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Description

La photographie à Montpellier à ses débuts

Dans la lignée de la gravure, en tant que moyen technique de reproduction, tâche dont la photographie dégagera la gravure à l’instar de la photographie dégageant la peinture du devoir de reproduction du réel, la photographie prend naissance, trop discrètement, en Bourgogne par La découverte de Niepce : la dagerréotypie dans les années 1816-1822. Ce n’est pas ici le lieu de débattre au sujet de ce que l’on doit à Niepce et à Daguerre, aussi allons-nous poser quelques repères historiques concernant l’introduction de la photographie dans les milieux montpelliérains après l’annonce officielle de cette découverte en 1839 par Arago. Outre l’attrait de la nouveauté, à chacun la photographie apporte par sa technique la possibilité de prolongements personnels sans pour autant donner l’idée de la révolution qu’apporte de fait cette iconophilie généralisée. Ainsi la première génération serait composée d’un regard curieux, celui de l’amateur (dans l’acception du XIXe siècle). A celui-ci succéderait un regard professionnalisé dans le sens où la photographie est son propre but. Enfin, le troisième temps pourrait être celui du regard commun, celui de la photographie universalisée et vulgarisée. F est évident que cette perspective ne nous paraît pas typiquement montpelliéraine. Elle reflète sans doute les réactions que l’on pourrait retrouver au moins dans toutes les villes universitaires. En effet, la première pratique de la photographie par ses difficultés d’application a bénéficié à Montpellier de la réception de l’université des sciences. Dans le même temps, les mécènes savent l’utiliser. C’est ainsi qu’un nouveau métier « photographe » fait son apparition, métier accompagné d’une nouvelle demande. Enfin, la banalisation de la photographie nous introduit dans quelques albums de famille ou dans les restes de collections d’artisans.

L’apparition à Montpellier

L’apparition de la photographie se matérialise sous la forme d’un événement que M. Philippe, opticien, organise dans le choix de produire un daguerréotype public, le 18 octobre 1839. Depuis le discours d’Arago sous la Coupole, la presse locale propose à ses lecteurs les anecdotes concernant Daguerre ainsi que les publicités pour la vente de ces nouveaux appareils. L’action de M. Philippe est intéressée puisqu’il s’agit pour lui de faire connaître sa marchandise. Cependant, nous pouvons plutôt voir en ce geste une espèce de performance dans la mesure où il prend le parti de réunir une assemblée choisie et le public en un lieu privilégié. Ont été conviés monsieur le recteur d’Académie, monsieur Provençal, professeur de zoologie, monsieur Balard. Il semblerait donc qu’il y ait volonté d’inscrire cette découverte dans l’idée de progrès scientifique puisque les personnes précitées apportent leur présence. Le parrainage scientifique et universitaire prélude à son histoire régionale. Le Courrier du Midi décrit la vue prise : « Une vue des tours et du clocher de Saint-Pierre (la cathédrale) avec des massifs d’arbres du jardin botanique et des maisons qui l’environnent ». C’est avoir choisi le lieu le plus prestigieux de Montpellier puisque le jardin témoigne de la première université de médecine de France. C’est peut-être aussi la rapprocher de l’ombre de Nostradamus par la proximité de la Tour des Pins. Plus que cet effet magique que nous ne saurions prendre au sérieux, ce daguerréotype public constitue un événement qui vérifie la véracité de la photographie expérimentée dans la quasi-instantanéité par rapport à Paris. Ce premier paysage urbain a sans doute été daguerréotypé de la place du Peyrou dans l’après-midi, à moins que ce ne soit du Jardin des Plantes. Parce que, malheureusement, nous n’avons qu’une trace écrite et non pas l’incunable, nous ne pouvons estimer cette image. L’idée de performance s’en trouve confortée alors que le daguerréotype est fait pour s’inscrire dans la durée. Ce paradoxe anecdotique nous permet néanmoins d’affirmer que le daguerréotype s’est bien révélé et que la photographie, par là, a fait son entrée à Montpellier sous l’égide scientifique, et que les universitaires sauront l’employer pour leurs propres travaux et l’améliorer.

Les milieux scientifiques

C’est en toute logique que l’Université des Sciences se constitue comme le foyer de la photographie. Réaliser un daguerréotype exige de nombreuses manipulations ; pouvoir connaître l’origine des défauts et les pallier reste utile jusqu’au fameux : « Appuyez et nous ferons le reste » des années 1880. Pour l’heure, la chimie s’applique à l’élaboration incertaine d’une future image dont l’aspect magique ne s’est peut-être pas affranchi de la connotation d’alchimie que les sels d’argent, la lune cornée véhiculent. Entre 1839, l’officialisation de la découverte du daguerréotype, et 1850, la révolution photographique s’instaure puisque le procédé négatif/positif est mis en place, ainsi la photographie en tant qu’image multipliable et non plus unique développe une potentialité supérieure à la gravure, une universalisation. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1998

Nombre de pages

8

Auteur(s)

Annie-Dominique DENHEZ

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf