Le maquis Bir-Hakeim face à l’armée allemande dans le Piscénois et le Clermontais
Le maquis Bir-Hakeim face à l’armée allemande
dans le Piscénois et le Clermontais
Le combat des Champs blancs de Caux et ses répercussions. 12-18 mai 1944.
Publication du
G.R.E.C. n° 228-229-230-231
(2e semestre 2021)
p. 82 à 93
Dossier coordonné par Pierre-Joan Bernard et Jean-Claude Richard Ralite
Introduction
Au début de l’année 1944, l’étau se resserre de plus en plus sur la France occupée où les Alliés opèrent de nombreux bombardements. Ces opérations aériennes s’accompagnent également de mitraillages, de largages de tracts, mais aussi de parachutages afin d’armer et de ravitailler la Résistance en prévision des combats de la Libération 1. Pour réceptionner les parachutes, en accord avec les Alliés, les résistants sélectionnent des terrains éloignés des agglomérations ayant un relief plat et dégagé, ce qui permet une évacuation rapide du matériel. C’est exactement la topographie que l’on trouve sur le Causse, plateau basaltique situé au cœur d’un triangle reliant les villages de Caux (occupé par l’armée allemande), Fontès et Nizas, entre Pézenas et Clermont-l’Hérault. Sélectionnée par les résistants du secteur en janvier1944, cette zone est désormais désignée « Rabelais » en langage codé 2. Dès le début du mois de février qui suit, des opérations y sont menées mais elles échouent toutes à cause du balisage qui est jugé insuffisant par les pilotes 3. La première opération qui réussit a lieu dans la nuit du 12 au 13 mars 1944. Une demi douzaine de paquets et quinze containers sont largués 4. Si tout se déroule sans accroc, les forces de police signalent toutefois avoir aperçu un ballonnet poussé par un fort vent au dessus de Fontès, vers 7 heures 5. Face à l’augmentation des parachutages alliés dans le département, les règles à respecter en cas d’observation d’avion ou de découverte de matériel parachuté sont rappelées par la Feldkommandantur 563 6 et la préfecture régionale à la population. Énoncées dans le premier numéro du Journal officiel d’ordonnances (Verordnungsblatt) du Commandant du territoire d’armée du sud de la France (Kommandant des Heeresgebiets Südfrankreich) 7, elles obligent notamment à informer sans retard les autorités allemandes et à protéger les objets tombés sur leur point de chute.
Le 17 mars 1944, quelques jours après le premier parachutage réussi, une nouvelle opération est entreprise sur Rabelais. Vers 18 heures 30, des avions survolent le secteur avant de larguer des containers 8. Du haut du clocher de Caux, utilisé comme poste d’observation, des soldats allemands assistent aux manœuvres et lancent aussitôt des recherches. D’origine américaine, l’ensemble du matériel est retrouvé entre deux vignes. Il s’agit de six cents cartouches et de cinq mitraillettes (endommagées lors de l’atterrissage) 9. Les soldats s’en emparent puis préviennent la gendarmerie de Pézenas afin qu’une enquête soit menée. Ce survol est une première alerte pour la commune de Caux. Même si les autorités occupantes n’ignorent pas que des résistants agissent dans le secteur, elles n’envisagent pas que des Caussinards puissent se risquer à des activités clandestines sous leurs yeux, alors que le village est investi et qu’elles peuvent, si elles le décident, opter pour de sévères mesures de répression. Aucune disposition particulière n’est prise par le commandement. Le 5 avril suivant, une action similaire à celle du 17 mars est menée sur Rabelais. La mission est un succès et passe totalement inaperçue aux yeux des soldats allemands. Les résistants du secteur ne le savent pas encore mais c’est la dernière fois qu’ils parviennent à réceptionner des parachutes alliés sans incident.
Un parachutage raté qui met en alerte l’armée allemande
Dans la nuit du 11 au 12 mai 1944, des soldats allemands occupant Caux sont sur le qui vive. Du haut d’une tour de guet construite à proximité de l’actuelle avenue de Mougères 10, ils scrutent l’horizon. Peu avant l’aube, des moteurs d’avion se font soudain entendre. Ce sont des appareils anglais dont les pilotes larguent du matériel (quinze containers et dix paquets). Alors qu’ils avaient visé la zone désignée par les résistants, une série d’erreurs fait que les parachutes s’échouent en divers points, dans des vignes 11. Il n’y a pas de doutes possibles pour les guetteurs : une action est menée parla Résistance. Des patrouilles sont immédiatement envoyées pour fouiller le secteur. Dans le même temps, en pleine campagne caussinarde, la dizaine de résistants qui s’était déplacée pour l’opération est aux abois, tentant de récupérer aussi vite que possible les colis. Malgré la pénombre, à proximité d’un ruisseau asséché surnommé la « Mère des Étangs 12 », les hommes – originaires de Caux et des communes voisines de Nizas, Neffiès et Pézenas – réussissent à mettre la main sur plusieurs parachutes qui sont cachés en toute hâte sous des branchages. La tâche est rendue plus ardue par un dernier container de munitions qui s’est ouvert lors de l’atterrissage. De nombreuses cartouches jonchent le sol ce qui pourrait permettre de repérer les caches. Tous les résistants s’attèlent pour les ramasser 13. Une fois la besogne accomplie, bien que des colis soient encore éparpillés, ils se séparent au plus vite et prennent la direction de leurs domiciles car ils se doutent que des manœuvres allemandes sont en cours. C’est le cas du Caussinard Élisée GELLY 14 et de deux Neffiessois : les frères jumeaux Joseph et Robert SANSANO.
Ces derniers n’en sont pas à leur premier coup d’essai 15. Ils étaient entrés dans la Résistance à la fin de l’année 1942 par l’intermédiaire de Marin CALAS, ancien maire de Neffiès et conseiller général révoqué par Vichy. Au cours de plusieurs missions, ils participèrent à la distribution de la presse clandestine (Combat, Libération, Franc-Tireur) et de fausses cartes d’identité fournies par le sieur MOULY de Béziers. Ils nouèrent aussi des relations avec Louis MARDON, instituteur d’Abeilhan et responsable du Front national par lequel ils furent chargés de réaliser plusieurs actions dans les communes de Pouzolles, Roujan, Neffiès, Fontès et Pézenas. Au début de l’année 1943, se fondant sur une dénonciation, deux inspecteurs de police menèrent une perquisition à leur domicile. Interrogés à la mairie de Neffiès durant plusieurs heures, les frères SANSANO furent relâchés faute de preuves. Le 13juillet 1943, un drapeau français était hissé sur la fontaine surmontée d’une Marianne à Neffiès. Le lendemain, une descente de police avait lieu dans un café du village. Joseph SANSANO fut arrêté ainsi que d’autres jeunes. Un interrogatoire minutieux fut mené à la mairie mais personne ne fut inquiété. Le29 novembre 1943, les frères SANSANO participèrent aussi au plasticage de la voie ferrée Pézenas-Saint-Thibéry qui occasionna le déraillement d’un train transportant des troupes allemandes. Quelques mois plus tard, en février 1944, ils aidèrent au sabotage des mines de bauxite de Villeveyrac. En mars et avril suivant, ils furent présents sur toutes les opérations de parachutages menées par les Alliés dans le secteur de Pézenas. L’activité des jumeaux résistants fut particulièrement importante jusqu’à cette matinée du 12 mai 1944 où, accompagnés d’Élisée GELLY, ils tombèrent nez à nez avec un groupe de soldats allemands.
Impossible pour les trois hommes d’éviter l’arrestation. Le largage des parachutes a eu lieu il y a moins d’une heure. Réunis dans une zone aussi éloignée du village, ils ne peuvent pas être là par hasard. Les résistants sont cernés par les militaires qui, sans les fouiller, décident de les conduire à la mairie. Sur le chemin, au détour d’un sentier, profitant de la pénombre qui règne encore, les frères SANSANO se débarrassent d’un sac contenant des armes. Alertés par leurs gesticulations, les soldats qui les escortent menacent de faire feu. Le groupe arrive finalement à la mairie non sans que Joseph SANSANO ait encore réussi à jeter des tracts qu’il avait en sa possession. Alors qu’ils sont enfermés dans une salle, Robert profite de l’absence de surveillance pour se débarrasser, à son tour, de tracts qui encombrent sa sacoche en les mettant dans un poêle. Élisée GELLY, Joseph et Robert SANSANO sont par la suite fouillés (!) puis longuement questionnés par les autorités allemandes. Les résistants expliquent qu’ils étaient bien sur le Causse en fin de nuit mais qu’ils n’ont aucun lien avec les parachutages alliés. Ils entendaient simplement vérifier des pièges qu’ils avaient posés dans une vigne quelques jours auparavant. Les militaires hésitent. La seule présence de ces hommes près du lieu des parachutages, à une heure aussi matinale, suffit à faire d’eux des suspects de premier ordre. Toutefois, comme on ne les a pas pris en flagrant délit et qu’ils ne portent rien de compromettant sur eux, il est finalement décidé de les relâcher après qu’ils ont montré aux militaires comment fabriquer et poser un piège 16. Ordre leur est cependant donné de rester à la disposition des autorités allemandes et de ne pas quitter leur domicile 17. Élisée GELLY et les frères SANSANO, auxquels le maire Achille GAUCH a apporté son soutien inconditionnel, acquiescent à toutes les demandes allemandes puis quittent la mairie pour rentrer chez eux. L’officier allemand dirigeant la garnison caussinarde informe la Feldkommandantur 563 des incidents de la matinée.
Dans le même temps, d’autres patrouilles allemandes dépêchées sur le Causse découvrent trois ballonnets. Au total, près d’une tonne de munitions est accrochée aux parachutes 18. Le matériel est saisi et rassemblé sur un terrain situé au lieudit les Champs blancs. Informé, le commandement allemand dépêche de nouveaux hommes pour accentuer les recherches. Alors que les colis récupérés par les résistants ne sont pas cachés aux endroits habituels, le père et le frère de Gilbert MERCADIER – qui ont participé à l’opération à l’aube – ont pris la direction d’une vigne voisine afin de surveiller que personne ne s’approche de la zone 19. Mis au courant que des soldats allemands se préparent à faire route vers leur secteur, un résistant caussinard qui a pu rentrer chez lui vient prévenir en hâte Caroline MERCADIER pour qu’elle aille avertir son mari et son fils aîné. Aussitôt, la Caussinarde se saisit d’un panier dans lequel elle rassemble des provisions puis, avec son cadet Gilbert, prend la direction du Causse. Après avoir rejoint Louis et Gaston, elle leur explique rapidement la situation. Louis décide de se déplacer sur une parcelle plus éloignée de la zone où se trouvent les colis. Arrivée dans la vigne, la famille feint de travailler les ceps. Quelques minutes plus tard, elle aperçoit au loin un contingent allemand lourdement armé qui s’avance vers elle. Les militaires arrivent finalement à sa hauteur. Un chef très remonté prend la parole dans un français approximatif pour demander à Louis s’il a aperçu des parachutes. Ce dernier répond par la négative et les soldats reprennent leur marche. Dès qu’ils ont complètement disparu de leur champ de vision, les MERCADIER quittent au plus vite les lieux et rentrent au village.
Le combat des Champs blancs
C’est la fin de la matinée à Caux où une certaine tension est palpable. Par le bouche à oreille, les Caussinards n’ignorent pas que des parachutages ont eu lieu dans les environs de leur commune et que des personnes ont été arrêtées. Les membres de la Résistance sentent un grand danger se profiler et décident d’agir. En hâte, le chef Noël BUARD se rend à Pézenas où il trouve le commandant de l’Armée secrète (AS) avec lequel il part, accompagné du responsable de la Section des Atterrissages et des Parachutages, en direction du Clermontais. Les hommes ont un seul but : contacter au plus vite le maquis Bir-Hakeim pour que le matériel allié puisse être récupéré et que Caux soit protégé d’éventuelles représailles. En effet, l’intervention des résistants prouvera aux yeux de l’occupant que les Caussinards ne sont pas mêlés à l’affaire. En outre, elle permettra de récupérer un matériel précieux à moindre coût puisque, selon les informations recueillies, les colis ne sont que faiblement gardés. Les trois hommes arrivent dans le camp du maquis Bir-Hakeim et exposent la situation. Le capitaine Paul DEMARNE étant absent, des subalternes décident d’agir 20. Aussitôt, une quarantaine de maquisards selon Gérard BOULADOU, une quinzaine si l’on en croit les rapports des autorités françaises 21, se mettent en route en direction de Caux. Vers 14 heures, sous un plein soleil, le groupe arrive au nord-est du village, à environ un kilomètre cinq cents de la commune de Nizas. Les trois chefs, Toussaint, Yves et le lieutenant Jean LUCAS, décident de diviser les forces afin de mieux surprendre les soldats allemands qui gardent les parachutes. Au cours de la manœuvre, un résistant trop hâtif tire un coup de feu 22. Le premier groupe lance immédiatement l’assaut suivi des deux autres. Si les résistants pensaient initialement avoir l’avantage du nombre, les effectifs allemands sont beaucoup plus importants que prévu (entre cinquante et cent). Le combat dure environ une heure. Sans que nous ayons pu définir les circonstances exactes, le lieutenant Jean LUCAS est mortellement blessé. Un autre de ses compagnons est quant à lui grièvement atteint. Malgré la perte d’un de leurs chefs, les résistants ont pris le dessus et ont fait battre en retraite les Allemands qui comptent une douzaine de tués et de blessés 23.
Les hommes du maquis Bir-Hakeim, qui ont été rejoints par le capitaine DEMARNE prévenu par Bony de l’AS 24, s’emparent du matériel et quittent les lieux au plus vite en direction de Nizas où ils demandent aux autorités locales de procéder à l’inhumation du corps de Jean LUCAS 25. La mairie s’y oppose fermement, sans doute pour éviter des représailles si l’armée allemande venait à apprendre la nouvelle. Les résistants décident de reprendre la route. Avant leur départ, l’un d’eux, armé d’une mitraillette, entre dans le bureau de poste de la ville et sectionne les câbles téléphoniques pour éviter que certains partisans de Vichy ne préviennent les forces de l’ordre. Peu de Nizaçois ont été témoins de cet incident qui a produit « une vive émotion parmi la population », selon le lieutenant de gendarmerie MIGNIOT 26. Les hommes du maquis Bir-Hakeim se rendent dans le village de Canet où le capitaine DEMARNE demande l’autorisation d’inhumer le corps de Jean LUCAS. La mairie refuse à son tour en conséquence de quoi le chef décide d’ouvrir le caveau de sa propre famille, le soir venu 27.« Dans la nuit, à la lueur de quelques allumettes, [les hommes] de Bir-Hakeim rendirent à leur lieutenant les derniers devoirs. À partir de ce jour, on ne vit jamais DEMARNE consentir à prendre quelque repos que roulé dans la couverture qui avait enveloppé la dépouille de son malheureux compagnon d’armes », écrivent à ce propos René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF 28.
Les représailles allemandes
C’est la fin de l’après-midi à Caux. Pour sécuriser le village et le Causse où les résistants ont été les plus forts, le commandant allemand demande des renforts. Plusieurs centaines de soldats sont dépêchés depuis Pézenas et Béziers. Gilbert MERCADIER a assisté à leur arrivée. Il raconte : « Nous jouions aux boules dans le square face à la mairie quand nous vîmes arriver des camions remplis de Boches sur la place. Nous prîmes peur car ils sortirent avec des mitrailleuses lourdes et portaient des bandes de munitions autour du cou. Mes camarades et moi-même rentrâmes chez nous au plus vite ». Les morts et les blessés allemands ne jouent pas en faveur de Caux qui s’expose à de lourdes représailles. Excédé, le chef de la garnison menace de mettre le feu au village s’il s’avère que des Caussinards sont impliqués dans le parachutage ou le combat 29. Les mitrailleuses lourdes aperçues par Gilbert MERCADIER sont installées en divers points de la commune (place, gare) 30. Les routes menant à Caux sont barrées. Plus personne ne peut sortir. Les soldats de la Wehrmacht se préparent à une action punitive. Devant ces mesures, la panique s’empare de la population. Des familles prennent la fuite à travers les vignes et les champs. À la mairie, Achille GAUCH a été mis au courant de l’intervention des « Biraquins ». L’édile profite de la situation pour« enfoncer le clou » et convaincre les autorités de l’innocence des Caussinards. C’est évident, les résistants qui ont agi dans le secteur sont tous étrangers au village. Le fait qu’ils se soient enfuis par Nizas avec des véhicules en est la preuve. Le maire se porte garant de tous les habitants de Caux, déclarant qu’aucun d’eux n’est impliqué 31. Le commandant allemand hésite. Manquant d’informations, irrité par les combats de l’après-midi, il décide de faire chercher les frères SANSANO à Neffiès 32.
Il est environ 19 heures 30. Douze à quinze soldats frappent à la porte de leur domicile familial situé derrière la poste (actuelle rue du Vieux Moulin). Seuls sont présents leurs parents ainsi qu’un de leur beau-frère, Etienne BLAYAC, qui a le réflexe salvateur de se faire passer pour un voisin. Particulièrement remontés, les militaires prennent le père SANSANO en otage. Au même moment, Mariano ROS, l’autre beau-frère de Joseph et de Robert, rentre chez lui. Des Neffiessois lui apprennent que des soldats se sont présentés au domicile de son beau-père. Sans trop réfléchir, il se rend au pas de course au domicile des SANSANO où il ne cache pas son identité et est pris en otage à son tour. Le faux voisin Étienne BLAYAC est congédié alors que le père SANSANO et Mariano ROS sont placés dans une camionnette. Le convoi descend l’actuelle avenue du Conseil Général puis tourne sur la gauche pour se retrouver sur l’avenue de la Gare. Apeuré, Mariano ROS profite d’un ralentissement du véhicule pour sauter sur la route et prendre la fuite à travers une ruelle étroite. Bondissant du camion, des soldats partent aussitôt à sa poursuite. Ils arrivent très vite à l’entrée de l’artère où se trouve encore le Neffiessois et tirent plusieurs coups de feu en sa direction. Touché à la tête et au poumon, Mariano ROS, 35 ans, décède rapidement. La dépouille est laissée sur place par les militaires allemands qui préviennent toutefois la mairie. Plusieurs Neffiessois viennent par la suite la récupérer pour la transporter dans l’ancien couvent 33. La camionnette reprend sa route en direction de la prison de Béziers d’où le père SANSANO est libéré sept jours plus tard, le 19 mai en fin d’après-midi.
S’il n’avait rien à se reprocher, pourquoi Mariano ROS a-t-il sauté du camion et ainsi mis sa vie en péril ? La peur des interrogatoires musclés des Allemands a indéniablement joué tout comme un deuxième facteur : l’homme s’adonnait illégalement à la chasse et avait des cartouches dans ses poches. Sans doute s’est-il souvenu de ce qu’il portait et a-t-il pensé que ce serait un élément qui le compromettrait dangereusement. Une chose est certaine : excédés par le combat de l’après-midi au cours duquel ils avaient perdu de nombreux camarades, les soldats allemands n’ont eu aucune pitié 34. Cette fuite a été assimilée à un aveu de culpabilité. Au bout de quarante-huit heures, le 14 mai 1944, la famille est autorisée à récupérer le corps du défunt. Mariano ROS est enterré le jour même, vers 17 heures, au cimetière communal. Une importante foule composée de Neffiessois, mais également d’habitants des villages voisins, assiste à la cérémonie 35.
Quant aux frères SANSANO initialement recherchés, ils ne sont jamais rentrés chez eux après avoir quitté la mairie de Caux le 12 mai 1944 dans la matinée 36. Obligés de vivre dans la clandestinité, ils sont recueillis et hébergés par un ami de Vailhan jusqu’au début du mois de juin 1944, période à laquelle ils rejoignent le secteur du Poujol-sur-Orb où se trouve le maquis « Formation Charvet » commandé par Fernand NOURRIGAT. Quelque temps plus tard, le maquis se retire dans le bois de Fournols, sur les hauteurs de Vailhan, et est attaqué par l’armée allemande. L’ordre de dispersion est donné et les frères SANSANO, continuant à saboter des lignes téléphoniques, survivent tant bien que mal jusqu’à la Libération. Ils retrouvent alors leur cher village de Neffiès qu’ils ne quittent plus jusqu’à leur mort en avril 2005 pour Robert, à l’âge de 86 ans, et en juin 2010 pour Joseph, dit « Le Pep », à 91 ans.
Il est difficile de connaître avec exactitude les événements de la fin de la journée du 12 mai 1944 à Caux que les Allemands décident finalement d’épargner. Deux raisons peuvent expliquer ce choix :
I. La possibilité d’une nouvelle intervention du maquis Bir-Hakeim était grande. Les Allemands n’ont peut-être pas voulu prendre le risque de subir une attaque de la Résistance qui aurait pu être beaucoup plus violente et sanglante. En effet, au cours du deuxième trimestre de 1944, les effectifs de la Wehrmacht dans la zone sud sont au plus bas. Hitler utilise le minimum d’hommes pour assurer une présence sur le littoral méditerranéen. Les villages éloignés de la côte sont délaissés et, qui plus est, les soldats sont peu expérimentés. Les militaires occupant Caux, bien que soutenus par des renforts, pouvaient très vite se trouver en danger face à une force résistante prête à tous les sacrifices et qui connaissait bien le terrain.
II. À Caux, on explique aussi l’abandon de ce projet de destruction par le fait qu’une habitante aurait obtenu cette faveur de la part de l’officier allemand dirigeant la garnison du village car elle entretenait des relations étroites avec lui. Ce dernier aurait cédé devant ses supplications.
Si Caux a échappé de peu à un terrible désastre, les soldats allemands n’en continuent pas moins leurs investigations en cette fin d’après-midi du 12mai 1944. Ils pensent que les résistants ont pu trouver de l’aide dans le domaine du Clot de Malibran, situé à quelque huit cents mètres des lieux du combat, sur le territoire de la commune de Nizas. 37
Un groupe composé d’une soixantaine de militaires et de policiers de la Sipo-SD de Béziers – dont Josef ROLEFF, Herbert HOFFMANN, Max PAKLEPPA, Han SOHN et des sbires français tels que Lucien TORCIA et Victor NELL – est envoyé sur les lieux afin d’interpeller et d’interroger la famille MILLAT, possédant le domaine 38. Les hommes trouvent portes closes mais forcent l’entrée et fouillent minutieusement les locaux. Dans une chambre du ramonétage, sous un lit, ils découvrent un étranger blessé à la main qui se cachait à l’insu même des propriétaires : Dario FRANCISCOBLASCO. Né le 25 octobre 1912 à Manzanares (Espagne), ancien combattant républicain lors de la Guerre civile 39, il avait été incorporé au Groupement de Travailleurs étrangers (GTE) n° 311 40, puis avait été employé au domaine du Clot de Malibran par Jacques MILLAT. Durant l’année 1941, il avait été licencié parce qu’il ne donnait pas satisfaction au point de vue du travail, alors il s’était fait engager comme ouvrier aux mines de lignite de La Caunette. Il n’a pas été établi comment il avait réussi à se cacher dans la ferme, ni à la suite de quelles circonstances personne ne l’avait aperçu 41. Au cours de leurs recherches, les soldats allemands découvrent également l’électricien caussinard André JULIEN, 37 ans, qui procédait à des travaux de réparation 42. Casimir ALIAPOPERO, le jeune fils du ramonet, âgé de 19 ans, est lui aussi mis en état d’arrestation. Vers 18 heures, en présence de leurs prisonniers – qu’ils avaient d’abord déplacés à Nizas 43 – et de Jacques et Armand MILLAT, les soldats allemands répandent de l’essence dans le ramonétage qu’ils avaient préalablement pillé, puis mettent le feu en jetant plusieurs grenades incendiaires. Les trois hommes arrêtés sont par la suite conduits à la prison Saint-Nazaire de Béziers où ils sont privés de nourriture durant plus de deux jours, puis interrogés sous la torture à la Villa Guy (siège de la Sipo-SD) 44. Si Casimir ALIAPOPERO et André JULIEN peuvent rentrer chez eux après avoir respectivement passé un mois et une semaine en détention, ce n’est pas le cas de Dario FRANCISCOBLASCO qui est déporté à Dachau depuis Compiègne le 18 juin 1944 (convoi I.229, matricule n° 74 279, Kommando d’Allach). L’homme sera libéré le 30 avril 1945. Lorsqu’en 1953, onze agents allemands de la Sipo-SD de l’Hérault sont jugés à Marseille, Casimir ALIAPOPERO est appelé à la barre des témoins. Il raconte l’enfer qu’il a vécu dans les geôles biterroises et les méthodes employées par les Allemands : « J’ai été arrêté le 12 mai 1944 parce qu’il y avait eu un parachutage dans la région. Je venais de sulfater. Avant de m’emmener, les Allemands ont tout pillé dans le domaine du Clot de Malibran. Ils n’ont rien laissé, pas même un verre. Ils ont pris le bétail et ont mis le feu à la ferme. Un Espagnol qui n’y était absolument pour rien et qui se cachait sous un lit a été ainsi découvert. […] C’est Herbert HOFFMANN qui m’a frappé avec Artigues et« le gros Lulu » [Lucien TORCIA]. Ils m’avaient pendu par les menottes. J’ai reçu quarante coups de nerf de bœuf. Une autre fois, on m’a piqué avec des baïonnettes. J’en porte encore les cicatrices 45 ».
Le Clermontais dans la tourmente
Les investigations allemandes se poursuivent durant la journée du 13 mai, tout comme celles des autorités françaises. Au matin, vers 8 heures 30, une patrouille de la gendarmerie de Pézenas trouve un container à environ quatre cents mètres au nord de la ferme Laval, sur le territoire de la commune de Caux 46. D’origine anglaise, il contient cinquante boîtes de conserve Wilson Corned-beef Chicago, ainsi que soixante-dix boîtes de sardines Frenchmorottan. Les gendarmes retrouvent également deux boîtes de biscuits. Les autorités allemandes saisissent les vivres après avoir été prévenues par le commandant de la section de gendarmerie de Béziers. Si le maquis Bir-Hakeim a sauvé Caux des représailles, il doit maintenant faire face à une traque menée par l’occupant et par les forces de Vichy. En cette mi-mai 1944, ce n’est un secret ni pour les autorités françaises ni pour les autorités allemandes qu’une force de résistance se cache dans les collines du Clermontais. Un jour avant les événements qui ont vu la mort du lieutenant Lucas et de Mariano ROS, un agent des Renseignements généraux (RG) du secteur de Montpellier écrivait : « Une information paraissant sérieuse et méritant d’être prise en considération signale qu’une bande très importante serait cachée et cantonnée dans un domaine appelé Le Temple, appartenant à un nommé BALESTRIER (sic) et situé à Cabrières, près de Clermont-l’Hérault. Elle aurait à sa disposition plusieurs voitures et camions dont un de cinq tonnes immatriculé 7076 FN 4 et une V8 immatriculée 4298 FN 4 qui serait celle du lieutenant (sic) DEMARNE. À Clermont-l’Hérault, un dénommé MONTEIL s’occuperait du ravitaillement. On signale comme étant en rapport avec les chefs, les nommés PIO, MAUZANÈRE, VALERO et MARÉCHAL [habitant] tous [rue Frégère] à Clermont-l’Hérault. Cette bande serait susceptible d’avoir commis de nombreux vols et agressions dans la région 47 ».
Informées de la situation, les autorités allemandes surveillent particulièrement la commune de Cabrières. Deux incidents notables précipitent leur intervention. Le premier éclate le 14 mai dans l’après-midi, deux jours après le combat des Champs blancs de Caux 48. Jeune Cabriérois âgé de 19 ans, David DONIS est hospitalisé à la clinique mutualiste Beau-Soleil de Montpellier après avoir été touché par une balle. Selon le jeune homme, vers 16 heures 30, sur la route reliant Clermont-l’Hérault à Pézenas, deux résistants auraient procédé à un règlement de compte à hauteur de la cave coopérative. Apeuré, David DONIS aurait reçu une balle perdue alors qu’il tentait de s’enfuir. À la suite de l’incident, deux gendarmes de la brigade de Montagnac sont dépêchés pour patrouiller dans Cabrières et dissuader toute manœuvre résistante. David DONIS s’en tire à bon compte car il a menti aux autorités. Le jeune homme se trouvait en réalité en compagnie d’amis membres du maquis Bir-Hakeim. Alors que le groupe manipulait des armes, un coup de feu partit inopinément et lui traversa la cuisse. Il maquilla ensuite les événements pour pouvoir se faire soigner tout en évitant la prison et les interrogatoires puisque les déclarations de blessures par balle étaient obligatoires depuis le 1er avril 1943 49. Les autorités allemandes sont informées de la « fusillade » qui s’est produite mais n’agissent pas. Quelques heures après l’hospitalisation de David DONIS, un nouvel incident convainc les militaires d’intervenir à Cabrières 50. En fin de soirée, alors qu’ils venaient de pénétrer dans le secrétariat de la mairie, les gendarmes de Montagnac censés maintenir l’ordre se trouvent entourés par deux ou trois individus âgés entre 20 et 25 ans, armés de mitraillettes et se réclamant de la Résistance. Les jeunes hommes leur intiment l’ordre de remettre mousquetons et pistolets 51. Alors qu’un des résistants appuie sa mitraillette contre la poitrine d’un des militaires, il s’exclame : « Il serait de notre devoir de vous tuer mais nous pensons que vous êtes de bons Français et vous serez épargnés ». Les gendarmes sont gardés tandis qu’une quinzaine d’autres résistants surveillent la cour d’entrée de la mairie et que d’autres se font conduire par le secrétaire aux bureaux des PTT où ils coupent les câbles téléphoniques. Les résistants se retirent vers 1 heure du matin, le 15 mai, en direction de Neffiès. Les gendarmes dépouillés de leurs armes retournent à Montagnac à moto.
Apprenant les événements et bien renseignée par des informateurs, l’armée allemande décide de mener une opération sur Cabrières dans les heures qui suivent 52. Arrivant de Pézenas et de Clermont-l’Hérault 53, des unités se rendent au domaine du Temple où elles espèrent trouver les membres de la Résistance qui ont participé à l’opération du 12 mai sur le Causse de Caux. Le commandement allemand l’ignore, mais il se trompe de cible. Le groupe fixe du maquis Bir-Hakeim ne bivouaque pas au domaine du Temple mais au Mas de Lauriol se trouvant à environ huit cents mètres à l’ouest 54. S’ils ne découvrent aucun maquisard, les militaires arrêtent toutes les personnes qu’ils rencontrent – comme ils ont pu le faire à Neffiès et au domaine du Clot de Malibran le 12 mai – y compris dans les alentours, notamment au Mas Rouch.
Au total, sept individus sont interpellés et conduits à Montpellier, à la Villa des Rosiers (siège régional de la Sipo-SD) 55 :
Louis DONIS, ancien membre de la Légion étrangère, métayer du domaine du Temple et père de David DONIS, blessé accidentellement par ses camarades de la Résistance le 14 mai 1944 près de la cave coopérative. En pénétrant dans son logis, les soldats allemands trouvent une photographie le représentant avec des camarades légionnaires en uniforme. Ils la décrochent et la jettent au sol avant de la piétiner. Louis DONIS fait l’objet de forts soupçons. Les militaires de la Wehrmacht pensent que des maquisards séjournent dans le domaine eut égard au grand nombre de lits qui s’y trouvent. Il s’agit en réalité des lits des propriétaires et de leurs six enfants (la famille BONNET, absente). Louis DONIS est frappé à de multiples reprises puis menotté. Il est finalement déporté à Buchenwald d’où il reviendra à la fin de la guerre 56.
Joseph RADIGALES, ouvrier agricole de nationalité espagnole, demeurant aux Crozes. Âgé de 25 ans, le jeune homme possédait un fusil ce qui était illégal depuis le début du mois de décembre 1942 et la confiscation des armes de chasse 57. Il est menacé par un soldat allemand qui brandit un couteau et le qualifie de « terroriste ». Il est déporté en Styrie, région autrichienne où il travaille pour l’aciérie Böhler sur le site de Kapfenberg. Les conditions de vie sont rudes et les bombardements de l’aviation alliée presque quotidiens. De son expérience du travail forcé, qui l’a conduit jusqu’au nord de la Yougoslavie, il a tiré trois carnets de souvenirs dont un seul subsiste de nos jours. Après être passé par l’Italie, notamment à Gênes, Joseph RADIGALES parvient à rentrer à Cabrières au début du mois de juin 1945.
Pierre LÉBRARD, jeune cultivateur arrêté dans une vigne voisine du Mas Rouch où un soldat allemand lui a collé le canon de sa mitraillette dans le dos 58. Le Cabriérois âgé de 18 ans en a gardé« un rond froid » sur la peau pendant plusieurs jours. Il aurait subi le même sort que ses deux compagnons Louis DONIS et Joseph RADIGALES si, le 6 juin 1944, en pleine alerte aérienne, près de Toulouse, il n’avait pas sauté du train qui devait le conduire à Compiègne avec son cousin Sylvain RÉGIS (qui avait été arrêté au Mas Rouch le même jour que lui) 59. Le courage des deux cousins leur permet d’éviter le travail forcé mais les oblige à vivre dans la clandestinité jusqu’à la Libération. Après un périple de quelque vingt-quatre heures au cours duquel ils sont notamment montés clandestinement à bord d’un train de marchandises, Pierre LÉBRARD et Sylvain RÉGIS parviennent dans le hameau de Frayssinet, situé sur le territoire de la commune de Saint-Jean-Delnous (Aveyron) où leur famille avait l’habitude de venir se ravitailler. Ils sont chaleureusement accueillis par la famille CABOT qui garde Pierre et transfère Sylvain auprès d’amis habitant le hameau voisin de La Clauze. Durant plusieurs semaines, les deux jeunes hommes profitent de l’hospitalité des habitants de Saint-Jean-Delnous. Au cours de cette période d’oisiveté, ponctuée de quelques rumeurs angoissantes annonçant la venue des Allemands, Pierre LÉBRARD rencontre Juliette, une jeune bergère qui deviendra sa femme après-guerre. Il envoie aussi une lettre à son père dans laquelle il tente de lui faire comprendre où il se trouve, écrivant notamment : « Les vacances se passent bien mais il fait froid à la montagne. Viens me porter des pulls ». Les deux cousins rentrent à Cabrières le 20 septembre 1944.
Joseph GIL, François PEREZ, Georges BONNAFOUS, tous trois Espagnols ayant fui leurs postes de charbonniers pour le compte de l’entreprise Brincivalli dont le siège est situé au 28, rue Gaillard à Vichy. Les deux premiers sont déportés en Allemagne 60. Comme Pierre LÉBRARD, Georges BONNAFOUS aurait échappé à la déportation en sautant du convoi qui le menait en Allemagne.
Un drame évité de justesse
À Caux, dans les jours qui suivent le combat des Champs blancs, les soldats allemands continuent d’enquêter. Une présence militaire importante est assurée 61. Le 18 mai 1944, jour de l’Ascension, vers 17 heures, après que des Allemands ont aperçu des hommes manœuvrant des containers sur le Causse 62, le village est à nouveau cerné par un important contingent comprenant également des miliciens. Des perquisitions sont menées chez deux Caussinards qui sont arrêtés : Denis ROUANET, 47 ans, ex-cordonnier, manœuvre à la coopérative de vinification, et Irénée VAISSETTE, 56 ans, chauffeur de camion 63. Leurs sorts nous sont restés inconnus bien qu’il semble probable qu’ils aient été rapidement libérés comme ce fut le cas pour l’électricien André JULIEN arrêté au Clot de Malibran. Le lendemain, les renforts allemands quittent le village ce qui clôt l’affaire des Champs blancs 64. Quelques semaines plus tard, Caux est définitivement évacué par la Wehrmacht.
Grâce au maquis Bir-Hakeim, un Oradour-sur-Glane a sans doute été évité dans l’Hérault le 12 mai 1944. Si l’armée allemande n’avait jusqu’ici jamais fait preuve d’une violente répression dans le département à l’égard des civils, il est certain qu’elle s’apprêtait à durement punir les habitants de Caux après le combat des Champs blancs. S’il aurait pu être particulièrement lourd, le bilan humain n’est toutefois pas à prendre à la légère : deux morts, un blessé grave et une dizaine d’arrêtés dont certains ont été torturés et/ou déportés. Dans les années1970, Jean BÈNE, avocat, résistant, ancien président du Comité départemental de Libération de l’Hérault et maire de Pézenas, décrira l’intervention du 12 mai comme « la chose la plus culotée qu’il ait jamais connue 65 ». Cette journée entraîne aussi des conséquences sur l’organisation de la Résistance dans le secteur. Désormais, le terrain Rabelais n’est plus utilisé. Une zone plus sûre est sélectionnée à deux kilomètres à l’ouest de Fontès (volcan des Baumes). Elle est nommée « Speaker » en langage codé 66. Au total, selon Gérard BOULADOU, cinquante-sept containers ont été réceptionnés sur Rabelais et Speaker entre les mois de mars et d’août 1944, ce qui représente entre 15 et 20 % de l’ensemble des containers récupérés dans l’Hérault 67. De nombreuses plaques et monuments rappellent aujourd’hui la mémoire des événements en divers points de Caux et de Neffiès. Une stèle a été érigée sur les lieux du combat où une cérémonie est organisée chaque année en présence des autorités.
NOTES
1. Entre le mois de janvier et le mois d’août 1944, le BCRA fait parachuter un peu plus de 29 000 containers en France. Cela représente près de 94 % de l’ensemble des parachutages effectués par l’organisme durant toute la Seconde Guerre mondiale ! Gérard BOULADOU, L’Hérault dans la Résistance 1940-1944, Nîmes, Lacour/Colporteur, 1992, p. 103.
2. Joseph LANET, Mémoires de Résistance – La création et l’organisation de l’Armée Secrète à Béziers, Saint-Pons, Bédarieux et Narbonne, Sampzon, Éditions Delatour France, 2010, p. 127. D’autres terrains sont choisis par les résistants héraultais. C’est le cas de « Pascal », situé près de Lunas et du hameau des Pascals. Gérard BOULADOU, op. cit., p. 103. Rabelais est le premier secteur de l’Hérault à avoir été choisi. Patrick NÉOLAS, La Résistance dans les hauts-cantons de l’Hérault (1940-1945), Montpellier, Patrick Néolas, 1995, p. 35.
3. Gérard BOULADOU, op. cit., p. 103. À la même période, dans le secteur Pascal, toutes les tentatives restent également vaines à cause d’un ennui mécanique au départ de l’avion et du mauvais temps. Un nouveau survol est organisé dans la nuit du 10 au 11 mars. Les moteurs de plusieurs avions sont entendus dans les communes de Fontès, Adissan et Nizas. Au matin, des tracts sont découverts dans la campagne, dispersés par un fort vent. AD Hérault, 1000 W 196.
4. Parallèlement, dans le secteur Pascal, les opérations échouent à nouveau à cause du mauvais temps.
5. AD Hérault, 18 W 25 et 18 W 31.
6. Il s’agit du Generalleutnant Heinrich Niehoff.
7. La Feldkommandantur 563 est alors la plus haute autorité militaire allemande dans l’Hérault.
8. AD Hérault, 18 W 182.
9. AD Hérault, 18 W 21.
10.D’après les témoignages de Gilbert MERCADIER et Augustin GINER recueillis par l’auteur. Cette tour de guet a été construite durant le mois d’avril 1944 car les Allemands voulaient quitter le poste d’observation du clocher, trop exposé aux aléas climatiques.
11.Gérard BOULADOU, op. cit., p. 104. Le balisage de la zone n’a pas été suffisant pour les pilotes anglais qui ont survolé le secteur une dizaine de minutes avant de larguer les colis.
12.La Mère des Étangs est un ruisseau qui descend du Causse depuis les étangs qui s’y trouvent les jours de fortes précipitations. Il est le point de départ du ruisseau de Regagnade.
13.Les munitions étaient si nombreuses que Louis Mercadier racontera plus tard à son fils Gilbert : « On ramassait les balles comme on ramasse des olives ».
14.L’homme est originaire de Montagnac mais il habitait à Caux au moment des faits. Propriétaire de quelques autobus, il réalisait des voyages sur une ligne reliant Neffiès à Béziers. D’après le témoignage d’Yves MAZET recueilli par l’auteur.
15.D’après des témoignages de Joseph SANSANO recueillis par Andrée PIACÈRE et Yves MAZET.
16.D’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur.
17.D’après le témoignage de Joseph SANSANO recueilli par Yves MAZET.
18.AD Hérault, 1000 W 190 et 18 W 24.
19.D’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur.
20.René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF, Le maquis « Bir-Hakeim », Genève, Éditions de Crémille, 1972, p. 124. À cette époque, Paul Demarne possède le grade de capitaine obtenu dans l’armée d’active. Le maquis Bir-Hakeim est dirigé par Jean Capel, alias commandant Barot. Paul Demarne obtient la direction du maquis et le grade de commandant FFI le 6 juin 1944, après que le commandant Barot a perdu la vie au combat de La Parade (Lozère), le 28 mai précédent.
21.AD Hérault, 1000 W 190.
22.D’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur.
23.Cette estimation est avancée par Gérard BOULADOU in L’Hérault dans la Résistance 1940-1944, op. cit., p. 105. Gilbert Mercadier déclare quant à lui que les soldats allemands auraient quitté les lieux avec « deux camions remplis de morts et de blessés ». René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF avancent un bilan de dix-sept morts et vingt-deux blessés, in « Le maquis Bir-Hakeim », op. cit., p. 125. Une chose est certaine : les blessés allemands étaient nombreux comme a pu en témoigner Jean Bène : « Le soir […] aux terrasses des cafés de Pézenas, les gars regardaient les colonnes motorisées qui ramenaient les blessés ». Midi Libre du 23 août 1974, p. 3.
24.René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF, op. cit., p. 124 et 125.
25.AD Hérault, 1000 W 196 et 18 W 21.
26.AD Hérault, 1000 W 206.
27.Après-guerre, le corps de Jean Lucas a été transféré dans le carré militaire 20 (rang B, n° 10) du cimetière Saint-Roch de Castres.
28.René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF, op. cit., p. 125.
29.Gérard BOULADOU, op. cit., p. 104.
30.D’après le témoignage d’Augustin GINER recueilli par l’auteur.
31.D’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur.
32.D’après le témoignage d’Yves MAZET. Élisée GELLY n’est quant à lui pas inquiété. Pourtant, il a lui aussi été arrêté à l’aube. Difficile de savoir pourquoi les Allemands ne se sont pas rendus à son domicile. Il est fort probable que les autorités caussinardes aient protégé l’intéressé qui, en plus de n’avoir jamais été soupçonné d’une quelconque activité clandestine – ce qui n’était pas le cas des frères Sansano – était alors une figure du village.
33.D’après le témoignage d’Yves MAZET.
34.Selon une attestation datée du 11 septembre 2000 et signée par Joseph Sansano, Mariano Ros était entré dans la Résistance à la fin de l’année 1942. Il avait participé à plusieurs opérations au côté de ses beaux-frères.
35.D’après le témoignage d’Yves MAZET.
36.D’après le témoignage de Joseph SANSANO recueilli par Yves MAZET.
37.Après le combat des Champs blancs, deux résistants se sont présentés au Clot de Malibran pour se désaltérer. Ils ont par la suite pris la direction de Cabrières.
38.AD Hérault, 1000 W 196.
39.AD Hérault, 1000 W 190.
40.Créés sous Vichy par la loi du 27 septembre 1940, les GTE servaient à encadrer les hommes étrangers âgés de18 à 55 ans qui se trouvaient au chômage et dans l’impossibilité de rentrer dans leur pays d’origine. Ils succédèrent aux Compagnies de travailleurs étrangers (CTE), créées par la IIIe République. Placés sous l’autorité du ministre de la Production industrielle et du Travail, les membres des GTE furent employés sans être payés, excepté une hypothétique prime de rendement et des allocations pour leurs familles. Ils effectuèrent des tâches variées et pénibles. C’est le ministre de l’Intérieur, ou les préfets, qui furent chargés de désigner les personnes qui devaient y être intégrées.
41.La famille Millat, dont la bonne foi n’est pas mise en cause par les autorités, ne sera pas inquiétée après l’arrestation de Dario Francisco Blasco. Si l’on en croit le témoignage de Gilbert Mercadier, Jacques Millat aurait eu des liens avec la Résistance. La présence de Dario Francisco Blasco n’était sans doute pas étrangère à ses activités.
42.AD Hérault, 18 W 182, 18 W 462, 1000 W 296 et d’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur. Après avoir appris l’arrestation d’André Julien, le maire de Caux Achille Gauch adressa une lettre – qui porta ses fruits –, au préfet délégué André Chassaigne afin de plaider pour une libération rapide de son administré, mais également de dédouaner les propriétaires du Clot de Malibran, la famille Millat : « Monsieur le Préfet, empêché de venir vous voir, j’ai prié mon ami M. Joseph Crébassol [président de la délégation spéciale de Nizas] de vous remettre, lorsqu’il vous aura fait le récit des événements qui se sont déroulés le 12 mai entre Caux et Nizas, ces quelques mots. Ils sont destinés à appeler votre attention sur le cas de M. André Julien, ouvrier électricien, appréhendé par les Allemands alors qu’il venait de terminer une installation électrique au domaine du Clot, chez M. Millat. Considéré par eux comme faisant partie du Maquis, il arrivera difficilement, si vous n’intervenez pas en sa faveur, à faire reconnaître son innocence. Nous pouvons témoigner puisqu’il est né à Caux le 11 mars 1907, qu’il y a une grande partie de sa famille, que nous ne l’avons jamais perdu de vue, de la rectitude de sa conduite, de son honnêteté, de son comportement au point de vue politique. Nous pouvons affirmer qu’il n’a rien à se reprocher. C’est la fatalité qui l’a fait se trouver à un endroit où il ne faisait pas le cas d’être à un pareil moment. Je profite de l’occasion pour vous dire aussi toute l’estime que j’ai pour la famille Millat, si durement et si injustement frappée. Ce sont des travailleurs intelligents, honnêtes, qui ont toujours donné le bon exemple dans toutes les circonstances. Je suis certain, Monsieur le préfet, que vous vous emploierez de toutes vos forces à faire éclater l’innocence de ces braves gens. Vous ramènerez […] la paix dans leur foyer et nous vous garderons, ainsi que toute la partie saine de notre population, la plus profonde reconnaissance. Nous vous en remercions d’avance et nous vous prions de recevoir […] l’assurance de notre entier dévouement ». AD Hérault, 1000 W 219.
43.Sauf Dario Francisco Blasco qui avait été convoyé à Caux.
44.D’après le témoignage d’Augustin GINER.
45.La Marseillaise du 28 novembre 1953, p. 7. Consécutivement à cette déposition, l’ancien policier Herbert Hoffmann, nie énergiquement les faits ce qui provoque la vive colère de Casimir Alia-Popero. En ce qui concerne l’incendie du Clot de Malibran, la police biterroise estime la totalité des dégâts à quelque 2 millions de francs (environ 400 000 euros de 2020), dont 304 735 francs (environ 60 000 euros de 2020) uniquement pour les biens appartenant au ramonet Francisco Alia, père de Casimir. AD Hérault, 16 W 276 et 1000 W 196.
46.AD Hérault, 18 W 21.
47.AD Hérault, 1000 W 196.
48.AD Hérault, 1000 W 206 et 18 W 161.
49.D’après le témoignage de Guy PASTOUREL recueilli par l’auteur et Jean BAUMEL, De la guerre aux camps de concentration, Montpellier, CGC, 1974, p. 69. David Donis est devenu une figure du village de Cabrières à la suite de cet incident. Bien après la guerre, il fut lourdement handicapé après un grave accident de voiture. Il est décédé dans la commune en 2008.
50.AD Hérault, 18 W 29 et 1000 W 206.
51.AD Hérault, 1000 W 296.
52.Gérard BOULADOU, op. cit., p. 105.
53.Au préalable, un poste téléphonique avait été installé à Neffiès. D’après le témoignage d’Yves MAZET.
54.René MARUÉJOL et Aimé VIELZEUF, op. cit., p. 126. Les résistants qui se trouvaient au Mas de Lauriol venaient régulièrement faire leur toilette au Temple. D’après un témoignage recueilli par Ginette LÉBRARD.
55.AD Hérault, 18 W 24. Ces hommes ne faisaient pas partie de la Résistance. Après l’opération, les soldats allemands occupent Cabrières et Neffiès jusqu’au lendemain matin. D’après le témoignage d’Yves MAZET.
56.D’après le témoignage de Ginette LÉBRARD.
57.La confiscation des armes de chasse avait été décidée consécutivement aux lois des 3 et 5 décembre 1942. Voir Alain ALQUIER, L’occupation allemande dans le département de l’Hérault 11 novembre 1942-23 août 1944, Thèse de Doctorat en Histoire, sous la direction de Jean-François Muracciole, Montpellier, Université Paul-Valéry Montpellier III, 2020, p. 388-394.
58.D’après le témoignage de Guy PASTOUREL recueilli par l’auteur.
59.« Vaut mieux crever ici qu’en Allemagne ! », se serait exclamé Pierre Lébrard avant de sauter.
60.D’après le témoignage d’Yves MAZET. Ils reviendront à Cabrières en juillet 1945.
61.D’après le témoignage de Gilbert MERCADIER recueilli par l’auteur.
62.D’après le témoignage d’Yves MAZET. Si l’on en croit une note des résistants de Caux écrite en août 1974, ces containers constituaient le reste du parachutage du 12 mai qui n’avait pas pu être récupéré.
63.AD Hérault, 1000 W 190.
64.D’après le témoignage d’Yves MAZET.
65.Midi Libre du 23 août 1974, p. 3.
66.Une dizaine de containers y sont réceptionnés dans la nuit du 11 au 12 juillet 1944. Gérard BOULADOU, op. cit., p. 130 et 132.
67.Ibid., p. 125.
Nota : Les cotes données ici concernant le fonds 18 W sont susceptibles d’avoir évolué compte tenu d’un récent reclassement effectué par les Archives départementales de l’Hérault. Si besoin, se référer à la Table de concordance.