Présentation de la publication
Entre mutualisme et diffusion musicale,
la Mutuelle des Musiciens de Montpellier (1910-1914)
Sabine TEULON LARDIC
En décembre 1909, la Mutuelle des Musiciens de Montpellier est fondée à l’initiative d’Armand-Cyprien Granier, directeur du Conservatoire de la ville. Après les deux arrêts de l’activité symphonique montpelliéraine – Société des Concerts symphoniques en 1903, Schola Cantorum en 1909 – cette Association reprend le flambeau du concert public tout en s’inspirant du courant de la mutualité pour servir des prestations sociales à ses adhérents musiciens.
De février 1910 jusqu’à la Grande Guerre, cinq saisons successives de concert se déroulent au Théâtre dans la salle des Concerts (actuelle salle Molière) et totalisent seize séances. La M.M.M. est placée sous la présidence d’honneur d’Emma Calvé, cantatrice de renommée internationale, qui vient d’aménager à Montpellier. Si quelques solistes invités sont de prestigieux artistes (E. Calvé, Gabriel Fauré, Felia Litvinne, consort de violes Casadesus, etc.), les 60 musiciens de la phalange assurent une programmation alliant la tradition à l’audace, soit contemporaine, soit baroque. La réception dans la presse locale et nationale offre un retentissement à cette activité musicale et sociale. En filigrane, elle dévoile les difficultés à articuler, hors de la capitale, innovation socioculturelle depuis la société civile et action publique républicaine.
En dépit de l’arrêt de la M.M.M. en 1914, l’engagement des artistes demeure caritatif dans l’espace montpelliérain. Certains participent à la soirée de gala de juin 1918, donnée au bénéfice de la Croix-Rouge française à Montpellier et clôturée par La Marseillaise..
« Ce fut donc un beau concert, une belle heure vécue dans de l’harmonie, qui promet par ses résultats financiers, de faire vivre des heures de repos et de calme aux cigales – devenues prévoyantes – fatiguées d’avoir trop chanté. »
En décembre 1909, la Mutuelle des Musiciens de Montpellier (MMM) est fondée à l’initiative d’Armand Granier, directeur du Conservatoire de la ville. Après les deux arrêts successifs de l’activité symphonique montpelliéraine – de la Société des Concerts Symphoniques de Montpellier (SCSM) en 1903, puis de la Schola Cantoruin en 1909 – cette Association reprend le flambeau du concert public tout en s’inspirant des principes de la mutualité pour servir des prestations à ses musiciens adhérents. A compter de novembre 1910, elle se trouve en concurrence avec la Société Charles Bordes, organisant cinq concerts annuels, puis en 1913, avec l’Association artistique de Montpellier, dirigée par le chef d’orchestre du Grand-Théâtre, Léon Delort. Comme dans toute ville française, l’espace de la musique couvre plusieurs secteurs. Opéras et pièces de théâtre sont représentés au Grand-Théâtre (actuel Opéra-Comédie) tandis que deux music-halls et deux cinémas (Pathé Cinéma et Athénée Cinéma) se partagent les divertissements plus légers. Leur public est-il musicien « amateur » ? La pratique musicale apparaît comme le premier loisir culturel dans la préfecture de l’Hérault : on dénombre 104 professeurs particuliers de musique, faisant vivre trois luthiers et deux négoces de musique, tandis qu’une quinzaine de chorales et d’harmonies maillent les quartiers.
De février 1910 jusqu’à la Grande Guerre, cinq saisons de la MMM se succèdent, placées sous les auspices de la cantatrice Emma Calvé, qui vient d’aménager dans la villa Harmonie à Montpellier, au 72 avenue de Lodève. Sous la plume d’un auditeur du concert inaugural, en exergue de cette étude, l’allusion aux cigales est doublement spirituelle car elle renvoie d’une part au logo de cigale et à la devise d’Emma Calvé, empruntée au poète félibre T. Aubanel : « Qui chante son mal enchante ! » D’autre part, la prévoyance est bien le but poursuivi par la première mutuelle montpelliéraine en faveur de la profession musicale.
Comment se fonde cette Mutuelle, et quelle programmation bâtissent le chef, ses invités et les 60 musiciens locaux dans la salle de concerts du Théâtre ? Quelle réception la presse locale et nationale accorde-t-elle à cette activité autant musicale que sociale ? Comment s’exerce le mutualisme de la société ? Les sources (lacunaires) de cette société, conservées aux Archives municipales de Montpellier et aux Archives de l’Hérault, forment le socle de notre investigation, enrichie du dépouillement de périodiques héraultais. [...]