L’Hérault dans la vague blanche (1940-1942)
Divine surprise, iconoclasme et vandalisme symbolique :
L’Hérault dans la vague blanche (1940-1942)
* Professeur agrégé d’histoire.
Doctorant en histoire contemporaine – CRISES, UPV Montpellier III
La toponymie urbaine en tant qu’objet d’histoire est un outil particulièrement pertinent pour comprendre les mentalités, les représentations et les comportements passés. L’objet de ce travail est de souligner les répercussions des affrontements politiques et symboliques sur le corpus des dénominations urbaines et des monuments républicains dans le département de l’Hérault sous le régime de Vichy.
Stunning surprise, iconoclasm and symbolic vandalism:
Herault during white tide 1940-1942
Urban toponymy as a subject of history is a tool, particualary relevant in the understanding of the former way of thinking, representations and behaviours. The purpose of this study is to highlight the consequences of the political and symbolic confrontations around the corpus of urban naming and republicans monuments within Hérault département under the Vichy regime.
Suspresa divina, iconoclasme e vandalisme simbolic :
Erau dins l’èrsa blanca (1940-1942)
La toponimia urbana coma objècte d’istòria es un esplech particularament pertinent per comprene las mentalitats, las representacions e los compòrtaments passats. La tòca d’aquela recèrca es de soslinhar las repercussions dels afrontaments politics e simbolics sus lo còrpus de las denominacions urbanas e dels monuments republicans dins lo departament d’Erau jos lo regim de Vichy.
La scène se déroule dans un village du Biterrois en 1940-1941. La préfecture de l’Hérault demande l’enlèvement des plaques de la rue Jean Laurès. Incompréhension et stupéfaction de la municipalité: pourquoi enlever le nom de ce natif du cru, félibre de surcroît ? En réalité la cible était le socialiste Jean Jaurès. La quasi homophonie des deux noms avait failli coûter au poète sa place au sein du panthéon municipal. Au-delà de l’aspect savoureux de cette tragi-comédie onomastique, cette anecdote révèle l’ambiance délétère qui accompagne l’installation du régime de Vichy, qui, sous le couvert d’injonctions à l’union nationale, profite de la « divine surprise » pour régler ses comptes avec la France républicaine et son avatar le plus récent, le Front populaire, à travers la suppression des symboles les plus quotidiens qui rappellent leur mémoire mais qui sont également un enjeu de pouvoir à différentes échelles. 1
Quelques mois à peine après que la France a subi la plus grande défaite militaire de son histoire, Vichy entreprend ainsi de s’occuper d’un sujet majeur : changer le nom des rues et évincer les symboles républicains. Cela apparaît tout de même assez trivial vu la gravité des circonstances et les souffrances endurées par les Français. 2 Pas pour les maîtres de l’heure qui y voient une question politique primordiale à régler rapidement. Dans l’Hérault cette volonté réveille le vieil affrontement entre le Midi rouge et le Midi blanc 3. Or, l’opportunité est belle pour ce dernier de prendre enfin sa revanche après avoir été tenu à l’écart des affaires publiques pendant des décennies. Car, changer les noms de rues, détruire des symboles tels que les statues, supprimer les bustes de Marianne des bâtiments publics, c’est vouloir marquer une rupture, vouloir faire table rase du passé ou tout au moins effacer une partie de celui-ci. Il s’agit de réécrire le roman national dans un sens différent par l’attribution de noms de substitution ou par la création d’un corpus totalement nouveau. 4 C’est aussi créer une nouvelle tradition à la fois festive et discursive. Changer le décor civique c’est proposer incidemment aux citoyens qui le pratiquent quotidiennement un projet politique. Pour autant, un tel changement, qui bouscule les habitudes quotidiennes et s’attaque à l’incarnation d’une culture politique, ne semble pas évident. Le département de l’Hérault, contrôlé jusqu’alors par les gauches radicales et socialistes, fait partie de ce royaume du maréchal 5 dans lequel se met en place cette politique de revanche à la faveur du trauma de la défaite. 6 Néanmoins dans un espace a priori rétif à l’idéologie d’extrême droite, se pose la question de savoir comment s’est déroulée l’offensive de Vichy et quelle a été sa réception. Bien davantage que sur le contenu de la réforme toponymique, c’est sous l’angle des modalités de la revanche qu’il faut envisager l’offensive symbolique pour mettre en évidence ses ressorts. L’épuration que souhaite Vichy s’appuie en effet sur la conjugaison d’une campagne menée par les cercles les plus actifs de la Révolution nationale relayée par l’État, provoquant une diversité de réactions chez les édiles et dans l’opinion.
Campagne de presse et agitation
Le traumatisme moral vécu dans les semaines de mai et juin 1940, ajouté au désarroi matériel de milliers de réfugiés disséminés dans le département, est un terreau fertile à la culture d’un sentiment de contrition. C’est pourquoi, saisissant cette occasion, au cours de l’été et de l’automne 1940, la presse d’extrême-droite incarnée par L’Action Française, Gringoire ou Candide, n’a pas le triomphe modeste. Leur anticommunisme viscéral peut désormais se doubler d’une exécration publique de la démocratie et du parlementarisme. Chantres du pacifisme avant septembre 1939, ils peuvent vouer aux gémonies les « bellicistes » qui ont déclaré la guerre, et le Front populaire qui ne l’a selon eux pas préparée et a sapé les fondements moraux de la Nation. C’est pourquoi très rapidement, ces journaux entrent dans une campagne sur le thème de la prescience. Pour ne les pas avoir écoutés, voilà dans quelle situation la France se trouve. Cette idée est exprimée par Maurras qui cite un courrier envoyé « par un vieil ami » d’un village de l’Hérault qui traduit selon lui « ce qui se dit et se fait dans les profondeurs du pays. » 7 Le correspondant explique ainsi que le regard de la population sur l’Action française s’est subitement transformé :
« Depuis la catastrophe, on n’est plus des énergumènes, mais des gens en somme clairvoyants qu’on a eu peut-être tort de combattre. Mais maintenant, on doit oublier toutes les querelles, et avant d’adopter une opinion, on est bien heureux d’avoir l’avis des gens d’A.F. Enfin ! Mais pourquoi a-t-il fallu pour cela un désastre. Était-il indispensable ? »
Cette conviction d’avoir eu raison avant et contre tout le monde permet aux hommes d’extrême-droite de s’ériger en parangon de vertu et en police symbolique dont le département de l’Hérault est souvent la victime. Dès la fin du mois de juillet Gringoire dénonce le maire socialiste de Nissan coupable d’avoir dressé un drapeau rouge avec un liseré vert, et souligne qu’il faut châtier ce genre d’agissement avec la plus grande sévérité : « L’énergie des autorités est d’autant plus nécessaire dans ce Midi languedocien où le Cartel d’abord, le Front populaire ensuite, ont particulièrement exercé leurs ravages. » 8 De l’affaire du drapeau à la question de la toponymie, il n’y a qu’un pas. La première bordée vient de l’hebdomadaire Gringoire, qui attaque dès le 8 août 1940, les fausses gloires qui ont été portées par la République dans le panthéon des plaques bleues. Cependant, c’est à partir de l’automne que le tir de barrage mené par la presse prend de l’ampleur à travers une véritable campagne de dénonciation publique. Frontignan a ainsi les honneurs d’une longue diatribe de Gringoire :
