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Description

Les pensions abbatiales des prieurés grandmontains

Le fonds de l’ordre et de l’abbaye de Grandmont, conservé aux Archives départementales de la Haute-Vienne et récemment classé, comporte un gros tiers de documents concernant les prieurés et autres établissements grandmontains. Malheureusement les deux prieurés héraultais, Montaubérou et Saint-Michel de Lodève, n’y sont représentés que par quatre documents n’offrant qu’assez peu d’informations sur leur histoire. Nous les livrons néanmoins à la curiosité des érudits.

La plus ancienne de ces pièces est une menace d’interdit jetée sur Montaubérou et Saint-Michel, afin d’obtenir le paiement des pensions abbatiales. En effet, chacun des trente-neuf prieurés était tenu de verser à l’abbé de Grandmont, en tant qu’abbé général de l’ordre, une redevance annuelle intitulée « pension ». Près de deux cents pièces de parchemin et de papier relatives à ces pensions nous sont parvenues, attestant les difficultés que les abbés rencontrèrent en tout temps pour obtenir leur versement. La papauté dut s’en mêler à maintes reprises. Ainsi, en 1324, sept ans après avoir structuré la nébuleuse grandmontaine selon le modèle standard du monachisme de l’époque, le pape Jean XXII informait l’ordre qu’il avait chargé certains diginitaires de Limoges d’obliger les prieurs et administrateurs de l’ordre à payer les pensions. En 1346, une bulle de Clément VI revint sur divers points d’organisation de l’ordre, dont les pensions. Un siècle plus tard (1467), Paul III dut nommer des arbitres pour juger un différend survenu à ce sujet avec le prieur du Bois de Vincennes. Sans doute entrait-il autant de négligence que de mauvaise volonté dans ces mauvais paiements, car les pensions étaient en général modiques. Mais leur total représentait pour l’abbé un revenu conséquent de près de 1 500 livres par an (toutefois, Grandmont devait verser à Rome une somme pratiquement équivalente).

Le document est un petit parchemin d’une vingtaine de centimètres de large, dont voici la traduction (nous publions le texte en annexe).

« Guillaume, par la permission divine abbé du monastère et de tout l’ordre de Grandmont rattaché à l’Église romaine sans aucun intermédiaire, à notre cher fils en le Christ, Frère … [ici un blanc de la longueur d’une demi-ligne environ] et à tous les autres qui nous sont subordonnés, salut dans le Seigneur. En vertu de la sainte obédience et sous peine de l’excommunication que nous portons contre vous et chacun des vôtres par cet écrit si vous ne faisiez ce que nous vous mandons, nous vous mandons expressément :
– que vous vous rendiez personnellement aux prieurés de Montaubérou et de Saint-Michel, et que vous avertissiez les prieurs de nos prieurés conventuels susdits, une première fois, une deuxième et une troisième, et par un édit péremptoire pour toutes, de payer et remettre, sous huit jours après une sommation de cette sorte à eux faite et intimée, outre les dépenses des écrits et du messager, à nous ou à notre receveur général, les sommes suivantes, pour le prieur de Montaubérou 24 livres tournois et 4 gros catalans par once, et pour le prieur de Saint-Michel 9 livres et 15 sous tournois et 2 gros aussi catalans par once, sommes dont ils nous sont redevables à raison des pensions annuelles qui sont dues à nous et à notre monastère ;
– et si, au plus tard une fois le terme de l’Ascension écoulé, malgré votre avertissement, ils ne le font pas, que vous les suspendiez a divinis, et au bout de quatre jours immédiatement suivants nous leur jetons l’interdit et les excommunions ;
– que vous les déclariez publiquement ainsi excommuniés dans chacune de vos églises les dimanches et jours de fêtes ;
– au cas où ils voudraient au contraire alléguer une cause juste et raisonnable, que vous les citiez à comparaître pour plaider celle-ci, à Grandmont, devant nous ou notre vicaire général, à tel jour précisé et idoine, non férié, afin qu’ils disent et justifient les raisons et arguments en vertu desquels ils ne sont aucunement tenus aux susdites pensions, et qu’ils fassent ultérieurement selon le droit et la raison, de telle sorte que, ayant été ainsi procédé par vous, il ne puisse nous être justement objecté ou reproché de négligence ou de mépris ;
– enfin que vous ayez soin, de vive voix ou par écrit, de nous rendre compte fidèlement de ce que vous aurez fait
 ». […]

Informations complémentaires

Année de publication

2010

Nombre de pages

4

Auteur(s)

Robert CHANAUD

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf