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Description

Fiscalité et Institutions : Le testament des États de Languedoc

Le 30 mai 1789, après l’ouverture des États Généraux, les prélats, les barons des États et le syndic général de la province envoient une requête au roi et un long mémoire justificatif contre le règlement du 7 février 1789, qui avait fixé pour le Languedoc l’exécution des lettres de convocation aux États Généraux et ruiné les prétentions des États à députer et à représenter le Languedoc. Ce long mémoire signé du président des États, de l’archevêque de Toulouse, de l’évêque d’Alais, du maréchal de Castries, du comte de Mérinville, du comte du Roure et du syndic général, Rome, est l’ultime argumentation dans le long débat qui avait agité le Languedoc depuis le printemps 1788.

Le premier assaut contre les États avait été lancé par la Cour des Aides le 26 février 1788 à l’occasion des remontrances qu’elle fit à l’édit d’octobre 1787 portant prorogation du second vingtième. La cour montpelliéraine dénonçait l’immunité fiscale dont jouissaient les biens du clergé : le clergé qui dominait les États de Languedoc présidait donc à la répartition d’impôts qu’il ne subissait pas. La cour allait beaucoup plus loin. Elle condamnait les abus d’administration et même l’organisation et les formes constitutives des États. Cette triple condamnation inégalité fiscale, vices de constitution et abus d’administration qui en découlaient demeura, poussée plus avant, approfondie et argumentée, au cœur de tous les débats jusqu’au printemps 1789, d’autant que très rapidement se posa la question suivante : comment seraient nommés les députés aux États Généraux ? Il avait été parfois affirmé et revendiqué que la députation des pays d’États serait désignée exclusivement par les membres des assemblées provinciales. Les États ou au moins une partie de ses représentants eurent cette ambition. Mais le Languedoc se reconnaissait-il en 1789 dans son assemblée provinciale ? Là est le fond du débat quelle était la représentativité des États, sur quoi se fondait-elle ?

Après la Cour des Aides qui renouvela ses attaques à l’automne et l’impulsion décisive de Rabaut-Saint-Étienne et de la sénéchaussée de Nîmes, partout on s’assembla pour dénoncer l’inconstitutionnalité des États, leur dénier toute représentativité, réclamer leur reconstitution. La session des États s’ouvrit à la mi-janvier 1789 dans un climat passionné et une atmosphère tendue. Les modalités d’élection aux États Généraux n’étaient pas encore fixées. En dépit de l’avalanche de protestations que reçut le greffe des États et des réunions parallèles aux séances régulières on évita l’affrontement. Dillon et les prélats firent preuve d’une grande souplesse tactique. Les États ne se raidirent pas dans une attitude hostile et stérile. Le 29 janvier l’archevêque de Narbonne annonça en assemblée générale : « l’honorable commission dont ont bien voulu me charger les membres des deux ordres réunis de l’Église et de la noblesse… ils ont formé le vœu personnel d’être associés à toutes les impositions de la province tant royales que locales ». Le représentant de Carcassonne écrivait le même jour : « le clergé et la noblesse offrant une contribution égale et proportionnelle venait de fait d’acquérir le droit à une représentation élective ».

L’agitation contre les États allait-elle cesser ? Les États avaient-ils désarmé leurs détracteurs et recouvré leur représentativité aux yeux des languedociens ? Nullement. La session des États achevée, la protestation se porta contre les assemblées diocésaines plus violemment encore. Mais alors la cause était entendue. Le règlement pour la convocation des États Généraux avait mis fin aux espoirs des États de députer et de représenter le Languedoc. Ce dernier coup contre l’assemblée provinciale qui faisait le jeu de ses détracteurs fut durement ressenti par ses défenseurs et singulièrement par son président. Monseigneur Dillon qui jusqu’alors était resté dans la réserve, et au moins publiquement n’avait pas répondu aux attaques, réagit. Son amertume était grande. En témoigne la lettre qu’il envoie le 8 février à Necker. Il accusait ouvertement le pouvoir d’inaction voire de faiblesse. Il le pressait de réagir, proposait même pour le Conseil des projets d’arrêt. On lui donna satisfaction sur ce point. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1983

Nombre de pages

6

Auteur(s)

Gilbert LARGUIER

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf