Catégorie : Étiquette :

Description

De l’ancrage culturel à l’empreinte sportive :
évolution des processus identitaires dans la joute languedocienne

La vigne et l’activité viticole ont suscité une littérature singulière en Languedoc qui donnera naissance plusieurs générations d’écrivains connus pour leur intérêt presque exclusif pour le thème viticole entre le dernier quart du XIXe siècle et le premier tiers du XXe. Si ce mouvement littéraire reste bien connu, l’évolution de ses centres d’intérêt l’est beaucoup moins et révèle l’intrication des idéologies et des relations entre groupes sociaux. La gestion des patrimoines par les vignerons coopérateurs contemporains se fait l’écho de mouvements comparables.

En effet, l’introduction des joutes nautiques sur le littoral camarguais, en France, remonte au XIIIe siècle, temps des croisades du roi Louis IX. En cette année 1270, les soldats contraints à l’attente du départ pour les terres saintes, se livrent à des combats à bord de petites embarcations. L’implantation de la joute se poursuit les siècles suivants et particulièrement au XVIIe siècle où elle s’officialise sur le pourtour languedocien. Sète devient une ville phare depuis l’inauguration du port le jeudi 29 juillet 1666 où la présence de Colbert, secrétaire d’État à la maison du roi Louis XIV, honore la ville. Un grand tournoi de joutes est organisé. Aujourd’hui, les jouteurs languedociens, regroupés au sein de seize sociétés distinctes, étendent leur territoire de pratique de Béziers au Grau-du-Roi et s’affrontent chaque saison estivale. Développée durant trois siècles, leur histoire est significative de sens et de valeurs et attribue aux joutes, par son passé, des acquis et un statut singulier en tant que pratique sportive.

Ancrée localement grâce à des caractéristiques ethniques, géographiques et sociales selon les périodes historiques précises, la joute répond à un processus qui se transforme dans la deuxième moitié du XXe siècle par la mise en place d’une structure sportive.

L’analyse, dégagée de l’observation ethnographique, permet de mettre en évidence l’évolution du processus identitaire développé chez les acteurs de la joute en tant que facteur d’implantation de ce sport traditionnel. Il s’agit d’établir comment chacun participe à la construction de sa société, par quels mécanismes il s’y attache, quels procédés il met en place pour l’organiser et de quelle manière il s’inscrit dans son fonctionnement.

Le processus identitaire : un facteur de la construction de l’identité de jouteur

En faisant référence au concept d’identité, l’observation se porte sur les processus qui ont contribué à la constitution et à la définition de la communauté des jouteurs au sein des différentes sociétés tout au long de leur histoire.

L’identité met en perspective un ensemble de vécus, d’expériences et de mécanismes qui élabore le mode d’appartenance à un groupe en le singularisant par rapport à d’autres groupes. L’interaction entre individus devient une notion clé afin de concevoir l’identité comme une construction sociale et/ou individuelle. En France, dans le champ de l’histoire du sport, de nombreux travaux ont apporté leur contribution à ce phénomène en analysant comment une pratique sportive peut être à la fois créatrice et révélatrice d’une identité de groupe : le football (Bromberger, 1995, 1998), le hockey sur glace (Bélanger, 1996), la tauromachie (Laforcade, 1990). J.-P. Callède, en étudiant la pelote basque (1985, 1987) met en relation étroite la notion de l’identité culturelle et de la sociabilité sportive où l’une s’exprime à travers l’autre à partir de deux modes d’expression les signes distinctifs de l’identité et le sentiment d’appartenance et de représentation collective des acteurs.

A travers la joute languedocienne, il s’agit de comprendre les mécanismes qui ont favorisé l’agrégation des hommes autour et dans une pratique traditionnelle afin d’analyser comment elle révèle l’identité. Le développement de ces mécanismes est associé au développement de la pratique à travers son histoire. La construction de l’identité de jouteur s’effectue, suivant les périodes, en relation avec un ensemble de facteurs conjoncturels ou structurels qui s’inscrivent comme des marqueurs dans l’histoire des joutes.

Les différentes phases du processus identitaire des jouteurs
à travers une construction sociale, ethnique et géographique

Comme toute pratique d’interaction humaine où l’affrontement prévaut sur la reproduction de formes, la joute se fonde sur la constitution de groupes distincts pour sa réalisation. Le premier processus identitaire répondant à cette configuration est matérialisé, comme dans d’autres sports, par la distinction sociale à partir de la dichotomie jeune/marié. Chacune des troupes avait un drapeau dont la couleur correspondait à l’appartenance. Ainsi, dans un couplet de la chanson des joutes, cette distinction est relevée : […]

Informations complémentaires

Année de publication

2001

Nombre de pages

9

Auteur(s)

Jérôme PRUNEAU

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf