Présentation de la publication
L’église médiévale de Saint-Jean d’Aureilhan à Béziers
Par Olivier GINOUVEZ
Les agglomérations languedociennes ont annexé ces trente dernières années plus de surface qu’elles n’en ont jamais occupé depuis leur fondation. A l’image d’un diaphragme en phase de respiration continue, l’urbanisation expansive de ses campagnes périphériques bouleverse dans leurs fondements les rapports séculaires que la ville entretenait avec ses propres limites et les obligations qui en découlaient en matière économique et sociale (figures 1 et 2). Des établissements, jadis éloignés du centre-ville et impliqués dans les activités que permettait et favorisait cet éloignement, se trouvent désormais couverts par de nouveaux quartiers qui ne conservent que rarement des éléments des formes d’occupation qui les ont précédés.
Au cœur d’un lotissement dont les maisons ont consommé les dernières parcelles de friche piégées entre un centre commercial et les hauts immeubles de la « banlieue » sud, les ruines d’une église semblent aujourd’hui assiégées à l’extrémité d’un court plateau couvert de constructions récentes (figure 3). Les lieux ont bien changé depuis le règne des derniers rois carolingiens. Aussi déconcertant qu’il y paraisse aujourd’hui, le bâtiment de culte est le dernier témoin de l’un des plus importants centres domaniaux parmi ceux localisés dans la zone auréolaire polarisée par la ville médiévale.
Histoire du site
La fréquentation durant l’Antiquité de la lisière sud du plateau de Montimaran est avérée dés les années 1960. A la suite de travaux agricoles, des mobiliers céramiques (tuiles, amphores, vaisselles de cuisine et de table…) ont été recueillis à la surface de plusieurs parcelles de vignes situées aux abords d’une ancienne propriété viticole qualifiée de « métairie de Saint-Jean-d’Aureilhan » sur le cadastre napoléonien. Les artefacts apparaissent suffisamment nombreux et concentrés pour que l’auteur de la découverte conclue dès cette date à la présence d’un établissement occupé durant les six premiers siècles de notre ère.
Les sites archéologiques ont leur histoire propre. Dans le cas biterrois, celle des habitats inscrits dans l’ancienne couronne périurbaine, aujourd’hui consumée, trouve sa précocité particulière dans les travaux précurseurs de Gilbert Fédière qui publie dés 1970 la liste, la chronologie et la localisation des habitats que ses prospections lui ont permis de recenser dans les campagnes périphériques (Fédière, 1970). Lorsque l’article paraît, certains des gisements cités n’existent déjà plus et ont fait place aux immeubles sans qu’aucune attention ne leur ait été accordée – sinon celle impuissante de leur inventeur.
C’est au début des années 1990 que les parcelles prospectées quelque trente ans plus tôt font l’objet de nouvelles investigations qui s’intéressent désormais à l’aspect médiéval de l’occupation des lieux. A la suite de l’observation de photos aériennes, Laurent Vidal et Laurent Schneider revisitent le site et constatent la présence de nombreux tessons de céramique grise qu’ils attribuent aux IXe-XIIIe siècles et associent à un habitat dont le lieu de culte est très vraisemblablement celui conservé dans les murs de la métairie proche. [...]