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Description

Le château de La Roquette ou de Viviourès à Valflaunès et Le Rouet (Hérault)
Approche historique et architecturale

* Professeur de Lycée en langues (Chartres).

Situé à mi-chemin entre les contreforts des Cévennes et la Méditerranée, le Pays de Londres est un court vallon d’une dizaine de kilomètres conquis sur la garrigue, au nord de Montpellier. Il est limité à l’ouest par le massif de la Séranne et à l’est par la vallée de Montferrand, à laquelle on accède par une large brèche que bordent la Montagne d’Hortus au nord et le Pic Saint-Loup au sud. Les ruines du château de La Roquette, spectaculairement dressées entre ciel et végétation, occupent une crête à l’ouest de la Montagne d’Hortus, à 225 mètres d’altitude. Elles dominent la RD 1 qui relie Saint-Martin-de-Londres à Valflaunès et Saint-Mathieu-de-Tréviers. A l’opposé, coiffant l’arête orientale du Pic Saint-Loup, court la vaste enceinte oblongue de la forteresse de Montferrand, qui fut possession du comte de Toulouse, puis de l’évêque de Maguelone.

La Roque d’Ortols

Le château de La Roquette apparaît dans l’histoire locale au début du XIIe siècle. Il était alors compris dans le district de Montferrand, partie du comté de Substantion que le comte Pierre de Melgueil tenait en fief du Saint-Siège depuis 1085, date à laquelle il en avait fait don à l’Église en la personne du pape Grégoire VII. En 1124, tandis qu’Almodis, veuve de Pierre, jouissait de l’usufruit de Montferrand et de ses dépendances, l’une de ces nombreuses guerres féodales dont le Moyen Age était coutumier éclata entre Bernard IV de Melgueil et Guilhem VI de Montpellier. Ce dernier ayant brusquement investi le Pays de Londres, le comte de Melgueil s’empara aussitôt de La Roquette, qui devait occuper une position stratégique de tout premier ordre pour le contrôle et la sauvegarde du vallon.

A ce moment, la place était entre les mains des frères Airre (ou Ayres), vassaux directs de la comtesse Almodis. Profitant de la spoliation dont ils venaient d’être victimes, Guilhem proposa un accord à Berenger Airre en échange de l’aide qu’il voudrait bien lui apporter dans sa lutte avec Bernard de Melgueil. Contre l’engagement de reprendre La Roquette, de la restituer à sa suzeraine légitime, puis de la recevoir d’elle à fief, il lui remettrait toutes les terres qu’il avait prises au pays de Londres. L’accord fut passé « le mercredi de mars avant le carême de l’année 1124 » : Bérenger et son frère Raimond reçurent 2 000 sols melgoriens pour prix de leur concours, puis tous deux firent hommage et prêtèrent serment de fidélité à Guilhem VI en l’église Saint-Firmin de Montpellier.

Résolu à stopper ce conflit qui ravageait le pays depuis plus d’un an, Galtier, évêque de Maguelone, demanda l’arbitrage du pape Calixte II. Les quatre archevêques et évêques chargés par le souverain pontife de régler le problème rendirent leur jugement le 9 mai 1125 : la comtesse Almodis garderait l’usufruit de Montferrand sa vie durant, après quoi le district reviendrait au comte de Melgueil. Quant à La Roquette, « il fut convenu que les créneaux en seraient démolis ainsi que la haute tour, et que la construction ne pourrait à l’avenir être exhaussée ». Désormais pleinement rétabli dans ses droits, Bernard IV redonna la « Roque d’Ortols » en fief aux frères Airre au début de l’année 1130. Dès lors, Bérenger fit partie des proches du comte de Melgueil comme le prouve sa signature au bas de plusieurs actes de l’époque.

A la mort de Bernard IV en 1132, le comte de Melgueil et ses appartenances échurent à sa fille Béatrix, qui épousa Bérenger Raimond, comte de Provence, en 1135. Devenue veuve, elle se remaria avec Bernard Pelet II, seigneur d’Alès, qui lui donna deux enfants : Bertrand et Ermessinde. L’aîné ayant été écarté de la succession parce que sa mère se jugeait « mécontente de sa conduite », le domaine fut apporté par Ermessinde à son mari, Pierre Bermond V, satrape de Sauve. A la disparition de celui-ci, Béatrix remaria sa fille à Raimond, fils du comte Raimond V de Toulouse et de Constance de France, le 12 décembre 1172. Le comté de Melgueil alla pour moitié à son gendre et pour moitié à Ermessinde, dans le cas où elle voudrait pourvoir le fils qu’elle avait eu de Pierre Bermond. Il semble que La Roquette fit partie de la première moitié, dans la mesure où l’on voit Raimond Airre et un autre membre de sa famille jurer foi et hommage à Raimond V de Toulouse au mois de juin 1173.

Exclu du partage, Bertrand, frère d’Ermessinde, entreprit de se faire justice et, s’alliant à Guilhem VII de Montpellier, déclara la guerre à son beau-frère. Après six mois de lutte, il dut s’incliner et reconnaître la souveraineté de Raimond V sur le comté (1174).

Vers la même époque, apparaît dans l’histoire de La Roquet te un certain Raimond de Melgueil, soudainement cité comme co-seigneur du fief à côté de Raimond Airre. On ignore dans quelles conditions se fit son arrivée, toujours est-il qu’un long et violent conflit ne tarda pas à opposer les deux titulaires de la seigneurie. Il fallut attendre juin 1197 pour qu’un arbitrage extérieur les mit enfin d’accord sur le partage du domaine. Chacun d’eux reçut alors une moitié du château « avec ses anciennes fortifications et sa baume ainsi que le rocher d’Ortols » (Hortus). Ils durent en outre promettre de ne jamais enlever la forteresse à leur co-seigneur, « ni tout autre défense qui leur était commune », et de se porter mutuellement assistance en cas d’attaque. L’accord fut confirmé par un acte daté du 25 mars 1205, dans lequel Raimond Airre et Raimond de Melgueil font hommage de La Roquette à Raimond VI, comte de Toulouse. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1996

Nombre de pages

8

Auteur(s)

Thierry RIBALDONE

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf