Description

Barthélemi Esbrayat, organiste et marchand de Béziers au XVIe siècle

* Roland Galtier, musicologue, 80, rue de la Mairie, 34160 Saint-Geniès-des-Mourgues.
** Jean-Claude Toureille, historien autodidacte, 282, avenue Saint-Maur, Résidence Lou-Mail, 34000 Montpellier.

La bonne fortune et la coopération entre chercheurs, aiguillonnée par la sagesse de notre ami Jean-Claude Richard, ont suscité notre intérêt pour deux registres des archives départementales de l’Hérault (II E 14/16 et II E 14/18, notaire Vitalis de Béziers, 1544 et 1545).

Nous découvrons l’activité d’un personnage : Barthélemi Esbrayat, qui, selon les actes, est organiste ou marchand. Est-il parent avec l’organiste de la cathédrale Saint-Nazaire, A. Esbrayat, qui perçoit 1 livre 6 sous de gages par trimestre en 1545, 1546, 1548, 1549 4 ? (qui est peut-être André Esbrayat, à qui le chapitre loue une maison, pour 2 livres par an, en 1552, 1553, 1554).

Notre homme, marchand ou organiste, ou les deux, Barthélemi Esbrayat, semble jouir d’une réputation solide auprès du clergé biterrois, comme dans le monde musical. En effet, nous le voyons, à travers trois actes, traiter avec un « organiste » de Paris, Pierre Langevin, à qui il commande deux épinettes, l’une à doubles cordes, l’autre simple, ainsi qu’avec deux facteurs d’orgues, Jean Affin et Claude Varènes, et nous savons qu’il a fourni un orgue à l’église Sainte-Madeleine de Béziers.

L’orgue qu’il commande à Claude Varènes, est un orgue-coffre, la façade encadrée de piliers cannelés avec chapiteaux et moulures, composé de six jeux, avec clavier au Fa : Flûte 6′ (était-elle bouchée, ou en façade ?), Octave 3′, Douzième (Nasard) , Quinzième (Doublette), Dix-neuvième (petite quinte) et Vingt-deuxième (Sifflet), ainsi qu’un tremblant. On ne manquera pas de rapprocher cet orgue-coffre de celui promis par Aymé Bugnon, facteur d’orgues de Chalon-sur-Saône à Anthoine Protelet en 1535, destiné à être placé sous une épinette : Flûte bouchée (en deux registres), Octave, Quinzième, Cymbale 1 rang (1/2′), Nazard, Flûte 2′, Régale 8′, Cornet ( ? 1 rang…), soit huit jeux avec Tremblant, un Tambour in et un Rossignol, le tout pour 10 écus. L’orgue-coffre est un instrument de la dimension d’une commode, dont le clavier forme l’un des angles du plateau supérieur, les panneaux latéraux doivent pouvoir s’ouvrir pour accéder aux tuyaux, mais une fois fermés, rien ne doit indiquer la présence d’ un instrument de musique. Une pédale, au bas du meuble, permet à l’instrumentiste de « souffler » lui-même. Le plateau supérieur peut aussi bien servir de table pour écrire que recevoir une épinette dont le clavier viendra immédiatement au-dessus de celui de l’orgue, permettant à l’interprète de passer de l’un à l’autre ou de jouer les deux simultanément : nous avons ainsi une formule qui donnera naissance aux clavecins ou aux pianos-forte « organisés » du XVIIIe siècle. Les instruments de ce type avaient une vocation profane : on les trouve le plus souvent parmi le mobilier de salon d’hôtels particuliers ou de demeures bourgeoises : ils servent à assurer le continuo de formations de musique de chambre ou à l’accompagnement de pièces vocales. Leur présence parmi le mobilier de salons aristocratiques incite les commanditaires à réclamer une riche décoration : ici les piliers cannelés et les chapiteaux moulurés. Cette réalisation est à rapprocher des autres travaux que nous connaissons de Varènes : frères mineurs d’Aix, 1550, construit en association avec Jean Gamond, de Tournon, un peu plus important, puisque de huit pieds (donc avec grand clavier à l’Ut 1), et sept jeux, dont un de deux rangs, Tremblant, Tambourin et Rossignol, et l’augmentation qu’il fit à l’orgue des frères mineurs de Salon d’un jeu d’anche (grande nouveauté de l’époque), nommé Sacqueboute, il s’agit là de grands instruments de tribune, destinés à des lieux de culte, mais la base reste la même : Unisson, Octave, Quinzième et Vingt-deuxième, ainsi qu’une Flûte à la douzième (en terminologie moderne : Montre, Prestant, Doublette, Sifflet et Nazard) const ituent les 5 jeux « obligés », toujours accompagnés d’accessoires pittoresques : tremblant, rossignol (quelques tuyaux orientés la tête en bas, plongés dans un récipient d’eau) et tambour. […]

Informations complémentaires

Année de publication

1996

Nombre de pages

3

Auteur(s)

Jean-Claude TOUREILLE, Roland GALTIER

Disponibilité

Produit téléchargeable au format pdf