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Description

L’oppidum de Saint-Siméon (commune de Pézenas)

Abbé Joseph GIRY (Conservateur du Musée National d'Ensérune - article complet)

C’est à la suite de la découverte de l’importante nécropole de « St. Julien » et de sa fouille (de 1963 à 1966) que nous nous sommes préoccupés de retrouver l’habitat correspondant.

Celui-ci se situe sur une petite éminence qui culmine à 94 mètres, à 300 mètres à l’Ouest de la Nécropole. Le lieu est dit « St. Siméon » et tire son nom d’une chapelle qui s’élève au Sud, le long d’une vieille voie qui met en relation la vallée basse de l’Hérault avec les Cévennes.

Cette chapelle du XVIIe siècle a été précédée d’un édifice roman dont on aperçoit une partie de voûte en berceau contre le mur méridional. Signalons également qu’à quelques 200 mètres, au Sud-Est, une maison dite « St. Siméon-le-Vieux » a dû remplacer une église plus ancienne. D’ailleurs autour de cette maison, les trouvailles de tessons d’amphores romaines, de dolia, de tegulae et de Gaufresenque, prouvent qu’il y avait là une « villa » romaine.

L’oppidum de St. Siméon occupe un petit plateau de 400 mètres de long, très étroit à l’Est, mais qui s’élargit à l’Ouest où il a 150 mètres de large.

Entre les deux parties, se trouve une dépression que l’on peut considérer comme aménagée par l’homme, pour en faire un large « vallum » qui devait favoriser la défense de la partie étroite-vers l’Est. C’est en effet dans cette zone que les pentes sont les plus abruptes.

Mais du fait de la pente assez forte et de l’exigüité du plateau, nous pensons que les terres archéologiques ont été entrainées, si bien que nous avons négligé d’y effectuer les premières prospections.

Nous avions d’autre part trouvé en surface dans la partie occidentale des fragments d’amphores micacées et étrusques, des galets aménagés en polissoirs, des bords de « dolia » de type préromain, et des fragments de meules en basalte soit à va-et-vient soit circulaires.

C’est donc là que nous avons décidé d’effectuer cinq sondages. Ils se situent dans la propriété de MR. Joachim ADELL, que nous remercions pour son aimable autorisation.

L'Oppidum Saint Siméon localisation (commune de Pézenas)
L'Oppidum Saint Siméon localisation (commune de Pézenas)

SONDAGE A (dans la parcelle 182 au Sud).

Il a couvert, une surface de 4,60 sur 4 mètres.

Les premiers 20 centimètres, quoique assez remaniés par la mise en culture, nous ont fourni environ 3 kgs de fragments antiques : petits « dolia », amphores micacées, vases gris de type phocéen, vases jaunes, vase peint à cercles concentriques, coupe ionienne, pisé.

Ce premier résultat était assez encourageant pour poursuivre.

C’est de -0,30 à -0,45 m., que nous avons trouvé certains sols d’habitats en place. Ceux-ci révélaient des pierres disposées à plat avec des traces de foyer. Il n’y avait pas trace de murs ; les débris de pisé rencontrés laissent supposer qu’ils n’étaient pas construits en dur. Quant aux débris recueillis à ce niveau, ce sont : des meules-navettes en basalte, des poteries phocéennes, des poteries peintes à cercles concentriques des amphores micacées, une coupe ionienne, une coupe attique noire.

D’après ces documents, nous pensons pourvoir dater cet habitat du VIe s. av. J.C. Ce fut le premier en ce point de la colline. Mais les cultures ont favorisé une dégradation du sol qui a fait disparaître toutes les traces des habitats postérieurs au VIe s.

SONDAGE B (dans la parcelle 167, près de la limite 168).

Il consistait en une tranchée en forme de croix sur 2,50 mètres de longueur.

Le terrain naturel apparut à -0,40 m. sans autres trouvailles que 4 à 5 petits fragments de poterie.

Nous ne pouvons dire si la stérilité de ce sondage provient d’une lacune dans l’habitat ou du fait que les terres ont été entièrement remaniées par les cultures (amandiers, oliviers…).

SONDAGE C (dans la parcelle 167, près des limites 166 et 127).

Il a pris la forme d’une tranchée de 2 m. de longueur sur 0,65 m. de profondeur.

Là encore n’ont été trouvés que de rares débris de céramique. Donc pas de traces d’habitat en ce point.

SONDAGE D (au Sud de la parcelle 182).

Il a été effectué en un point où nous espérions trouver le système défensif de l’oppidum. Il s’est étendu de 4 sur 4 m. (à 20 m. du sondage A).

Le décapage sur 40 cm. de profondeur a révélé une terre bouleversée par la mise en culture.

Nous avons cependant recueilli des débris de meules-navettes en basalte et des fragments : d’amphores micacées, de vases gris (certains à décor ondé), de vases peints, de coupe attique (anse), de petit « dolium » (bord à profil anguleux), de campanien. Ce dernier fragment est le plus récent que nous ayons trouvé en cet endroit.

La fouille s’est poursuivie ensuite jusqu’à 80 cm. de profondeur et nous a fourni des fragments : de vases indigènes, d’amphores micacées, de « bucchero nero » étrusque, d’amphores étrusques, de vases gris phocéens, de coupe grecque ; avec une fusaïole.

Le cailloutis qui forme à -0,80 m. le sol primitif de la colline porte des traces de feu avec de la cendre dans les interstices de pierres et quelques ossements d’animaux. Nous sommes donc sur un lieu d’habitat qui devait âtre fait de cabanes en matériaux périssables, puisqu’aucun mur n’a été décelé. Cet habitat primitif, d’après le contexte céramique, se révèle être du VIe s. av. J.C., comme nous l’avions constaté pour le sondage A.

Mais au bord même du talus qui limite le plateau où nous avons poussé la fouille, nous n’avons trouvé aucun reste de rempart. Il semble donc que celui-ci, s’il a existé, a disparu en ce point dans le remaniement des terres au cours des siècles.

SONDAGE E (au Sud-Ouest de la parcelle 127).

Ce sondage a été effectué sur une terrasse en contrebas du plateau au Nord, près de la falaise qui tombe brusquement vers la vallée de la Peyne. Quelques tessons de poteries avaient été remontés en surface lors d’une plantation de pommiers et le propriétaire du terrain nous avait signalé avoir rencontré d’autres débris, à cette occasion. Ce sondage s’est étendu de 2 m. sur 3 m.

Le décapage de 0 à -0,30 m. nous a fourni une masse importante de poteries ; fragments : d’amphores micacées et étrusques de vases clairs sans décor, de vases indigènes non tournés, de canthares étrusques (« bucchero nero »), et de petit « dolium » à cordon saillant).

Au centre de la fouille apparut à 0,50 m. un sol formé de petites pierres dans lesquelles étaient noyés des débris de meules-navettes.

Au Nord de la fouille, après avoir trouvé un autre sol à -0,75 m., nous nous sommes arrêtés à 0,90 m. où nous avons recueilli de l’étrusque, du massaliote et du phocéen gris.

Enfin au Sud de la fouille nous avons trouvé, à -0,60 m., un véritable sol d’habitat formé de terre brûlée. A ce niveau le contexte céramique était fait de fragments de coupe ionienne, de vases gris (type phocéen), d’amphores étrusques et d’amphores légèrement micacées (peut-être grecques), et de vases indigènes. Nous étions donc bien là au niveau du VIe s. av. J.C.

En approfondissant cette fouille dans cette zone Sud, nous avons rencontré un autre sol d’habitat à -1,15 m. et nous nous sommes enfin arrêtés à -1,40 m. sur un foyer de terre brûlée sans rencontrer encore le sol naturel. A ce niveau profond, la fouille nous a fourni un matériel très différent de ce que nous avions trouvé précédemment. Il s’agit uniquement de poterie non tournée, certaine noire lissée. Nous remontions donc, dans le temps, au-delà du VIe-VIIe s. av. J.C., sans qu’il soit possible de préciser davantage.

Notre crédit de fouille étant alors épuisé, nous n’avons pu poursuivre au delà notre prospection.

C’est dans cette zone du sondage E qu’il sera intéressant de poursuivre la fouille si nous voulons faire l’histoire primitive de l’oppidum de St. Siméon.

Nous espérons bien avoir l’occasion de le faire au cours de cette année.

Abbé Joseph GIRY
Conservateur du Musée National
d’Ensérune

Informations complémentaires

Année de publication

1970

Nombre de pages

4

Auteur(s)

Abbé Joseph GIRY

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf