Les Annonces, Affiches et Avis Divers et le Journal de la Généralité de Montpellier
Les Annonces, Affiches et Avis Divers
et le Journal de la Généralité de Montpellier
p. 113 à 122
Cet article est extrait de notre mémoire de Maîtrise d’Histoire de l’Art soutenu en octobre 2000 sous la direction du Professeur Laure Pellicer, intitulé « Le goût des Montpelliérains à la fin de l’Ancien Régime : à partir des Annonces, Affiches et Avis Divers et du Journal de la Généralité de Montpellier. »
Nous tenons à souligner, que l’ampleur d’un tel sujet ne pouvant être contenu dans un seul article, nous limiterons nos propos aux domaines ayant trait à la culture matérielle, à savoir la décoration intérieure mais aussi la parure et les soins corporels.
Analysé au XVIIIe siècle dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert par Voltaire et Montesquieu, le goût est défini par la promptitude, la finesse, le discernement. Emmanuel Kant, dans la Critique de la faculté de juger (1790), en donne une analyse rigoureuse. Le jugement, le goût, qui est subjectif, présente néanmoins un trait qui lui est propre, à savoir qu’il requiert l’universalité, l’adhésion de tous.
Selon Watelet et Levesque 1, le goût est un « mot qui ne déʃigne dans ʃon origine que les ʃenʃations de la langue et du palais, a pris une ʃigniʃication plus étendue. (…) On a emprunté ʃon nom pour déʃigner cette qualité de l’eʃprit qui Juge du mérite des ouvrages dans les lettres et dans les arts. (..) Le goût ayant donc été adapté à tout, tout le monde ʃe pique d’en avoir. Ce mot a été ʃi ʃouvent employé, et ʃi ʃouvent mal appliqué, qu’il a fini par n’avoir plus qu’une ʃignification vague, et quelquefois même inintelligible. (…). Levesque conclut donc : Il ʃemble que le goût ne ʃoit autre choʃe que le ʃentiment des convenances. Ce qui choque le goût c’eʃt ce qui ʃ’écarte des convenances. Il n’y a d’inné que les diʃpoʃition au goût, mais le goût lui-même dépend de l’étude, de la pratique, de l’expérience, de l’habitude de comparer, et de la réflexion. »
Très largement empreinte des idéaux des Lumières et de l’encyclopédisme, Montpellier connaît dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, une accalmie en matière religieuse et un essor économique important, dû principalement au développement des industries des toiles imprimées et des indiennes destinées à la parure des petites gens. Son statut de capitale provinciale, siège de la Cour des Comptes, Aides et Finances, et des États du Languedoc, fait de cette ville un lieu attractif pour les notables, mais aussi pour les étrangers, qui de par leur présence apportent des influences extérieures nécessaires au développement du goût. Cette ville va voir s’affirmer des hommes entreprenants et ouverts, qualifies par nos soins « d’acteurs du goût », qui sauront s’adapter non seulement aux productions nouvelles, mais aussi aux nouveaux goûts qui donnent alors une certaine cohésion à l’Europe « éclairée ».
L’un des facteurs essentiels de cette ouverture aux goûts et aux nouvelles techniques, est sans aucun doute l’organe de presse qui s’établit en cette ville dès 1770. Jusqu’à cette date Montpellier se tenait au courant du cours des choses grâce au « Mercure de France » et à la « Gazette ».
Le premier de ces hebdomadaires désigné sous le nom d’Annonces, Affiches et Avis Divers 2, débute sa parution le 19 mars 1770, et ce jusqu’au 25 mai 1776. Ce journal fut fondé par Marguerite Pagès-Marinier, dentiste de son état ; elle est assistée par le maître de pension Cuminal-Duhoulet ; l’impression était quant à elle assurée par des artisans locaux tels que Auguste-François Rochard jusqu’en 1774, puis par Jean Martel ; en mai et juin 1775 l’impression se fait à Nîmes chez Pierre Beaume, puis chez la veuve Belle, avant d’être transférée à Avignon dès la mi-juin, chez les frères Bonnet.
Le prix de la souscription d’abord fixé à 6 livres par an, passe en 1773 à 6 livres 12 sous pour les habitants de la ville ; pour les souscripteurs extérieurs il reste stabilisé à 9 livres, Cette feuille privilégiée comporte essentiellement des informations locales ayant trait au trafic maritime, aux ventes et aux locations diverses, aux nouvelles littéraires…
Confrontée à de nombreux problèmes, cette feuille disparaîtra et sera remplacée dès le 30 novembre 1780 par le Journal de la Généralité de Montpellier.
Cette seconde feuille est assez proche de la première bien que son centre d’intérêt soit plus large que celui de la précédente ; elle contient essentiellement des annonces et avis divers, des articles relatifs au commerce, à l’agriculture, à la médecine et à la chirurgie, à la législation et jurisprudence, à la poésie, au théâtre et aux nouvelles locales ; les informations politiques n’apparaissent quant à elles qu’au moment de la convocation des Assemblées de Notables.
Ce journal paraît chaque jeudi, cependant de nombreuses lacunes persistent, notamment pour les vingt-neuf premiers numéros, et pour ceux du 10 décembre 1785 au 6 janvier 1787, ou encore en ce qui concerne la neuvième année (1788-1789).
Cet hebdomadaire fut fondé par Larmand du Harlay qui cédera sa place à Dominique Grammaison qui ne sera en fait que le prête-nom du véritable propriétaire, Jean-François Picot.
Le prix de la souscription est quant à lui, de 7 livres 4 sous pour les habitants de la ville, et de 9 livres port franc pour l’extérieur. Cette feuille se poursuivra jusqu’au 28 avril 1790 par le Journal du Département de l’Hérault.
Bien qu’ayant eu des succès médiocres, ces deux feuilles permettent de mesurer non seulement, la diffusion des idéaux des Lumières en province, mais aussi de se faire une idée de la vie urbaine et du goût proprement dit des Montpelliérains en cette fin de siècle.
La vente de marchandises constituant une part essentielle dans le développement du « goût », a besoin d’être connue et reconnue du public ; c’est en ce sens que l’utilisation de la le « réclame » dans la presse locale semble être la meilleure manière d’attirer l’attention de l’acheteur potentiel, non en essayant de le convaincre d’acheter, mais tout simplement en lui suggérant de passer à la boutique afin qu’il se fasse sa propre opinion sur la qualité et l’intérêt de la marchandise proposée. L’un de ces marchands, jouant de finesse et de subtilité vis-à-vis des acheteurs, annonce : « On peut voir chez M. Fontanel, Libraire, rue du Gouvernement deux magnifiques Inʃtruments du célèbre d’Ollon, Opticien du Roi d’Angleterre : la réputation de l’Auteur ʃuʃʃiroit pour ʃaire l’éloge de ces Inʃtruments ; mais le Public a été ʃï ʃouvent la dupe de ʃa confiance, & l’ignorance a ʃi ʃouvent emprunté le nom des Artiʃtes célèbres, qu’il lui eʃt permis de s’en défier. 3 »
Le recours à l’annonce en tant qu’élément promotionnel était déjà utilisé au XVIIe siècle par les commerçants, et en particulier par les libraires et marchands d’estampes. En effet, selon Marianne Grivel 4 cette publicité aurait vu le jour dans le « Mercure de France » dés sa fondation par l’écrivain Jean Donneau en 1672. Ses travaux de recherches l’ont amenée à consulter ce type d’annonces parues au XVIIIe siècle et dont elle cite certains extraits qui, tout en étant distants d’environ un siècle de ceux qui concernent notre étude, diffèrent très peu dans le style et dans la forme de ceux de la fin du XVIIIe siècle. Ainsi, à Paris au mois de novembre 1704, l’on peut lire l’annonce suivante dans le « Mercure de France » : « Mr Nicolas Langlois, libraire et marchand d’eʃtampes, appelées communément images, ou taille-douce, vient de mettre en lumière de beau recueil des veues et perʃpectives de Paris et des chaʃteaux de France. (…) On trouve aussi chez ledit Langlois pluʃieurs livres qui regardent la ʃcience et la piété : ils ʃont ʃur la peinture, l’architecture, la géographie et ʃur l’hiʃtoire. On y trouve auʃʃi des figures et toutes ʃortes d’eʃtampes des plus habiles graveurs ʃur divers ʃujets (…) et tout ce qu’on peut ʃouhaiter de curieux dans les marchandises de librairie et d’eʃtampes. m
Les annonces qui ont fait l’objet de notre étude semblent se placer dans la continuité de celles de la fin du XVIIe siècle et du début du XVIIIe. Ce sont, dans les deux dernières décennies de l’Ancien Régime, des articles publicitaires relativement fréquents, mais qui n’ont cependant pas l’apparence des « panneaux publicitaires » tels que nous les concevons à l’heure actuelle ; aucun emplacement spécifique ne leur est réservé ; aucune image n’attire l’œil du lecteur. Ils s’intègrent parfaitement dans le corps du texte, seules les mentions « Avis Divers », « Avis aux Amateurs », « Livres Nouveaux », ou bien tout simplement « A Vendre » constituent un point de repère pour le lecteur. Les articles proposés sont le plus souvent énoncés les uns à la suite des autres sans aucun détail ni prix ; les marchands, en supposant que ce soient eux qui rédigent le contenu de l’annonce, insistent surtout sur la qualité des objets proposés mais aussi sur leur provenance, et en particulier sur le nom de l’artiste, de préférence connu de la population, comme par exemple dans celle du 4 novembre 1771 qui signale qu’un « marchand de cette Ville fait ʃçavoir au Public qu’il a les efféts ʃuivants à vendre : Eʃtampes de Balechou, Vernet, Greuze, Tableaux originaux de Raphaél, Bourdon, Rigaud » ; il en est de même dans une annonce du 4 décembre 1784 dans laquelle on propose « des papiers peints de la Manufacture Royale du ʃieur Réveillon qui a de véritables correʃpondans établis en cette ville. »
En réalité, cette étude de la presse locale à la fin de l’Ancien Régime nous conforte dans l’idée, que nous avons hérité d’un savoir-faire bien antérieur à notre siècle. La seule différence notable réside dans l’absence quasi systématique du nom de l’enseigne du magasin. La seule mention faite à ce sujet se trouve dans un « Avis Divers » daté du 26 décembre 1774 qui signale la vente de « Nouveautés chez Fontanel Libraire et Marchand d’eʃtampes rue du Gouvernement, à l’enʃeigne du Rendez-vous des Artiʃtes. » Selon Marianne Grivel, le choix fait par le commerçant est une « assimilation inconsciente et quasi magique dans l’esprit du marchand entre l’enseigne et le but vers lequel tendent ses efforts. » 5
Cette hypothèse semble être confirmée par ce curieux personnage que fut Fontanel ; son enseigne illustre parfaitement le dévouement avec lequel il mènera ses activités au sein de la société montpelliéraine.
Abraham Fontanel s’installe officiellement à Montpellier en 1773, au moment même où il obtient son brevet de libraire. Dès cet instant, ce commerçant atypique sera au centre du processus de développement du goût à Montpellier. La personnalité de cet homme transparaît dans les annonces qu’il fait publier ; nous noterons surtout les ambitions qu’il affiche et les buts qu’il s’est donné d’atteindre. En effet, l’intitulé même de son enseigne laisse songeur : « Au Rendez-Vous des Artistes » ; nul ne peut nier qu’elle est le reflet matériel de son désir conscient ou non de faire de sa boutique le centre de la vie artistique et du « bon goût » dans la ville de Montpellier. Nous espérons d’ailleurs que l’étude que nous menons actuellement sur ce personnage et sur le commerce d’art en province à cette époque, et ce, dans le cadre de notre Doctorat, apportera un éclairage nouveau sur les processus et les stratégies commerciales qui ont cours à ce moment là.
D’autres artisans et commerçants, nombreux, vont dès 1770, profiter de ces organes de presse pour promulguer une publicité parfois massive, qui deviendra en tant que telle, un facteur déterminant dans le développement du goût, mais aussi un témoignage historique capital pour les historiens et les historiens de l’art.
L’amélioration du niveau de vie qui touche la quasi-totalité de la population entraîne avec elle ses corollaires habituels : « frénésie de la consommation, futilité, indifférence en matière religieuse » 6. Dès lors de nombreuses publicités paraissant dans la presse locale suggèrent au public la recherche d’un cadre de vie plus raffiné, proche de celui que l’on peut trouver dans la capitale. Cependant le constat reste mitigé entre modernité et traditions locales.
Pour le chroniqueur anonyme de 1768 7, Montpellier est un réservoir de maisons de premier, second, troisième ou quatrième ordre, selon qu’elles soient plus ou moins grandes et luxueuses. Une impression similaire se dégage de ces annonces. La majorité de celles qui concernent la vente de maisons ou d’appartements signalent en général la présence d’un salon à manger, d’un salon de compagnie, d’un cabinet au moins avec son lieu à l’anglaise, de chambres à alcôve avec des cheminées de marbre bardées et plafonnées comme les autres pièces. On annonce parfois l’existence d’une terrasse avec vue sur le jardin, mais de façon générale l’évocation d’une nature proche, bienfaisante et salutaire est une constante dans ces ventes.
Pour sa part le chroniqueur anonyme de 1768 considère que « tous ces édifices sont bâtis en pierre de taille ; les pavés en pierre appelée « bars » ; les plafônds en plâtre ; les cheminées, tables, encognures en marbre et miroirs. La propreté et le goût règnent dans toutes, même celles des simples particuliers. » 8
Ce témoignage bien qu’intéressant, reste assez sommaire. Néanmoins il peut être augmenté par divers éléments, concernant la décoration intérieure, glanés dans la presse, et dont la combinaison nous permettra de recréer l’atmosphère d’un intérieur montpelliérain à la fin de l’Ancien Régime.
Les manuels d’histoire de l’art n’y font guère allusion et pourtant il fut un élément évident de l’évolution du goût des Français. « Le papier peint dans sa fragilité même, à cause de son emploi commode, devenait le signe d’une société nouvelle qui trouvait ainsi le cadre de sa « promotion » au gré de ses « mutations ». Davantage qu’un décor de couleur, il était le reflet des aspirations et des goûts d’une famille. Sentimental, moralisateur, exotique, patriotique, il était un cadre des mœurs. » 9
Ce que nous appelons communément papier peint Il, à savoir un rouleau 10 de papier sur lequel des motifs furent imprimés en détrempe par le biais de planches de bois gravées, ne s’est imposé que tardivement en France contrairement à l’Angleterre 11. Ce retard semble être dû à l’emploi que l’on faisait en France, d’une formule plus traditionnelle consistant à faire une impression à l’encre grasse noire rehaussée de couleurs au pinceau ou au pochoir sur une feuille de papier ; cette méthode s’est maintenue, semble-t-il, jusque dans les années 1760. La naissance du papier peint découle en réalité, comme beaucoup d’autres inventions, de la nécessité de remplacer un produit coûteux, en l’occurrence les tapisseries de haute lisse et les soieries d’ameublement, par un équivalent meilleur marché accessible à une part plus importante de la population.
Une fois encore la presse illustre parfaitement cette concurrence ; les annonces de ventes de tapisseries d’Aubusson tiennent une place importante dans les feuilles hebdomadaires, sans pour autant aboutir ; certaines d’entre elles paraissent successivement chaque semaine durant plusieurs mois. Le même désintérêt est à noter pour les revêtements d’ameublement.
Selon Henri Clouzot 12, c’est l’inspecteur des manufactures Savary des Bruslons qui signala le premier la vogue naissante du papier peint dans son « Dictionnaire du commerce » publié en 1723 : « Cette espèce de tapisserie de papier qui n’avait longtemps servi qu’aux gens de la campagne et au petit peuple de Paris, a été poussée vers la fin du XVIIe siècle à un point de perfection et d’agrément qu’outre les grands envois qui s’en fait pour les pays étrangers et pour les principales villes du royaume, il n’est plus de maisons à Paris, pour magnifique qu’elle soit, qui n’ait quelque endroit, soit garde-robes, soit lieux encore plus secrets, qui n’en soit tapissé et assez agréablement orné. » Il ajoute de plus : « L’on ne dit ici quels sont les sujets représentés sur ces légères tapisseries, cela dépendant du goût et du génie du peintre ; mais il semble que les grotesques et les compartiments mêlés de fleurs, de fruits, d’animaux et de quelques petits personnages ont jusqu’ici mieux réussi que les paysages et les espèces de haute lisse qu’on y a quelquefois voulu peindre. »
On distingue deux catégories de papiers peints : les plus courants répètent sur chaque feuille le même motif (damiers, rayures, mosaïques, compartiments, arabesques…) qui relèvent essentiellement du domaine du dominotier ; tandis que les autres peuvent être qualifiés de « belles sortes » ; leur dessin raccordé compose un tableau tels que des paysages, des imitations de, papier de Chine, des ornements architecturaux ou bien encore des reproductions de tapisseries de haute lisse.
Montpellier comme la plupart des grandes villes de province dispose dès les années 1770 des produits les plus en vogue à cette époque. Cependant les années 1780 semblent marquer un tournant dans la consommation du papier peint : l’installation de Fontanel 13 et l’expansion de, son magasin, ainsi que la création d’une « Manufacture & Magaʃins de Papiers peints hors la Porte des Carmes » 14 à l’enseigne du « Globe » en sont des éléments révélateurs. Dès lors le marché montpelliérain se trouve littéralement submergé par ces diverses productions ; les unes proviennent de la grande, manufacture du célèbre papetier Réveillon 15 dont Fontanel est le correspondant privilégié en cette ville, tandis que les autres sont des modèles originaux du « ʃieur Bedos Graveur du Roi et de la Reine, Deʃʃinateui; Fabricateur des couleurs fines & communes de Paris, Fabricant de papier peint pour tapiʃʃerie. »
Une fois encore Fontanel sera la figure de proue de, la vente de, papier peint et de tous les objets destinés à la décoration intérieure ; il proposera même dans l’un de ses avis du 4 octobre 1783 de diriger lui-même les travaux de collage « juʃqu’à la perfèction de l’ouvrage ». Ses avis publicitaires, comme à leur habitude, insistent sur la modicité des prix pratiqués dans ce magasin, mais aussi sur la qualité des articles proposés : « Il ʃuffiroit du ʃeul nom de l’Artiʃte à la tête de chaque pièce de Papiers, ʃortant directement de ʃes Atteliers (sic), pour aʃʃurer le Public qu’il n’eʃt pas trompé dans ʃes achats, & qu’il prend la bonne marchandiʃe. » 16
L’expansion de, son commerce ainsi que l’accroissement de la consommation de papier peint peut se ressentir dans ces mêmes articles. Le 7 décembre 1782 ce sont cent-quarante-huit dessins différents qui sont proposés par Fontznel ; le 4 décembre 1784 le nombre de ces dessins s’élève à quatre cent-soixante exemplaires disponibles immédiatement « ʃans y comprendre ce qui concerne l’architecture & les divers ornemens qui l’accompagnent comme deʃʃus de porte, ʃoit en imitation du marbre ou du plâtre, ʃoit en diverʃes couleurs. »
L’essor commercial que prit le papier peint durant ces années est sans aucun doute le reflet d’un engouement général pour ce type de décoration accessible au plus grand nombre.
Fontanel propose pour sa part un assortiment des plus beaux papiers peints français et étrangers « imitant les Gobelins & les plus riches étoffes qui ʃe fabriquent à Lyon ʃoit rehauʃʃé en or, ʃoit en couleurs nuées » 17. « On y trouvera en outre toute ʃorte d’ornemens imitant la ʃculpture, comme friʃes, corniches, plinthes, cymaiʃes, hauteur d’appui ou lambris, panneaux, pilaʃtres, trophées, balcons, marbre, chambranles des portes, plafonds à l’antique, bordures ʃculptées propres à être appliquées ʃur des liteaux plats, & produire la plus parfaite illuʃion, deʃʃus de porte à bas-relief, Jeux d’enfans, autres à urnes & à médaillon, deʃʃeins, de poêles en carreau de fayance & porcelaine, d’un uʃage très agréable pour décorer les gardes-robes, cabinets des bains, papier à tuʃʃilages pour les endroits à niveau des jardins ou terraʃʃes, autres pour galeries, des tours aux tableaux ou eʃtampes, & faits de manière à faire reʃʃortir & valoir les gravures & les cadres dorés ; enfin des baluʃtres d’un relief ʃurprenant, quoique féint, & généralement toutes ʃortes de papiers depuis trois livres le rouleau juʃqu’à quatre-vingt ʃeize livres, ce qui monte ʃucceʃʃivement de vingt ʃous en vingt ʃous on pourrait encore en fournir de plus chers dans les arabeʃques rehauʃʃées d’or. »
Le « ʃieur Bedos » de la Manufacture du « Globe » propose quant à lui des papiers à partir de trente sous jusqu’à dix neuf livres le rouleau. Nous ne pouvons cependant juger de la qualité des papiers proposés ni même de leurs motifs, étant donné qu’il n’est paru qu’un seul article le concernant, et dans lequel l’auteur insistait surtout sur sa formation parisienne et son retour dans sa ville natale
En ce qui concerne la technique du collage des papiers peints, elle est explicitée par Papillon dans une des planches de « l’Encyclopédie ». Les grands tableaux se collaient tous assemblés comme pour une haute lisse, tandis que les papiers « dominotés » étaient collés feuille par feuille et juxtaposés. Une bordure formant un galon couvrait les joints dans le sens de la hauteur et dissimulait ainsi les raccords disgracieux. Cette même bordure encadrait également le panneau de haut en bas, de sorte que les murs offraient l’aspect de feuilles de paravent. Une fois l’opération de collage exécutée, le papier peint était, le plus souvent, recouvert d’une couche de vernis comme en témoigne un article du 13 janvier 1790 dans lequel le « ʃieur Martin fils de l’inventeur des beaux Vernis & Verniʃʃeur du Roi qu’il fait un vernis pour les papiers de teinture, qui, en ajoutant à l’éclat de leurs couleurs, les rend beaucoup plus durables ».
La seconde moitié du XVIIIe siècle est sans contexte la plus belle époque du papier peint. En effet, les progrès techniques, procurant à cette industrie, la pleine possession de ses moyens lui permettent de satisfaire à tous les caprices de la mode, qui délaissant la sévérité des hautes lisses se tournent vers les peintures claires et beaucoup plus riantes de ces papiers destinés, non plus à la décoration de grands appartements d’apparat, mais à de petites pièces plus confortables et mieux distribuées.
Dès lors que nous avons restitué, de façon plus ou moins précise, l’aspect général de la décoration murale, nous allons nous consacrer maintenant au mobilier.
Cet élément à part entière du décor et du confort intérieur est résumé par le chroniqueur anonyme de 1768, de la manière suivante : « Les ameublemens sont fàstueux et trop entassés dans les maisons. Les lits, les tapisseries, commodes, tables, encognures (sic), miroirs, lustres, girandolles (sic), sophas (sic), canapés, chaises longues, fauteuils, et toutes sortes de sièges font l’ornement des maisons. Tout y est recherché pour la richesse des étoffés, des matières et le goût. » 18
Cette énumération du mobilier ne permet en rien de l’identifier précisément, contrairement à certaines annonces très détaillées que l’on peut trouver dans les deux feuilles hebdomadaires ayant fait l’objet de notre lecture attentive. Il est cependant important de souligner que les A.A.A.D. comportent à elles seules l’essentiel de ces annonces ; le J.G.M. ne comporte pour sa part que quelques avis susceptibles d’apporter quelques éléments à notre conclusion. Plusieurs annonces font quant à elles, référence à des meubles d’ébénisterie, dont un dépôt se trouve chez les « ʃieurs Decorio fils & Cie Miroitiers à la Grand’rue » 19.
La majorité des meubles d’ébénisterie correspond à des tables, des bureaux ou bien encore des secrétaires en marqueterie et bois plaqué. Le seul meuble estampillé mis en vente se trouve dans la feuille hebdomadaire du 10 décembre 1784 : « Un grand bureau en or moulu, en écaille, du célèbre Boulle ; une Pendule en or moulu, du même Artiʃte. »
L’essentiel des ventes consiste en meubles de repos, de rangement, servant à la toilette, ou bien encore à protéger du vent ou du feu.
Les lits répertoriés sont pour l’essentiel « à la polonoiʃe ʃculptés avec baldaquin, plumets dorés, et roulettes à l’angloiʃe ». Ce type de lit est selon Pierre Verlet 20, très répandu dans le mobilier élégant du XVIIIe siècle. Il est parfois assimilé au lit à la romaine, à la turque ou au lit de travers par Rouho 21. Il est surmonté d’un dais de dimension inférieure à la surface du lit, et porté par quatre montants en partie métalliques, galbés (en forme de « S » ou de « C »). Nous avons également trouvé la mention très fréquente de lits à la « Ducheʃʃe avec ciel et férrure » 22. Ce type de lit est plutôt destiné selon Pierre Verlet, à des chambres plus petites, mieux chauffées, et ce dès les années 1700. Sa fonctionnalité réside dans le fait que son impériale n’est maintenue que par l’arrière et par quelques appuis pris au mur ou au plafond. Ce système permettait ainsi à l’avant du lit d’être dégagé contrairement aux autres modèles qui étaient placés dans une niche ou une alcôve, de manière à ce que l’un de leurs côté soit appliqué le long du mur.
Ce type de disposition est, nous l’avons vu dans la partie relative à l’agencement intérieur, très courante dans les demeures montpelliéraines. La distribution intérieure étant en étroite corrélation avec le mobilier, la présence de galetas ne pouvait qu’entraîner celle de lits à tombeau tels qu’ils nous sont signalés le 10 décembre 1770.
Nicole de Reynies citant le « Grand vocabulaire français » souligne que ces sortes de lits étaient avant tout destinées aux gens modestes ou au personnel. Leur invention découla de la nécessité de les placer dans ces galetas dont le toit et le comble empêchaient qu’on ne leur donna autant de hauteur aux pieds qu’à la tête. Cependant il est toutefois possible de les trouver « indifféremment partout des les appartements qui ne sont pas de parade » 23.
Les autres meubles de repos consistent quant à eux en « Ducheʃʃes en ras de Sicile verd et velours d’Utrecht tigré » 24 des « fauteuils dorés et des chaiʃes à la Reine peintes » 25 des « cabriolets garnis en ʃoie ou en canne » 26 ou bien encore des « bergères » 27, des « veilleuʃes » 28 ou bien encore des « ottomanes » 29.
Les meubles de rangement sont essentiellement du type commodes, armoires de noyer en général, « chiffonnières » ou « vuides-poches » (sic), buffets, cabinets et secrétaires pour les papiers et les collections diverses, sans oublier les tablettes de bibliothèques et autres étagères. Il faut souligner que les commodes et les secrétaires peuvent être classés dans les meubles d’ébénisterie étant donné qu’ils font appel aux techniques du placage et de la marqueterie. On peut de même ajouter à ce type de meubles les tables de jeu à l’exemple de celle annoncée le 20 novembre 1784 : « Un beau Trictrac neuf, dont le fond & bandes ʃont de bois d’ébène, plaqué en ivoire, les Dames d’ivoire & d’ébène, les cornets en cuir, avec toutes fes dépendances, du prix de cinq louis d’or. »
Les simples tables sont quant à elles très nombreuses dans ces avis de vente, elles sont de cuisine en simple noyer ; à consoles avec leur dessus de marbre ; à quadrille pliante 30 ; à écrire, propres à être placées dans un cabinet ; à piquet 31 ; à angles ; à déjeuner ; de nuit ou simple pupitre.
Les meubles de toilettes se limitent, quant à eux, à deux mentions, l’une de bidets et l’autre de tables de toilette. Les écrans et les paravents appartiennent pour leur part au domaine des meubles de protection mais ils font néanmoins partie de cet ensemble mobilier qui compose les intérieurs montpelliérains à la fin de l’Ancien Régime.
Une grande partie du mobilier de cette époque était peint afin qu’il s’accorde à la peinture qui revêtait les murs. La dorure était souvent associée à la peinture pour en atténuer l’effet. Cependant la couleur la plus appréciée pour les meubles était le noir, que l’on associait à la patine de l’âge ; pour ce faire la plupart des meubles était en bois d’ébène ou en acajou. La recherche d’harmonie dans une pièce était poussée à l’extrême et, il était du meilleur goût d’assortir la garniture des chaises et des fauteuils aux principales tentures de la pièce ; l’expansion du marché du papier peint obligea les grandes manufactures à créer des motifs accordés pour le revêtement des meubles.
Bien que les tissus d’ameublement en soie aient connu une certaine désaffection en matière de décoration murale, étant donné leur coût élevé, ils restèrent néanmoins utilisés pour la garniture des meubles, exception faite de quelques meubles en « peau de marroquin (sic) rouge avec garniture de clous » 32, ou en damas cramoisi. Les rideaux de fenêtres étaient quant à eux le plus souvent en taffetas, tandis que les couvertures et les courtes-pointes étaient en indienne.
La plus grande partie de l’éclairage semble avoir été faite grâce à l’utilisation des bougies et des chandelles de toutes sortes que l’on pouvait se procurer dans le magasin de Fontanel. Cependant un article du 2 juillet 1785 fait la « DESCRIPTION d’une Lampe avec laquelle on peut lire la nuit dans ʃon lit ʃans craindre les accidens du feu ; lue à la Société royale des Sciences de Montpellier le 16 Juin 1785 » 33.
Les bougies à cire d’abeilles étaient essentiellement réservées à la classe aisée étant donné leur coût élevé.
Autre élément incontournable de la décoration intérieure, les fleurs très en vogue à cette époque, fraîches ou artificielles dans des niches vitrées, leur utilisation est d’ailleurs conseillée dès 1780 par Le Camus de Mézières. Une fois de plus Montpellier dispose de ce genre de commerce comme en témoigne l’article du 13 janvier 1790 consacré à « Madame Arnaffant », ou bien encore ceux relatifs à la vente d’uʃtenfiles en terre de pipe & mi-porcelaine ; fàit en blanc, peints en couleur qui imite parfaitement la porcelaine de Sève, celle de Saxe & du Japon. Les couleurs en ʃont des plus fines, & les deʃʃéins des plus recherchés. On trouve dans ce magafin tout ce qu’on peut déʃirer pour ce qui concerne les ʃérvices de table, la toilette, & la décoration des appartemens à fçavoir vaʃes à fleurs, figures en bifquet blanc d’une ʃculpture ʃʃemblable à celle de Sève, grandes fontaines » 34…
Bien que la notion de chauffage suggère plus une nécessité qu’un artifice, plusieurs avis consécutifs, parus durant l’année 1787 et concernant un certain « Carey » inventeur d’un poêle économique, semblent objecter cette idée. En effet, selon les dires de l’article ces poêles peuvent être placés n’importe où « ʃans craindre pour le feu » ; et être ornés selon les goûts, de dorure, sculpture, peinture, faïence, de porcelaine et de stuc. Cet « Artiʃte les aʃʃimile même avec les meubles de l’appartemens où ils ʃe trouvent ; ils ʃont utiles dans les Salles à manger, les grands Veʃtibules & Corridors, les Orangeries ou Serres pour conʃerver toutes ʃortes d’arbres & fleurs. »
En effet, selon Daniel Roche, « il n’y a pas de révolution mais une stabilité technique, peu à peu ébranlée par le travail des constructeurs, l’intelligence des architectes, les exigences des clientèles diverses et de nouveaux usages » 35. En fait dit-il, « une longue période s’achève pendant laquelle deux ,filières techniques s’affrontent celle de la cheminée, qui règne en maîtresse, celle du poêle, qui concurrence faiblement l’âtre traditionnel, puis gagne du terrain ».
Cette étude stylistique de la décoration intérieure nous a permis de constater les changements de goût en matière d’agencement intérieur, qui se tourne dès lors vers des lieux plus intimes. De plus, la différenciation des pièces permet une autre « philosophie » de l’ameublement et de la décoration murale ; l’accent est mis avant tout sur la recherche de clarté, de luminosité et d’harmonie tant dans les papiers peints que dans les peintures diverses qui ornent les meubles ou les murs, donnant parfois l’illusion d’être à l’extérieur. Ce refus des couleurs sombres se retrouve d’ailleurs dans les services de vaisselles que proposent les deux magasins spécialisés de Montpellier.
Cette étude minutieuse de la presse locale nous a permis de mettre en lumière un autre domaine spécifique de la culture matérielle, à savoir celui de la parure et des cosmétiques. Nul n’ignore en effet, la grande influence qu’eurent, sur l’industrie vestimentaire, les innovations techniques et les idées philosophiques de l’époque. En effet, selon Daniel Roche 36, entre le XVIIe et XVIIIe siècle, l’ornement et la parure dictent dans les classes supérieures, aux habitudes masculines et féminines un maximum d’artificialité et de foisonnement décoratif.
Les historiens du vêtement se sont en effet rendu compte que les modes se succèdent non plus en fonction des personnes qui les portent, comme cela fut le cas par exemple avec la robe « à la Pompadour », mais qu’elles sont dorénavant en corrélation directe avec les événements politiques qui ont lieu. Ainsi, les années 1770-1780 virent se succéder, de façon presque ininterrompue des modes, « à la polonaise » 37 (vers 1772-1774) coïncidant avec le partage de l’ancien royaume d’Auguste III ; « à l’anglaise » 38 dans les années 1780 correspondant ici à une forte période d’anglomanie dans tous les domaines, aussi bien en littérature que dans les jardins ; « à la lévite » dont la dénomination orientale et la vogue furent fortement influencées par le théâtre ; sa diffusion est due quant à elle, à la Reine Marie-Antoinette qui l’adopta pour sa première grossesse en 1778. Il y eut beaucoup d’autres robes orientales la « circassienne » qui comportait une soubreveste 39 à manches longues et très étroites, avec une robe ou un manteau retroussé de tous côtés, ayant des manches très courtes coupées en bouche de canon ; la « levantine » entrouvrait une sorte de pelisse ourlée d’hermine sur une soubreveste et un jupon ; la robe « à la sultane » entièrement ouverte devant, à manches courtes, se caractérisait surtout par le contraste des couleurs entre les parties du vêtement, comme d’ailleurs la « circassienne ».
De même, selon François Boucher, l’on peut attribuer le goût très nouveau des pelisses fourrées et bordées de fourrure, apparues après 1770, à l’Orient ; soulignons dès à présent que Montpellier possède deux marchands pelletiers ; dont l’un « vend des fourrures de manteaux pour femmes, des bordures de peliffes en queues de Martre du « canada » de « Pruffe » et de « France » ; bordures et manchons d’hermines, facs de petit-gris pour fourrures d’habits ; facs de Martre du « Canada » ; fourrures d’Ariskin polonaiʃès & Wilchourats fourrés. » 40
Vers 1778-1779 succéda à la vogue déjà ancienne des robes d’indiennes, celle des robes dites « en chemise » et à « la créole » de formes souples et beaucoup plus simples, très proches l’une de l’autre. Les robes blanches beaucoup plus élémentaires reflètent, dit-on, l’influence de la « Nouvelle Héloïse » de Jean-Jacques Rousseau, et celle du mouvement philosophique qui prône l’amour de la campagne et de la nature retrouvée.
Il ne faut tout de même pas omettre l’existence de petits vêtements autres que les robes, qui par leur commodité ou leur coquetterie furent mis à la mode tout au long du siècle, comme par exemple les bonnets.
En ce qui concerne la confection, il faut se rappeler que seuls les tailleurs avaient le privilège de faire les vêtements du dessus, les « gardes robes » et les corsets, cependant les couturières sont indépendantes depuis le règne de Louis XIV, L’année 1776 voit apparaître une nouvelle catégorie d’artisans, les « marchands ou marchandes de modes » venus de la grande corporation des merciers, et qui obtinrent le droit de se constituer en corps indépendant. Ce corps de commerçants, en majorité composé de femmes, peut dès lors travailler et vendre tous les accessoires appliqués aux vêtements, y compris la coiffure ; elles deviennent en ce sens de véritables créatricesde modes, garnissant selon leur imagination les ouvrages du tailleur ou de la couturière.
La broderie trouva elle aussi au XVIIIe siècle des conditions favorables à son expansion facilités pécuniaires, goût du luxe, recherche de fantaisie tout en respectant les obligations d’éthique. Cette époque regorge de textiles variés tels que le taffetas, le satin, le velours etc., qui se prêtaient aisément aux travaux de l’aiguille. La soie, quant à elle, mêlait ses couleurs à celle de l’or et de l’argent.
Ce rappel historique, certes un peu long mais néanmoins nécessaire, résume assez sommairement l’état d’esprit de cette période bien limitée dans le temps et dans un domaine précis : celui de la parure. Il nous permet aussi de constater que la ville de Montpellier en tant que capitale administrative, correspond assez bien à cette évolution historique du comportement vestimentaire. Nous avons pu, grâce notamment au repérage effectué concernant les artisans et les commerçants de la parure, constater que Montpellier disposait à cette époque de tous les éléments nécessaires à l’adoption de ces modes successives.
Deux articles se sont révélés en ce sens, très significatifs de cette « culture des apparences ». Deux « Lettres à l’Auteur du journal », respectivement datées du 20 juillet 1782 et du 28 juin 1783 ont d’autant plus de valeur, qu’il s’agit de lettres de concitoyens, et non plus d’avis publicitaires vantant tel ou tel produit afin de convaincre de potentiels acheteurs.
La première de ces lettres est l’œuvre dune « villageoiʃe » venue, semble-t-il, dans la capitale provinciale pour le mariage d’une cousine, et à l’occasion duquel elle découvre la « parure des Dames » qu’elle qualifie de « modèles » ; elle ajoute « mes yeux venant en-ʃuite (sic) à rencontrer ma robe montée à la mode de nos aïeules, je me trouvai toute mauʃʃade & décontenancée ». Pour y remédier elle se proposa donc de tout imiter. C’est ainsi que les « ouvrières » et les « Marchands » lui confectionnèrent une robe « couleur merde d’oie et une boue de Paris », la première étant selon l’auteur du journal déjà remplacée par la « couleur carmélite ». Il faut souligner en l’occurrence un certain ésotérisme dans les appellations données aux couleurs, cependant nous pouvons constater une volonté de lutter contre les couleurs sombres et grisâtres. Elle prit donc deux robes, l’une à « l’angloiʃe » et l’autre à la « lévite », et acheta « des bordures à glands pour faire remonter en polonaiʃes » ses « robes ʃurannées ».
L’homme était vêtu pour sa part d’un « toupet 41 ébouriffé, de deux boucles qui touchoient preʃque aux épaules, d’une bourʃe » 42 « à la dormeuʃe », d’un frac 43 « prune-Monʃieur » à boutons de nacre, d’une veʃte de baʃin piqué, & d’une culotte de drap de ʃoie noir ; d’un grand chapeau avec un ragotzi (sic) pour gance (sic) ; un bâton d’épine à pomme d’ivoire ornée d’un cordon de poil de chèvre blanc » pour relever cette parure. Cet inventaire vestimentaire se place tout à fait dans l’évolution des modes parisiennes.
La coiffure de la femme est dite « en hériʃʃon, un bandeau de rubans mouchetés & un chapeau à la … (…) avec quantité de plumes ». Ce genre de coiffure semble s’être répandu vers les années 1780 ; les cheveux étaient relevés, crêpés et frisés à la pointe. Sous Louis XVI, on contrebalançait souvent la masse des boucles par un bouquet de fleurs qui était séparé par un rang de perles, une natte pendait derrière l’oreille et remontait en torsade, elle partait d’un nœud à ruban attachant le bouquet.
Cette lettre très sommaire, surtout dans le domaine de la coiffure et des chapeaux, peut être complété par un « Avis aux Dames » paru le 13 novembre 1784. Cet article annonce l’arrivée en ville d’un « Marchand Modiʃte de Paris » nommé « Lebrun » qui propose à la clientèle montpelliéraine quantité de « Coëffes & Chapeaux à la dernière mode ; ʃavoir à la Figaro 44, à la Danaïde, à la Minerve, à la Ste. Huberti, à l’Ecoʃʃoiʃe, au Globe, à la Gondole, au Turban, à la Caravane, à l’Angloiʃe, à la Religieuʃe, au Nautonnier (sic) ; Chapeaux en chemiʃe, Manteaux à trois collets. Fichus de parure, autres de Colin & Colinette fort bien aʃʃortis aux Coëffès & Chapeaux dont il eʃt fait mention ci-deʃʃus ; il a en outre des Bonnets, demi-Bonnets, Toques & Poufs 45 de différens goûts & du plus nouveau genre ».
Cette « parure » ne saurait être complète sans l’apport de bijoux tels que « des boucles d’oreilles à la myrʃa et un médaillon à perle (…) des boucles à la Chartes » qui selon le rédacteur du journal ne sont plus à la mode ; « il faut dit-il des roʃettes », et « un cordon de montre ventre de grenouille ».
Cependant un article paru le 27 juillet 1782, c’est-à-dire une semaine plus tard, rectifiait une « faute eʃʃentielle à corriger dans la dernière fèuille » ; il signale qu’une « tranʃpoʃition de note à fait croire à quelques Dames de la Ville, qu’aux robes à « l’Angloiʃe » et à la « Lévite » avaient déjà ʃuccédé les robes à la « Jeannette », ce qui les a beaucoup intriguées ». Ce même article du 27 juillet poursuit : « Nous nous empreʃʃons de les raʃʃurer. C’eʃt en place « des Médaillon » qu’on porte « des Jeannettes ». « C’eʃt ainʃi qu’on nomme une longue croix d’or comme en portaient autrefois les Servantes ».
Cette erreur si importante fut-elle, nous permet de constater le changement incessant des modes au cours duquel il était parfois difficile de se repérer surtout lorsque l’on se trouvait en province, ce qui provoquait certainement un léger décalage temporel dans la diffusion de la dernière mode en date. Cette erreur est d’autant plus utile, qu’elle met clairement en lumière, l’artificialité qui règne en cette période d’irréligion croissante. L’auteur de « l’erratum » se désole de voir que « la mode embellit tout, et ne permet pas même d’appercevoir (sic) toute l’indécence de certaines dénominations … déʃigner une croix par le nom de « Jeannette ! », « Ô temps ! », « Ô moeurs ! »
La dernière observation que l’on puisse faire concernant la lettre du 20 juillet 1782, illustre parfaitement cette théorie de Daniel Roche, selon laquelle « la mode est un instrument de la hiérarchisation distinctive des groupes » ; Ce « divin ajuʃtement » comme le nomme cette femme est avant tout destiné à une population urbaine très au fait des plus récentes nouveautés, tandis qu’il paraît extravagant voire ridicule à la campagne.
Cette population urbaine, élément constitutif de la diffusion du nouveau goût, correspond parfaitement à l’auteur de la lettre du 28 juin 1783 qui souligne, que sa maîtresse et lui, n’ont pas laissé passer « aucune mode nouvelle, ʃans l’adopter auʃʃitôt ; & comme elles ʃe ʃuccedent avec une rapidité ʃingulière, une parure toujours différentes nous rend l’un à l’autre un objet toujours nouveau ».
De même que la correspondante précédente, il dresse l’inventaire complet dies différentes modes par lesquelles est passée sa maîtresse, à commencer par « la robe à la françoiʃe » ensuite à la « polonoiʃe », « à la lévite avec une circaʃienne », « à l’angloiʃe » au moment où il écrit, et parfois « en amazone ».
En ce qui concerne les couleurs il cite « le roʃe pâle, le verd anglais, la prune Monʃieur ; le caca dauphin, la merde d’oie, la carmélite, l’œil du roi ».
La coiffure est cette fois en « catogans » alors « qu’il croyait que l’on avait épuiʃé toutes les formes de « chignons poʃʃibles ». Le « catogan » ou « cadogan » suivant les auteurs, n’est autre qu’une coiffure masculine qui devait son nom à lord Cadogan et s’appelait aussi « queue à l’anglaiʃe ». En effet, l’anglomanie qui règne dès les années 1780 en France, voit se développer une mode beaucoup plus masculine qui aboutira un instant au port de la redingote, de la cravate et même des deux montres, et du chapeau de castor par les femmes.
Cette évolution de la mode semble selon les dires de la lettre, ne pas être appréciée par certaines personnes, et notamment par l’auteur des « Contemporaines » 46 s’insurge contre cet état de fait. Il considère pour sa part que : « la baʃe de l’art de plaire par la parure, c’eʃt de faire abʃolument trancher celle des deux ʃexes. Ainʃi l’arrangement des cheveux, la friʃure des femmes, leurs chignons, leur coèffure, en un mot, pour avoir ce charme, cette magie aux yeux des hommes qui dérive de la différence du ʃexes, doit entièrement différer de celles de ces derniers la faire reʃʃembler, c’eʃt la profaner, c’eʃt lui ôter ton prix, ʃa valeur, & cette magie dont je parlois. Rendez les deux parures égales, vous refroidiʃʃez les deux ʃexes l’un pour l’autre… Je ʃoutiens que ceci eʃt du reʃʃort de la Police, & qu’elle à le droit d’écarter toute mode, qui tend à rapprocher la parure des femmes de celle des hommes ».
D’ailleurs, si les femmes s’habillaient comme les hommes, les hommes à leur tour s’habillaient comme les femmes, poursuit l’auteur de la lettre. Il vit dit-il « pluʃieurs jeunes perʃonnes avec des ʃouliers bien découverts, bien pointus, talon bien haut, faits d’étoffe couleur » d’œil du roi « ils portois (sic) des chignons (une note signale qu’il s’agit là de cheveux relevés avec peigne courbe) très amples avec des boucles qui flottaient négligemment ʃur les épaules. »
La parure, aussi belle soit-elle, ne peut l’être que si elle a une propreté irréprochable. En effet, un autre élément et non des moindres est à prendre en compte dans ce domaine : la grandi majorité des vêtements est taillée dans des tissus non lavables. La boue et l’embarras des villes, ajoutés au coût élevé de l’eau contribuent à la souillure des étoffes, d’où la nécessité de recourir à des dégraisseurs ou à des blanchisseurs. L’autre condition pour être propre est de disposer de linge ou de vêtements en quantité suffisante afin de s’en passer au moins le temps du nettoyage.
Cet élément non négligeable de la parure nous est apparu clairement après la lecture des A.A.A.D. et du J.G.M. qui font paraître tour à tour des annonces à ce sujet, telle que celle du 5 novembre 1770 qui signale l’arrivée en ville du « ʃieur Geoffroy, dégraiʃʃeur de Lyon » qui « vend une liqueur & une poudre excellente pour lever toutes ʃortes de tâches comme la graiʃʃe, le cambouis, le goudron, la cire, l’huile & autres, ʃur toutes fortes d’étoffes en laine & en ʃoie, ʃur le brocard en or & en argent, et rend le luʃtre des étoffes à neufs » ; on trouve de même une annonce du 14 juin 1783 faisant mention de « Mmes Gaillac » qui « blanchiʃʃent les blondes & les gazes à neuf ; gauffrent les bouffantes, raccommodent les dentelles, brodent en ʃoie, lavent toutes ʃortes de tâches ʃur la ʃoie & ʃur la laine ».
Le nettoyage peut relever cependant de recettes « locales » comme en témoigne un article du 14 juin 1774 notifiant la « manière de nettoyer les galons d’or » et ce, en faisant griller de la mie de pain que l’on mettra bien chaude avec le galon dans une serviette pliée plusieurs fois On retrouve couramment ce genre de recettes miracles dans divers domaines et notamment en ce qui concerne les tapisseries et les tableaux.
Bien que l’hygiène vestimentaire soit des plus importantes, il ne faut pas négliger d’étudier les éléments de la presse qui font référence aux soins corporels. Les A.A.A.D. et le J.G.M. nous apparaissent à nouveau comme une source intarissable d’éléments concernant le goût de ces Montpelliérains à la fin du XVIIIe siècle.
Loin de la capitale, Montpellier dispose néanmoins d’un réseau important de commerçants et d’artisans locaux ou non, très au fait des nouveautés ; nous pouvons sans aucun doute ajouter à cette liste le nombre important « d’étrangers » entendons par là des personnes venant d’autres villes du royaume ou d’autres pays, qui séjournent en cette ville essentiellement pour son climat salutaire et sa faculté de médecine, qui sont réputés dans l’Europe entière.
Le XVIIIe siècle, siècle des Lumières, de la pensée philosophique et médicale, voit se développer une certaine hygiène qui passe essentiellement par une progression des habitudes corporelles, inséparables des pratiques vestimentaires.
Pendant longtemps, l’individu odoriférant signifie force et prospérité. L’usage du bain tiède était entaché d’une réputation lascive, condamnée par les moralistes de toutes les Églises.
Dans « l’Émile » Jean Jacques Rousseau se fait l’écho de cette nouvelle incitation. « L’eau froide doit affèrmir le corps, tremper le caractère, contribuer à former des citoyens dignes de l’antiquité, que les mollesses aristocratiques et la crasse monastique ont pu détourner de ses bienfaits. » 47 Depuis le XVIIème siècle les bains sont interdits, nous dit-il, pour des motifs de pudeur, de plus ils sont une cause d’accident. Chaque année les baignades dans les rivières sont interdites, comme le confirment de nombreux articles dans la presse locale.
L’hygiène du corps, de même que celle des aliments, des vêtements, du linge est une garantie pour les médecins de lutter contre les maladies urbaines. De ce fait la maîtrise de l’eau s’inscrit dans les programmes urbains. Montpellier, comme la plupart des villes, se munit des lors de fontaines permettant une adduction d’eau importante à l’intérieur même de la cité 48.
Ce regain d’intérêt pour les bains ne peut être que corroboré par les mentions successives de deux établissements de bains 49. L’un de ces avis, daté du 10 juillet 1784, annonce que « le ʃieur Roch, Maître Perruquier, vient de rétablir des Bains dans la Maiʃon de Madame Lamorier, bien différens de ceux qui y étoient ci-devant ; (…) il s’eʃt fait une étude particulière de la manière de conʃtruire & de donner les bains ; & par la pratique qu’il en a faite à Paris & Montpellier, il s’eʃt mis en état de donner un bain de propreté, comme à épiler & aromatique, ʃelon l’ordre de MM. Les Médecins. (…) On trouvera chez lui trois ʃalles toutes différentes qui forment dix cabinets, chacun tapiʃʃé proprement (…), une ʃalle pour les Dames, bien ʃéparée & parfaitement bien meublée. »
Le second article daté du 4 décembre 1784, concerne quant à lui un certain « Carré, coëffeur de Dames, Baigneur de l’Empereur » qui « donne avis au Public qu’il a changé ʃes bains hors la porte de la Saunerie. » L’auteur de l’avis ajoute que l’on y trouvera « cinq ʃalles de bains, deux pour les Dames & trois pour les hommes. Ces cinq ʃalles renfèrment vingt deux cuves en cuivre étamées très proprement, ʃéparées les unes des autres, qu’on rempli avec l’eau de fontaine, & par le moyen de gliʃʃoires, les perʃonnes de connoiʃʃance peuvent ʃe voir & parler enʃemble, ainfi qu’un grand & très-beau jardin. »
Ces bains bien que destinés aux soins corporels permettaient par la même occasion de se rencontrer à la manière de certains lieux de réunions tels que les salons et autres clubs.
Ce personnage propose entre autres des bains épilatoires, aromatiques, froids, et dispose en supplément d’une « cuve en pierre taillée, de neuf pieds de longueur, ʃur cinq de large ; laquelle eʃt faite par ordonnance de MM. les Médecins pour les bains à la douche. »
D’autres possibilités s’offrent aux clients : ils peuvent se restaurer et se reposer dans des « appartemens garnis où il y a pluʃieurs baignoires avec un robinet d’eau chaude & d’eau froide. Pluʃieurs lits pour ʃe repoʃer en ʃortant des bains, une cheminée dans chaque ʃalle, des globes pour éclairer, termomètre (sic) pour ʃavoir le degré des bains, des paniers portatifʃ à la Pariʃienne pour chauffer le linge, une ʃonnette dans chaque cabinet, pluʃieurs lieux à l’angʃoife. »
Ces bains ont certes cette dimension hygiénique prônée en cette fin de siècle par les médecins, mais ils apparaissent ici comme un lieu où l’on pratique les soins corporels pour le seul plaisir de s’y adonner. L’on note en effet, un véritable engouement de la population montpelliéraine pour ce type de soins : « le ʃieur Carré ʃe propoʃe, pour l’aiʃance du Public de faire deux ʃalles dans le jardin, vu l’attachement que le Public lui témoigne par la quantité d’ouvrage qu’il a tous les Jours. »
Les soins corporels ne résident pas en la seule pratique des bains. La lecture des A.A.A.D. et du J.G.M. met en exergue certains types de cosmétiques utilisés par les femmes montpelliéraines.
Le premier produit proposé à la vente n’est autre qu’une « pommade pour le teint, dont les premières épreuves faites par pluʃieurs Dames diʃtinguées de cette ville, ont eu tout le ʃuccés déʃiré. Elle donne à la peau un coloris & une fraîcheur qui ne font pas ordinaires » 50.
Le J.G.M. offre quant à lui beaucoup plus de produits cosmétiques et notamment une « pommade appelée Blanc des Bergers & des Bergères del Cadi », « compoʃée par le ʃignor Tuori, ancien chymiʃte (sic) de ʃa Majeʃté le Roi de Sardaigne. Cette compoʃition à la propriété de donner à la peau toute la fraîcheur de la jeuneʃʃe, & de la préʃerver de tous les accidens, comme les tâches de rouʃʃeur, tâches occaʃionnées par le ʃoleil, rides » 51. L’avis signale que l’on peut trouver dans le même dépôt « l’eau des Bergères qui eʃt ʃpécifique pour empêcher la ʃueur des mains, les rendre fraîches & blanches ».
Le deuxième cosmétique proposé par le .T.G.M. est une « Eau de Beauté » 52 que l’avis qualifie de « coʃmétique doux, déterʃif, vulnéraire, qui décraʃʃe la peau, qui rafraîchit le teint, qui l’éclaire, qui l’adoucit, qui en diʃʃipe les rouʃʃeurs, les tâches, les boutons, &c. &c. » Ce produit est en fait un le « vinaigre blanc d’une odeur agréable » que l’on applique tous les jours, à l’aide d’un linge, sur le visage, le cou, les bras et les mains ; et que l’on essuie ensuite avec un autre linge. Ce produit que l’on qualifie même de topique – nous rejoignons ici la dimension médicale de ces soins corporels – peut être « employé pur » en « dentifrice, qui dégorge & blanchit les dents, qui les raʃʃure même en fortifiant les gencives ».
Montpellier dispose aussi d’une « Manufacture Royale des Eaux-fortes », située au cours des casernes, et dont la production consiste en partie à la distillation de vinaigres de tables, mais aussi de toilette. Un avis du mercredi 29 juillet 1789 propose au public un assez large éventail de ces compositions vinaigrées, soit à base de lavande, de rose, d’œillet, de jasmin, d’orange, d’ambre… « Les vinaigres ont des propriétés rafraîchiʃʃantes, ils enlèvent les rougeurs, les boutons, & les dartres ».
Le besoin de « paraître » n’est plus en cette fin d’Ancien Régime le seul privilège de la Cour ; mis à part la classe laborieuse trop pauvre pour se le permettre, toutes les autres s’adonnent à cette « culture des apparences ». Loin d’unifier parfaitement le climat social, la parure reste néanmoins un élément du goût « auquel une partie plus importante de la population peut se laisser aller par rapport aux siècles précédents, tandis que d’autres domaines restent encore hermétiquement repliés sur eux-mêmes.
L’accent qui fut mis sur ces éléments intrinsèques de la vie privée, révèle parfaitement les choix esthétiques des Montpelliérains ; choix à la fois personnels, universels. Cette étude est de ce point de vue très révélatrice des mutations et des changements de valeurs qui ont eut lieu en cette fin de XVIIIe siècle frénésie de la consommation, futilité, et indifférence religieuse.
Notes
1. Watelet et Levesque, Dictionnaire des Arts de la Peinture, Sculpture et Gravure, L.F Prault, 1792, 5 tomes.
2. Jean Sgard (ss direct.), Dictionnaire des journeaux (1600-1789), Paris, Universitas, 1991, 2 volumes. Roland Andréani, La presse quotidienne de Montpellier des origines à 1944, Thèse dactylographiée, Toulouse, 1989, 2 volumes.
3. Annonces, Affiches et Avis Divers du 1er novembre 1774.
4. Marianne Grivel, Le commerce de l’estampe à Paris au XVIIe siècle, Genève, Librairie Droz, 1986, 446 p.
5. M. Grivel, op. cit., p. 238.
6. Bernard Sournia et Jean-louis Vayssettes, Montpellier, la Demeure Classique, Paris, Imprimerie Nationale Édition et Inventaire Général, 1994, 336 p., p. 26.
7. Joseph Berthelé, Montpellier en 1768 d’après un manuscrit anonyme inédit, Montpellier, Imprimerie Serre et Roumégous, 1909, 174 p.
8. J. Berthelé, op. cit., p. 118.
9. Trois Siècles de Papiers Peints, Catalogue d’exposition, Musée des Arts Décoratifs et Palais du Louvre Pavillon Marsan, Paris, 1967.
10. Henri Clouzot, Le Papier Peint en France du XVIIe au XIXe siècle, Paris, Ed. G. Van Oest, 1931, 35 p., 32 pl. ill., p. 9 : l’auteur nous signale que « l’idée d’assembler les feuilles bout à bout, par hauteur de lés, et de les vendre en rouleaux, au lieu de les débiter à plat et séparées, date des environs de 1760.»
11. On trouve d’ailleurs, dès le 22 novembre 1773, la présence de marchands anglais à Montpellier.
12. H. Clouzot, op. cit., p. 5.
13. Journal de la Généralité de Montpellier du 4 décembre 1784. Mention de Fontanel comme étant le correspondant privilégié du célèbre papetier Réveillon.
14. Journal de la Généralité de Montpellier du 30 octobre 1784.
15. Bernard Jacqué (ss dir.), Les Papiers Peints en Arabesques de la fin du XVIIIe siècle, Paris, Ed. de la Martinière (Coll. Artémuse), 1995, 190 p., p. 41 « C’est la plus illustre et la mieux connue des manufacture parisiennes du XVIIIe siècle». Jean-Baptiste Réveillon (1725-1811), après un apprentissage de marchand -mercier-papetier, il acquiert une boutique et pose avec succès des « papiers bleus » ou d’Angleterre pour Lord Abermale, ambassadeur d’Angleterre en France, à Passy. Vers 1756, il se met à les fabriquer, tout en rencontrant des difficultés avec les corporations. Installé rue de Charonne au faubourg Saint-Antoine en 1759, il se déplace dans le même quartier en 1763 dans les dépendances de la vaste Folie – Titon qu’il rachète en 1767. Il est rapidement considéré comme le meilleur fabricant de papier peint de Paris, tant par ses dessins que par sa maîtrise de la technique. Il obtient le privilège de « Manufacture Royale » le 15 Juillet 1783. La même s’élève, de son jardin, la première montgolfière parisienne. L’année 1789 est moins glorieuse pour le papetier dont la Folie -Titon est pillée par des émeutiers le 28 Avril. En 1791, il cède sa manufacture à Pierre Jacquemart et Eugène Bénard.
16. Journal de la Généralité de Montpellier du 4 décembre 1784.
17. J.G.M. du 7 décembre 1782.
18. Joseph Berthelé, op. cit., p. 149.
19. J.G.M. du 27 novembre 1784.
20. Pierre Verlet, Les Meubles Francais du XVIIIe siècle, Paris, PUF, 1982 (1ère Ed. 1955), 291 p.
21. Nicole De Reyniès, Principes d’A.nalyse Scientifique. Le Mobilier Domestique, Paris, Imprimerie Nationale, 1987, Tomes I et II, p. 252.
22. A.A.A.D. du 30 avril 1770.
23. Nicole de Reyniès, op. cit., p. 250.
24. J.G.M. du 7 juillet 1787. Les « Duchesses» sont des chaises longues comportant en face du dossier, un « dossier » plus bas, éventuellement à retour, ou un deuxième dossier de même hauteur, également parfois à retour. (Nicoles De Reyniès, op. cit., p. 186)
25. Nicoles De Reyniès, op. cit., p. 48 siège (chaise ou fauteuil) à dossier plat (rectangulaire, ovale, carré, violoné…) présentant le caractère Louis XV ou Louis XVI. Ce terme apparaît dès 1730.
26. Idem, op. cit., p. 48 : siège à dossier concave. Le terme apparaît vers 1759
27. Idem, op. cit., p. 88 fauteuil à bas dossier.
28. Nicole De Reyniès, op. cit., p. 196 lit de repos (ou canapé) de plan ovale à deux chevets (ou accotoirs) d’inégale hauteur, réunis par un dossier incliné de façon à joindre les deux niveaux.
29. Idem, op. cit., p. 152 canapé de plan ovale ou ellipsoïdal dont le dossier se prolonge par des joues.
30. Idem, op cit, p. 398 : ou table de jeu carrée. Table dont le plateau est carré et sert à jouer à différents jeux de cartes dont le quadrille.
31. Idem, op. cit., p. 400. Table dont le plateau sert à jouer au jeu de cartes dit piquet. Elle peut être brisée et comporter alors un volet carré, qui ouvert, pivote avec le dessus pour reposer de façon symétrique sur les pieds.
32. A.A.A.D. du 14 juin 1771.
33. Il s’agit de l’invention du « ʃieur Devilliers fils, Contrôleurs Général des Fermes du Roi. »
34. A.A A.D. du 18 novembre 1771, ces articles se trouvent dans le magasin de la « veuve Martin rue de la Valʃère. »
35. Daniel Roche, Histoire des Choses Banales : Naissance de la Consommation XVIIe-XIXe siècle, Paris, Fayard, 1997, 329 p., p. 140.
36. Daniel Roche, La culture des apparences une histoire du vêtement XVIIe-XVIIIe siècles, Paris, Favard, 1989, 549 p.
37. François Boucher, Histoire du Costume en Occident de l’Antiquité à nos Jours, Paris, Flammarion, 1965, 448 p., p. 300 : « ses caractéristiques essentielles étaient d’être agrafée en haut sur la poitrine, de s’écarter largement sur la jupe de dessous et d’être retroussée en arrière des hanches par deux galons coulissants qui formaient trois pans arrondis, courts sur le côté (les ailes), et plus longs derrière (la queue) ou inversement. Les manches plates emboîtaient le coude dans une sorte de manchette de gaze ou de tissu, d’une forme dite en sabot. Ajustée dans le dos, cette robe dessinait une silhouette alerte et écourtée, et elle détrôna vite comme tenue courante la robe à la française.»
38. Idem, op. cit., p. 302 : cette robe est « ouverte sur un gilet fait de deux compères ; son corsage baleiné très ajusté se termine en pointe dans le dos ; les manches plates ne sont pas garnies d’engageantes mais parfois de volants sur le coude ; l’ampleur de la jupe est rejeté en arrière sur un faux-cul elle n’est pas portée sur panier.»
39. Sorte de gilet qui était toujours apparent par devant.
40. A.A.A.D. du 3 janvier 1774.
41. Coiffure consistant à relever et à dresser au fer les cheveux de devant, tandis que ceux des tempes sont disposés en touffes frisées et crêpées.
42. Perruque légère, large, gonflée de crin et nouée par une large rosette de ruban.
43. Le frac ou fraque est un justaucorps léger, sans poches, ni plis, très largement évasé du bas.
44. Chapeau faisant référence à la pièce de Beaumarchais « Le Mariage de Figaro ».
45. On désignait de ce nom les pièces de gaze et de faux cheveux que l’on introduisait entre les mèches et qu’on chargeait d’accessoire les plus variés.
46. L’auteur de cet ouvrage semble être Nicolas Restif dit Rétif de la Bretonne (1734-1806), écrivain français. Son œuvre abondante et multiple, témoigne d’un sens profond de l’observation. Il a tour à tour traité de la condition paysanne sous l’Ancien Régime, du libertinage…
47. Daniel Roche, op. cit., 1997, p. 178.
48. A.A.A.D. du 15 mai 1775 : délibérations du Conseil de la ville de conduire les eaux sur l’Esplanade.
49. Un troisième établissement moins important se trouve chez la « veuve Valette» ; voir J.G.M. du 7 juillet 1789.
50. A.A.A.D. du 15 avril 1771.
51. J.G.M. du 14 juin 1783. Ce produit est en vente chez la « Dlle Flabée » à l’Esplanade.
52. J.G.M. du 2 octobre 1784. Ce produit est en vente chez le « ʃieur Villetti ».