« Mais on signale le cas de Frontignan qui avait bien fait les choses pour Salengro ! On y a construit un square Salengro dans une avenue triomphale qui a été débaptisée pour se décorer, elle aussi, du nom de Salengro et l’on a planté au milieu de toutes ces merveilles d’urbanisme un buste de Salengro […]. Il y a aussi la plaque Salengro qui porte dans le marbre le nom du président du Comité Salengro : Moch et celui du président du Conseil général actuellement encore maire de Frontignan. Et il y a une autre plaque Salengro apposée par la Fédération socialiste de l’Hérault : elle affirme, celle-là, que Salengro ne voyait rien au-dessus de son parti. Il avait la vue basse ! Sur l’avenue Salengro s’ouvre l’avenue Henri Barbusse et à quelque distance l’avenue Francisco Ferrer. Il y a la photographie de Salengro dans le bureau du maire, un agrandissement de Salengro dans la salle publique du conseil municipal et des mariages. Nous sommes à Salengroville ! » 9
Gringoire procède ainsi à des dénonciations collectives qui donnent une impression d’un travail de masse de la part de l’hebdomadaire. C’est une façon de maintenir la pression sur les édiles qui sont désignés par le journal et sur les autorités qui sont dès lors mises en demeure d’agir de façon sous-entendue. Á l’heure où Marcel Peyrouton, secrétaire d’État à l’Intérieur procède à des dissolutions nombreuses de conseils municipaux et renvoie maires et conseillers municipaux à l’état de simples citoyens, l’enjeu de ces dénonciations est bel et bien un enjeu de pouvoir. Compromettre un édile bon gestionnaire par ses choix odonymiques 10 laisse espérer à certains l’opportunité de prendre sa place. Paul Lombard, à l’origine de nombre de ces articles, ne dissimule d’ailleurs pas cette intention. Dénonçant une salle Salengro à Balaruc-les-Bains, il demande franchement la disparition du conseil municipal :
« Par quel prodige la municipalité de cette commune peut-elle se maintenir encore en fonction ? Avec elle, aussi, il y a compte à faire. » 11 Le journal devient ainsi une caisse de résonnance aux affrontements internes des petites communes, car les informations qui sont publiées sur les localités les plus modestes ne peuvent provenir que de courriers envoyés au journal par des lecteurs. Cela induit un phénomène de délation détournée car on peut supposer que les correspondants espèrent susciter l’intervention de l’administration par cet éclairage médiatique. C’est d’ailleurs le cas en ce qui concerne le village de Montagnac où le maire est interpellé par la préfecture au sujet de la place Émile Combes qui se trouve ainsi dénommée, depuis 1904, devant l’église. Gringoire s’en prend à cette dénomination en novembre 1940 dénonçant le « fichard » Combes qui a pris la place de Saint-André. L’hebdomadaire y revient encore un mois plus tard car la dénonciation n’a pas eu l’effet escompté, et sur le ton de l’ironie précise à ses lecteurs que « c’est la place de l’église qui par une délicatesse exquise porte le nom d’Émile Combes. » 12 (Fig. 1)
L’acharnement à l’égard de Montagnac persiste avec un nouvel encart qui s’en prend à la municipalité coupable de maintenir le souvenir d’un évènement douloureux pour les fidèles car la place avait été « débaptisée par anticléricalisme et provocation ». 13 Cette affaire est assez édifiante dans la mesure où elle met en évidence la mémoire longue des affrontements toponymiques. Le changement de nom avait suscité l’ire des conservateurs lors de la période de la Séparation de l’Église et de l’État, et il provoque une nouvelle polémique lors de l’avènement de Vichy qui apparaît à quelque réactionnaire comme une opportunité de prendre sa revanche. Autre exemple de la résurgence des affrontements symboliques anciens, Gringoire dénonce les hommages rendus à Béziers, à l’ancien maire radical Émile Suchon 14. Que lui reproche l’hebdomadaire ? C’est sous son mandat que les « anciennes rues » de la ville ont été débaptisées à grande échelle 15. Près de quarante ans après l’évènement, la laïcisation toponymique des années 1904-1905 devient le prétexte à l’éviction des noms républicains. La presse locale n’est pas en reste et s’implique en relayant les mots d’ordre venus des titres nationaux. Jules Véran, éditorialiste de l’Éclair, se livre à la même dénonciation du sectarisme religieux et de la bassesse d’esprit des élus républicains en opposant l’immortalité des saints à la disparition de la Gueuse :
« En province, on s’est livré à un véritable massacre des plaques bleues sous l’empire des passions politiques qui n’étaient pas éclairées par l’intelligence. Quelle chasse on a donné partout aux saints, qui n’avaient pourtant fait de mal à personne et qui même parfois, appartenaient au pays d’où on les expulsait. Témoin entre mille autres, la rue Saint-Roch à Montpellier devenue rue de la République. Voyez comme vont les choses ! Le bon saint Roch vit toujours dans la vénération publique, ni son nom ni son culte ne sont près de s’éteindre et c’est la République qui est partie. » 16
L’autre face du sectarisme toponymique dénoncé par la presse c’est l’adhésion aux théories marxisantes donc étrangères et surtout mères de la démagogie et du désordre. Il faut donc éradiquer les noms qui potentiellement peuvent exciter les masses et les pousser dans les bras de la révolution :
« Déjà dans de nombreuses villes, des mesures ont été prises qui ont emporté l’approbation de tous les hommes de bon sens. On a eu le tort de baptiser et de débaptiser des rues à tour de bras. On l’a fait en général par passion sectaire ou par grossière démagogie. Il en est résulté que trop de noms de rues écorchent les oreilles françaises. Les Salengro, les Jaurès, les Barbusse, les doctrinaires de la révolution et les agitateurs de la rue ont partout quelque plaque, dont l’inauguration fut, à l’époque, l’occasion de quelques manifestations de masse ou de quelques meetings de propagande électorale. » 17
Cette campagne de presse suscite des pressions directes exercées par des habitants selon différents canaux. La Légion Française des Combattants s’érige par exemple en véritable auxiliaire du pouvoir. Se référant à la maxime du maréchal Pétain qui fait d’eux « ses yeux et ses oreilles », les légionnaires s’immiscent dans le fonctionnement municipal afin d’imposer l’épuration toponymique tant désirée. À Béziers, la Légion réclame un changement particulièrement symbolique : la suppression du nom de Jaurès donné en 1924 à la place de la Citadelle après une sévère polémique. Pour les cadres d’un secteur de la ville qui signent la demande, les plaques partant le nom du tribun doivent « être enlevées sans délai » car « ce nom de Jean Jaurès n’a plus aucune signification sinon celle de guerre civile et qu’il ne saurait subsister plus longtemps dans le secteur Pétain. » 18 La LFC n’a d’ailleurs pas le monopole de ce genre de réclamation directe. Quelques mois plus tard, d’autres militants biterrois réclament la suppression du nom de boulevard d’Angleterre donné en 1918 à la suite de l’attaque britannique sur Madagascar. Une lettre parvient même au journal l’Éclair pour proposer de restaurer tous les anciens noms traditionnels comme place de la Citadelle, rue Saint-Aphrodise, place des Carmes, avenue d’Agde. L’argument du traditionalisme toponymique est donc mis en avant, mais il dissimule mal la volonté de revanche de l’auteur qui vise respectivement la place Jean Jaurès, la rue Étienne Dolet, la place de la Victoire et l’avenue Wilson. En sus, le remplacement de la République par le nom du général Huntziger est réclamé car ce mot « évoque le régime qui nous a valu la plus humiliante défaite de notre histoire. » 19
Cependant, la presse va bien plus loin en incitant les activistes les plus virulents de son lectorat à s’en prendre physiquement aux symboles incriminés. Dans l’affaire de Montagnac, l’hebdomadaire nous apprend que ce sont de jeunes membres de la Légion Française des Combattants (LFC) qui ont rendu justice au parvis de l’église paroissiale en déboulonnant la plaque portant le nom d’Émile Combes, et les consacre en quelque sorte au tableau d’honneur de l’activisme en relatant leur geste 20. De ce fait les incidents se multiplient dans l’Hérault et notamment à Montpellier. Le 20 novembre 1940, le préfet apprend que dans cette ville les plaques indicatrices de la place Roger Salengro ont été enlevées par des jeunes gens 21. Dans un de ses numéros, Gringoire décerne évidemment un brevet de civisme à cet acte et en profite pour se plaindre de l’action sélective de la police :
« Á Montpellier, un groupement ami, celui des Gardes Françaises, a brisé les cinq plaques qui portaient le nom de Salengro. L’exécution qui eut lieu à dix-huit heures trente, attira l’attention de deux policiers qui verbalisèrent, tandis qu’il ne se trouve jamais dans cette ville, un représentant de l’autorité pour empêcher la lacération des affiches reproduisant le dernier appel du Maréchal. » 22
Durant la nuit du 21 au 22 novembre des évènements similaires se produisent dans la même ville contre les plaques indicatrices de la place Jean Jaurès. Celles-ci sont recouvertes d’un placard indiquant : « Place Charles de Foucault ». Deux étudiants sont arrêtés, l’un d’eux fait partie du service d’ordre du PPF 23. Le 29 novembre, ce sont les plaques de la place Aristide Briand qui sont descellées et enlevées. Ces trois incidents en une dizaine de jours, poussent la municipalité montpelliéraine à débaptiser la place Roger Salengro le 7 décembre. Un élu socialiste en vient même à déclarer avant le vote qu’il est « partisan de cette mesure dans l’intérêt de la tranquillité publique et de la France. » 24 Un incident du même acabit se produit également à Pézenas où, dans la nuit du 8 au 9 décembre, des inconnus recouvrent de goudron les plaques de l’Avenue Roger Salengro et du Cours Jean Jaurès 25. L’ancien adjoint au maire socialiste voit aussi la porte d’entrée de sa maison recouverte de goudron. Les monuments sont également visés. L’hebdomadaire s’en prend ainsi à la commune de Frontignan, « Salengroville » coupable de trop honorer Roger Salengro avec en particulier un buste qui décore un square du même nom. Le journal relate la mésaventure qui est arrivée au buste :
« On a planté au milieu de toutes ces merveilles d’urbanisme un buste de Salengro, affreux navet qui a été un beau matin, trouvé décapité. La tête de Salengro, tombée dans le bassin Salengro, – toujours bordé de fleurs rouges – a été repêchée, recollée, sans invitation ni discours, dans la plus stricte intimité, et avec adjonction d’un plâtre tout neuf qui forme cicatrice. Le nez a un peu souffert. Quant aux oreilles, elles ont disparu. » 26
Il s’agit évidemment de se féliciter de cette action et de dénoncer la municipalité indigne qui a restauré le monument. Cette mise en exergue publique du vandalisme est une constante de la part de Gringoire qui attribue ainsi des brevets d’activisme aux militants d’extrême droite et provoque une émulation et une surenchère dans l’iconoclasme. Cette incitation à la destruction symbolique permet de créer une atmosphère délétère qui met le sujet sur le devant de la scène et impose aux autorités une réaction. Dans son édition du 5 décembre, le journal relate l’équipée des Gardes Françaises (PPF) à l’encontre du monument Jaurès de Montpellier « qui a reçu un pot de minium sur l’os frontal » mais qui, « touchante attention », a été immédiatement remis en état par la municipalité. Les vandales remettent le métier sur l’ouvrage quelques semaines plus tard en descellant le buste du député du Tarn avec des cordes au moment de la rencontre Pétain-Franco en février 1941 27. Même satisfecit à Béziers où l’hebdomadaire félicite ceux qui s’en prennent à la statue de l’ancien maire radical qui avait eu l’impudence de laïciser les rues de la cité de Riquet : « La statue de Suchon a été encapuchonnée dans un sac, et le piédestal goudronné et recouvert de cette inscription : « Ici, place à Pétain. » » 28 Dans la même tonalité mais sur un support différent, le scénario se répète à Montpellier où l’hebdomadaire s’en prend à une plaque qui orne le hall d’entrée de l’université : « Le nom du condamné Jean Zay brille encore sur la façade de la Faculté des Lettres et les protestations des étudiants ne font même pas tinter les oreilles obturées au coton maçonnique des hauts personnages de l’administration départementale. » 29 L’effet de la dénonciation et de la mise en cause des autorités ne se fait pas attendre ; quelques jours plus tard, la plaque est prise d’assaut par des jeunes du PPF qui faute de pouvoir la desceller martèlent le nom de Jean Zay jusqu’à ce qu’il soit définitivement illisible. Bien sûr, cela fait les choux gras de l’hebdomadaire qui s’empresse de fêter les vaillants nationaux en relatant tous les détails de l’opération : « Le groupement des Gardes Françaises de Montpellier a fait sauter l’autre dimanche à seize heures quarante-cinq, et à coup de ciseau, le nom de Jean Zay qui s’étalait sur la plaque de marbre du hall d’entrée de la Faculté des Lettres. » 30 Il n’en faut pas plus pour les autorités ; en l’occurrence, la direction de l’université donne l’ordre de desceller la plaque qui est remisée à la cave. L’administration mise en cause dans le premier article a dû probablement intervenir en faveur de cette mesure radicale sous le motif d’éviter de nouveaux troubles. (Fig. 2)
Cette accumulation d’incidents troublant l’ordre public tombe à point nommé pour le pouvoir et l’administration, qui peuvent opportunément faire valoir la justesse de leurs instructions. Cela révèle une sorte de répartition des rôles tacite, sinon une complicité entre la presse, les agitateurs et les services officiels. Plusieurs exemples sont éclairants quant à l’ambiance de chasse aux sorcières qui se met en place au moment où campagne de presse et épuration officielle se conjuguent. L’enlèvement de la plaque rappelant l’inauguration de la faculté des lettres par le ministre de l’Éducation est ainsi révélatrice des interactions d’un triangle d’acteurs mêlant la presse de droite et d’extrême droite, les agitateurs de l’Action française et du PPF et l’administration. De là à y voir un complot ourdi par les cercles les plus engagés en faveur de la Révolution nationale, il n’y a qu’un pas que l’on ne peut franchir faute de preuves étayant cette thèse. Néanmoins, la conjonction des évènements accrédite l’idée d’une connivence assez poussée dans certains départements entre différents éléments de cette trilogie.
L’épuration d’État
Dans ce contexte particulier, quelques initiatives voient plus ou moins spontanément le jour. Certaines communes, sentant monter la contestation de la presse d’extrême-droite, n’attendent pas de voir se manifester de l’agitation pour prendre des mesures préventives. Cependant, cela reste sporadique et en tout cas tout à fait insuffisant pour ceux qui brûlent d’en finir avec les signes extérieurs du républicanisme. Au mois d’octobre 1940, le fruit semble mûr : l’intensification de la campagne de presse associée à l’agitation de cercles extrémistes rend possible ou nécessaire, selon le degré de connivence et de responsabilité que l’on veut attribuer à l’exécutif, la mise en œuvre d’une épuration toponymique à grande échelle. Du reste, la feuille n’est pas blanche puisque moins de huit mois auparavant, l’administration Sarraut avait diligenté une opération du même type entre le 15 mars et l’armistice à l’encontre des dénominations communistes. Le savoir-faire existe donc, tout comme une mémoire administrative fraîche qui permet aux exécutants de connaître assez rapidement l’état de la situation et éventuellement de cibler les endroits les plus sensibles. C’est pourquoi la machine administrative peut rapidement se mettre en route. Qui plus est, le secrétaire d’État à l’Intérieur, Marcel Peyrouton, en poste depuis l’éviction d’Adrien Marquet le 6 septembre, connaît bien les rouages de la maison, ayant été le secrétaire général de son prédécesseur depuis le mois de juillet. Le gendre de Louis Malvy arrive au ministère de l’Intérieur avec la réputation d’être un homme à poigne. Il épure très fortement le corps préfectoral, et préside sans aucun scrupule à la mise en œuvre des mesures contre les franc-maçons et contre les juifs. Il signe l’abrogation du décret Crémieux le 7 octobre 1940. C’est dans ce contexte que cet homme, dont la presse de droite vante l’énergie, formalise l’épuration symbolique. On peut se demander quelle part relève de sa seule initiative. La forte pression exercée par l’extrême-droite à travers la presse et l’agitation a pu pousser certains à vouloir donner des gages pour éviter les troubles à l’ordre public. La ductilité du chef du gouvernement, Pierre Laval, et son goût du marchandage pourraient expliquer une initiative dont le but serait d’acheter un soutien. On peut également imaginer que les maurrassiens du gouvernement et ceux qui orbitent autour du maréchal ont pu saisir l’occasion de prendre leur revanche sur la gueuse. Quoi qu’il en soit, le témoignage de Marcel Peyrouton au procès Pétain de 1945, signifiant qu’en tant que ministre de l’Intérieur il n’avait été qu’un agent d’exécution, tend à démontrer que la décision a été prise dans les cercles les plus élevés de Vichy, même s’il faut relativiser le propos dans la mesure où le témoin était lui-même accusé et emprisonné.
Comme au mois de mars 1940 sous la conduite de Maurice Sarraut, les ordres prennent la forme d’une simple circulaire, publiée le 22 octobre à destination de tous les préfets. Dans ce texte relativement court, le ministre se livre à un bref historique avant de délivrer des ordres qui se veulent fermes. Il regrette notamment que les instructions données au début de 1940 pour faire disparaître les marques extérieures de l’influence de la IIIème Internationale n’aient pas été totalement appliquées : « J’ai été amené à constater que certaines dénominations de rues et édifices publics étaient toujours utilisées dans de nombreuses villes. » 32 L’ordre est donc donné « d’appliquer strictement » les instructions données lors de la dissolution du PCF et de se livrer « à un examen attentif des dénominations utilisées dans les villes de votre département. » Cette décision est justifiée par des raisons de sécurité car selon le ministre : « Une tolérance excessive en ce domaine risquerait de susciter un légitime mécontentement, de provoquer des manifestations et, par suite, de troubler l’ordre public. » Cependant, la véritable motivation est idéologique et Marcel Peyrouton la dévoile dès le début de sa circulaire : « D’une manière plus générale, il est inconvenant et paradoxal que cette manière d’hommage public continue à être rendue à la mémoire de ceux qui, par leurs erreurs ou leurs fautes, ont contribué à précipiter notre patrie dans la ruine. »
Dans l’Hérault, le préfet Pierre Olivier de Sardan diffuse le 7 novembre 1940 une circulaire à l’attention de tous les maires du département. Le texte de ce document reprend mot à mot l’argumentation générale de la circulaire Peyrouton du 22 octobre. Le préfet enjoint aux édiles de lui rendre compte rapidement des mesures qu’ils comptent prendre. (Fig. 3)
Habilement, le préfet de l’Hérault met à profit les troubles publics que constituent les arrachages de plaques pour insister sur la nécessité d’appliquer au plus vite ces directives. Après le déboulonnage des plaques Salengro du quartier de Figuerolles, le maire de Montpellier se fait tancer parce qu’il n’a pas suivi les instructions du 7 novembre avec suffisamment de promptitude :
« J’estime qu’il eût été préférable que l’enlèvement de ces plaques à Montpellier résultât de votre action personnelle, plutôt que de l’intervention de tiers. » Même avec ce type d’arguments, l’exécution de ces ordres semble pourtant bien timide puisque dans le mois qui suit, seules trois communes effectuent des changements avant la fin du mois. D’ailleurs, ceux-ci demeurent limités à quelques rues. Á tel point, que le sous-préfet de Béziers suggère de contraindre les communes à modifier leur espace dénominatif :
« Ne pensez-vous pas, monsieur le préfet, que vous pourriez prendre un arrêté obligeant les municipalités à démarquer ces rues ? Je crois que c’est ce qu’a dû faire le préfet des Bouches-du-Rhône, qui a ainsi engagé la responsabilité des maires qui ne se sont pas conformés dans un certain délai aux prescriptions de cet arrêté. » 33
Finalement comme beaucoup de ses collègues d’autres départements, le préfet de l’Hérault se résout à faire un nouveau rappel aux maires le 6 janvier 1941. Dans cette nouvelle circulaire la fermeté est de mise. Il insiste sur le fait que « le gouvernement attache une importance toute particulière à l’observation stricte de ces prescriptions. » 34 Il met également en demeure les maires de lui fournir les listes complètes des dénominations et les mesures envisagées.
La toponymie urbaine n’est pas la seule en cause, tous les emblèmes du mouvement ouvrier doivent disparaître. C’est ainsi que dans le dossier des archives relatant l’enlèvement des dénominations urbaines de l’Hérault, on trouve également l’inventaire de la saisie de drapeaux appartenant à des partis politiques ou à des syndicats. Ce sont près d’une trentaine d’emblèmes qui sont saisis par la police dans la ville de Montpellier. Dans un inventaire à la Prévert on retrouve un drapeau noir saisi à la bourse du travail de Montpellier, 19 drapeaux rouges appartenant à la CGT, un autre au syndicat des ouvriers agricoles CGT, un drapeau de la SFIO montpelliéraine et un autre des jeunesses socialistes, un drapeau rouge de la Fédération nationale des travailleurs des chemins de fer de France et des colonies, section syndicale PLM de Montpellier, un du club républicain antifasciste et un autre de l’Union des Libres-penseurs de l’Hérault ainsi qu’un drap d’honneur rouge et noir… 35 La ville de Montpellier n’est pas la seule visée puisque une note préfectorale du 8 novembre 1940 ordonne la saisie du drapeau mutualiste du petit village de Fontès qui a le tort d’être de couleur rouge. La razzia se poursuit, la préfecture saisissant un total de 29 drapeaux dans le reste des communes, notamment dix à Mèze, cinq dans la commune minière du Bousquet d’Orb mais aussi dans des communes viticoles comme Cazouls-les-Béziers, Nizas, etc. 36
Les premières décisions interviennent donc au cours de l’automne. Le préfet de l’Hérault fait ainsi enlever le buste de Roger Salengro du square qu’il occupe à Frontignan après que celui-ci a été dégradé, anticipant ainsi les instructions formelles du ministère de l’Intérieur 37. Les plaques de rues sont également déposées. Salengro disparaît également dans la petite commune de Cruzy et à Montpellier. L’ancien ministre est également évincé à Capestang, Florensac, Villeneuve-les-Béziers. Dans ces deux dernières communes Jaurès l’accompagne tout comme à Cazouls-les-Béziers, Bédarieux. À Lunel et Montpellier son nom est enlevé en 1942. Le nom d’Henri Barbusse qui subsistait à Frontignan est supprimé en janvier 1941 alors que celui de Francisco Ferrer est enlevé l’année suivante à Capestang et Lunel. D’ailleurs les communistes et les socialistes ne sont pas les seules cibles, les radicaux Camille Pelletan à Béziers et Clermont-l’Hérault et Émile Combes à Pézenas voient leur plaques démontées. Coupables de laïcisation impénitente aux yeux des nouveaux maîtres, ils expient par la suppression de ces hommages publics. À Lunel, c’est le général Sarrail qui paie ses accointances radicales et franc-maçonnes. Plusieurs opérations se caractérisent par une certaine ampleur comme par exemple à Clermont l’Hérault en février 1941, à Pézenas au mois d’août suivant. Inversement, les grandes villes n’ont pas procédé à des révisions massives. Il semble qu’il y ait eu des projets de ce type à Montpellier mais au bout du compte seuls deux noms ont été enlevés. Au total 25 opérations de changement sont réalisées durant toute la période. Signe de la divine surprise et de la satisfaction que représentent ces résultats, un fonctionnaire de la préfecture annote un bordereau victorieusement à destination de son supérieur en s’exclamant « il s’agit de Capestang ! », lorsque lui revient la réponse de la municipalité, signe que malgré tout la réaction des hommes du Midi rouge était redoutée de la part du régime.
Face à la vague blanche
Il s’avère que face aux pressions et à l’épuration officielle les réactions à l’offensive symbolique sont protéiformes. Une attitude qui n’est pas un refus, mais qui apparaît comme notable, est la résignation triste. L’observation des textes de délibération montre différentes réactions face aux circulaires de la préfecture. La première réponse se traduit par l’exécution stricte des ordres des autorités, mais cette application est faite sans entrain et sans plus de commentaires du conseil. Dans ce cas la délibération se réduit à quelques lignes qui reprennent le plus souvent les prescriptions préfectorales. Tel est le cas à Cruzy où le texte se résume à deux phrases : « En exécution de la note de M. le préfet du 22 novembre 1940, le conseil décide que la place Roger Salengro portera dorénavant le nom de place de l’ancien château. » 38 La brièveté et la sécheresse de la décision semblent indiquer une certaine résignation dans l’application stricte des mesures édictées par le pouvoir; résignation doublée d’une austérité qui ne peut que signifier que la décision n’est pas prise avec enthousiasme. La même sécheresse peut être observée dans d’autres communes, comme à Florensac pour l’enlèvement des noms Roger Salengro et Jean Jaurès 39, et à Capestang quand disparaît le patronyme Francisco Ferrer. Certains soulignent le fait qu’ils ne font qu’appliquer les ordres ainsi qu’en témoigne la délibération de Saint-Pargoire :
« Monsieur le maire donne lecture au conseil municipal d’une note de monsieur le préfet de l’Hérault en date du 7 novembre, relative aux marques extérieures de la IIIème Internationale dénommant des rues ou des édifices publics. Monsieur le Président explique au conseil municipal que la place Roger Salengro rentre dans cette catégorie, et qu’il convient d’après les ordres de monsieur le préfet de faire enlever cette plaque. » 40
La soumission aux instructions officielles peut aussi prendre d’étonnantes formes. Á Castelnau-le-Lez, le maire décide de supprimer toutes les dénominations de la commune pour ne prendre aucun risque. La délibération précise que seul le nom du chef de l’État désignera la place de l’hôtel de ville et toutes les autres plaques indicatrices « seront enlevées et déposées à la mairie. » 41 Zèle ? Prudence ? En tout état de cause, la peur de l’administration nouvelle pousse les élus à vouloir montrer patte blanche. Dans de nombreux cas, on prend des précautions pour se prémunir d’une sanction mais aussi pour se défausser de sa responsabilité sur l’administration. Les liasses de réponses aux enquêtes préfectorales contiennent ainsi des textes qui demandent des instructions directement au préfet sur des dénominations précises sur lesquelles les édiles se demandent si elles correspondent aux critères énoncés par la circulaire Peyrouton. La lecture de ces demandes tient presque d’un inventaire à la Prévert de la toponymie républicaine. Dans l’Hérault le premier magistrat de Villeveyrac demande ainsi s’il doit ou non enlever le nom de Ferdinand Buisson du fronton de l’école 42. Le maire de Cazouls-les-Béziers fait de même en posant la question du maintien des noms de Jean Jaurès, d’Anatole France et le la place de la Révolution. Il précise d’ailleurs que cette dernière dénomination fait référence à 1789. Cependant, il s’incline d’avance et se défausse sur ses prédécesseurs pour éviter les foudres administratives en répondant au préfet : « Si vous estimez que ces dénominations sont incompatibles avec le régime actuel, nous sommes prêts à les remplacer par d’autres. Ces dénominations ne sont certainement pas subversives, mais ce n’est pas pendant notre gestion qu’elles ont été utilisées. » 43
D’autres comportements sont révélateurs de certains retournement ou reniements. On peut également parler de duplicité pour ne pas dire d’une certaine veulerie dans les contorsions effectués par certains pour conserver coûte que coûte leur siège. Ainsi la délibération supprimant les noms de Jaurès et Salengro à Villeneuve-les-Béziers est-elle un modèle d’hypocrisie. Le maire y affirme sans trembler :
« L’ordre nouveau exclut toute politique de l’administration municipale; la municipalité de la commune n’a jamais fait de politique dans son administration ; pour bien marquer ce caractère il propose au conseil de modifier le seul acte qui pourrait être interprété dans ce sens, c’est de redonner l’ancien nom aux places Jean Jaurès et Roger Salengro, les seules qui ont été modifiées durant son mandat. » 44
Or, le même, dans la délibération établissant les dénominations Jaurès et Salengro en 1937 rendait hommage au « grand tribun français » et voulait perpétuer le souvenir « du citoyen ministre de l’Intérieur. » 45 Autre temps, autre mœurs.
Dans le même ordre d’idée mais de façon beaucoup plus poussée, l’attitude du maire de Béziers est tout aussi intéressante. En effet, la ville de Béziers dirigée par Auguste Albertini décide de changer le nom de certaines de ses rues au printemps 1942. Apparaît notamment le nom du général Huntziger décédé quelques mois auparavant, alors que disparaît le radical Camille Pelletan un peu trop anticlérical aux yeux du nouveau régime. Sont également inscrites les dénominations « maréchal Lyautey » et « Ceux d’Argeliers » qui sont des clins d’œil au mythe impérial et à la politique du retour à la terre 46. Pourtant la seule voie du corpus qui fait l’objet d’une inauguration est l’avenue Bertrand de Saussines. Ce dernier est un marin d’origine biterroise issu de la noblesse locale, condisciple de lycée d’Antoine de Saint-Exupéry. L’Éclair insiste d’ailleurs sur ce point en citant plusieurs fois le patronyme complet du héros et en évoquant son titre de comte. Pour un vieux radical comme Albertini un tel choix peut paraître assez étonnant, même si un aspect psychologique n’est pas à négliger dans la mesure où son propre frère, marin lui aussi, est décédé dans l’incendie du cuirassé Liberté en rade de Toulon en 1911. Nonobstant cet aspect, cette décision symbolique ne fait que confirmer l’évolution politique d’une certaine aile droite du radicalisme qui vit dans la crainte du rouge. Opposé au Front populaire lors des élections législatives de 1936, Albertini s’était déjà illustré en 1938 par une réforme onomastique qui avait effacée la toponymie anticléricale et militante imposées par les radicaux des années 1904. La rue du partageux Gracchus Babeuf avait ainsi repris son ancien nom. Confirmant cette évolution, le sénateur Albertini vote les pleins pouvoirs à Pétain et se voit maintenu dans ses fonctions de maire en 1941. De fait, l’inauguration de cette avenue est une véritable opération de propagande festive en faveur du régime à un moment où celui-ci se durcit avec le retour de Pierre Laval aux affaires et la nomination de collaborateurs affirmés comme l’amiral Platon. C’est en effet ce dernier qui vient, en tant que secrétaire d’État, parrainer l’évènement à l’occasion de la Quinzaine impériale. La cérémonie dans la veine des fêtes vichyste mêle l’Église – une messe, est prononcée dans l’ancien hôtel particulier des de Saussines -, l’armée avec un détachement de la coloniale, les anciens combattants, l’administration avec deux préfets et les corps constitués. (Fig. 4)
Comme dans toute cérémonie de la période, la journée commence par un recueillement et un dépôt de gerbe au monument aux morts. Pour marquer l’objet de la journée, l’amiral Platon y dépose une ancre de marine en fleurs naturelles. Lors de l’inauguration même, le secrétaire d’État aux Colonies prononce un discours aux violents accents. L’anglophobie récurrente de Charles Platon transparaît dès l’introduction :
« C’est quand la France vibrait encore de l’indignation soulevée par l’agression britannique contre Madagascar et commençait d’apprendre le nom des héros tombés au loin pour la défense de ses droits, que s’ouvrait malgré les deuils de nos cœurs cette quinzaine impériale. » 47 Il cite ensuite la liste des agressions britanniques de 1940 de Mers-el-Kébir à Dakar en passant par la capture de l’escadre d’Alexandrie. Les gaullistes ne sont pas plus épargnés :
« Idéologie ou intérêt, le crime des dissidents, ajoute le vice-amiral, est clair : refusant de reconnaître la défaite, ils refusent de s’associer à l’épreuve de leur patrie ; refusant d’obéir aux ordres de leur gouvernement, ces Français libres, comme ils s’intitulent, s’asservissent à un gouvernement étranger dans le fol et naïf espoir que l’étranger aura meilleur soin de la France que la France elle-même. » 48 (Fig. 5)
Auguste Albertini, ne pouvait ignorer qu’une telle dénomination et plus encore une telle cérémonie le rangeait de facto dans un pétainisme actif et militant. Il s’agit donc de sa part d’une manifestation d’adhésion au régime. Qui plus est, cela se produit au printemps 1942 alors que la perspective d’une guerre courte s’est éloignée avec la résistance soviétique de l’hiver passé et l’entrée en guerre des États-Unis. En outre, sur le plan symbolique, l’épuration de masse de l’hiver 1940-1941 s’était largement apaisée et rien n’obligeait le maire à mettre en place une chaîne dénominative aussi orientée et à organiser un évènement de cette ampleur. L’étendue du changement de pied réalisé se mesure au discours dans lequel, Albertini va jusqu’à citer Barrès 49.
Dans ces quelques exemples, le choix de figures issues de la noblesse ou rappelant les liens du trône et de l’autel et la France éternelle en disent long sur les revanches que certains se plaisent à prendre en profitant du malheur comme d’une occasion inespérée. Cela montre aussi comment d’autres peuvent abandonner les oripeaux d’hier pour conserver la part de pouvoir qui leur est dévolue.
Pourtant, des attitudes rigoureusement opposées peuvent voir le jour de différentes façons. On peut ainsi voir des municipalités utiliser des formes de résistance plus ou moins passives en ne prenant aucune mesure sans ordres ou bien encore en dissimulant par omission. En effet, alors que le préfet de l’Hérault réclame les listes de noms des voies et édifices publics, le maire SFIO du village de Vendres, qui possède une rue Jean Jaurès depuis 1925 50, omet de l’inclure dans sa réponse. De la même façon, Olonzac, dont de nombreuses rues portent des noms en rapport avec la Révolution française et l’histoire républicaine, ne communique qu’une liste amputée d’une dizaine de noms 51.
Cette soumission forcée et ce penser-double apparaissent dans d’autres cas et montrent qu’il se développe des stratégies d’évitement. Ainsi, la municipalité de Mèze rend-elle hommage au maréchal Pétain en janvier 1941 en attribuant son nom à l’esplanade. Cependant, le maire ajoute à la délibération envoyée à la préfecture la note manuscrite suivante : « Veuillez me faire envoyer quatre plaques portant l’indication place maréchal Pétain. » 52 Une sorte de mauvaise foi ou à tout le moins de mauvaise volonté transparaît dans ce mot. Il y a d’une certaine façon un sous-entendu disant : je m’incline devant le nouveau régime mais je n’ai pas l’intention de payer les plaques que l’on m’oblige à apposer. S’opposer à l’épuration toponymique sans s’attirer les foudres du régime ni s’aliéner le soutien d’une population qui vous a élus, telle est la gageure que tentent de remplir certains maires. La stratégie développée à plusieurs reprises consiste à tenir compte des circonstances nouvelles tout en préservant ses valeurs et ses convictions. Dans les faits, cela se traduit le plus souvent par l’attribution d’un hommage public au maréchal Pétain, tout en préservant les dénominations menacées. Les délibérations témoignent de ce subtil équilibre. Malgré les risques encourus par leurs auteurs, des gestes de résistance publics se produisent. Un de ces actes de penser-double revient à Vincent Badie, maire de Paulhan, un des premiers opposants à Vichy, puisqu’il fait partie des 80 parlementaires qui se sont opposés au vote des pleins pouvoirs le 10 juillet 1940. La section locale de la LFC demandant le baptême d’une voie Pétain par l’intermédiaire de la presse et d’une demande solennelle, Vincent Badie doit évoquer cette mesure en conseil municipal. Cependant, il rappelle les évènements qui se sont produits au casino de Vichy l’été précédent, mentionnant en particulier que la motion dont il était le porte-parole n’avait pu être lue à la tribune. Évoquant le contenu de ce texte, il précise que « s’il était prêt à accorder sa confiance au Maréchal, il ne pouvait en faire autant à ceux qui voulaient instaurer en France un régime dictatorial à leur profit. » 53 Il manifeste ainsi son opposition au régime de façon subtile, épargnant le maréchal Pétain pour mieux dénoncer le caractère dictatorial du régime. Il accepte donc le vœu de la LFC tout en prenant soin d’adresser une pique habile aux fervents de la Révolution nationale. Il conseille en effet de donner le nom du maréchal au cours national car « il ne pense pas qu’il soit opportun de débaptiser le boulevard de la Liberté, appellation à laquelle la population paulhanaise a toujours été très attachée. » L’opposition entre les dénominations « National » et « Liberté » est également un message de résistance indirect et astucieux.
Jean Bringuier, maire de Montagnac, se trouve comme on l’a vu confronté durant le deuxième semestre de l’année 1940 à une campagne de presse qui a pour objet de faire débaptiser la place publique en question : « le journal Gringoire, dont je suis moi-même lecteur, dans sa campagne contre les noms des rues, a fait paraître différents articles au sujet de cette place. » 54 Cette campagne contre la place Émile Combes est menée et orchestrée par un natif du village, expatrié depuis une vingtaine d’années. Contre toute attente, cette affaire se solde par un statu quo voulu par le maire qui, malgré ses convictions plutôt modérées, répond au préfet : « On a dit avec juste raison, que les passions ou les exagérations politiques, étaient les causes profondes de notre ruine. C’est profondément mon avis. Pourquoi alors recommencer dans l’autre sens, au moment où nous avons tant besoin de paix ? » Il ajoute fermement : « De ma propre initiative, je ne changerai pas le nom de la place Émile Combes. » Outre son dénouement inattendu, compte tenu des opinions politiques du premier magistrat de la commune, cette affaire met en exergue les pressions qui peuvent s’exercer sur les édiles par le biais de la population et de la presse réactionnaire. La volonté de revanche, la virulence et l’acharnement manifestés sont remarquables si l’on songe qu’il s’agit d’éliminer une dénomination apposée 37 ans auparavant. Il faut également souligner la rigueur et l’intégrité de Jean Bringuier qui dans un contexte d’épuration des conseils municipaux démontre un courage rare. Ce courage se manifestera d’ailleurs plus tard à l’automne 1942 puisque le maire de Montagnac fournira de faux papiers portant son nom pour sauver deux sœurs de confession juive 55.
La presse de gauche pourtant surveillée et contrôlée soutient ce genre d’attitude et dénonce insidieusement la revanche des blancs. Le quotidien radical de Montpellier, le Petit Méridional, dévoile ainsi son opposition au processus sous couvert d’humour au plus fort du mouvement de débaptisation. Le journal publie ainsi un petit récit imaginaire mettant en scène un personnage visiblement royaliste qui s’évertue à transformer les noms de rues de sa petite ville en écrivant à « son » journal que l’on peut supposer être L’Éclair, rival royaliste du Petit Méridional. Le récit ridiculise le délateur compulsif qui ne cesse d’écrire pour obtenir des modifications de la nomenclature comme le raconte le narrateur :
« Je vous ferai remarquer, lui dis-je, que cinq de nos rues ont été débaptisées sous votre impulsion et que vous avez demandé, toujours par l’organe de votre journal, qu’une quinzaine d’autres changent de nom. Vous avez réclamé une rue Pépin-le-Bref, une rue Philippe-Auguste, une rue Madame-de-Maintenon, une rue Nicolas III, une rue Louis XII… Cela vous gêne ? » 56
L’article, sous une apparence légère et humoristique, est en fait beaucoup plus politique dans le fond. En effet, alors que la campagne pour le changement des noms de rues bat son plein, le quotidien montpelliérain met en évidence les traits essentiels du processus. Le personnage de Paul-Augustin, « le noble ami » du narrateur, souligne ainsi les sentiments revanchards de la droite conservatrice qui profite de la divine surprise pour régler ses comptes. En outre, il ridiculise les demandes, pour ne pas dire les délations, qui caractérisent souvent les courriers publiés dans la presse locale. Pour cela l’auteur invente un quiproquo savoureux autour de la figure de George Sand :
— Nous avons une rue George Sand me dit-il. Qu’est-ce que c’était au juste que George Sand, je veux dire comme opinions politiques ?
— De gauche, lui dis-je, très certainement et même socialiste à la mode 1848.
— Son compte est clair, s’écria triomphalement Paul-Augustin, j’écris immédiatement à mon journal, la rue du Duc-de-Reichstadt doit remplacer la rue George Sand. Baptiste, du papier et une enveloppe…
Dix jours se sont écoulés et, pour la première fois, la lettre vengeresse de mon ami Paul-Augustin n’a pas été publiée par son journal. Il commençait à se demander si la respectable feuille qui a nourri sa jeunesse et son âge mûr d’idées générales ne se serait pas vendue à de louches et de ténébreux ennemis de la morale et de l’ordre, quand, hier, au cours de la conversation, je laissai échapper que la conduite privée de George Sand fût assez scandaleuse, que celle-ci fut la maîtresse d’Alfred de Musset — qu’elle trompa du reste avec un médecin italien — celle de Chopin et de plusieurs centaines d’hommes moins illustres.
— Vous dites ? hurla Paul-Augustin, vous dites leur maîtresse ? C’était donc une femme ?
— Aucun doute sur ce point n’est possible. Les témoignages sont trop nombreux et trop formels.
Mon noble ami eut un gémissement.
— Voilà donc, fit-il douloureusement, pourquoi Ils n’ont pas publié ma lettre.
— Qu’y disiez-vous donc ?
— Que George Sand empoisonna sa première femme, battit la seconde et eut une grosse histoire de désertion pendant son service militaire. J’ajoutais même qu’il portait une longue barbe notoirement pleine de poux.
Mon impression très nette est que mon ami Paul-Augustin va renoncer pendant un bon moment à débaptiser les rues de notre jolie petite ville. Mais, qu’est-ce qu’il va bien pouvoir faire maintenant ? C’était, depuis deux mois, le grand travail de ses veilles et l’unique préoccupation de ses nuits.
Cette farce permet ainsi de dénoncer les excès et surtout l’ambiance ubuesque et délétère dans laquelle se développe la campagne d’épuration. Les mensonges de Paul-Augustin, rappellent ceux de la presse d’extrême-droite qui colporte toute sorte de rumeurs pour arriver à ses fins, soutenant ainsi un processus de revanche pensé et voulu au plus haut-niveau de l’État et souvent exécuté par des notables exclus du pouvoir par la République, gonflés de rancœurs et avides de vengeance.
La divine surprise, n’est pas une vaine expression, c’est un fait. L’évènement du régime de Vichy au cours de l’été 1940 aiguise les appétits de revanche et réveille les vieux contentieux. L’occasion est trop belle, et dès le mois de juillet, les cercles d’extrême-droite profitent du traumatisme, de l’abattement puis du climat de contrition et d’expiation qui découle de la défaite pour s’en prendre avec virulence à tout ce qui incarne la République et la démocratie. Le régime, professant à qui veut l’entendre qu’il faut s’unir derrière le maréchal Pétain pour « refaire la France » aurait pu laisser cette opportunité en jachère en ne suivant pas le fil du courant le plus extrémiste. De fait, c’est l’inverse qui se produit, les maurassiens et les journaux à succès de la plus droitière des presses deviennent les prescripteurs de ce nouvel ordre moral qui n’a que pour seule réponse au désastre, le déboulonnage de plaques bleues.
La campagne de revanche politique qui s’affirme à travers la destruction et la chasse aux symboles républicains résulte de la conjonction de la campagne de presse menée par ces journaux, de l’agitation des cercles d’activistes notamment issus du PPF de Doriot, et surtout de l’action de l’État dans une sorte de tragi-comédie où les rôles ont été soigneusement répartis. Officiellement, la puissance publique n’a que le souci de la tranquillité publique, qui concrètement, est loin d’être menacée. Les arrachages de plaques menés par les plus déterminés et montés en épingle par Gringoire sont absolument minoritaires et faibles en valeur absolue mais ils servent de prétexte. La conjonction des évènements est donc bien opportune.
Qui plus est, l’action de l’État, loin d’être ponctuelle et apaisante, se traduit par une opération massive qui a du mal à dissimuler les intentions de ses initiateurs. De lourds moyens sont mis en œuvre puisque l’on sollicite des services préfectoraux, des policiers, des gendarmes, etc. Sous cette opération apparaît la vraie nature d’un régime et d’une révolution nationale qui pouvaient être encore mal compris sous le paravent du maréchalisme et du ralliement de l’été 1940. Cette large volonté d’épuration montre que Vichy est l’incarnation d’une contre-révolution en marche. Au-delà en effet de l’anticommunisme ou de la revanche sur le Front populaire, pointe concrètement un rejet des valeurs issues du XVIIIème siècle et de la Révolution Française qui se traduit d’ailleurs tant par la disparition de figures les incarnant que par l’apposition de dénominations qui reflètent leur négation.
NOTES
1. Jean-Marie Guillon, « Les Toponymes de l’espace urbain », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 63 (1999), pp. 137-139.
2. Alary, Eric, « La zone libre, un Midi appauvri », Arkheia, Revue d’histoire. Histoire, mémoire du vingtième siècle en Sud-Ouest, n°14-15-16, 2005.
3. Secondy, Philippe, La persistance du Midi Blanc, Perpignan, Presses Universitaires de Perpignan, 2006. Sagnes, Jean, Le Midi rouge, mythe et réalité, Paris, Anthropos, 1982.
4. Vassakos, Richard, « Les plaques bleues du midi rouge dans la tourmente. L’épuration de la toponymie urbaine en Languedoc-Roussillon sous Vichy », Les Annales du Midi, n° 280, octobre-décembre 2012, pp. 523-539.
5. Delperrié de Bayac, Jacques, Le Royaume du Maréchal : histoire de la zone libre, Paris, R. Laffont, 1975.
6. Chaubin, Hélène, L’Hérault dans la guerre, Paris, Éditions de Borée, 2015.
7. L’Action Française, 4 octobre 1940. Le vieil ami en question est peut-être Abel Pomarède, viticulteur à Pomerols, qui était l’emblème des « ouvriers agricoles monarchistes » dans les milieux d’Action Française. Voir à ce sujet l’introduction de l’ouvrage de Philippe Secondy, op. cit.
8. Gringoire, 25 juillet 1940.
9. Gringoire, 7 novembre 1940.
10. Les odonymes sont les noms propres désignant les voies de communication.
11. Gringoire, 9 janvier 1941.
12. Gringoire, 26 décembre 1940.
13. Gringoire, 21 novembre 1941.
14. Gringoire, 26 décembre 1940.
15. Vassakos, Richard, « L’odonymie en Midi rouge : une arme de « républicanisation » massive », dans Le Midi, les Midis dans la IIIe République, sous la direction de Christian Amalvi, Céline Piot et Alexandre Lafon, Nérac, Éditions d’Albret, 2012, pp. 35-52.
16. Éditorial de Jules Véran dans L’Éclair, cité par l’Action Française, 15 avril 1941.
17. L’Éclair, 12 décembre 1940.
18. AM Béziers, non classé, lettre des cadres du secteur Pétain au président de la LFC de Béziers, 27 novembre 1941, document aimablement transmis par monsieur Jacques Cros.
19. L’Éclair, 3 mars 1942.
20. Gringoire, 21 novembre 1941.
21. AD Hérault, 1000W 31, lettre du préfet au maire de Montpellier, 20 novembre 1940.
22. Gringoire, 5 décembre 1940.
23. AD Hérault, 1000W 31, rapport de la direction de la sûreté nationale, 22 novembre 1940.
24. L’Éclair, 8 décembre 1940.
25. AD Hérault, 1000W 31, rapport du commissaire de police de Pézenas, 9 décembre 1940.
26. Gringoire, 7 novembre 1940.
27. Amalvi, Christian, Richard Vassakos, « Controverses autour des statues de Montpellier de la Révolution à 2010 », dans Christian Amalvi et Rémy Pech (sous la direction de.), Histoire de Montpellier, Toulouse, Privat, 2015, pp. 785-796.
28. Gringoire, 26 décembre 1940.
29. Gringoire, 28 novembre 1940.
30. Gringoire, 5 décembre 1940.
31. La plaque a été retrouvée et restaurée grâce aux efforts de Jean-Claude Richard-Ralite. Remise en place en 2014, elle n’a toujours pas été inaugurée alors que désormais Jean Zay est entré au Panthéon. Tous nos remerciements à Jean-Claude Richard-Ralite pour les informations et les photographies qu’il a bien voulu nous transmettre.
32. AD Hérault, 1000W 31, circulaire diffusée aux préfets, 22 octobre 1940.
33. AD Hérault, 1000W 31, lettre du sous-préfet de Béziers au préfet.
34. AD Hérault, 1000W 31, circulaire aux maires du département, 6 janvier 1941.
35. AD Hérault 100W 31, note du 4 novembre 1940 ordonnant la saisie des drapeaux.
36. Id., drapeaux saisis à Cazouls-les-Béziers, Loupian, Lansargues, Saint-Jean-de-Fos, Nizas, Cazouls-d’Hérault, Mèze, Pérols, Lézignan-la-Cèbe, Le Bousquet d’Orb, Gigean.
37. AD Hérault, 100W 31, rapport du commissaire spécial de police 30 octobre 1940.
38. AD Hérault, 2W 88, Cruzy, délibération municipale, 30 novembre 1940.
39. AD Hérault, 2W 88, délibérations municipales du 17 janvier et du 15 juillet 1941.
40. AD Hérault, 2W 88, Saint-Pargoire, délibération municipale, 9 novembre 1940.
41. AD Hérault, 2W 88, Castelnau-le-Lez, délibération municipale, 18 janvier 1941.
42. AD Hérault, 1000W 31, lettre du maire de Villeveyrac au préfet, 19 novembre 1940.
43. AD Hérault, 1000W 31, lettre du maire de Cazouls-les-Béziers, 9 novembre 1940.
44. AD Hérault, 2W 88, Villeneuve-les-Béziers, délibération municipale du 22 janvier 1941.
45. AD Hérault, 2W 88, Villeneuve-les-Béziers, délibération municipale du 9 avril 1937.
46. Vassakos, Richard, « L’élu, l’apôtre et le martyr. Essai de typologie sur la mémoire viticole à travers la toponymie urbaine », dans Piot Céline, Chanoir Yohann, (sous la direction de.), Figures paysannes en France : mythes regards et sociétés, Nérac, Éditions d’Albret, 2012, pp. 167-189.
47. L’Éclair, 27 mai 1942.
48. Le Petit Méridional, 27 mai 1942.
49. L’Éclair, 28 mai 1942.
50. Sagnes, Jean, « Jaurès dans l›espace urbain départemental » dans Jaurès et le Midi viticole, Montpellier, Max Chaleil-Les Presses du Languedoc, 1988.
51. AD Hérault, 1000W 31, réponse des communes au préfet, janvier 1941.
52. AD Hérault, 1000W 31, délibération municipale, 18 janvier 1941.
53. AD Hérault, 2W 88, Paulhan, délibération municipale, 15 février 1941.
54. AD Hérault, 2W 88, lettre du maire de Montagnac au préfet de l’Hérault du 28 janvier 1941.
55. Iancu, Mickaël, Spoliations, déportations, résistance, des juifs à Montpellier et dans l’Hérault, 1940-1944, Avignon, Éditions A. Barthélémy, 2000.
56. Le Petit Méridional, 11 janvier 1941.