Description
Le soutirage au soufflet, Dom Pérignon et l’élaboration de vins fins
dans l’Hérault avant la vinification moderne
Voilà un titre qui vraisemblablement va surprendre. En dehors de cet ancien procédé aujourd’hui méconnu du soutirage au soufflet, on admettra sans peine qu’il y ait un rapport étroit entre dom Pérignon et les vins fins : on le sait depuis longtemps. Mais par quel paradoxe peut-on y mêler les vins de l’Hérault ? C’est en effet aujourd’hui une “vérité” trop ancrée dans les esprits : le Midi, et les départements de l’Hérault et de l’Aude tout particulièrement, n’ont jamais produit de bons vins. Aussi la qualité croissante des vignobles languedociens depuis une trentaine d’années est-elle un sujet d’étonnement : « Enfin, on fait de bons vins dans le Midi ! » Et de disserter sur la “bibine”, sur les vins réputés exécrables que donnaient l’Aramon, le Carignan ou les Bourrets, fort heureusement bannis aujourd’hui au profit des Merlot, Syrah et autres cépages améliorateurs ! Tant il est vrai que l’on a besoin pour vivre de vérités simples et indiscutables, et ce n’est pas toujours innocent.
Certes, l’envahissement des basses terres par la vigne pour une production de masse après l’ouverture de la voie ferrée Bordeaux-Sète (1857), et surtout après la reconstitution du vignoble consécutive à l’épidémie de Phylloxéra, n’était pas fait pour favoriser l’élaboration de vins fins. On pourrait prendre à témoin Lenoir dans les années 1830, ou encore le docteur Jules Guyot, qui accusait en 1868 les vignerons de l’Hérault de ne pas soigner leurs vins (mais c’était un reproche que lui-même et les auteurs du XIXe siècle faisaient aux vignerons de quasiment toutes les régions viticoles de France). Et si l’on remonte au XVIIIe siècle, où l’essentiel de la production était distillée, on conviendra que la fabrication de vins de chaudière ne devait pas elle non plus encourager une vinification soignée.
Cependant, il ne faut pas oublier pour ces temps déjà reculés les fines bouches qu’étaient les ecclésiastiques et les bourgeois, qui furent partout les promoteurs d’une vinification de qualité. Plus près de notre époque, il faut penser aussi à cet âge d’or de l’œnologie héraultaise, qui commence avec Cazalis-Allut avant le milieu du XIXe siècle, et continue avec Coste-Floret et les professeurs de l’école d’Agriculture de Montpellier. Même quand on se livra à la viticulture “de masse”, on recherchait la production de vins certes abondants, ordinaires, mais cependant “marchands”, “droits de goût” et bien vinifiés. Et si l’on a fait par la suite des vins de très petit degré avec les rendements fabuleux de l’Aramon dans les basses plaines de l’Hérault et de l’Aude, d’une part, sans être un grand cru, ce cépage bien employé ne donnait pas toujours un vin aussi mauvais qu’on voudrait le faire croire, mais surtout, bien des propriétaires faisaient dans le même temps un vin plus soigné, soit pour leur consommation personnelle, soit pour des destinations que seuls quelques initiés veulent encore savoir…
Aussi, continuant le paradoxe apparent de mon titre, je vais tout d’abord m’intéresser à une région viticole des plus prestigieuses, la Champagne. Mais auparavant, il faut définir les méthodes que l’on employait couramment pour le soutirage du vin avant la généralisation du matériel de cave moderne, avant les pompes et les tuyaux en caoutchouc armé et à raccords de laiton filetés apparus dans les années 1860-1880. […]
Informations complémentaires
Année de publication | 2009 |
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Nombre de pages | 28 |
Auteur(s) | Michel ADGE |
Disponibilité | Produit téléchargeable au format pdf |