Catégorie : Étiquette :

Description

Morphogenèse du village médiéval, IXe-XIIe siècles

Morphogenèse du village médiéval, IXe-XIIe siècles, Cahiers du patrimoine, n° 46, 1996, 300 p. Ce très bel ouvrage, publié par l’Inventaire, est constitué par les Actes de la table ronde qui s’est tenue à Montpellier en février 1993, à l’Hôtel de la région Languedoc-Roussillon.

Le principal maître d’œuvre en fut G. Fabre, entourée alors de M. Bourin, de J. Caille et du regretté A. Debord. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui avaient alors poussé le Service régional de l’Inventaire général et le Conseil régional du Languedoc-Roussillon à monter cette opération, ni sur la polémique qui, à propos de la sortie de l’ouvrage de K. Pawlowski sur les « circulades », lui servit de toile de fond ; je me suis déjà exprimé à ce sujet dans le n° 20 d’Hérésis (p. 125-128). Je me contenterai donc de présenter l’ouvrage et de faire part des quelques réflexions qu’il m’inspire.

Ce livre rend compte des journées et de l’esprit dans lequel elles se sont déroulées avec une grande fidélité ; non seulement nous retrouvons, après les traditionnels discours d’ouverture (J. Blanc pour la région, J.-M. Vincent pour l’Inventaire général et le patrimoine et J. Senegas pour les villages circulaires de Languedoc), les 19 communications prononcées mais aussi les débats, restructurés et débarrassés de leurs scories afin que l’essentiel en soit gardé : ils occupent 24 pages à la fin de l’ouvrage, juste avant le bilan et les conclusions présentés par A. Debord. On ne peut que féliciter les artisans de cette publication d’avoir « conservé » les discussions – ce qui est de plus en plus rare et c’est fort dommage – et d’avoir dressé un index des personnages historiques, des auteurs et des noms de lieux – outil indispensable et que rejette malheureusement un certain nombre d’éditeurs -. Tout cela contribue, avec la qualité du support et les 169 illustrations (dont beaucoup sont en couleur), à faire de ces Actes un livre prestigieux. C’est pourquoi, pour en finir avec ces questions formelles – je regrette d’autant la présence des nombreuses bavures et coquilles qui émaillent le texte (« plus au moins » pour « plus ou moins », p. 36 ; « village criculaire », p. 55 ; « un micro-région », p. 57 ; «  » ayant trop souvent perdu son accent, p. 40, 43… ; phrase répétée deux fois, au tournant des pages 37-39, etc.) et qu’une relecture plus attentive aurait pu en grande partie éviter.

Le titre de l’ouvrage pourrait paraître quelque peu trompeur : « la morphogenèse du village médiéval » semble devoir concerner à priori tous les types de villages ; mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit des Actes d’un colloque qui a été en grande partie, comme je l’ai laissé entendre ci-dessus, provoqué par la parution du livre sur les « circulades ». Aussi ne faut-il pas s’étonner si déjà dans son exposé introductif où elle a magistralement posé les problèmes, M. Bourin, après avoir montré l’originalité de la réunion et la complexité du thème abordé, a fait la part belle à la fois aux pays méditerranéens et aux villages de plan circulaire. Voguant avec maîtrise des terpen frisons du haut Moyen Age aux castra du Midi, en passant par les occasionnels villages ronds des pays du Harz, elle annonce le poids relatif des thèmes traités en même temps que le plan de l’ouvrage où, à une brève évasion vers « les mondes septentrionaux » (4 communications), succèdent 14 interventions consacrées aux « mondes méridionaux », dont 9 au seul Languedoc.

En ne se laissant pas entièrement enfermer dans le cadre des villages de forme circulaire, le colloque – et les Actes en sont bien le reflet – a pris de la hauteur ; il a pu dépasser le domaine de la polémique et rendre davantage compte de la complexité du problème. C’est un des acquis essentiels de cet ouvrage : dans l’Introduction M. Bourin avait déjà souligné qu’à une forme de village – par exemple le cercle – pouvaient correspondre des genèses et des réalités sociales très différentes. Prisonnier de ses sources et bien souvent de son manque de sources, chaque chercheur ne peut, la plupart du temps, aborder les problèmes de la morphogenèse des habitats que sous un angle très restreint; donner la parole à des historiens de mondes géographiquement et politiquement très divers avait, en revanche, le mérite de multiplier d’autant les angles d’approche et de montrer une fois de plus à tout un chacun qu’en ce domaine toute explication simple et unique devenait vite fort simpliste. C’est pourquoi une des perspectives avouées du colloque résidait en une démarche qui se voulait avant tout comparatiste.

Des quatre communications sur des régions non méditerranéennes, je retiendrai en priorité trois éléments de réflexion :

1. La situation géopolitique contribue, pour une part très inégale selon les lieux, à l’élaboration et à la conservation des formes du peuplement. C’est ainsi que J. de Meulemeester (p. 33-44), à travers quatre exemples ponctuels pris dans les anciens Pays-Bas méridionaux, montre que le poids du château dans le développement d’une agglomération peut varier considérablement selon les endroits mais aussi selon les moments et selon les fluctuations de l’intérêt stratégique du lieu. Pour H. J. Nitz (p. 45-56), c’est aussi la géopolitique qui explique l’extension coloniale du Rundling planifié aux frontières orientales du monde franc à l’époque carolingienne, et au-delà de ce monde après 1100 ; mais l’archéologie a confirmé que ce Rundling n’était pas une nouvelle forme de village conçue et imposée par le pouvoir mais qu’il n’était qu’une variante de celui du très haut Moyen Age, héritier lui-même des anciens villages circulaires slaves. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1998

Nombre de pages

3

Auteur(s)

Jean-Claude HELAS

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf