fin du XIVème siècle, ils le remplacent par une chapelle plus grande dédiée à saint Roch. Elle existe toujours, accolée à l’église. Elle est le plus ancien monument du quartier. Cette chapelle n’est que prêtée. Pour que les Minimes deviennent propriétaires, il faut une autorisation du roi. Les Archives départementales possèdent le procès-verbal de la prise de possession officielle qui a eu lieu le 19 mai 1503 ». Voir Archives Départementales de la Haute Garonne, Fonds des Minimes, Série 129 H (l’acte n’était pas consultable lors de notre passage). Voir aussi DE CRAZANNES, Notice historique sur le Couvent des Minimes de Toulouse. Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, 1874-1879, Tome XI, p. 272-285.
63. GODDING, Op. cit., p 81.
64. 6, note en partie effacée et d’une autre main que le reste « Anno Domini MCCCLVI, obiit domina alta de planis die XXVI mensis septembris… »
65. En outre rien n’autorise à dire que le saint Roch honoré en 1391 à Voghera l’était au 1er Le registre des statuts civils et criminels de Voghera de 1391(Voghera, Archivio civico, MSS 30, fol. 52 v°) à l’article « De festis et qualiter debent observari vel celebrare», n’y associe aucune date et l’ordre de ces différentes fêtes est peu intelligible.
66. Francesco DIEDO, Vita Sancti Rochi, AASS, Augusti t. III, p. (BHL 7274) « Qua de re quamvis sanctissimus hic Vir apud Germanos et Gallos satis claruerit, et mira sanctitatis documenta praestiterit » ; Idem, La Vita de Sancto Rocco, [Milan 1479] (GW8334) : [Fol. 2] « Per la qual cosa avenga che el glorioso sancto apresso Germani e galli sia stato illustre [Fol. 2 v°] et claro, et habi demontrato mirabel documenti di sanctita ».
67. La Vita de Sancto Rocco, Cit. [Fol. 19] « i meriti et le opere diquesto sanctissimo homo sono state obscure ali itali za piu de anni LXXXta » ; Vita Sancti Rochi Cit., « Cujus sanctissimi Viri merita atque opera supra septimum atque octuagesimum annum Italos latuere ».
68. GODDING, Op. cit., p. 82, « Pare anche verosimile, come sostiene Bolle, che sia stato il culto nella Linguadoca ad essere all’origine della grande fioritura del culto di san Rocco protettore contro la peste, iniziata a Brescia e a Voghera, al momento del l’epidemia del 1468-69. Risalirebbe a quel momento l’assimilazione della tempesta alla peste ».
69. En Italien tempesta/peste et en Français tempeste/peste.
70. Le Petit Thalamus de Montpellier, publié pour la première fois d’après les manuscrits originaux par la Société Archéologique de Montpellier, Montpellier, 1840, p. 648, « et apres s’en descendit au couvent des Freres Prescheurs à l’onneur de monsieur Saint Roc ou quel est en l’eglise d’icellui fondée la chapelle… ». La mention souvent citée dans un céremonial est un ajout d’une autre main. Ici encore le courrier de Pierre Louvet à Henschenius nous sera d’une aide précieuse en même temps qu’il traduit une nouvelle fois la sagacité de son auteur : « je ne scaurois mesme assé m’estonner de la nonchalance des greffiers et chroniqueurs de la ville qui n’en ont rien laissé par escrit, ni dans le grand, ni dans le petit Talamus, et dans le ceremonial de la maison consulaire fait l’an 1351 par le greffier Boschonis on ya seulement entrelassé depuis peu et d’une autre lettre et encore à la marge par un renvoy entre le dernier Juillet qui est la fête de saint Germain, et le 25 aoust feste de saint Louys, est noté le 16 aoust la feste de st. roq. enfant de Mompelier », Collectaneae bollandianae, Ms. 128, Fol. 208 ou p. 9.
71. ARTURO DEL MONASTERO, Martyrologium franciscanumin quo sancti, beati, aliique servi Dei, in universo Ordine FF.Minorum toto orbe terrarum, Paris 1638, p. 371-373 « Sciendum Joannem Meingrum Boucicaldum, Franciae Marescalcum, virum illustrissimum ac strenuissimum, Religiosos Oridinis S. Trinitatis, Redemptionis captivorum (quos Mathurinos in Gallia vulgo vocamus) multum adamasse, eisque, maxime Arelatensibus, bona ac reddituscontulisse. Insuper, authoritate Apostolica sibi facta, inter alia Sanctorum pignora, Arelatem transtulit ex urbe Mon-Pessulana corpus S. Rochi anno MCCCLXXII Kalend. Aprilis atque pro sua pietate dono dedit ipsis Religiosis praefati conventus Arelatensis : ubi maxima cum veneratione asservatum est, tantaque populi frequentia colitur, ut haud mirum est, si quaeque nationes et regna etiamremotissima hujus sacratissimi corporis particulas certatim summe exoptarint ».
72. Pinius, dans AASS augusti t. III, p. 384 faisait état d’un bref du 4 février 1501 d’Alexandre VI enjoignant les Trinitaires d’Arles à faire don d’une partie de leurs reliques à leurs coreligionnaires du royaume de Grenade. Il est repris dans l’acte de remise des reliques conservé aux Archives Départementales des Bouches du Rhône, Série H (Archives ecclésiastiques). 51 H 32, n° 187, Acte de remise des reliques le 2 juin 1501, original sur parchemin. Il s’agit d’ailleurs d’une justification a posteriori tout aussi fabuleuse que celle de Venise. Il est par ailleurs hautement probable que les reliques dont il s’agit, en compagnie de celles d’autres saints, sont celles de Raco d’Autun. Voir également l’étude assez complète de P. DESLANDRES, L’ordre des Trinitaires pour le rachat des captifs, Toulouse-Paris, 1903, t. I, p. 9-19.
73. L’orthographe en est d’ailleurs Roco.
74. Francesca LOMASTRO, Cit., p. 108 : « De genere unus exduodecim paladinis, scilicet Austolphi, fuit in Anglea in vico qui vocatur Moncuchaler quidam Johannes equestris ordinis vir ».
75. DIEDO, La Vita de Sancto Rocco, Cit., « Hebe per Patria Monpoliere quale antiquamente era nominato Agatha overoAgathopolicita ».
76. GUIRAUD, Recherches topographiques sur Montpellier au moyen âge. Mémoires de la Société Archéologique de Montpellier, 1895, 2ème série, n° 2, p. 251 : « Il me paraît indispensable de formuler quelques conclusions après une digression aussi longue. Tout d’abord, la tradition qui place la maison de saint Roch à l’angle des rues de la Loge et des Trésoriers de France est absolument fausse : là existait celle, non moins ancienne au surplus, d’Obilion avec sa tour et son arceau » ; Voir aussi, pour l’origine de la légende du banc sur lequel se serait assis le saint à son retour : L. GUIRAUD, Le banc dit de saint Roch à Montpellier, Montpellier, 1910.
77. BOLLE, Saint Roch. Genèse et première expansion d’un culte au XVème siècle, Cit. p. 214-229.