Description
Notes sur la parfumerie et les marchands-parfumeurs
de Montpellier (XVIe-XVIIIe siècles)
A la lecture des auteurs anciens et contemporains, on apprend que Montpellier était réputée pour ses eaux de senteur, pommades et parfums divers.
De Charles d’Aigrefeuille à Jean Baumel sans oublier Louis Irissou et Louis Thomas, aucun n’a manqué d’évoquer cette industrie, de la rattacher à l’apothicairerie originale de Montpellier, et à la présence d’une garrigue odoriférante. En effet, elle naît au Moyen Age lors des importations d’épices et de drogues, et déjà, le roman provençal de Flamenca évoque les parfums répandus dans les rues de la ville à Noël.
Parmi les substances aux utilisations multiples – une cinquantaine végétales et quatre ou cinq animales – celles destinées à l’apothicairerie avaient parfois un usage en parfumerie. Montpellier trouve en Aigues-Mortes son havre d’approvisionnement par excellence. D’autres ports lui fournissent indirectement des produits orientaux. Plus tard, Sète ne reste pas à l’écart des circuits commerciaux internationaux. Grâce au port de Lattes, notre ville profitera longtemps d’un accès direct à la mer.
Sa prospérité et ses contacts avec les marchands étrangers permettent le développement progressif de l’activité de transformation de matières premières odorantes. C’est de la santé du trafic global dont elle dépend. Elle est déjà précaire, liée aux fluctuations du marché et aux prix de ces produits de luxe destinés à une infime partie de la population. Les hommes qui en assurent le commerce ne nous sont pas inconnus :
Les « pébriers sobeyrans » se distinguent des « pébriers de mercat », détaillants, par leur négoce en gros. Les « especiayres » ou espiciers-apothicaires emploient les drogues à des fins plutôt thérapeutiques. Cependant, ils auraient appris des Arabes, l’art de distiller les essences et les parfums, ce qui leur aurait valu le nom d’« aromatarii »…
Est-ce là les prémices d’une spécialisation ? En tout cas, cela confirme la lente séparation qui s’opère entre les apothicaires et les marchands épiciers-droguistes, puis les gantiers-parfumeurs-distillateurs. Ce n’est qu’au XVIe siècle que l’on distingue enfin, à côté des apothicaires, les gantiers et plus tard les parfumeurs.
L’activité elle-même est plus ancienne que le métier dont l’émergence à l’époque moderne donna tout son retentissement à la parfumerie au-delà du Royaume.
Une tradition fort ancienne
Le raffinement des cadeaux
La coutume des cadeaux offerts par la ville aux invités de qualité n’est ni une caractéristique de l’époque moderne, ni une particularité montpelliéraine.
Cependant, grâce aux livres de compte tenus pendant plusieurs siècles par la municipalité, on note que certains visiteurs recevaient à leur arrivée un présent de choix en signe d’accueil. Parmi ceux-ci, beaucoup de parfums et d’épiceries – au sens large du terme – étaient présentés avec raffinement dans des corbeilles ou des caisses doublées d’étoffes.
Dès 1406, Yolande d’Aragon et son mari Louis II, Roi de Sicile, reçoivent des « épiceries », soit des flambeaux et des confitures. Mais c’est en avril 1497, qu’apparaît pour la première fois dans la comptabilité, l’achat de parfums secs sous la forme de poudre de Chypre….
On parvient ainsi à établir la liste chronologique des cadeaux, de leurs récipiendaires, et des fournisseurs qui les ont livrés à la ville. Ces gestes diplomatiques sont pratiqués pendant quatre siècles, de 1497 à 1764.
Comme on le verra dans ce corpus, le conditionnement des cadeaux est presque toujours le même : flasquettes dorées, sachets bordés d’or, étoffes…
Mais la somme engagée dépend probablement de la personne fêtée. Ainsi, Madame la Connétable reçoit des présents de senteur pour 981 £. Le détail n’en est malheureusement pas connu. Pour la même période, la valeur des autres dons n’a aucune commune mesure avec celui-ci qui lui est remis à la fin du siège de la ville. A titre d’exemple, 890-900 £ étaient nécessaires à l’entretien d’une compagnie de 200 hommes durant une semaine. Il faut que Montpellier ait eu bien des choses à se faire pardonner pour avoir offert des senteurs d’un tel prix…
Les secrets de Montpellier
Parmi les compositions originales, l’eau de la Reine d’Hongrie est certainement la plus ancienne, et contemporaine des confections d’Alkermès, de Capillaires et autres distillations qui sont à l’origine des remèdes. Mais son arôme, satisfaisant le goût de l’époque, fit croire qu’il s’agissait d’une boisson. Cette méprise dans l’usage de cette eau odoriférante, est représentative de la grande confusion qui règne à l’époque l’eau de la Reine d’Hongrie – alcoolat aux plantes de la garrigue – est considérée comme une boisson, un remède pour les frictions, mais aussi un produit de parfumerie. Ainsi, dans l’« État des marchandises qui se trouvent chez Jacques la Faveur », elle est classée parmi les eaux de senteur. La spécialité a du mal à se distinguer de la pharmacie et de l’épicerie pure ; les apothicaires continuent à vendre des parfums, les parfumeurs des remèdes et des liqueurs, les liquoristes des eaux de senteur… […]
Informations complémentaires
Année de publication | 1990 |
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Nombre de pages | 10 |
Auteur(s) | Béatrice RIVET |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |