L’Hérault vu par Raoul Guiraud…
Un naturaliste biterrois (Cerbère, 1888 – Béziers, 1976)

Rien ne prédestinait Raoul Guiraud, issu d’un milieu rural, à une telle carrière artistique. D’origine héraultaise, il avait choisi la ville de Béziers pour pratiquer son art sous l’influence des couleurs méridionales. Peintre naturaliste, Guiraud fait partie des artistes atypiques de la modernité par sa technique, son tempérament, sa forte personnalité. Sa réussite et son enrichissement personnel lui valent d’être reconnu, aimé et admiré de tous. Il n’est pas mondain, mais plutôt timide et discret, généreux et bohème, certains le qualifient même de « pittoresque ». À son époque, son nom est connu de Paris jusqu’en province, et les biterrois voient en lui, plus qu’un peintre, un homme talentueux et qui aime profondément son art. Son œuvre a embrassé tous types de commandes, de supports ou de thématiques. Ce maître incontesté de la peinture languedocienne, très engagé politiquement, a eu aussi des amitiés et des relations souvent prestigieuses.

Guiraud a donc marqué profondément l’Hérault et plus particulièrement la ville de Béziers qui lui a rendu hommage, de mars à juin 2008, au musée des beaux-arts, par une exposition rétrospective, « Raoul Guiraud, Un luministe biterrois » 1. Cet article va permettre de mieux découvrir son travail dans notre région, mais auparavant, une première partie retracera sa vie, très riche, et le parcours exceptionnel de ce peintre-décorateur héraultais.

Destin d’un peintre du midi

Qui est Raoul Guiraud ? Quelles ont été sa vie, son oeuvre, sa carrière… Comment ce peintre, né dans midi de la France, évolue t’il dans le milieu artistique du XXème siècle ? De sa formation provinciale à la vie parisienne, il chemine progressivement vers une gloire incontestée, qu’il connaît lors des salons nationaux et avec ses grandes décorations pour la ville de Béziers. Peintre aux couleurs régionales et très populaire de son temps, Raoul Guiraud a laissé une forte empreinte dans l’Hérault même si son nom, connu de quelques biterrois, reste encore aujourd’hui inconnu du grand public.

Un artiste languedocien (1888-1919)

Raoul Gaston Guiraud naît le 17 novembre 1888 à Cerbère (Pyrénées-Orientales) dans une période artistique foisonnante et bouleversante pour les esprits, qui marque une rupture avec les canons et les formes traditionnelles. Un contexte auquel échappera pourtant la carrière de Raoul Guiraud. Fils unique de Marius Guiraud, chef de gare et facteur, et de Célestine Laymond (couturière) 2, il grandit dans un milieu modeste et rural et passe une enfance heureuse dans le Sud de la France (Cerbère, Paulhan 3, Narbonne, Béziers 4 et Toulouse). Adolescent, il est très tôt conscient de son engouement pour la peinture et débute son apprentissage à l’occasion des Salons Héraultais, en particulier ceux de la Société des Beaux-arts de Béziers. Le plus prestigieux, celui de 1901, riche en peintures impressionnistes, aurait influencé son goût pour la peinture en plein-air et la technique pointilliste.

À l’âge de 19 ans, son certificat d’études en poche, il entre en 1907 à l’école des beaux-arts de Toulouse dans l’atelier d’Henri Bonis (1868-1921) et se sent à l’aise auprès de ce maître passionné par les sujets pittoresques et ruraux 5. Montrant rapidement un certain talent, il expose dès 1909 à l’Union artistique des beaux-arts de la ville 6 et participe au Grand Prix municipal de peinture où il obtient la quatrième place 7. Dés le début, il peint le monde qu’il connaît, son entourage familial et les lieux où il a grandi. L’on retient de ses premières études, une série de toiles peintes en 1909, intitulées Marin-Haute Normandie, représentant des pêcheurs en train de récolter des tenilles, ainsi qu’un portrait de sa mère, classique et académique, une œuvre de jeunesse signée dans la pâte, avec un stylet, « Guiraud.R ».

Assidu et rigoureux, il est l’un des meilleurs élèves peintres de l’école (18 prix entre 1908 et 1912) 8 et son talent est reconnu à plusieurs reprises dans les journaux toulousains 9. Les cinq années passées à Toulouse lui ont aussi apporté des amitiés sincères, dont celle du sculpteur Edmond Corneille (né en 1890) 10. Corneille réalise le buste de Raoul Guiraud en 1910, puis entre en 1911 à l’École nationale et spéciale des beaux-arts de Paris pour préparer le prix de Rome de Sculpture 11. Stimulé par la qualité de sa formation toulousaine, Guiraud évolue rapidement, sous une double influence, celle des partisans de l’académisme, Jean-Paul Laurens et Henri Loubat (1855-1926), et celle des post-impressionnistes et des régionalistes, Henri Bonis et Adolphe Gauret (l870-1955) 12. En 1912, il termine brillamment son cursus toulousain en obtenant les six prix les plus prestigieux ; toutefois il échoue une deuxième fois au Grand Prix Municipal de Peinture, en arrivant seulement troisième avec la mention 13.

Sa bourse de voyage lui permet cependant de séjourner quelques mois à la Villa Médicis, et, grâce aux gains d’autres prix honorables et d’encouragements, il part s’installer à Paris, au n° 19 de la rue du Moulin-Vert, dans le XIVème arrondissement 14. Il entre alors comme auditeur libre à l’Académie Julian, dans l’atelier de Jean-Paul Laurens (1838-1921) qu’il avait déjà côtoyé à Toulouse 15. Ce grand peintre d’histoire, très attaché à l’identité régionale, est le maître classique idéal, l’archétype de l’artiste officiel. Il donne à Guiraud l’exemple de ses grandes décorations classiques, antiques, historiques, mythologiques telles que le plafond du théâtre de l’Odéon, l’Hôtel de Ville de Paris, le Capitole de Toulouse. Mais son intégration dans cet atelier, ne laisse en rien présager sa préparation à l’entrée à l’Ecole des beaux- arts de Paris, ni son entrée en loge pour le prix de Rome, auquel il renoncera 16.

Le choix d’un autre atelier, celui de Léon Augustin Lhermitte (1844-1925) 17 à la Villa des Arts à Montmartre, éclaire cependant les préférences du jeune Guiraud. Admiratif des vastes compositions de son maître, il en conserve ce goût naturaliste, porté sur les aspects de la vie paysanne. Raoul Guiraud débute sa carrière, sur la butte, dans ce quartier familial, où il rencontre sur la place du Tertre des peintres abstraits 18. Malgré son incursion dans la vie artistique parisienne, les nouveaux mouvements de l’époque et les débuts de l’abstraction n’ont aucune influence sur son travail. Formé à la peinture figurative, sa pratique demeure académique et régionaliste sans aucun accent de modernité. Son œuvre reste dans la mouvance du XIXème siècle, du traditionalisme et de l’art officiel du Salon, mais elle subit également l’influence des peintres impressionnistes, post-impressionnistes et régionaux comme le pointilliste Henri Martin 19. Il montre aussi sa dette envers certaines écoles, celles de Barbizon, d’Honfleur, du Havre et des peintres du Salon, comme Pierre-Eugène Montézin (1874-1946). Raoul Guiraud est donc l’un des représentants d’une certaine conception d’un métier bien fait, des grandes compositions savantes, solides voire grandiloquentes.

Sa peinture ne va pas se limiter à un seul genre, mais on y découvre principalement des scènes de la vie rurale donnant une vision de « la petite France », celle des vendangeurs, faucheurs, laboureurs, bergers… Très méthodique et appliqué, il utilise des supports variés (toile, carton, bois plein, contreplaqué, isorel, papier), pratique diverses techniques (peinture, dessin, lithographie, photographie, sculpture) et excelle dans tous les formats. Au début de sa carrière, ses peintures à l’huile à la touche lourde sont très prisées, puis sa facture devient progressivement plus légère dans ses aquarelles crayonnées (Fig. 1) et pointilliste dans ses toiles (Fig. 2).

Le Marché de la Madeleine à Béziers, 1947 (Collection particulière)
Fig. 1 Le Marché de la Madeleine à Béziers, 1947 (Collection particulière)
Les Vendanges à Puissalicon, 1938 (Collection particulière)
Fig. 2 Les Vendanges à Puissalicon, 1938 (Collection particulière)

Raoul Guiraud se fait un nom dans la capitale, grâce à l’appui de ses maîtres et à l’aide des galeristes de Montmartre et collectionneurs privés qui lui achètent des tableaux. Paris est pour lui comme pour beaucoup de peintres des XIXe et XXe siècles, un objet d’étude propice à une approche impressionniste de la peinture. Ces toiles et aquarelles privilégient le patrimoine parisien, des ouvriers sur les quais de la Seine aux grands ponts de Paris, ainsi que des places, des églises, des marchés aux fleurs jusqu’aux grands lieux, l’Opéra et l’institut de France par exemple.

Lorsque la guerre éclate en 1914, l’artiste-peintre est rapidement engagé comme dessinateur 20. En raison de sa faiblesse musculaire, il n’est envoyé au front qu’en 1915. Affecté en 1916 à la Section Photographique de l’Aéronautique militaire (S.P.A) 21, Raoul Guiraud réalise des emblèmes pour la S.P.A et prend de très nombreux clichés, dont aucun n’est connu à ce jour 22. Il reproduit certains de ses souvenirs, peint beaucoup de paysages, en particulier dans le Nord de la France, à Reims, et exécute en Alsace des aquarelles. D’autres œuvres, une série d’huiles évoquant la tristesse, la peur des soldats et de la population, dénoncent toute l’ampleur de la guerre en Pologne (1917). Guiraud, reste fidèle à ses aspirations, il n’a pas vécu l’enfer des tranchées et ces œuvres ne retracent pas en image la situation du conflit. Ce n’est pas un peintre « officiel » de la guerre, comme Robert Delaunay, Fernand Léger ou Otto Dix qui réalisent des sujets inattendus.

À l’approche de la trentaine, il se marie à Marmande, le 24 octobre 1918, avec Irma Marie Jeanne Lucienne Tollet, une infirmière âgée de 23 ans et originaire de Libourne 23. Lucienne Tollet connaît bien la peinture car l’un de ses amis d’enfance est François-Maurice Rogagneau (1883-l974) 24, peintre-décorateur, 1er Grand Prix de Rome en 1906. Raoul Guiraud se liera d’amitié avec cet artiste bien connu à Bordeaux, directeur de l’Ecole des beaux-arts et président du salon annuel bordelais « L’Atelier ». Dès lors, sa signature change, il ajoute le prénom de son épouse au sien et signe ses toiles « L.R.Guiraud » : Lucien Raoul Guiraud, en trois mots, comme J-P Laurens et L-A Lhermitte. Dès son retour, en juillet 1919, il habite à Marmande avec sa belle-famille et son épouse, une belle et grande femme, qu’il peint pourtant de dos, représentation inhabituelle et rare dans son œuvre et qui se rapproche de l’art académique de Jean-Paul Laurens. Guiraud retourne cependant régulièrement dans l’Hérault pour revoir ses parents qui habitent Lodève (quai de la Mégisserie) depuis une dizaine d’années 25 et dont il reste très proche. Tout le long de son existence, il multiplie les portraits de sa famille, tout particulièrement de ses parents, de sa femme et de sa fille qu’il prend souvent pour modèle. À Lodève, Un Repas à la ferme (Salon des Artistes français de 1931) 26 est une scène très réaliste, conviviale et pittoresque, se déroulant en famille et avec des amis dans la maison des Guiraud. Raoul Guiraud fait partie de l’école de portraitistes qui continue toujours à cette époque. Ses portraits collectifs ou encore ses figures de paysans, de bourgeois et de vieillards, relèvent du genre académique mais avec une touche de « ruralité ».

La reconnaissance officielle (1919-1944)

Malgré son installation en province, Raoul Guiraud poursuit sa carrière parisienne et entretient sa renommée de peintre mais aussi de décorateur. Son premier contact artistique dans la capitale ayant été concluant avant la guerre, il est appelé à réaliser, avec l’aide de Lucien Jusseaume, spécialiste du genre, très connu dans le milieu parisien à cette époque 27 des décors pour les théâtres parisiens, l’Opéra et l’Opéra Comique, En outre, Tristan Bernard (1866-1967) fait appel à lui pour les décors du théâtre impérial du Châtelet en 1919, et il travaille en même temps pour l’illustre Théâtre de Sarah Bernhardt (1844-1923), l’un des premiers et des plus beaux théâtres de Paris (détruit en 1970) 28. En ce sens, il fait partie des décorateurs traditionnels de théâtre, auteurs des décors de scènes et de panneaux muraux), tels Henri Martin et Guirand de Scévola, par opposition à ceux des Ballets russes. En même temps, il participe à la décoration d’une des lignes de l’Orient-Express, la célèbre Compagnie Internationale des Wagons Lits de Georges Nagelmackers (1845-1905) 29.

Enfin père d’une petite fille prénommée Simone Marie Gabrielle, né à Marmande le 22 avril 1920 30, il décide de se rapprocher de ses parents. Très nostalgique de sa jeunesse héraultaise, il s’installe en 1921 au n° 2 de la rue Rabelais à Pézenas en 1921 31, une petite ville animée tout au long de l’année par les « Amis de Pézenas ». Raoul Guiraud s’insère rapidement au sein de la vie sociale, grâce à l’aide d’Albert- Paul Alliés (1868-1935) qui lui permet de faire ses débuts en tant qu’illustrateur pour L’Etendard Piscénois (1925-1928), en particulier avec le frontispice, où il rend hommage à la ville de Pézenas (clocher de la collégiale, monument à Molière d’Injalbert, lyre, feuilles de vignes, longue plume…). De plus, la ville le sollicite pour illustrer les pages de garde des livres d’or des Fêtes du tricentenaire de Molière de 1922 (Béziers, Montpellier, Pézenas) et de L’Exposition de Pézenas de 1925. Comme de nombreux artistes depuis le XIXème siècle, Raoul Guiraud n’a aucune formation spécifique dans ce domaine, mais il devient toutefois l’un des plus grands illustrateurs de la région. Il collabore avec d’autres journaux, dont Le Biterrois illustré ; il est proche du directeur Gaston Vinas 32 et fait partie des quelques privilégiés à avoir participé à la célèbre revue d’art « Septimanie » (1923-1944) avec d’Henri Martin 33.

Renouant avec les belles couleurs du Languedoc, Guiraud privilégie dorénavant le naturalisme et le régionalisme avec de nombreuses scènes de la vie rurale. Son œuvre est très appréciée pour sa facture solide, reconnaissable dans ses thèmes sur les paysans, les paysages méditerranéens et l’arrière-pays de l’Hérault. Il se spécialise dans la peinture bucolique et, dés 1922, exécute son chef-d’œuvre, le décor de la cage d’escalier du château de Roquelune, près de Pézenas (Fig. 3). La région est très riche en châteaux viticoles, folies, hôtels particuliers, « campagnes », grandes demeures et Raoul Guiraud réalise plusieurs décorations aux alentours de Pézenas, notamment au château de Peyrat-Montplaisir, mais aussi à Béziers, Narbonne et Toulouse. Par ailleurs, grâce à ses travaux pour les théâtres parisiens, il est aussi considéré comme un excellent décorateur de théâtre. On peut supposer qu’il a assuré des travaux d’entretien au théâtre de Pézenas et confectionné des décors mobiles, en particulier pour les Fêtes de Molière de 1922 (L’Avare, Les Précieuses Ridicules, Le Dépit Amoureux34. Sa renommée de peintre-décorateur dans l’Hérault étant établie, il reçoit aussi la commande du plafond du Café de la Bourse, à l’Hôtel Molière, situé au n° 39 de la place du Quatorze- juillet. Dans un format octogonal, l’Allégorie de la terre fertile fait écho aux œuvres contemporaines de Raoul Guiraud sur la vigne.

Le Cycle de la vigne en Languedoc-Roussillon - Les Vendanges, 1922 (Collection particulière)
Fig. 3 Le Cycle de la vigne en Languedoc-Roussillon - Les Vendanges, 1922 (Collection particulière)
L'Enlèvement des sarments, après-midi de janvier - Propriété de Saint-Adrien à Servian, 1942 (Collection particulière)
Fig. 4 L'Enlèvement des sarments, après-midi de janvier - Propriété de Saint-Adrien à Servian, 1942 (Collection particulière)

Ses toiles à caractère provincial sont fort remarquées lors de ses premiers salons à la Société Artistique de l’Hérault en 1922 à Montpellier 35, ainsi qu’en 1924 à Béziers, avec Le Marché de la Madeleine à Béziers 36, où Jean Soulairol, journaliste à La Vie Montpelliérain, le considère déjà comme un des « meilleurs peintres de sa génération » 37. Il est aussi plébiscité par le public et la critique dans d’autres salons provinciaux (Narbonne, Toulouse, Bordeaux, Périgueux, Dijon…) mais plus particulièrement à Paris, au Salon des Artistes Français. En tant que maître de la peinture régionale, il expose à neuf reprises 38 au Salon, la première fois en 1924 avec Scènes de vendanges en Languedoc 39 et entretient jusqu’en 1934 sa renommée de peintre de tableaux « paysans » avec L’Enlèvement des sarments, après-midi de janvier (Fig. 4) 40. Il est finalement reçu triomphalement en 1928 et remporte une Mention Honorable (Médaille de bronze) 41. Quelques années plus tard, en 1935, il sera promu officier des palmes académiques 42.

Dans le biterrois, sa notoriété est telle qu’il s’installe définitivement à Béziers à la fin de l’année 1926 et y demeure toute de sa vie, dans un appartement, au 5ème étage du 8, rue de la République. Son atelier, au bas des allées Paul-Riquet, à rue des Poètes, lui permet de donner des cours particuliers de dessin et de peinture 43. Par ailleurs, il y organise de grandes expositions particulières, bien accueillies par la presse et le public. Selon le journaliste Gaston Vinas, « chaque exposition du peintre R. Guiraud est une véritable manifestation d’art qui dépasse le cadre habituel » 44. Artiste complet, s’essayant à toutes les techniques, il est connu dans Béziers pour sa facture élégante, ses œuvres consacrées au monde paysan et populaire héraultais, tels Les Haleurs ou Les Pêcheurs à la traîne, thème peu commun chez les peintres de l’époque.

Choyé et apprécié de toute la population, il s’intègre facilement dans cette ville où règne un évident climat artistique et se plaît particulièrement dans les assemblées conviviales de Béziers. Il y est introduit par des personnalités influentes comme Jules Cadenat (1885-1966). Grâce à l’imprimerie Cadenat, très renommée auprès des particuliers et des sociétés biterroises, Raoul Guiraud illustre des cartons pour toutes sortes d’événements (artistiques, viticoles, politiques…). Cette large diffusion lui permet de se faire connaître puisqu’il les signe toutes L.R. Guiraud ou bien L.R.G (Fig. 5). Excellent dessinateur, il adopte une écriture souple, légère, continue, qui permet de donner plus de reliefs et de contrastes aux dessins. Très sollicité, il devient le premier illustrateur de la ville de Béziers et du Comité de Propagande pour le Vin. Par ailleurs, il obtient des commandes prestigieuses pour illustrer des livres, dont Hygiène et médecine familiale du Docteur P. Huot, édité à plusieurs reprises entre 1930 et 1950 par l’imprimerie Clareton de Béziers, et des couvertures d’ouvrages comme L’Acropole Biterroise en 1928.

À Béziers, Raoul Guiraud noue des amitiés variées, des compagnons « de bar » à d’autres relations souvent prestigieuses. D’ailleurs, ses sorties entre amis passent trop souvent en premier, au détriment parfois de sa vie familiale et sentimentale. Beaucoup d’entre eux, hommes politiques ou joueurs de rugby, sont francs-maçons. Raoul Guiraud a-t-il fait partie de la franc-maçonnerie ? C’est une possibilité à ne pas écarter et certains éléments de sa biographie pourraient confirmer cette hypothèse.

C’est pour le Grand Café Glacier à Béziers, situé en haut des allées Paul-Riquet, et jouissant d’une très forte renommée à la « Belle Epoque », que Raoul Guiraud réalise, à la fin des années 1920, l’une de ses premières décorations publiques biterroises, un plafond allégorique et des décors muraux. À la demande du Président Gaillard, il collabore à partir de 1925 au programme décoratif de la Chambre de Commerce et d’industrie de Béziers, et s’installe en 1931 dans un grand immeuble néoclassique, au n° 26, des allées Paul-Riquet. D’autres peintres héraultais participent à l’entreprise, le piscénois Emile Beaume, Louis Azéma, Jean-Désiré Bascoulès, mais Guiraud, présent dans presque toutes les pièces, du grand hall (Fig. 6) au cabinet du secrétaire, avec deux allégories Cérès et Neptune, bénéficie d’une place de choix.

Diplôme pour la foire-exposition de Béziers, 1929 (Musée du biterrois, Béziers)
Fig. 5 Diplôme pour la foire-exposition de Béziers, 1929 (Musée du biterrois, Béziers)
Saint-Pons, 1925-31 (Chambre de Commerce et d'industrie, Béziers)
Fig. 6 Saint-Pons, 1925-31 (Chambre de Commerce et d'industrie, Béziers)

D’autre part, de riches propriétaires biterrois lui commandent des aménagements d’intérieur : toiles marouflées, panneaux, plafonds… il est même chargé de réaliser des meubles et s’associe pour cela à des architectes, ébénistes et sculpteurs de la ville. Il se spécialise dans les cosys, les buffets de salles à manger et les cheminées, au dessus desquels il dispose de grandes toiles aux tonalités douces, qui marquent le début de sa période pointilliste (Fig. 2 et 4). Raoul Guiraud dégage trois thèmes : l’antiquité, l’amour et le monde rural où il utilise les techniques des luministes, telles que Les Jeunes chevriers dans un paysage antique (1933). Sa palette claire, sa touche enlevée et son sujet lié au naturalisme font toute l’originalité d’un style issu à la fois de l’académisme et de l’impressionnisme.

Au sommet de sa gloire, à l’âge de 46 ans, il réalise son deuxième Autoportrait (1934). On y voit un homme grand et robuste, sérieux et très élégant dans un costume marron sous une blouse beige signifiant son appartenance au monde des artistes-peintres. Remarquable portraitiste, il devient le peintre favori de la haute société héraultaise et biterroise, qu’il connaît bien : Le Commandant Edouard Barret (1936) (1876-1940), président de la Société Archéologique Scientifique et Littéraire de Béziers et l’excellent journaliste de La Dépêche, Paul Vindrios (1928).

Grâce à l’appui de son ami Emile Claparède (1902-1967), premier adjoint au maire Auguste Albertini et délégué aux beaux-arts et aux finances de Béziers, la ville attribue à Raoul Guiraud plusieurs commandes publiques. De 1935 à 1944, il a en charge les décors des deux théâtres biterrois, il réalise pour le théâtre en plein-air des Arènes, créé en 1898 sous l’impulsion du mécène Biterrois Fernand Castelbon de Beauxhostes (1859-1934), les décors de Bacchus et le Jeune Dieu (1935-3000m2 de toiles peintes), aidé par Marcel Causse, qui avait déjà conçu des décors pour l’opéra de Montpellier 46. Pour le théâtre municipal, à l’italienne, œuvre de l’architecte Charles isabelle entre 1842 et 1844, il restaure divers types de décors interchangeables (antique, pittoresque et classique) 47 et a en charge, avec d’autres artisans, la nouvelle décoration intérieure de la salle de spectacle 48.

On lui confie en 1937, la décoration de la Salle du Conseil Municipal 49 qui va le hisser au rang de peintre- décorateur et asseoir définitivement sa réputation de « peintre de la mairie de Béziers ». Ce décor constitue l’une des ultimes expressions du grand mouvement de décoration didactiques d’édifices publics sous la IIIème République : les hôtels de ville, les préfectures, les chambres de commerce, les théâtres… Ce programme iconographique développe en 12 toiles marouflées l’histoire locale de la ville de Béziers et de ses héros dans une grande érudition. Sur les murs, sont honorées de grandes personnalités biterroises telles Pierre-Paul-Riquet, le créateur du Canal du Midi (1609-1680), tandis qu’au plafond, Guiraud évoque la Vigne et les artistes célèbres de la ville de Béziers, en associant naturalisme, allégorie et imaginaire. Pour ce projet monumental réalisé en trois ans, il accumule une multitude de croquis et de maquettes, qu’il conserve dans son nouvel atelier, au dernier étage de la mairie. Ici, Raoul Guiraud reste fidèle à la peinture d’histoire de son maître Jean-Paul Laurens et au pointillisme d’Henri Martin, technique qui permet une grande rapidité d’exécution. En revanche, son œuvre compte très peu de sujets historiques et religieux, car Raoul Guiraud est athée. Cette période, constitue, par bien des aspects, le point culminant de sa carrière professionnelle, mais aussi des années douloureuses à la suite du décès de ses parents (en 1937 et 1938), pour lesquels il avait une très grande affection.

Les épreuves d'une fin de vie (1944-1976)

Lors de la deuxième guerre mondiale, Raoul Guiraud poursuit son activité de peintre et de professeur mais est contraint de déménager son atelier. Malgré cela, la plupart de ses cartons à dessins, ses esquisses, sont volés ou égarés 50. Le reste de ces études (sanguines, fusains, crayons noirs et blancs, pastels, encre noire) témoignent autant que ces tableaux de son talent de dessinateur et de son sens inné pour cet art. Certains sont parfois les seuls témoins de décors de théâtres détruits ou de tableaux inconnus.

Sa renommée n’étant pas essentiellement régionale, après 1945, il reprend contact avec ces commanditaires parisiens, qui le mettent régulièrement à l’honneur dans les galeries. Parmi eux, de riches et grands collectionneurs, propriétaires d’endroits réputés sur Paris comme François Coty (1874-1934), journaliste et homme politique, propriétaire de journaux, pour lequel Guiraud peint le plafond de sa parfumerie (23, place Vendôme) 51. D’autre part, il exécute de grandes toiles décoratives pour des magasins et restaurants tels L’Australie (36, rue Vivienne), dont le propriétaire est Jean Rosset 52.

Peu après son mariage 53, sa fille unique part avec son époux, en 1946, vivre au Maroc dans le grand domaine céréalier et oranger de la famille Duhoux, à Souati, une bourgade de la région de Taounate. Un an après, la femme de Raoul Guiraud, en voyage à Souati, décède le 25 octobre 1947, des suites d’un cancer 54. L’artiste part en 1950 dans ce pays aride et rural où il reste presque deux ans. De ce voyage, il ramène une série de toiles orientalistes faisant référence au caractère berbère et montagnard du Maroc. On compte des scènes de souk, inspirées de ses divers lieux de passage (Fès, Meknès, Marrakech) ainsi que des portraits inédits, de vieillards ou d’enfants, dessinés pour la plupart avec un grand souci de vérité. Il réalise de nombreux dessins, dans une écriture différente, plus souple, légère et continue, avec plus de relief et de contraste que dans sa peinture. Il se montre capable de variations infinies dans le trait et la lumière et excelle dans le rendu des formes et des matières. Parallèlement, il travaille sur un projet de décoration (triptyque) pour le palais des P.T.T, place de l’Istiqlal 55.

À son retour à Béziers, en 1952 56, il succède à son rival, Félix Cambon (1875-1961), pour le poste de conservateur du Musée des beaux-arts de Béziers, dont il était conservateur- adjoint depuis décembre 1928 57, fonction qu’il occupera jusqu’ à la fin de sa carrière où il est nommé « conservateur à vie » 58 Conservateur, il travaille sur la 8ème édition du Catalogue des peintures, aquarelles, dessins, sculptures, objets d’art, etc., et remet minutieusement à jour l’inventaire des œuvres du musée 59. À ce titre, il participe aux nouvelles expositions de la Société des beaux-arts dans le hall de la Chambre de commerce en 1955, 1956 et 1958 60. On note peu de nouveauté dans son travail ; il y expose d’ailleurs Le Portrait de Marius Guiraud, déjà présenté au Salon des Artistes Français de 1932 61. C’est un hommage à son père, pour lequel il avait un très grand respect. La présentation est naturelle, le modèle habillé de blanc est disposé de demi-profil, sous un ciel nuageux ; il émane de l’œuvre vérité, profondeur et tendresse. Veuf mais entourée de nombreux amis, Guiraud séjourne très souvent dans le Var (Les Roches d’Agay, Le Cap roux), les Alpes- Maritimes (Le Pont de Sospel), la Normandie (le port d’Honfleur), l’Aveyron (Le vallon- La Couvertoirade)…

Vers 1960, on constate un ralentissement dans sa carrière publique. Dorénavant, son strabisme l’empêche de peindre, et il exécute seulement de petites toiles pour sa famille et ses amis proches. Les années deviennent difficiles à partir de 1966 et le décès de Jules Cadenat, puis celui d’Emile Claparède en 1967. Commence alors pour Raoul Guiraud une triste et mélancolique existence dans une ville en pleine évolution.

Suite aux événements d’Algérie, la fille et la famille de Guiraud habitent Béziers dès 1956, puis s’installent en Corse et à Nice en 1964. L’artiste, les rejoint en 1968, pour l’ouverture de la saison, dans leur hôtel « La Giraglia » à Ersa, au nord du Cap Corse 62. Là bas, il se remet à la peinture, avec une série de paysages corses, aux tons marins sous l’éclat d’un fulgurant soleil : L’Ile de la Giraglia, La Tour Agnello et Le Petit port de pêche de Saint-Florent. Toutefois sa vue étant de moins en moins distincte, ces petites toiles sont très claires et contrastées. Ses dernières œuvres sont des natures mortes (bouquets, objets et fruits), un genre présent de bonne heure chez l’artiste et pour lequel il gardera une prédilection tout le long de sa carrière. Si une évolution est perceptible dans une certaine légèreté (en comparaison à la lourdeur de ces premières toiles), la composition est semblable : il reprend, dans un plan rapproché et un souci d’équilibre, les schémas classiques traditionnels.

Raoul Guiraud passe l’hiver à Nice, où il contracte un rhume sévère dont il a du mal à se remettre. Son état s’aggrave, et en avril 1969, il ne repart pas pour la Corse mais revient définitivement à Béziers auprès de son amie Marthe Cadenat 63. Quelques années plus tard, le 3 avril 1973, il entre à la maison de retraite municipale 64 et décède le 14 février 1976, à l’hôpital, à l’âge de 88 ans 65. Le lendemain le Midi Libre (édition de Béziers) retrace rapidement sa brillante carrière et lui rend un hommage émouvant : « Le maître Raoul Guiraud laisse le souvenir d’un artiste de talent mais aussi d’un homme intègre au coeur généreux » 66. Ses obsèques ont lieu le lundi 16 février 1976 en l’église Sainte-Madeleine 67. Raoul Guiraud est ensuite inhumé au Cimetière Vieux de Béziers dans le tombeau de la famille Assemat-Cadenat, qu’orne une Allégorie masculine en bronze par Jean Magrou (1907). Le peintre biterrois repose ainsi auprès de son plus cher ami, Jules Cadenat.

Aujourd’hui, trente-deux ans après sa mort, ce maître de la peinture du Midi est reconnu comme l’auteur d’une œuvre prolifique, éclectique et variée, pittoresque et régionaliste, qui lui confère le statut de peintre languedocien, et plus particulièrement d’héraultais. Guiraud reste célèbre pour ses commandes prestigieuses, mais est cependant peu représenté dans les musées français, excepté à Béziers, Pézenas et Narbonne. L’essentiel de ses œuvres se trouve chez des collectionneurs privés et des amis de Raoul Guiraud, vivant pour la plupart dans l’Hérault. Dans le marché de l’art actuel, il est à regrouper avec les « petits maîtres provinciaux », et s’inscrit de façon significative dans l’art français du XXème siècle.

L'Hérault vu par Raoul Guiraud

Artiste local, défenseur de son terroir, Raoul Guiraud est fier de son enracinement. L’Hérault est propice à sa peinture, essentiellement des paysages et des scènes de la vie régionale, rurale ou traditionnelle. Il montre son attachement au monde paysan dont il est issu et aux couleurs du Midi très caractéristiques de ses paysages régionaux. Dans chaque œuvre, on retrouve un univers pittoresque similaire, même si l’on remarque une évolution continue au niveau de la technique. Raoul Guiraud obtient d’importantes commandes publiques ou privées, avec toujours les mêmes sujets de prédilection, l’Histoire, la culture, les paysans et les vignes de l’Hérault.

Les paysages d'« impression héraultaise »

Le paysage est pour Guiraud un thème inépuisable dans lequel il excelle et qu’il traite avec une grande rapidité d’exécution. Féru de nature, il observe cette dernière qui se révèle si différente à chacun de nous. Guiraud en fait des œuvres très personnelles et pleines d’émotions. De plus, ce genre pictural est aussi très fructueux, car en vogue, il permet une échappatoire aux citadins.

D’origine méditerranéenne, Raoul Guiraud est séduit très jeune par la terre du Languedoc mais aussi la Côte d’Azur, les Pyrénées, Paris et le Maroc. Mais il s’attache surtout aux paysages du Midi, en particulier ceux de l’Hérault. Sans souci du détail, il capte avec talent la qualité de la lumière et toutes les nuances de l’atmosphère, de l’eau et des ciels. Comme les impressionnistes, il porte une attention toute particulière aux variations climatiques. Il en livre une vision majestueuse, pleine de force, de mouvements, de couleurs, d’une facture soignée, mais parfois « pesante » et trop scrupuleuse. Il ne se limite pas seulement à la représentation d’un coin de nature mais investit le monde moderne, les villes, les villages, la mer et les plages. Le peintre s’est rarement essayé aux paysages citadins, avec un nombre restreint d’œuvres liées à la vie urbaine et sociale de son temps. Mais aucune ne concerne Montpellier : l’univers de Raoul Guiraud, une campagne souvent idéalisée, est en dehors de la grande Histoire, et des changements sociaux, économiques et techniques.

Entre terre...

On loue chez Guiraud l’instinct du paysagiste, son sens inné du cadrage et la précision de son observation. Son amour du pays natal, lui a, semble-t-il, donné la clé de la nature au sens vaste du terme, avec laquelle il entretient une relation d’intimité. Il travaille en extérieur, en contact direct avec le sujet et ne peint que très peu dans son atelier. Raoul Guiraud jouit donc du rare privilège de savoir capter, dans une touche vigoureuse et nuancée, et de nous les rendre familiers, les paysages languedociens : Béziers surtout, et les villes et villages de l’arrière-pays de l’Hérault, Pézenas, Lodève, Saint-Pons… Dans la plupart de ses œuvres, il se montre attentif à décrire des sites peu connus en découvrant de nouveaux points de vue.

À Béziers, Raoul Guiraud est très sensible à l’architecture de la ville et met en exergue des monuments et sites emblématiques comme la cathédrale Saint-Nazaire, les ponts, l’Orb… Ces vues perspectives, avec leurs variations de lumière changeantes au fil des heures, de l’aube au crépuscule, jalonnent sa carrière, plus particulièrement entre 1920 et 1940. Ces vues sont prises sous divers angles, mais en privilégiant toujours le ciel, et traitées dans des tonalités différentes.

Dès 1919, peu avant son installation dans la région, Guiraud traite la perspective la plus caractéristique de la ville, la plus chère aussi aux biterrois. Il peint Béziers avec la position exceptionnelle et dominante de la cathédrale Saint-Nazaire surplombant le Pont Vieux et la vallée de l’Orb, point de vue célèbre grâce à de nombreux peintres biterrois Jean-Baptiste Genillion (1750-1829), Gabriel Fayet (1832-1899), Louis Paul (1854-1922) 68, etc. Raoul Guiraud affiche une prédilection pour le Pont Vieux et en multiplie les représentations. Sur l’une d’elle, exposée au Salon des Artistes Français de 1928 69, le pont envahit la composition et laisse peu de place à la cathédrale, le tout dans une symphonie de couleurs, alliant aux reflets du pont dans l’Orb les teintes chaudes de la ville, le soleil tamisé et le ciel nuageux. Avec sa lumière méditerranéenne, La Vue de Béziers avec le lavoir du bord de l’Orb (Fig. 7) accorde au contraire une place significative au ciel, d’un bleu sans nuage, qui suit les contours de la ville.

La Vue de Béziers avec le lavoir du bord de l'Orb, 1922 (Collection particulière)
Fig. 7 La Vue de Béziers avec le lavoir du bord de l'Orb, 1922 (Collection particulière)

Guiraud marque aussi son attachement au fleuve avec La Gravière (Salon des Artistes Français de 1927) 770, où, dans un style très impressionniste, il se penche vers les petits métiers des bords de l’Orb. Les couleurs utilisées traduisent excellemment le brouillard et la fraîcheur de ce matin d’hiver. À l’instar de Louis Paul 71, il s’intéresse à un autre élément majeur du paysage biterrois : le Canal du Midi bordé de platanes, comme dans Bord de canal avec péniche (Fig. 8). À Béziers, le canal longe la ville après avoir franchi huit écluses et traversé l’Orb sur Le Pont-Canal (Fig. 9). En cette année 1934, Raoul Guiraud a posé son chevalet au Bosquet, un matin par temps gris. Dans un effet de profondeur, il accentue la taille du pont surmonté ici par les cheminées de l’usine à gaz.

Bord de canal avec péniche, 1920-40 (Collection particulière)
Fig. 8 Bord de canal avec péniche, 1920-40 (Collection particulière)
Le Pont-Canal, 1934 (Collection particulière)
Fig. 9 Le Pont-Canal, 1934 (Collection particulière)

Après les vues fortement structurées de Béziers, le peintre s’est attaché à dresser un panorama des villages héraultais. La majeure partie de son œuvre comprend des vues d’architectures, monuments historiques, ponts, places, églises et rues de villages… Nombre de tableaux présentent des vues générales de Saint-Pons. Sur sa toile Retour de Marché, des femmes en groupe discutent et marchent devant l’église. Les rehauts d’ombre diagonaux sur les arbres et le haut du clocher accentuent la verticalité de la toile. Traitée dans des couleurs douces et hivernales, significatives de la fin de sa carrière, L’Eglise de Magalas (Fig. 10), témoigne de l’animation villageoise encore réelle dans les années 1950.

À l’instar de Georges-Daniel de Monfreid (1856-1929,) originaire de l’Aude, ami de Gustave Fayet, qui fut également mécène et biographe de Gauguin alors exilé dans le Pacifique 72, Raoul Guiraud choisit de peindre des paysages de campagne à la végétation épineuse. Comme lui, il saisit les contrastes de la lumière crue méditerranéenne, en utilisant son talent de coloriste pour décrire les rochers gris et la terre rouge brûlée du sud. Avesnes les bains (Fig. 11), caractérise bien cette peinture, où il joue d’une palette restreinte pour créer une harmonie et produire un effet de scintillement qui anime la surface picturale. L’utilisation luministe des ombres portées accuse le soleil vif qui imprime des taches irrégulières sur le sol, ou encore les feuilles de l’arbre se projetant en taches sombres sur l’ocre rose des murs de la maison de campagne.

Familier des alentours de Béziers, il poursuit inlassablement sa recherche de lieux pittoresques. Dans ces paysages du sud, peints en plein air comme chez les impressionnistes, il concentre son attention sur le rendu de la lumière et les conditions atmosphériques (neige, vent, pluie). Ces toiles n’en sont pas moins colorées (Les Campagnes de Vendres ou Les Carrières de Bessan). Il insiste également sur le rendu des matières, dans Les Environs de Lodève, paysages plus particulièrement arborés, mais aussi Le Matin à Vieussan…

L'Eglise de Magalas, 1952 (Collection particulière)
Fig. 10 L'Eglise de Magalas, 1952
(Collection particulière)
Avesnes les bains, 1946 (Collection particulière)
Fig. 11 Avesnes les bains, 1946 (Collection particulière)

Parmi les œuvres inspirées par l’environnement immédiat et peintes « d’après nature », il faut inclure de nombreux paysages, sans titre, non datés, parfois non signés ou monogrammés L.R.G, de petit et moyen formats, peints à l’huile dans une touche lourde et enlevée et réalisés avec des pinceaux épais et des couteaux. Certains sont très représentatifs de notre région, avec ses couleurs, ses rochers et son abondante végétation. Ce sont des sites et des lieux particuliers comme Un hameau, Une petite église…, tableaux réalisés en l’espace de quelques heures. Avec sa boite remplie de feuilles, toiles de petit format, couleurs, pinceaux, crayons….Guiraud s’installe et s’imprègne de ce qu’il voit, entend, ressent. Ses œuvres sont peintes pour la plupart sur isorel, support idéal qui ne craint ni la chaleur, ni l’humidité et reste plat, léger, maniable 73. Il s’agit de peintures entièrement réalisées en extérieur, sans aucunes retouches en atelier. Comme disait Monet « tout sujet en plein air doit être exécuté et achevé sur place, ceci exigeait du peintre un complet changement d’habitudes et le renoncement à son confbrt […] la nature, le motif changent à chaque instant, avec le passage d’un nuage devant le soleil ou le souffle du vent qui ride la surface de l’eau » 74.

Les ponts occupent une place fondamentale dans son œuvre : ponts de l’Hérault mais aussi ceux de l’Ariège (Le Pont de Varilhes), du Tarn (Le Pont de Brassac), de l’Aveyron en particulier, (Le Pont d’Espalion), de la région niçoise (Le Pont de Sospel) et des environs de Paris. Il reprend toujours, pour cette importante série, les mêmes schémas de composition (l’eau, le pont et le ciel) et les mêmes coloris. Il nous offre une véritable « histoire atmosphérique » de ces lieux qu’il aime et prête une attention particulière à leurs architectures, comme le prouvent ses nombreux croquis. Parmi les ponts héraultais, Raoul Guiraud peint très largement ceux des petits villages de l’arrière-pays, dans leur vétusté et leur délabrement (Le Pont d’Avesnes), comme le faisait Henri Martin, très sensible aux couleurs et aux vibrations de la terre languedocienne, qui a laissé de nombreuses évocations de ponts à demi ruinés, de vieux clochers et de villages perdus. Les chemins des deux artistes se sont croisés plusieurs fois, à Toulouse, à Paris et à Lodève où Henri Martin s’installe provisoirement en 1929 et publie vingt bois gravés dans un album intitulé « Lodève, ses vieux ponts, ses vieux coins, sa cathédrale » 75. Ses parents habitant Lodève, Raoul Guiraud exécute plusieurs vues du Pont pointu de Montifort, avec son arche unique de tracé brisé. Entre 1920 et 1940, Le Pont du diable à Olargues (Fig. 12) devient un de ses sujets favoris. Vraisemblablement construit au tout début du XIIIème siècle sur un aplomb rocheux au-dessus de la rivière, il s’intègre parfaitement dans le paysage de la vallée du Jaur. Raoul Guiraud insiste sur sa monumentalité, la grandeur de l’arche centrale et le reflet de son ombre dans l’eau qui amplifie l’effet de hauteur. La touche lourde et les couleurs terreuses accentuent le côté rustique et pittoresque du lieu. C’est sans doute l’alliance entre un site naturel exceptionnel et l’ingéniosité de l’homme pour l’aménager qui a séduit Guiraud à Olargues. Dans les mêmes tonalités, on retrouve Le Pont de Vieussan, appelé aussi le « pont de Ceps », situé dans un petit village pittoresque du Parc du Haut-Languedoc, au sein d’un paysage très arboré.

Le Pont du diable à Olargues, 1920-40 (Collection particulière)
Fig. 12 Le Pont du diable à Olargues, 1920-40 (Collection particulière)

...et mer

La Côte méditerranéenne, 1931 (Collection particulière)
Fig. 13 La Côte méditerranéenne, 1931 (Collection particulière)

Il faut accorder une part importante au goût de Raoul Guiraud pour l’eau et à la présence toute proche de la mer. Né en Languedoc, il est très attiré par le soleil et les belles couleurs de la Méditerranée. Parallèlement à l’essor du paysage de plein air au cours du XIXème siècle, les marines connaissent aussi un grand développement. La côte méditerranéenne (Roussillon, Languedoc, Côte d’Azur et Corse), déjà célébrée par de nombreux peintres comme Courbet, Van Gogh, Matisse et Cézanne, devient bien entendu un de ses thèmes de prédilections. Il est fasciné par l’espace marin et sa solitude à peine troublée par de légers voiliers de plaisance et l’animation des bateaux de pêche. Il peint la côte méditerranéenne par temps gris ou très ensoleillé. Mais il s’intéresse aussi à la Vendée (l’Ile d’Yeu), le Nord (Bergues) et la Normandie (Honfleur, le Havre). Ces paysages maritimes sont d’une naturelle simplicité et l’on remarque que sa peinture s’éclaircit au fil des ans. Peignant beaucoup au couteau, il capte toutes les nuances de la lumière sur l’eau et privilégie l’intensité des ciels. Raoul Guiraud s’enthousiasme pour les bords de mer, dans un crescendo qui voit d’abord grandir l’importance accordée à la surface de l’eau, puis à celle du ciel comme dans La Côte méditerranéenne (Fig. 13). Nombre de ses œuvres sont peintes sous le coup de l’inspiration, très vite, presque sans recherches préalables. À l’exception de ses toiles sur le thème des haleurs, où la mer est agitée, elles reflètent le ciel d’azur et la mer bleue du Languedoc, sans aucune comparaison cependant avec les vastes marines d’Eugène Boudin ou d’Edouard Manet.

Dans l’Hérault, Raoul Guiraud s’est attaché au lieu-dit « les Onglous », près de Marseillan, petit village languedocien pittoresque, entre Sète et Agde, où le Canal du Midi rejoint l’étang de Thau. Les œuvres exécutées sur ce site, sans doute très nombreuses, n’ont pas toutes été répertoriées. Dans ce paysage très caractéristique du Midi, il saisit à plusieurs reprises l’étang aux hautes herbes dominé par le Mont Saint-Clair et Sète, avec un ciel bleu et tourmenté. Le tableau le plus remarqué, Les Marécages des Onglons (Fig. 14) a été exposé en 1927 et 1932 au Salon des Artistes Français 76. Ce que l’on retient dans cette composition, c’est l’extraordinaire mélange qu’opère Guiraud entre le choix de ses couleurs et la force de sa peinture. C’est un jeu de lignes et de plans qui anime la composition, vide de présence humaine. Il se rend aussi régulièrement aux Onglons pour chasser avec ses amis et faire, sur le vif, des croquis de canards. L’une des ses dernières toiles, datée de 1957, s’intitule La Chasse aux canards. Mais ici la facture est différente : le temps est beau, les couleurs sont plus douces et le ciel parsemé de quelques nuages. Les Onglons, c’est aussi un lieu de prédilection pour les pêcheurs. Raoul Guiraud connaît d’ailleurs un vieux pêcheur, sétois ou marseillanais, dont il a peint plusieurs portraits, mais qu’il observe aussi en train de pêcher dans une barque sur l’étang de Thau.

Les Marécages des Onglons, 1927 (Collection particulière)
Fig. 14 Les Marécages des Onglons, 1927 (Collection particulière)
Paysage méditerranéen, 1930-40 (Collection particulière)
Fig. 15 Paysage méditerranéen, 1930-40 (Collection particulière)

Une grande partie de ses paysages méditerranéens incluent des pins, qui gardent un côté pittoresque et rural. Très représentatif, le Paysage avec pins maritimes est probablement réalisé à la Tamarissière, à Agde, un bois de pins et de tamaris planté à la fin du XVIIIème siècle pour lutter contre l’ensablement du fleuve et de son embouchure. Cette pinède maritime lui donne l’occasion de se promener et de peindre d’exceptionnels paysages. C’est un morceau de nature plus proche de la peinture pure, dans la mesure où il concentre la couleur et la lumière. Le mouvement sinueux des nuages correspond à une interprétation libre du paysage qu’il avait sous les yeux. Dans l’ensoleillement d’une belle journée, les pins courbés sont interminables et suivent la diagonale de la falaise rocheuse surplombant la mer. Dans la même veine, il peint Les Rapides de l’Orb à Réals, sur la rive gauche de l’Orb, au somptueux décor naturel de pins accrochés aux rochers de Garrigues, ainsi qu’un très beau Paysage méditerranéen (Fig. 15), œuvre colorée mais discrète qui surprend par son vide, où il reste fidèle à l’organisation de l’espace par une diagonale qui ouvre la perspective vers l’arrière-plan. Il assimile les variantes d’un même site sous la lumière changeante du Midi, en ne laissant au ciel qu’une place très réduite. Ces toiles font référence aux Roches blanches, l’une des œuvres les plus célèbres de Raoul Guiraud, réalisée à Cassis, sur la Côte d’Azur.

Très attaché aux petits ports de pêches, Raoul Guiraud a souvent représenté celui de Marseillan, d’un charme incontestable (Fig. 16). Cette commune portuaire, à l’embouchure du Grau de Pisse-Saumes, occupe une situation exceptionnelle au bord de la Méditerranée, sur le bassin de Thau et le long du Canal du Midi. Un site typiquement méridional, entouré de maisons blanches couvertes de tuiles, avec des barques de pêche traditionnelles, de petits voiliers amarrés, ou encore des hommes s’apprêtant à charger de nombreux barils de vin. Marseillan lui offre des sujets de marines et l’occasion de recherches chromatiques autour du bleu et du rose.

Peintre des eaux paisibles, comme de nombreux impressionnistes, et très attiré par le soleil et les couleurs de la Méditerranée, Guiraud aime aussi beaucoup la plage. Il se rend très souvent à Valras, petite station balnéaire proche de Béziers, avec sa femme, sa fille et ses amis Jules et Marthe Cadenat. Il participe d’ailleurs, en juin 1928, à une exposition de marines organisée au casino de Valras 77 par la Société des beaux-arts de Béziers. Enfin, vers la fin de sa carrière, dans les années 1950, Raoul Guiraud peint un grand nombre de toiles à Collioure, dans les Pyrénées-Orientales. Cet endroit lui rappelle sans doute son enfance à Cerbère, mais il suit surtout le mouvement de peintres tels qu’Henri Matisse, André Derain, Juan Gris, Pablo Picasso… et aussi Henri Martin, qui y viennent depuis 1905.

Le Port de Marseillan, 1939 (Chambre de Commerce et d'Industrie, Béziers)
Fig. 16 Le Port de Marseillan, 1939 (Chambre de Commerce et d'Industrie, Béziers)

Le monde rural et les paysans de l'Hérault

Région agricole, l’Hérault se prête au goût de Raoul Guiraud pour le pittoresque. En ce début du XXème siècle, la production et les récoltes sont abondantes. Très sensible aux thèmes du travail et en particulier celui du monde rural, Guiraud, adepte du naturalisme, a donc entrepris un cycle de tableaux paysans. Ses œuvres sont très représentatives de la vie sociale, ouvrière et paysanne, de son époque et il donne une vision de la France traditionnelle et rurale qu’il côtoie depuis son enfance (son père était un viticulteur dans l’âme, sa mère, couturière et son grand père jardinier) 78. Le terroir est, pour Raoul Guiraud, une source d’inspiration vivifiante. Des petites toiles aux grands panneaux, il travaille sur le thème des vendangeurs, des faucheurs, des laboureurs.., en poursuivant toujours sa recherche de la lumière. Par ailleurs, si on lui doit des portraits de personnalités héraultaises et parisiennes, il montre aussi des travailleurs anonymes aux gestes répétitifs, saisis en pleine action. Son respect pour la nature lui fait toujours accorder la prééminence au paysage, mais il n’occulte pas dans ses œuvres la présence de l’homme ou de l’animal. Les saisons laissent aussi leurs empreintes, Guiraud en évite les répétitions grâce aux infimes variations du temps.

L'Art de la vigne

Depuis la fin du XIXème siècle, le vignoble languedocien ne cesse de s’agrandir, donnant au Midi les allures d’une « mer de vigne ». La prospérité viticole est telle que Raoul Guiraud ne peut que lui rendre hommage. Il semble bien que, dés son arrivée dans l’Hérault en 1921, il débute ses propres recherches sur le travail de la vigne. Pendant plus de trente ans, il observe attentivement les vignes et les gestes des viticulteurs. Ces toiles vont restituer avec la plus grande exactitude la très riche viticulture de la région. Des tableaux de chevalets aux grandes toiles en passant par le dessin et la lithographie, Raoul Guiraud reprend toujours les mêmes schémas. Il se dirige vers un « réalisme paysan » dont il sera d’ailleurs l’un des plus enthousiastes représentants de ce siècle. Toutefois, son travail sur l’univers viticole évolue au fil des années, dans le style comme dans la technique. Au départ, il s’inspire des réalisations d’Henri Bonis, son premier professeur, qui l’a initié aux sujets régionaux et naturalistes comme La Vendange (Toulouse, salle du Conseil Municipal), pour finir dans un pointillisme à la Henri Martin, artiste très connu pour ses scènes de la vie campagnarde et ses grandes décorations à sujets viticoles pour la préfecture du Lot, La Culture de la vigne et Le Labour et de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Béziers, Les Vendanges.

La vigne et ses attributs seront présents tout au long de sa carrière, des portraits aux toiles allégoriques, avec l’utilisation récurrente de la figure de Bacchus, de feuilles de vignes ou de grappes de raisins. Inondé par la lumière méditerranéenne, son travail trouve son apogée dés 1922, avec la décoration de la cage d’escalier du château de Roquelune, près de Pézenas, avec un ensemble de cinq toiles, vivantes, colorées, lumineuses, sur Le Cycle de la vigne en Languedoc. Une grande composition de plein air illustre le temps des Vendanges (Fig. 3). Des hommes et femmes, armés de sécateurs, avancent en rangs, coupent les grappes mûres et garnissent les seaux qui, une fois remplis, sont enlevés par les porteurs. L’un d’eux verse des raisins dans un bac, sous le regard attentif d’un enfant. À sa droite, une femme tient un bébé dans ses bras. Elle vient d’apporter aux vendangeurs le repas de midi. La Taille, Le Sulfatage-Soufrage, ou La Réception de la vendange et Le Pressurage illustrent aussi la culture et les soins apportés à la vigne au fil des saisons. Actuellement, ces œuvres ne sont plus en place dans le château : elles ont été décrochées en 2001 puis découpées en 7 éléments distincts et vendues en 2006, à la salle Drouot-Richelieu.

La qualité de cette décoration allait valoir à Raoul Guiraud de nombreuses commandes de la part de nombreux propriétaires viticulteurs héraultais. Il reprend alors les divers aspects du cycle de la vigne. On retrouve, dans une facture solide, les mêmes couleurs vives et la même convivialité entre viticulteurs et vendangeurs. Son réalisme est presque un hyperréalisme car il détaille avec soin la moindre feuille de vigne et le plus petit grain de raisin. Le paysage n’est plus aussi présent et le personnage du premier plan occupe l’essentiel de la toile. Dans La Bouillie bordelaise (Fig. 17), appelée aussi Le sulfatage, c’est Marius Guiraud, le père de l’artiste, reconnaissable à sa longue barbe blanche, qui est pris pour modèle. Viticulteur lui-même, il possède une petite propriété à Lodève. En ce clair matin d’été, il verse, au milieu de vignes abondantes et colorées, la bouillie dans la sulfateuse Eclair Vermorel. Derrière lui, un autre viticulteur vaporise les ceps d’un nuage bleuté pour lutter contre les maladies cryptogamiques. Marius Guiraud est aussi ce Vendangeur de 1921, portant la « taillole » des paysans, une large et longue ceinture de laine de couleur verte que l’on noue autour de la taille.

De ces premières années de recherches sur la vigne Guiraud à laissé plusieurs études et dessins comme cette Etude pour les vendanges, de 1925, qui représente une vendangeuse, de profil, regardant en direction des vignes. En 1929, il la prend aussi pour modèle, aux côtés de Marius Guiraud dans l’illustration d’un diplôme (Fig. 5) pour la Foire Exposition viticole, agricole, horticole, artistique… de Béziers, organisée en collaboration avec l’Association de Propagande pour le Vin. Raoul Guiraud étend donc ce thème à l’illustration avec Buvons, amis, le vin des mes cent ans (1926) destinée au journal L’Etendard Piscénois, et pour laquelle il prend pour modèle un vieil homme, Aubert Aricie, viticulteur et voisin de Raoul Guiraud, au n° 2 de la rue Rabelais à Pézenas 79. Il se sert aussi de ce proverbe dans une autre illustration, rendant hommage au centenaire de la naissance de Pasteur, le père de l’œnologie moderne.

La Bouillie bordelaise, 1920-24 (Musée de Vulliod-Saint-Germain, Pézenas)
Fig. 17 La Bouillie bordelaise, 1920-24
(Musée de Vulliod-Saint-Germain, Pézenas)

Au cours des années 1930, le mode de représentation, le format, les tonalités changent. À partir de ce moment, ses paysages des vignes et de la lagune du Languedoc traduisent une atmosphère différente. L’Enlèvement des sarments, après-midi de janvier (Fig. 4) devient un sujet récurrent, très connu du public grâce aux expositions. Raoul Guiraud se déplace dans la propriété de chacun de ses commanditaires. Ici, à Saint-Adrien (Servian), des femmes groupées se penchent en avant pour chercher les fines branches provenant de la taille, qu’elles ajoutent à leurs fagots. La touche est très pointilliste, ce qui traduit les sautes de vent par la multiplication de simples traits en diagonale. Cette évolution est également perceptible dans les scènes de vendanges, où s’activent des groupes de vendangeurs et de vendangeuses penchés vers les ceps enfouis dans le feuillage rutilant ou ahanent sous le poids des paniers débordants de grappes comme sur Les Vendanges à Béziers (Chambre de Commerce et d’industrie). Le peintre insiste sur l’abondance des vignes au pied de Béziers et la luminosité du paysage languedocien. En ce sens, il y a rupture au niveau du style et de la technique, la facture se rapprochant du pointillisme d’Henri Martin, dans une touche de plus en plus fine, légère et scintillante. Ce changement de style est plus particulièrement perceptible dans Les Vendanges à Puissalicon (Fig. 2) petit village près de Béziers.

Un « réalisme social » agricole

Pour Raoul Guiraud, le travail social est une source d’inspiration et un objet d’étude particulièrement riche. Des ouvriers sur les bords de Seine (1920-1940) aux ramasseuses d’oranges Marocaines (1950-51) en passant par La Récolte des pommes dans les Pyrénées-Orientales (1945), il s’attache à représenter dans sa peinture les petits métiers du monde paysan. Dans l’Hérault, l’occupation agricole est très importante, avec le terroir viticole, l’élevage du bétail et la culture des céréales. Raoul Guiraud, reste fidèle à la terre, son premier horizon, il restitue dans sa peinture la place considérable qu’elle occupe dans la région en dépassant très largement la simple représentation du travail. Au-delà, du paysage, il est attentif aux gestes quotidiens des paysans, auxquels il attribue une solennité presque sacrée. Avec ses travailleurs, il s’inscrit dans la lignée des réalistes sociaux, tout comme son maître Léon Augustin Lhermitte, et plus particulièrement Jean-François Millet. Par sa peinture de la vie des champs et de la terre, Guiraud se fait le chantre de la paysannerie. Il révèle, en un récit vivant et riche en couleurs, les racines les plus profondes du pays héraultais. Ses toiles d’inspiration paysanne, remarquées lors de ses expositions languedociennes et parisiennes, sont très appréciées du public.

Les œuvres de Guiraud sont en lien direct avec la réalité et la nature. En ce sens, il célèbre la vie rurale et donne une représentation forte de la classe paysanne héraultaise. Il déclare admirer ceux qui restent toute leur vie liés à cette terre qu’ils travaillent chaque jour. Les paysans de Raoul Guiraud sont vrais et n’ont rien de superficiel. À cet égard, dans Les Faucheurs (Fig. 18), thème de prédilection de la peinture naturaliste qu’il emprunte à Henri-Martin (Les Faucheurs, au Capitole de Toulouse), il s’attache, dans un réalisme traditionnel, à représenter des hommes fauchant les champs de blé. On observe l’équilibre entre les personnages et le fond du paysage soulignant le naturel et l’authentique.

Les Faucheurs, 1930-40 (Collection particulière)
Fig. 18 Les Faucheurs, 1930-40 (Collection particulière)
Le Labour, 1930-50 (Collection particulière)
Fig. 19 Le Labour, 1930-50 (Collection particulière)

Les moissons rappellent le souvenir du passé et d’une tradition qui se transmet de génération en génération. Toujours en s’inspirant de l’école de Barbizon, Raoul Guiraud peint Les Glaneuses (Société des Arts du Languedoc, Narbonne 1928) 80, sujet propre à Millet, comme Le Labour (Fig. 19), thème récurrent chez de nombreux artistes depuis le milieu du XVIIIème siècle (Constant Troyon, Rosa Bonheur). Il concentre son attention sur la charrue et les bœufs qui avancent difficilement. La terre occupe plus de la moitié de la toile, dans une facture lourde qui accentue la pesanteur de la scène. Sans aucune exception, il peint des portraits d’hommes et femmes des campagnes, notamment avec La Lavandière, un sujet traité par son maître Jean-Paul Laurens (Triptyque avec des lavandières). Ce thème est intimement lié à la vie locale de cette époque ; dans les villages de l’Hérault, ou les petites villes, comme Pézenas ou Lodève, les lavandières lavent encore le linge à la main, par tous les temps. Raoul Guiraud se montre très sensible aux petits métiers des femmes, comme les couturières, à l’image de sa mère, Célestine Guiraud, représentée dans plusieurs scènes de la vie domestique, en train de raccommoder un tissu. C’est un sujet qu’aborde aussi Léon-Augustin Lhermitte (Les Couturières81 ainsi que Mary Cassat.

Au cours de ses sorties dans l’arrière-pays de l’Hérault, Raoul Guiraud exécute de nombreux croquis d’animaux, chèvres, bœufs, chevaux, et leur attribue une place importante dans ses toiles. Ils sont parfaitement insérés dans leur contexte naturel comme dans Les Ramasseurs de foins et Les Vendanges à Béziers, où des chevaux blancs, aux harnais en cuir marron, tirent une calèche. À partir de 1940, Raoul Guiraud suit régulièrement, dans les montagnes de l’Hérault, un ami berger, Monsieur Mora 82 et son troupeau de chèvres. Dans ses archives, le peintre conserve de multiples études et photographies de chèvres, un de ses animaux fétiches avec les chiens. En hommage à son père, avec lequel il chassait très souvent à Lodève, ses compositions reprennent pour la plupart le portrait de Marius Guiraud, debout avec son fusil au sommet d’un rocher, au pied d’un pin, accompagné de ses chèvres. Enfin, la Vue du village de Mourèze (Fig. 20), œuvre de la pleine maturité de l’artiste, montre une jeune bergère au pied du petit village médiéval. À cette époque, les troupeaux y sont nombreux, car ils permettent de réduire l’envahissement de la végétation. Ce lieu exceptionnel et atypique permet de rassembler en une toile plusieurs facettes de la peinture campagnarde de Raoul Guiraud sous le beau soleil du midi, dans une pâte riche qui privilégie la lumière.

Vue du village de Mourèze, 1930-50 (Collection particulière)
Fig. 20 Vue du village de Mourèze, 1930-50 (Collection particulière)

Dans les marchés aux bestiaux, Raoul Guiraud représente avec soin bœufs et maquignons, dans des tons vigoureux et avec un louable souci de vérité. Il apprécie ces rencontres, à Riols, par exemple (Les Maquignons à Riols), et observe aussi régulièrement le marché sur la place de Saint-Pons (Fig. 6), petite ville des hauts-cantons de l’Hérault. Avec un accent rustique, il peint cette place très vivante, typique de la région, entourée de petites maisons et de grands platanes. C’est aussi à l’extérieur de la ville, en pleine campagne, que le bétail est parqué (Le Foiral de Saint-Pons), peint dans une facture pour le moins très pointilliste, caractéristique des années 1940-1950. Pour les gens du terroir, ces rassemblements sont aussi l’occasion d’écouler leurs productions indispensables, comme dans Le Marché de la Madeleine à Béziers (Fig. 1), à deux pas de la rue de la République. L’artiste s’y rend quotidiennement et sa première œuvre sur ce thème remonte à 1919. Sur cette place, s’élève l’église romane Sainte-Madeleine, bordée de platanes et entourée de belles demeures des XVIIIème et XIXème siècles. Raoul Guiraud montre l’effervescence du marché, où fourmillent des groupes de ménagères, paniers à la main, entourés de fruits et légumes en abondances.

L’œuvre de ce maître prolifique, de second rang au niveau national, trouve dorénavant sa place dans le contexte régional du Languedoc. Elle révèle un peintre de qualité, qui a tenu compte des enseignements académiques de l’Ecole des beaux-arts et du naturalisme des peintres régionaux. Ses multiples commandes, de la peinture de chevalet à la réalisation de grandes toiles décoratives destinées à des châteaux et demeures privées, témoignent de sa brillante carrière publique et privée. Peintre décorateur renommé dans les théâtres nationaux et provinciaux, la ville de Béziers lui confie la commande la plus importante de sa carrière avec la salle du Conseil municipal. Il devient l’une des personnalités majeures du milieu artistique biterrois, et occupe dans la ville une place privilégiée. Artiste complet, Guiraud, s’est essayé à plusieurs techniques et a abordé de nombreux thèmes, inspirés de sa vie et de ses divers lieux de séjour.

Auteur d’une œuvre essentiellement régionale, Raoul Guiraud rend hommage au pays héraultais et laisse derrière lui de multiples travaux, mais aussi de nombreuses œuvres encore inconnues à ce jour. Son goût l’a porté vers le monde dont il était issu, l’univers paysan avec comme thématique récurrente le travail agricole et les paysages régionaux. Tandis que ces paysages du midi expriment un fort sentiment de la nature, allié à une grande habileté dans les associations chromatiques, les vignes de l’Hérault, lui ont inspiré des scènes qui le font aujourd’hui reconnaître comme l’un des plus importants peintres de la viticulture de ce siècle. Par ses œuvres d’inspiration rurale et ses paysages, il a su avec fierté célébrer cet opulent pays, profondément humanisé car façonné par l’homme et le temps. Loin d’une image d’artiste officiel, il s’est voulu en particulier le chantre des méridionaux dans la représentation de ces hommes et femmes du Languedoc qui travaillent chaque jour pour leur terre et vivent en communion avec la nature. Raoul Guiraud est ce que l’on appelle « un peintre régional » et, à son époque, la première moitié du XXème siècle, l’un des plus célèbres artistes de l’Hérault.

Notes

   1.Marjory CLEMENT, Nicole RICHE, Cat. exp. Raoul Guiraud, Un luministe biterrois (1888-1976), Milan, Sylviana Editoriale Spa, 2008.

   2.Archives Municipales de Cerbère, n°91, Acte de naissance de Raoul Guiraud-Cerbère, 16 novembre 1888.

   3.Archives Départementales de l’Hérault, 6M594, Dénombrement de la population-Paulhan, 1er avril 1896.

   4.Entretien avec Simone Duhoux (Fille de Raoul Guiraud), Nice, le 13 mars 2006.

   5.Archives Municipales de Toulouse, 1R38, Registre d’inscription des élèves 1906-1912 – Ecole des beaux-arts de Toulouse, n° 806, Raoul Guiraud, Toulouse, 1907.

   6.Jean LEPAGE, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, graveurs, dessinateurs et architectes du Languedoc-Roussillon (1800-1950), Sète, Editions Singulières, 2008, pp. 419-420.

   7.Archives Municipales de Toulouse, 1R68, École des beaux-arts de Toulouse – Palmarès – Années 1903-1923, 1909, Toulouse, M. Cléder.

   8.Ibid, 1908-1912.

   9.Archives Municipales de Toulouse, 1R93, Coupures de presse sur l’école des beaux-arts, 1908-1912.

 10.Archives Municipales de Toulouse, 1R38, Registre d’inscription des élèves 1906-1912 – Ecole des beaux-arts de Toulouse, n° 264, Edmond Corneille, Toulouse, 1904.

 11.Archives Municipales de Toulouse, 1R68, Ecole des beaux-arts de Toulouse – Palmarès – Années 1903-1923, 1911, Toulouse, M. Cléder.

 12.Fond ancien de l’Ecole des beaux-arts de Toulouse, Dossier 161, Adolphe Gauret.

 13.Archives Municipales de Toulouse, 1R68, Ecole des beaux-arts de Toulouse – Palmarès – Années 1903-1923, 1912, Toulouse, M. Cléder.

 14.Inscription des coordonnées parisiennes de Raoul Guiraud (Collection particulière) : Jules PILLET, Encyclopédie du dessin et de la construction, Traité de perspective linéaire précédé du tracé des ombres usuelles et du rendu dans le dessin d’architecture, Vrin, Paris, p. 1.

 15.Catherine FERHER, Cat. exp. The Julian Academy-Paris 1868-1939, New York, Shepherd Gallery, 1989, non numeroté.

 16.Marjory CLEMENT (Sous la direction d’Odile Foucaud), Raoul Guiraud (1888-1976), Mémoire de Master 2, Montpellier III, Université Paul-Valéry, Document dactylographié, 2007, pp. 169-171.

 17.Benezit (sous la direction de Jacques BUSSE), Dictionnaire des peintres sculpteurs dessinateurs et graveurs, n° 6 Genck Herwarth, Paris, Gründ, 1999, p. 587.

 18.Entretien avec Simone Duhoux, Nice, le 13 mars 2006.

 19.Marjory CLEMENT (Sous la direction d’Odile Foucaud), Raoul Guiraud (1888-1976), Mémoire de Master 1, Montpellier III, Université Paul-Valéry, Document dactylographié, 2006, pp. 19-25.

 20.http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/RaoulGuiraud.

 21.Entretien avec l’adjudant-chef Palmieri, Service Historique de la défense de Vincennes, Bureau Symbolique et traditions du département de l’armée de l’air, le 10/07/2007.

 22.CLEMENT 2007, cit., pp. l79-l80.

 23.Archives Municipales de Marmande, n°48, Contrat de Mariage, Lucienne Tollet et Raoul Guiraud, 24 octobre 1918.

 24.Entretien avec Simone Duhoux, Nice, le 13 mars 2006

 25.Archives départementales de l’Hérault, 6M 443, Dénombrement de la population – Lodève, 01/04/1926.

 26.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 144ème exposition officielle, Grand-palais, Paris, 1931, p. 56 (n°1099).

 27.« Les décors », dans La Vie Biterroise, Béziers, n°1340, 27/07/1935, p. 2.

 28.Ibid.

 29.Entretien avec Simone, Duhoux, Nice, le 14 mars 2006.

 30.Archives Municipales de Marmande, n° 50, Acte de naissance de Simone Guiraud – Marmande, 22/04/1920.

 31.Archives Départementales de Toulouse, 45021 W 4, Ministère de la guerre – Registre matricule, n° 1524, Classe 1908.

 32.« Couverture du Livre-Guide de l’exposition de Béziers », Dans Le Biterrois illustré, Béziers, n° 29, 02/11/1929, p. 1.

 33.Duplessis de POUZILHAC, « L’Hérault et ses artistes », Dans Septimanie, Narbonne, n° 123-124-125, 1935, non numéroté.

 34.CLEMENT 2007, cit, pp. 94-95.

 35.Société Artistique de L’Hérault, Salon de mai 1922 – Catalogue de la XXVIème exposition, Montpellier, mai 1922, p. 10 (n°140 à 142).

 36.« Exposition des beaux-arts », Dans l’Eclair-Béziers, n° 17005, 30/05/1924, pp. 4-5.

 37.Jean, SOULAIROL, « Le Salon de Béziers – XXVIIIème Exposition de la société Artistique de l’Hérault », dans La Vie Montpelliéraine, Montpellier, n° 71, 07/06/1924, p. 2.

 38.Archives de la Société des Artistes Français, n°5916, Fiche Individuelle de Raoul Guiraud, Grand Palais – Paris, 1927.

 39.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 137ème exposition officielle, Grand-palais, Paris, 1924, p. 47 (n° 935-936).

 40.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 147ème exposition officielle, Grand-palais, Paris, 1934, p. 17 (n° 1199).

 41.Archives de la Société des Artistes Français, Lettre de M. Guerra (Archiviste du Salon des Artistes Français), Grand Palais – Paris, 26/06/2007.

 42.Philippe MACOMBES, « Officiers de l’instruction publique » – 31/08/1935, dans Le Journal officiel de la république Française – Lois et décrets, n° 205, 01/09/1935, p. 9668.

 43.Gaston VINAS, « Note d’Art, Exposition Raoul Guiraud », dans La Vie Biterroise, Béziers, n° 903, 13/03/1927, p. 5.

 44.Gaston VINAS « Peinture », Dans L’Etendard Piscénois, Pézenas, n° 148, 28/04/1928, pp. l-.

 45. [Appel manquant] SABOYE, De-ci, de-là, dans La Vie Biterroise, Béziers, n° 1214, 04/03/1933, p. 3.

 46.« Les décors », dans La Vie Biterroise, Béziers, n°1340, 27/07/1935, p. 2.

 47.Archives Municipales de Béziers, 1D 120 à 1D 122, Délibération C. municipal – n° 7, 11030, n°13 Bâtiments communaux, 1937, 1938, 1939, p. 215, p. l43, p. 122.

 48.Archives Municipales de Béziers, 1D 123, Délibération C. municipal – n° 9 Bâtiments communaux, 1940, p. 43-45.

 49.Archives Municipales de Béziers, 1D 119, Délibération C. municipal – n°3 Bâtiments communaux, 1937, p. 183.

 50.Entretien avec Simone Duhoux, Nice, le 03 juillet 2007.

 51.Entretien avec Jean Poyo (Ami de Raoul Guiraud), Béziers, le 27 avril 2006.

 52.Inscription des coordonnées parisiennes de Jean Rosset, propriétaire du restaurant L’Australie (Collection particulière) : Etude pour Les Pêcheurs à la traîne par Raoul Guiraud.

 53.Archives Municipales de Béziers, n° 000127, Acte de Mariage de Simone Guiraud et Gabriel Duhoux, 04/03/1946.

 54.Entretien avec Simone Duhoux, Nice, le 14 mars 2006.

 55.Société des beaux-arts de Béziers, Catalogue de l’exposition de Peinture et Sculpture, Chambre de Commerce et d’Industrie, Béziers, 1956, p. 5 (n°83).

 56.Archives Municipales de Béziers, 1D 134, Délibération du conseil municipal – n° 53 Beaux-arts – n° 8 Beaux-arts, 1951, 27/04/1951 au 22/01/1952, p. 98, p. 220.

 57.« Au musée », dans La Vie Biterroise, Béziers, n° 995, 15/12/1928, p. 3.

 58.Rubrique Echos, « M. Raoul Guiraud est décédé », dans Le M. L, Béziers, n°11.161, 15/02/1976, p. 6.*

 59.Raoul GUIRAUD, Inventaire et Catalogue manuscrit du Musée des Beaux-arts de Béziers (Collection particulière).

 60.« Le Salon d’Automne groupera des œuvres des meilleurs artistes régionaux », Dans Midi Libre, édition de Béziers, 8 décembre 1955, p. 6 Société des Beaux-arts de Béziers, Catalogue de l’exposition de Peinture et Sculpture, Chambre de Commerce et d’Industrie, Béziers, 1956, p. 5 (n°83), 1958, p. 3 (n°49,50) ; René CEBE, « Au foyer du théâtre – Quand l’art Taurin rejoint l’art tout court », Dans Midi Libre, édition de Béziers, n°4742, 11/06/1958, p. 8.

 61.Société des Artistes Français, Le SALON – 145ème exposition officielle, Paris, Grand-Palais, 1932, p. 60 (n° 1184).

 62.Entretien avec Simone Duhoux, Nice, le 14 mars 2006.

 63.Ibid.

 64.Entretien avec Julienne Castellarnau (Ancienne directrice de la maison de retraite municipale de Béziers), le 5 février 2006.

 65.Archives Municipales de Béziers, n° 137, Acte de décès de Raoul Guiraud – Béziers, 14/03/1946.

 66.Rubrique Echos, « M. Raoul Guiraud est décédé », dans Midi Libre, édition de Béziers, 15 février 1976, p. 6.

 67.Rubrique Deuils, « Deuil de Raoul Guiraud », dans Midi Libre, édition de Béziers, 15 février 1976, p. 7.

 68.Nicole RICHE, Cat. exp. Béziers vu par les peintres, Musée des Beaux-arts de Béziers (Espace Riquet), Béziers, Lapetina, 2001, non numéroté.

 69.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 141ème exposition officielle, Grand-palais, Paris, 1928, p. 49 (n° 971-972).

 70.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 140ème exposition officielle, Grand-palais, Paris, 1927, p. 46 (n° 907-908).

 71.Nicole RICHE, Cat. exp. Louis Paul (1854-1922), Peintre, sculpteur, céramiste, Musée des Beaux-arts de Béziers, Béziers, Imprimerie Nouvelle, 2006, p. 12.

 72.Jean LEPAGE, Aude PESSEY-LUX, Cat. exp. George-Daniel de Monfreid (1856-1929), Le confident de Gauguin, Musée d’art et d’histoire de Narbonne, Paris, Somogy, 2003.

 73.Société des Artistes Français, Le SALON – Catalogue de la 154ème Exposition officielle des Beaux-arts, Palais de Tokyo, Paris, 1941, p. 3 : « Lettre à un sociétaire » par B.M.

 74.Ernest GOMBRISH, Histoire de l’art, Paris, Phaidon, 2001, p. 518.

 75.Nathalie GINESTE, Jean-Louis Asté – Artiste Montpelliérain (1864-1943), Montpellier, Document dactylographié, 2002, p. 14.

 76.Le SALON, 1927, Op. cit. 46 (n°907-908) Le SALON, 1932, Op. cit. p.60 (n°1184-1187).

 77.« L’exposition de marines et la soirée des Beaux-arts à Vabas », Dans L’Eclair-Béziers, Béziers, 7 juin 1928, p. 3.

 78.Association Généalogique du Clermontais, N° 34, Acte de naissance de Marius Gaston Emile Guiraud – Clermont l’Hérault, 19 février 1855.

 79.Archives Départementales de l’Hérault, 6M605, Dénombrement de la population, Pézenas, 1er avril 1926.

 80.Jean LEPAGE, cit. p. 419-420.

 81.David LIOT, Cat. exp. Millet, Rousseau, Daumier… Chefs d’œuvre de la donation d’arts-graphique d’Henry Vasnier, Musée des Beaux-arts de Reims, Paris, Somogy, 2002, p. 98.

 82.Entretien avec Henri Cauquil-Gleizes (Fils d’un ami de Raoul Guiraud), Bassan, le 31 janvier 2006.